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Margaret Thatcher est morte. La politique qu’elle a menée comme premier ministre a ruiné les vies de millions de personnes. Maintenant, ses héritiers politiques tentent d’étendre les dégâts qu’elle a provoqués d’une manière dont elle a seulement pu rêver.
La grande tâche politique qui est devant nous tous est de nous assurer qu’ils échouent. Nous devons faire en sorte que l’héritage de Thatcher meure avec elle.
Parmi ceux qui pleurent la mort de Margaret Thatcher, il y a les banquiers et les spéculateurs en recherche du coup fumant qui peuplent la City. Elle a été la pionnière du "capitalisme de casino" néolibéral qui les a enrichis. Parmi ceux qui la pleurent, on trouve aussi les journaux de Rupert Murdoch, qui ont tant fait pour défendre ses valeurs pourries. Et les parasites à la tête des grandes entreprises qui se sont enrichis par la privatisation des services publics se souviendront sans aucun doute d’elle avec tendresse.
Beaucoup d’entre nous par contre ne pleurerons pas la mort de Thatcher.
Les millions de personnes qui ont perdu leur emploi au fur et à mesure que l’industrie se décomposait, que des secteurs entiers de celle-ci finissaient en ruine et que le chômage augmentait ne pleureront pas. Les ex-mineurs, leurs familles et leurs communautés qui ont combattu le gouvernement de Thatcher au cours de la grande grève de 1984-85 ne pleureront pas. Les familles de Liverpool qui ont combattu pendant 23 ans contre les silences et les dissimulations de l’establishment pour que justice soit rendue aux victimes de Hillsborough [1] ne pleureront pas.
Beaucoup d’autres - tous ceux qui rejettent l’idéologie de la concurrence où l’homme est un loup pour l’homme, le nivellement par le bas des salaires et des conditions de vie et la politique vicieuse du "diviser pour régner" qui les accompagne - ne pleureront pas plus le passage de vie à trépas de Margaret Thatcher.
La gauche est parfois décrite par les journaux de droite comme claironnant des appels à la « guerre de classe ». La vérité est que Thatcher a mené la guerre de classe pour les riches et les puissants, qu’elle a été la plus grande "guerrière de classe" de sa génération. Dès l’élection de son premier gouvernement en 1979, sa mission était de déplacer l’équilibre de la répartition de la richesse et du pouvoir, au détriment de la grande majorité de la population et au profit d’une élite fortunée. Elle a fait passer en force des politiques de privatisation et de déréglementation, elle a utilisé la peur du chômage pour mettre au pas ceux qui travaillaient et elle a fait entrer le marché dans les services publics.
Thatcher a attaqué toute une série de groupes de travailleurs et de leurs syndicats - depuis les sidérurgistes au début des années 1980 jusqu’aux ambulanciers à la fin de cette décennie, en passant par les mineurs, les imprimeurs et bien d’autres encore, dans un effort concerté visant à détruire la résistance de la classe ouvrière à son programme de droite. Elle voulait "libérer" les services publics afin que les riches amis des Conservateurs puissent en tirer profit. Elle a cherché à supprimer tous les obstacles à l’accumulation des richesses dans les mains de quelques-uns.
Thatcher a été plus qu’une simple figure de la politique nationale britannique. À l’échelle mondiale, elle est devenue - aux côtés du président américain Ronald Reagan - une icône pour le modèle néolibéral. Son amitié avec le général Pinochet - qui a supervisé le massacre de milliers de militants de gauche afin que les sociétés multinationales puissent piller les ressources de son pays et exploiter ses travailleurs - était célèbre. Thatcher était une porte-parole enthousiaste pour les programmes du FMI imposés aux pays en développement, ouvrant leurs marchés aux puissantes multinationales occidentales et vendant aux enchères leurs ressources publiques.