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30 avril 2011 6 30 /04 /avril /2011 11:06


Entretien avec Jean-Yves Camus, chercheur associé à l’Institut de relations internationales et stratégiques (Iris).
Propos recueillis par Gabriel Gérard

Les élections européennes de 2009 révélaient une forte poussée des droites conservatrices et des extrêmes droites. Concernant ces dernières, les scrutins nationaux qui se déroulent, depuis 2009, semblent confirmer cette tendance. Quelles sont les forces concernées ? Quelles sont les raisons de cette progression ?


La tendance s’est effectivement confirmée lors des élections législatives finlandaises du 17 avril, qui ont vu les « Vrais Finnois », un parti populiste eurosceptique et xénophobe, remporter 18 % des voix. C’est un cas d’école, montrant à quel point la nature des droites radicales a changé : comme l’Union démocratique du centre (UDC) suisse, le Parti de la liberté du néerlandais Geert Wilders ou le Parti du peuple danois, cette formation finlandaise est hostile au multiculturalisme et à l’immigration, opposée au principe même d’une Europe supranationale, se donnant comme une alternative globale aux élites et aux partis traditionnels. Comme Wilders ou le Parti du progrès en Norvège, les Vrais Finnois sont favorables à l’intervention de l’état dans l’économie et le social, ce qu’on retrouve dans le nouveau cours imprimé au Front national (FN) par Marine Le Pen.


La diversité est plus grande sur les questions dites « de société » : les Vrais Finnois sont ultraconservateurs alors que Geert Wilders, comme naguère Pim Fortuyn, concentre ses attaques sur l’islam au nom de valeurs traditionnellement associées aux combats de la gauche : liberté des moeurs ; égalité des sexes ; laïcité.
Les raisons de ces succès électoraux sont différentes selon les pays et les contextes politiques. Cependant des éléments communs sont identifiables : le rejet d’une société devenue, dans les faits, plurireligieuse et pluriculturelle ; le sentiment que les élites sont coupées de l’électorat ; la crainte des bouleversements induits par la mondialisation et d’un monde devenu moins « lisible » avec la fin des grandes idéologies mobilisatrices ou la fin de la division Est-Ouest.

Le Front national, qui fut longtemps le modèle de nombreux partis d’extrême droite en Europe, semble aujourd’hui piocher sa stratégie chez d’autres organisations. Pourriez-vous nous en dire plus ?


Le FN dirigé par Marine Le Pen a compris qu’il devait abandonner toute alliance avec des formations d’extrême droite qui présentent un caractère de repoussoir. Son problème est de trouver des alliés qui acceptent de s’afficher avec lui. L’inflexion anti-islam du discours mariniste pousserait au rapprochement avec Wilders et l’UDC, mais ces deux partis gardent leurs distances avec Le Pen. L’attitude de la Ligue du Nord est ambiguë : Marine Le Pen est allée à Lampedusa en compagnie d’un de ses eurodéputés, Mario Borghezio, mais c’est un ministre de l’Intérieur leghiste, Roberto Maroni, qui a délivré les permis de séjour aux immigrés tunisiens cherchant à gagner la France depuis Vintimille. Quant au parti de Gianfranco Fini, il s’est prononcé clairement contre Marine Le Pen. Le FN me semble donc avoir regardé ce qui se passe en Suisse ou en Hollande sans pour autant tenter de reproduire un modèle. Il est en effet confronté à une nécessité qui ne s’impose ni à Wilders ni à Blocher : donner l’impression de rompre avec une filiation intellectuelle qui est proprement d’extrême droite.

 

Quelle est l’activité du Front national au Parlement européen ? Avec qui ?


Cette activité est quasi nulle, l’Alliance européenne des mouvements nationaux, dirigée par Bruno Gollnisch, étant en sommeil. Siégeant comme non-inscrits, les députés du FN, du Vlaams Belang ou du BNP britannique sont marginalisés.
Au sein du groupe « Europe de la Liberté et de la démocratie » se retrouvent en revanche Philippe de Villiers, la Ligue du Nord, les Vrais Finnois, le LAOS grec, le Parti danois du peuple, les ultranationalistes slovaques et les eurosceptiques anglais de UKIP. Le centre de gravité de la droite « dure » est là.

Le FN et le Jobbik hongrois sont alliés au sein de l’Alliance européenne des mouvements nationaux. Cette proximité n’est-elle pas contradictoire avec la « dédiabolisation » souhaitée par Marine Le Pen ?


