Des salariés deNutréa-Triskalia estiment avoir été intoxiqués par des pesticides stockés dans les hangars de la coopérative, à Plouisy.
Ils se sont tus longtemps. Aujourd'hui, des salariés de l'entreprise agroalimentaire Nutréa-Triskalia basée à Plouisy près de Guingamp (Côtes-d'Armor) ont décidé de parler pour faire éclater publiquement ce qu'ils considèrent comme un scandale : leur intoxication par des pesticides (dont certains interdits au moment des faits comme le Nuvan Total) se trouvant dans des hangars stockant des céréales. Une intoxication très sévère pour certains d'entre eux, qui souffrent de lourds problèmes de santé.
L'affaire éclate ce matin : trois des salariés ont décidé de témoigner publiquement dans le cadre d'une conférence de presse, qui se tient en ce moment-même à Paris.
«Brûlures, problèmes respiratoires...»
Les faits remontent à 2009, suite à l'utilisation « de pesticides pour traiter des céréales infestées par des vermines ». L'Union syndicale solidaire explique que « Certains salariés ont commencé à présenter des symptômes qui réapparaîtront régulièrement par la suite : maux de tête, douleur au ventre, picotement de la langue, trouble du sommeil, saignement de nez, brûlure au visage et cuir chevelu, problèmes respiratoires, crachats sanguins...».
Selon les salariés, cette infestation de vermines ne relevait pas du hasard : « Depuis quelques temps, les dirigeants avaient décidé de ne plus faire fonctionner la ventilation la nuit, pour faire des économies... » Les salariés pointent alors l'utilisation notamment du Nuvan Total, interdit au moment des faits. « Et des doses de pesticides utilisés sur les céréales beaucoup plus importantes que la norme autorisée. » Triskalia reconnaît aujourd'hui « une erreur dans l'utilisation d'un fond de bidon de Nuvan Total, alors qu'il n'était plus autorisé sur le marché depuis le 30 juin 2007 », indique Frédéric Soudon, le directeur de la communication du groupe, un poids lourd dans la nutrition animale sur le Grand Ouest.
Plainte contre X
Si Triskalia indique que « jamais aucun lien n'a été établi entre l'utilisation de ce produit et les maladies développées par certains membres du personnel », elle ne conteste pas les troubles apparus chez les salariés. Et reconnaît que « leur état de santé s'est aggravé à partir de mars 2010. Mais nous n'avons pas d'explication sur l'origine de ces maux ».
L'entreprise Nutréa de Plouisy, filiale du groupe Triskalia, emploie actuellement 70 salariés dont 18 se disent directement ou indirectement concernés par l'intoxication. « Ils font aujourd'hui l'objet d'un suivi médical », indique l'Union syndicale solidaire, qui accompagne les salariés dans leurs démarches.
Une enquête est ouverte auprès du parquet de Saint-Brieuc. Les deux salariés les plus grièvement atteints ont déposé plainte contre X. Un autre salarié a fait une demande de reconnaissance de maladie professionnelle auprès du tribunal des affaires de la Sécurité sociale de Saint-Brieuc.
Depuis, deux des plaignants « déclarés inaptes par la médecine du travail ont été licenciés cet été », indique l'Union syndicale solidaire. Des éleveurs, « qui ne souhaitent pas pour le moment témoigner, auraient eu des animaux malades suite à l'ingestion des aliments fournis par l'entreprise ».