7 juillet 2010 - Le Télégramme
À nouveau, des scientifiques affirment que le Plan algues vertes est voué à l'échec si on ne revoit pas en profondeur les systèmes de production agricole.
Le Plan algues vertes est parti du mauvais pied. Outre le report de son comité de pilotage, à la demande de la Région, et son boycott
par les associations (Le Télégramme de mardi), le comité scientifique chargé d'apporter son expertise émet de sérieux doutes quant à sa réussite, du moins dans son état actuel.
De 5 à 10mg/l
Les experts insistent ainsi sur le fait «qu'en l'absence d'une prise en compte ambitieuse des objectifs» de réduction de pollution azotée en sortie des bassins-versants (*) mais aussi de
pollution entrante, «le plan semble voué d'emblée à l'échec à l'horizon 2015 (réduction visible des marées vertes) et, même probablement, au-delà de cette date». Ils mettent l'accent sur le fait
que la croissance des algues est un phénomène dont l'ampleur ne varie pas linéairement avec les concentrations en nitrate dans l'eau de mer. À l'instar des chercheurs de l'Inra (Le Télégramme du
samedi 26 juin), le comité scientifique fixe un seuil de 5 à 10 mg/l de nitrate à ne pas dépasser, entre mars et septembre, pour qu'une réduction massive des marées d'algues soit observée.
Mutation à engager
Ils considèrent qu'une réduction de pourcentage est inadaptée à la problématique: «Le seuil de 30% par rapport à la moyenne 1999-2003, proposé dans le cadre des appels à projets de territoire,
est clairement insuffisant. Cet objectif a, en effet, d'ores et déjà été en partie atteint par certains bassins-versants au cours de ces dernières années sans qu'une diminution des marées vertes
ait été observée». En conséquence, le comité scientifique souligne que la résolution du problème «requiert une révision en profondeur des systèmes de production. Cela doit conduire à une réelle
réflexion sur les mutations à engager pour l'agriculture dans les bassins concernés». Concrètement, les experts considèrent qu'il va falloir rechercher une autonomie en azote de chaque bassin, en
prenant en compte les engrais minéraux et les effluents d'élevage mais aussi les aliments du bétail, riches en protéines.
Réduction drastique
Quoi qu'il en soit, compte tenu de l'inertie générée par les stocks de nitrate et leurs temps de résidence dans les eaux souterraines et les stocks d'azote organique dans le sol, la réduction des
charges azotées en entrée doit être drastique pour qu'un effet significatif puisse être observé dans les concentrations en sortie de bassin d'ici 2015: «Le plan d'action doit donc intégrer ce
niveau d'ambition extrêmement élevé pour avoir une chance de succès notable et non contestable par rapport aux variations naturelles de concentration en nitrate dans les eaux superficielles,
issues des variations annuelles du climat».
* De la Lieue de Grève et de la baie de Saint-Brieuc, bassins expérimentaux.