30 septembre 2010 -Le Télégramme
La régularisation de l'extension du plus important élevage porcin du canton de Loudéac suscite de vives réactions d'Eau et Rivières et de Côtes-d'Armor Nature Environnement.
Des recours sont annoncés.
Il est rare que le Conseil départemental de l'environnement et des risques sanitaires et technologiques (Coderts), anciennement
conseil départemental d'hygiène, émette un avis négatif sur un tel dossier (*). Malgré cet avis, le préfet a néanmoins signé, le 10septembre dernier, un arrêté autorisant l'extension de l'élevage
de Kerloïc, à Loudéac.
«Pas assez de résorption»
En réalité, l'EARL de Kerloïc diminue une partie de ses effectifs, passant de 3.646 équivalent animaux à 2.700, et ce uniquement pour l'engraissement. Mais,
parallèlement, Olivier Étienne, l'exploitant, crée avec un autre éleveur, une maternité de 2.550 équivalent animaux, l'EARL Trugez. Ce qui, pour les associations de protection de l'environnement,
ajouté à l'exploitation proche de l'épouse de M.Etienne (1.190 équivalent animaux), commence à faire beaucoup.
Au-delà de la hausse des effectifs, «via la multiplication des structures juridiques», les associations reprochent à l'exploitant d'avoir, «depuis 1996, refusé de participer à l'effort de résorption des excédents d'azote demandé à tous les élevages du canton, classé en zone d'excédent structurel». Elles contestent le choix de l'éleveur de ne pas recourir au traitement du lisier en privilégiant l'épandage; et ce sur le bassin-versant de l'Oust où la protection du captage située à l'aval est classée prioritaire par le Sdage Bretagne:
«Alors que le plafond réglementaire d'épandage par exploitation est fixé à 75 ha dans le canton et 12.500 kg d'azote, les surfaces d'épandage liées au projet
dépassent les 400 ha pour 60.000 kg d'azote», affirme Gilles Huet (Eau et Rivières). «J'ai suffisamment de terres, qui m'appartiennent, pour épandre mes excédents d'azote», réplique Olivier
Étienne qui annonce, pour sa part, 188 ha pour 21.600 unités d'azote: «Soit une charge azotée à l'hectare de 125 kg, la norme étant de 170 kg. De même avec 66 unités de phosphore». L'exploitant
explique, par ailleurs, que, recourant à l'élevage sur paille et exportant le fumier via la société Fertival, il contribue «aussi à faire baisser la charge d'azote dans le canton». Il tient
également à préciser que cette régularisation «a été imposée par la mise aux normes bien-être et ce à partir d'effectifs autorisés et sur des terres en propre».
«Injuste»
La chambre d'agriculture des Côtes-d'Armor, quant à elle, se montre assez circonspecte: «Nous respectons la position de l'État, déclare Jean-Pierre Le Bihan,
vice-président, mais si tous les éleveurs avaient procédé de la même façon (épandage), il n'y aurait pas eu assez de terres dans le département. Et cela aurait eu des conséquences, tant sur le
prix du foncier, qui aurait flambé, que sur l'ensemble des producteurs, y compris laitiers. Certains auraient dû, en effet, arrêter leur activité». En tout état de cause, les associations
estiment cet arrêté «profondément injuste par rapport aux éleveurs qui ont appliqué les obligations de résorption et respectent leurs autorisations préfectorales».
(*) 1% des dossiers présentés. Selon Eau et Rivières, la DDASS aurait également émis un avis négatif.
Eau-et-Rivières de Bretagne et l’association Côtes-d’Armor Nature Environnement réagissent très vivement à la décision du préfet des Côtes-d’Amor d’autoriser l’extension régularisation d’un élevage de porcs à Loudéac. Elles rappellent « qu’à deux reprises le conseil départemental d’hygiène avait donné un avis défavorable ».
Elles affirment que les surfaces d’épandage liées au projet d’agrandissement de l’Earl de Kerloic « dépassent au total 400 ha pour plus de 60 000 kg d’azote ». Les protecteurs de l’environnement estiment qu’en donnant son feu vert « le préfet montre le mépris de l’État pour les instances consultatives et que, malgré les discours, la protection de l’eau n’est pas une priorité. » Les associations décideront dans les prochains jours d’engager un recours auprès du tribunal administratif de Rennes à l’encontre « de cette autorisation préfectorale inopportune et immorale ».
Olivier Etienne, l'éleveur ne comprend pas la réaction d'Eau-et-Rivières. «Il s'agit uniquement d'une restructuration de l'élevage à partir d'effectifs déjà autorisés. Nous ne sommes pas hors la loi. Nous faisons cette restructuration à cause de l'obligation de nous mettre aux nouvelles normes bien être européennes sur les truies gestantes à partir du 1er janvier 2013. Ou on le faisait, ou nous devions arrêter le métier.»