Avec 17 % des voix, Jobbik est une force politique importante qui, effectivement, ne correspond pas au profil des formations avec lesquelles Marine Le Pen veut s’allier. En particulier, on signalera son antisémitisme assumé, son racisme anti Roms fait de violences physiques à répétition, sa curieuse fascination pour les racines de l’identité nationale dans le pantouranisme1, autrement dit dans une idéologie proche de l’ethnicisme nationaliste turc.

1. Courant idéologique politique prônant l’union de tous les peuples touraniens, c’est-à-dire descendant des tribus turcophones d’Asie centrale.

 

Note du blogueur: Les hongrois ne sont génétiquement qu'à 10%  Magyars, la proportion normale des envahisseurs dans une population. Par contre ils ont transmis aux autres leur langue, du même groupe que Finlandais, Lapon (Sami),  Karélien,  Estonien et de peuples restés en Russie (Mordves, Samoyèdes). Les 90% restants descendent des peuples originaux de la Pannonie où les vestiges celtiques sont nombreux et  dont le premier peuple connu s'appelait les ... Vénètes!  Ensuite y sont venus les Boiens, "touristes"  qui ont donné leur nom à la Bavière, la Bohême, le Bourbonnais et Bologne. Les Hongrois doivent être tout autant "celtiques" que le reste des européens de l'Ouest.  Bienvenue au Club!

 

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29 avril 2011 5 29 /04 /avril /2011 10:25




 

non au fn

Par Alain Bihr le Jeudi, 28 Avril 2011

 

Ainsi il aura fallu et il aura suffi à la fois qu’un sondage annonce, courant février, que Marine Le Pen, fille de son père, auquel elle vient tout récemment de succéder à la tête du Front national (FN), est en mesure de devancer Nicolas Sarkozy au premier tour des élections présidentielles l’an prochain, ce qui le renverrait du coup à son étude, pour que la «classe politique et médiatique» française prenne à nouveau conscience de l’existence et de la puissance de ce parti d’extrême droite.


Coup de semonce rapidement suivi d’une confirmation grandeur nature: le mois suivant, au premier tour des cantonales, dans un type de scrutin qui ne lui a généralement guère réussi, ses candidats totalisaient 15,06% des suffrages exprimés, talonnant ceux de l’UMP (16,97%), dans un contexte de forte abstention (55,68%) qui a visiblement pénalisé ces derniers. Arrivé en tête dans trente-neuf cantons, le FN aura pu maintenir des candidats au second tour dans quelque quatre cents cantons, pour n’avoir finalement que deux élus.

La surprise vient de ce que, depuis le coup d’éclat de 2002 (Jospin éliminé dès le premier tour de la présidentielle par un Jean-Marie Le Pen au sommet de sa carrière), le FN avait semblé en perte de vitesse: cinq ans plus tard, le même Le Pen ne se plaçait plus qu’en quatrième position, loin derrière Sarkozy, Royal et Bayrou. Cependant, avant d’expliquer les raisons de cette éclipse, il faut revenir sur celles de sa permanence sur la scène politique depuis maintenant quasiment trente ans.

 

Le FN, le parti des «laissés pour compte» et des «têtes d’haineux» [1]


L’installation durable, à partir de la première moitié des années 1980, du FN sur la scène politique française s’explique par la conjonction de quatre crises majeures que traverse la formation sociale française, d’ailleurs liées entre elles. Et elles n’ont fait que s’aggraver depuis lors [2].

 

La première est celle du vieux bloc hégémonique (système d’alliances de classes assurant l’hégémonie de la bourgeoisie) fondée sur l’alliance entre la bourgeoisie et les classes moyennes traditionnelles (petite et moyenne paysannerie, artisans et petits commerçants, professions libérales, petit capital). Fondé aux lendemains de la Commune de Paris, ce bloc des possédants avait essentiellement pour fonction d’assurer des majorités parlementaires capables de marginaliser politiquement la classe ouvrière et l’encadrement. Il assurera la stabilité de la IIIe République. Il commencera à être mis à mal par la modernisation fordiste du capitalisme française sous la IVe puis la Ve République gaulliste, en entrant de plus en plus en contradiction avec les exigences du compromis entre bourgeoisie et prolétariat par mouvement ouvrier (syndicats et partis de gauche) interposés sur lequel était fondé le fordisme. Exigences économiques qui, sous couvert de la politique agricole commune (PAC), laminent la paysannerie tandis que le petit capital et la petite-bourgeoise de l’artisanat et du commerce font les frais de la concentration du capital industriel et commercial (cf. le développement des grandes surfaces par exemple). Mais aussi exigences politiques et idéologiques: le bloc de gauche, réunissant le prolétariat (le salariat d’exécution composé des ouvriers et des employés) et la fraction publique de l’encadrement, ne peut durablement être laissé à l’écart du pouvoir (de l’exercice des fonctions gouvernementales) sans risquer qu’il ne se radicalise – Mai 68 est un sérieux coup de semonce en ce sens [3].

