Depuis trois ans les populations de régions déshéritées de Tunisie, exclues du « miracle économique »exhibé comme vitrine du régime, se soulèvent à tour de rôle pour exiger des emplois, la fin de la corruption et du népotisme.
Après celles du Bassin Minier de la région de Gafsa, de La Skhira et de Ben Guerdane, c’est, depuis une semaine, au tour de la population du gouvernorat de Sidi Bouzid, au centre du pays, de manifester.
Comme toujours, la réponse des autorités est répressive, sécuritaire, voire meurtrière : arrestations, tortures, couvre-feu, déploiement des milices du parti au pouvoir, de la police et de l’armée, tirs à balles réelles qui ont fait des dizaines de blessés et un mort, des suicides, le tout dans le silence ou la désinformation d’un blocus médiatique imposé.
Des syndicalistes ont organisé des manifestations de soutien à Bizerte et Tunis, Nabeul et Sfax.
Le NPA affirme son soutien plein et entier à la lutte légitime des populations pour l’emploi, exige la libération des personnes arrêtées, réclame une commission d’enquête indépendante sur la torture et les morts, le départ des forces de police et de l’armée et le rétablissement des libertés démocratiques confisquées.
Le NPA dénonce le silence du pouvoir français complice de la dictature et appelle à la solidarité internationale avec le peuple tunisien en lutte.
source des photos: http://www.tunisiawatch.com/
Un Tunisien au chômage a tenté de s'immoler par le feu la semaine dernière pour protester contre son impossibilité à trouver du travail, ce qui a déclenché une vague de violents affrontements sur place [un manifestant a été tué vendredi, ndlr] et un mouvement de solidarité sur les plateformes de réseaux sociaux. (Voir la vidéo d'une manifestation à Sidi Bouzid)
Tandis que le sort de Mohamed Bouazizi, 26 ans, de Sidi Bouzid, dans le sud tunisien, reste inconnu -grièvement brûlé, il a été hospitalisé-, les internautes de Tunisie se sont saisis de l'affaire pour déplorer le manque d'emplois, la corruption et la détérioration des droits humains dans leur pays.
Sur Facebook, Twitter et les blogs, les internautes ont exprimé leur solidarité avec Mohamed, diplômé de l'université de Mahdia il y a quelques années, mais dans l'incapacité de trouver un emploi.
Seul pour nourrir sa famille, il a décidé de chercher un gagne-pain et, avec l'appui familial, s'est lancé dans la vente de fruits et légumes sur un stand de rue. Son entreprise ne lui rapportait pas grand chose, juste assez pour sauvegarder la dignité de sa famille.
Mais les employés municipaux veillaient et lui ont confisqué plusieurs fois sa marchandise. Il a essayé de leur expliquer qu'il n'avait pas choisi de faire cela mais essayait seulement de survivre. A chaque fois, sa marchandise a été confisquée, et il s'est fait insulter et chasser des abords de la mairie.
La dernière fois que cela s'est produit, Mohamed a perdu tout espoir : il s'est arrosé d'essence et y a mis le feu.
« Nos médias dépravés exercent un black-out complet sur cet incident »
Sur Facebook, plusieurs groupes ont été créés pour dénoncer ces événements. « M. le Président, les Tunisiens s'immolent par le feu » (en arabe) est l'un d'eux. En moins de 24 heures, le groupe comptait 2 500 membres, et a attiré à ce jour plus de 11 000 soutiens. Mais les autorités n'ont pas attendu 24 heures pour le censurer et bâillonner Internet de leur main de fer.
Des blogueurs ont commenté les événements, exprimant leur colère. Ecrivant en arabe dialectal tunisien, Boukachen a écrit un billet intitulé « L'holocauste de Sidi Bouzid » :
« Ce qui s'est passé n'est pas nouveau. Cette situation misérable persiste depuis de nombreuses années dans les régions à l'écart. C'est le résultat d'une combinaison de conditions climatiques et de la marginalisation de ces régions, à quoi s'ajoute la totale indifférence [des autorités]. Mais l'histoire ne s'arrête pas là puisque nos médias dépravés exercent un black-out complet sur cet incident. »
Sur son blog, A Tunisian Girl a quant a elle écrit :
« Le gouvernement n'a trouvé d'autre remède que de censurer les sites internet diffusant l'affaire et d'imposer un blocus à la ville de Sidi Bouzid, où les gens donnent libre cours à leur colère en manifestant dans les rues. »
Sur Twitter, la fureur continue aussi, avec le hashtag #sidibouzid en tête chez les utilisateurs tunisiens.
En partenariat avec Global Voices
http://www.rue89.com/2010/12/26/emeutes-en-tunisie-apres-limmolation-dun-jeune-chomeur-182422