Pierre Tevanian est professeur de philosophie dans un lycée de Seine Saint-Denis (Drancy, 93). Il est fondateur avec Sylvie Tissot du collectif Les mots sont importants et en co-anime le site (http://lmsi.net/). Il est investi dans le collectif Mamans Toutes Égales (MTE).1
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Contretemps : Tu as déjà participé à l’ouvrage collectif Les filles voilées parlent2 et publié Le voile médiatique3. Pourquoi as-tu trouvé nécessaire d’écrire de nouveau sur cette question ? Est-ce le contexte qui a changé ? Est-ce que le recul t’a permis d’aborder la question différemment ?
Pierre Tevanian : Le livre est une sélection de textes que j'ai écrits au fil des années, c’est une chronique de la presque décennie de matraquage anti-voile de haute intensité. Au moment même où le livre sortait, il y avait encore une loi votée par le Sénat, dite loi « anti-nounou »4.
Je n'ai donc jamais arrêté d'écrire : on est requis, sollicité par toutes ces offensives islamophobes et anti-voile, non seulement à contre-argumenter, mais aussi, lorsque les choses s’aggravent, et se dévoilent encore plus, appelé à combattre et à radicaliser parfois ses analyses.
Fondamentalement, la situation n'a pas été bouleversée, et c’est notamment ce qui permet à toutes ces différentes campagnes anti-voile de plus ou moins bien fonctionner sans provoquer un soulèvement de la population. Le matraquage médiatique contre les femmes voilées et l’absence des principales concernées en tant que sujet de paroles écoutées, restent la norme depuis dix ans.