 

Lorsque le fordisme entre en crise au cours des années 1970 et que, pour tenter de résoudre cette crise, la grande bourgeoisie industrielle, commerciale et financière se lance dans l’aventure de la «globalisation» à coup de libéralisation et de déréglementation de la circulation internationale du capital, le vieux bloc hégémonique vole en éclats. Les classes moyennes traditionnelles se trouvent plus ou moins directement attaquées ou menacées dans leurs positions socio-économiques tandis qu’elles se rendent compte, du moins pour une partie d’entre elles, qu’elles ne peuvent plus compter sur les partis de droite classiques qui les avaient représentées jusqu’à présent, dont l’aggiornamento néolibéral dit bien qu’elles ne défendent plus que les intérêts de la grande bourgeoisie et de ceux des couches et catégories des autres classes qui sont prêtes à suivre cette dernière dans l’aventure de la «globalisation». Orphelins de représentations politique et idéologique, certains de leurs éléments vont alors trouver un nouveau parrain et tuteur dans le FN et plus encore dans le tribun qui lui sert de leader, Jean-Marie Le Pen – cela avait déjà été le cas lors de l’épisode poujadiste (1953-1958) auquel Le Pen avait lui-même pris part.

 

Simultanément un processus analogue va affecter l’autre pôle du spectre politique, sous l’effet de la crise du modèle social-démocrate du mouvement ouvrier [4]. Ce dernier, qui s’impose comme modèle dominant du mouvement ouvrier à partir des années 1900, triomphe pendant les Trente Glorieuses qui suivent la Seconde Guerre mondiale. Il est en effet un acteur décisif de l’institution du compromis fordiste qui consacre sa stratégie national-étatiste de réforme du capitalisme, ses modèles d’organisation (syndicalisme structuré par branches industrielles articulé à un parti dont l’action est dominée par le parlementarisme) et ses références idéologiques réformistes. Mais il va aussi se trouver progressivement enfermé et sclérosé (notamment par sa bureaucratisation) dans et par le cadre institutionnel de ce compromis, en se trouvant ainsi coupé de l’émergence de nouvelles aspirations, revendications ou formes luttes, que ce soit dans le travail (cf. la révolte des OS autour de mai-juin 1968) ou hors du travail (dans les luttes urbaines, féministes, écologistes, etc.)

 

Aussi, l’éclatement de la crise du fordisme le prendra-t-il tout autant de cours que son pendant de droite. Face à l’offensive néolibérale qu’entame la bourgeoisie à la fin des années 1970, rapidement synonyme de développement du chômage et de la précarité, de paupérisation relative du gros du salariat voire de paupérisation absolue des ses couches les plus exploitées et précarisées, d’aggravation généralisée des inégalités sociales, etc., il n’a plus rien d’autre à proposer, au mieux, que la défense des acquis du fordisme dans le cadre institutionnel considéré comme intangible et indépassable de l’Etat-nation, cadre que le mouvement de «globalisation» contourne de plus en plus allégrement, en rendant de plus en plus inopérantes les pratiques habituelles de lutte (grèves, manifestations de rue, etc.) Pire encore, une partie des états-majors syndicaux et politiques de ce qui reste alors du modèle social-démocrate du mouvement ouvrier, sous couvert de réalisme, se met à prêcher la résignation face au nouveau cours capitaliste et s’en fait même le zélé serviteur: c’est le gouvernement Mauroy PS-PC qui entame le grand tournant néolibéral entre juin 1982 et mars 1983, ouvrant ainsi la voie aux «alternances» successives entre gauche et droite qui aura assuré, depuis lors, la parfaite continuité de la mise en œuvre du programme néolibéral de «contre reformes» sociales. Dans ces conditions, c’est aussi une partie du salariat, notamment certaines couches et catégories ouvrières, qui va se trouver orphelin de représentations et qui, dans le cours des années 1980, se détache lui aussi des parties de gauche pour apporter, de manière permanente ou occasionnelle, son soutien électoral au FN.

 

Les évolutions politiques et idéologiques précédentes n’avaient cependant rien de nécessaires. Privées de leurs représentants traditionnels, tant la partie des classes moyennes qui s’est détachée de la droite que la partie du prolétariat qui s’est détachée de la gauche auraient pu se trouver d’autres représentants de substitution que le FN. Pour expliquer pourquoi et comment c’est ce dernier qui a, alors, raflé la mise, il faut se tourner vers les deux autres crises majeures dans lesquelles la formation française a plongé simultanément.

