blog du Npa 29, Finistère
3 février 2012 -
À l'école, il y a les élèves qui ont pris le train en marche. Et ceux qui cherchent encore le chemin de la gare.Avec 18 postes en moins dansle Réseau d'aides spécialisées (Rased), «il sera de plus en plus difficile de les remettre sur les rails», témoignent deux enseignants.
Neuf postes en moins en 2009. Dix-huit cette fois-ci, sur les 40 restant dans le Finistère. Face à ce qu'ils estiment être une
véritable saignée, les enseignants spécialisés tirent la sonnette d'alarme. Pas pour eux. «On retournera dans le circuit ordinaire, on reprendra une classe et on sera payé de la même
manière».
Le refus d'apprendre n'existe pas
Non, ils tirent la sonnette d'alarme en pensant à tous ces bambins qui vont inévitablement rester sur la touche sans aucun espoir de voir le bout du tunnel. Une
situation difficile à digérer, quand on a dans ses bagages des années d'expériences, des dizaines d'anecdotes et le souvenir de centaines d'heures passées à phosphorer pour trouver les bons
outils, pour susciter des déclics, persuadés «que des enfants qui ne veulent pas apprendre, ça n'existe pas». Une situation inacceptable quand on croit en sa mission, qu'on s'est investi, qu'on a
mesuré de réels résultats... Une situation jugée injuste quand on pense aux collègues qui font actuellement des sacrifices pour se former... Pour rien, pour retourner à la case départ.
Travail d'équipe
Michel Malgorn et Lan Trividic ne veulent pas se résigner. Mais ils ne se voilent pas la face et
tiennent àce que les gens prennent conscience de ce qui va se passer. «Il y a de plus en plus d'enfants en difficulté, en grande section et CP principalement, et donc de plus en plus de demandes.
Mais de moins en moins de postes. Il faudra donc faire des choix. On ne peut pas saupoudrer nos heures en restant efficaces. Prendre son temps, ce n'est pas perdre du temps. Alors on refusera de
tendre la main à certains enfants...». Dans ce qu'on appelle les Rased, le mot aide n'a rien de galvaudé. On est bien au-delà du soutien et
c'est tout l'intérêt de ce système finalement mal connu. Un vrai travail d'équipe. Mis en place en 1990, ces Réseaux d'aides spécialisées aux élèves en difficulté fonctionnent sur des triptyques
comprenant un psychologue scolaire, des maîtres E chargés de la remédiation pédagogique et des maîtres G ayant un rôle de rééducation, de conduite émotionnelle.
Enseignants, pas soignants
«Quand un enfant a des soucis et que l'aide personnalisée ne suffit plus, les enseignants font appel à nous», explique Lan Trividic. «Ensemble, on tente alors de trouver la solution la plus adaptée à la situation, sachant que nous ne sommes pas des soignants
mais bien des enseignants». Avec les parents, qu'il faut parfois convaincre parce qu'il y a une certaine crainte de la stigmatisation, sont alors mis en place des projets d'aide. Après un bilan
approfondi, les enseignants spécialisés interviennent dans les écoles et prennent ces élèves par petits groupes. Jamais seul, car il est important de créer une certaine dynamique.
«On est là pour restaurer leur confiance, leur enseigner le savoir-apprendre. Avec nous, il y a le droit à l'erreur et on ne se fait pas moquer par ses petits camarades». Oui mais voilà. «Si l'on supprime tous les chefs de gare, bon nombre de nos petits voyageurs vont errer sur les quais parce qu'ils auront manqué de temps pour traîner leurs bagages encombrants, parce qu'ils n'ont pas su trouver l'heure de départ sur les panneaux ou le numéro de la voie d'embarquement... Ou pire encore, parce qu'ils ne sauront pas où aller et pour quoi faire...».