TRIBUNE. Vendredi dernier, l'ancien Premier ministre réaffirmait ses réserves sur l’ouverture du mariage aux homos. L'écrivaine Virginie Despentes revient sur son argumentaire, et sur celui des anti-mariage pour tous.
Invité vendredi dernier sur le plateau du Grand Journal de Canal+, Lionel Jospin est revenu sur ses réserves sur l'ouverture du mariage aux couples homos. «C'est la position de mon parti, et
donc je la respecte, a commenté l'ancien Premier ministre. Ce n'était pas la mienne au départ. Ce que je pense c'est que l'idée fondamentale doit rester, pour le mariage, pour les couples et pour
la vie en général, que l'humanité est structurée entre hommes et femmes.» L'écrivaine Virginie Despentes a choisi de lui répondre dans une tribune que publie TÊTU.com.
«Alors, cette semaine, c'est Lionel Jospin qui s'y colle.
Il trouve qu'on n'entend pas assez de conneries comme ça, sur le mariage gay, il y va de son solo perso. Tranquille, hein, c'est sans homophobie. Il n'a pas dit qu'on avait le droit de casser du pédé ou de pourrir la vie des bébés gouines au lycée, non, juste, il tenait à signaler: attention, avec le mariage, on pousse mémé dans les orties.
«L'humanité est structurée sur le rapport hommes femmes.» Juste, sans homophobie: les gouines et les pédés ne font pas vraiment partie de l'humanité. Ils ne sont pourtant pas stériles - mais comme ils ne vivent pas en couple, ce n'est pas de l'humain pur jus, pas de l'humain-humain comme l'est monsieur Jospin.
Ce n'est pas super délicat pour les célibataires et les gens sans enfants, son truc, mais Jospin est comme ça: il a une idée forte de ce qu'est l'humanité, et l'humanité, c'est les femmes et les hommes qui vivent ensemble, copulent et produisent des enfants pour la patrie.
C'est dommage pour les femmes, vu que, in fine, cette humanité là, c'est l'histoire de comment elles en ont pris plein la gueule pendant des millénaires, mais c'est l'humanité, que veux tu, on la changera pas. Et il faut bien l'admettre: il y a d'une part la grande humanité, qui peut prétendre aux institutions, et de l'autre, une caste moins noble, moins humaine.
Celle qui devrait s'estimer heureuse de ne pas être persécutée, qu'elle ne vienne pas, en plus, réclamer des droits à l'état. Mais c'est dit sans animosité, hein, sans homophobie, juste: l'humanité, certains d'entre nous en font moins partie que d'autre. Proust, Genet, Leduc, Wittig, au hasard: moins humains que des hétéros.