 

Celle de l’Etat-nation tout d’abord. Le mouvement de «globalisation» que le capitalisme développé entame à partir des années 1970 en réponse à l’entrée en crise du fordisme est en fait essentiellement un mouvement de transnationalisation du capital: un mouvement par lequel la base territoriale et institutionnelle de la reproduction du capital cesse d’être celle des différents Etats-nations pour s’élargir à des ensembles plus vastes faits de systèmes continentaux d’Etats, pour ce qui nous concerne l’Union européenne. Dans ce nouveau cadre, les anciens Etats-nations ne disparaissent pas mais ils se trouvent intégrés dans une architecture institutionnelle beaucoup plus complexe, au sein de laquelle ils doivent abandonner une partie de leurs pouvoirs régaliens traditionnels et de leur capacité administrative à des instances supérieures (supranationales) aussi bien qu’à des instances inférieures (infranationales: essentiellement les régions et les grandes aires métropolitaines). Il s’ensuit inévitablement un affaiblissement de leur cohésion matérielle, institutionnelle et idéologique [5].

 

L’ensemble de ce processus s’accompagne logiquement d’une moindre vivacité des consciences nationales et, plus encore, des nationalismes. Mais il peut aussi, contradictoirement, stimuler par réaction le nationalisme. Et c’est notamment le cas parmi les couches ou catégories sociales qui voient dans le cadre de l’Etat-nation, son maintien et son renforcement, le seul moyen de défendre leur statut social, entendons non seulement leurs intérêts socio-économiques mais aussi leurs droits, leurs privilèges éventuels ainsi que leur dignité et leur identité (à leurs yeux comme aux yeux des autres). Tout simplement parce qu’ils ne disposent plus d’autres moyens de parvenir à ces fins, ni individuellement (par le biais de la mobilisation des ressources personnelles dans la lutte concurrentielle du chacun pour soi) ni collectivement (dans la mobilisation corporative, syndicale ou politique, en un mot la lutte de classe): privés du moyen de se doter d’une identité et d’une capacité d’action individuelle ou de classe, il leur reste le moyen de se dire et se penser Français et d’agir en conséquence… en votant pour le FN. Et telle est bien la situation dans laquelle se trouvent placées, pour des raisons différentes mais analogues, la partie des classes moyennes en déshérence de représentation par la droite et la partie du prolétariat en quête d’une alternative à une gauche dans le social-néolibéralisme de laquelle elle ne se reconnaît pas davantage.

 

La première reste ainsi fidèle à un de ses tropismes fondamentaux qui fait du nationalisme en même temps que du corporatisme les deux axes majeurs de tout son horizon politique; c’est d’ailleurs sur des bases nationalistes que s’était notamment fondé le vieux bloc hégémonique des possédants, rompu précisément du fait que la grande bourgeoisie n’inscrit plus depuis des lustres la poursuite de ses intérêts dans les limites du cadre national. Quant au prolétariat, le compromis fordiste a d’autant plus facilement pu conforter en lui des réflexes nationalistes qu’il a fait de l’Etat-nation son cadre et son garant et que, au moment de sa rupture, les organisations du mouvement ouvrier qui ont continué à le défendre ont (ré)activé ses réflexes (cf. par exemple le slogan «Produisons français !» sur lequel le PC a mené campagne dans les années 1980). Aux uns comme aux autres, la «préférence nationale», autrement dit la promesse de réserver en priorité si ce n’est en exclusivité aux nationaux emplois, marchés, logements, droits sociaux, etc., pierre angulaire de ce qui tient lieu de programme économique et social au FN, ne peut dès lors que résonner de manière sympathique à leurs oreilles et faire de ce dernier la planche de salut à laquelle ils vont s’accrocher.

 

La dernière crise à laquelle s’alimente le FN, au sens où elle fournit un terreau favorable à la réception de son discours, est de nature différente. Alors que les trois précédentes dérivent toutes, plus ou moins directement, des formes prises par la dernière phase en date du devenir-monde du capitalisme, celle-ci s’origine au contraire dans ce qu’on pourrait appeler le devenir-capitalisme du monde: la manière dont, pour assurer les conditions sociales générales de sa reproduction, le rapport capitaliste de production tend à bouleverser profondément tous les domaines ou champs de l’activité sociale, bien au-delà de la seule sphère économique dans laquelle il se déploie immédiatement. Dans la phase la plus récente de ce processus, il en a notamment résulté la formation d’un type spécifique d’individualité qui n’aspire pas seulement à l’autonomie (à acquérir la possibilité subjective et objectivité de vivre selon sa loi propre) mais qui se pose comme autoréférentielle: qui entend ne dépendre de rien ni de personne et veut s’ériger en mesure de toutes choses, en aspirant à la réalisation immédiate de tous ses désirs. C’est le type même d’individualité que vise à former par exemple la publicité, même si elle n’en est pas, et de loin, le seul ni même le principal facteur.

 

Cette individualité autoréférentielle ne se laisse a priori que peu mobiliser politiquement, pour quelque cause que ce soit, si ce n’est des causes humanitaires ou, à la rigueur, de défense des droits humains, ce qui constitue le degré zéro de la conscience politique contemporaine. Mais, au-delà des apparences dans et par lesquelles elle se conforte et de ses fantasmes de toute-puissance, c’est en même temps une individualité fort fragile, dont la dimension narcissique exacerbée est constamment en quête d’une réassurance dans et par le regard des autres, du moins de ceux au regard desquels il faut compter. Que les conditions objectives (les conditions sociales d’existence) de son affirmation narcissique viennent à faire défaut, ou tout simplement qu’elles menacent de faire défaut, et a fortiori qu’elles invalident radicalement toute possibilité d’une telle affirmation narcissique (en cas de déclassement social, de précarité chronique ou de chômage de longue durée, de plongée dans la pauvreté ou la misère, etc.), en générant angoisse, culpabilité, agressivité réactionnelle, et l’individualité autoréférentielle se fige alors facilement dans une attitude de ressentiment faite tout à la fois du ruminement constant de maux réels ou imaginaires et d’une plainte chronique à leur égard, d’un vif sentiment d’injustice doublé d’une rage impuissante et d’une révolte sourde, d’une haine tenace sans objet précis, qui ne peut en définitive se soulager que dans la recherche et la désignation de quelques boucs émissaires auxquels on puisse en imputer la responsabilité. Dans ces conditions, le discours frontiste amalgamant insécurité et immigration, faisant de la présence de certaines catégories d’étrangers la source de tous les maux qui peuvent nous accabler, trouve là encore des oreilles complaisantes du côté de tous ceux qui, de par les conditions sociales d’existence qui sont les leurs, ne parviennent pas à soutenir les exigences de cette individualité autoréférentielle dont le mode de vie capitaliste contemporaine fait pourtant un devoir pour chacun.

 

L’existence du FN s’enracine donc profondément dans les transformations des conditions objectives et subjectives d’existence qui caractérisent la formation sociale française contemporaine – comme d’ailleurs d’autres formations voisines (Italie, Suisse, Allemagne, Autriche, Belgique, Pays-Bas, Danemark, Norvège, Hongrie, etc.), elles aussi en proie à la résurgence de mouvements d’extrême droite cousins du FN. Dès lors, le phénomène aurait dû être permanent et croissant tout au long de ces dernières années. Or, après le coup d’éclat de 2002, le FN a connu une éclipse d’une petite dizaine d’années, du mois sur le plan électoral. Pourquoi ?

 

Du rififi chez les frontistes


C’est que la traduction des processus sociaux en termes politiques n’est jamais un processus mécanique ni automatique. La représentation politique (la constitution de formations prenant en charge l’expression programmatique et idéologique des intérêts, des sentiments, des opinions de classes, fractions, couches, catégories, etc.) constitue un travail spécifique, répondant à ses règles et rythmes propres, caractéristique de la scène politique. Or deux obstacles sérieux sont venus entraver le déroulement du travail de représentation politique de sa base sociale que le FN avait entrepris et jusqu’alors assez brillamment mené à partir du milieu des années 1980.

 

En premier lieu, le problème posé par la succession de Jean-Marie Le Pen à la tête du FN. Parmi les conditions nécessaires de réussite du travail de représentation politique figure la nécessité pour une formation politique, surtout d’extrême droite, de disposer à sa tête d’un leader incontesté, sachant parler haut et clair, mais aussi d’un appareil consistant, capable de diffuser la propagande du parti, de recruter des adhérents, de former des militants et des cadres, de présenter des candidats aux élections, etc. Or, dans le cours des années 1990, il se crée un conflit potentiel à la tête du FN opposant son leader historique et président inamovible, Jean-Marie Le Pen, à son premier lieutenant, Bruno Mégret, un transfuge de la droite, tard venu au FN (en 1986), alors son délégué général, conflit dont l’enjeu est certes immédiatement la succession de Le Pen mais aussi, de manière plus fondamentale, la stratégie du parti pour parvenir au pouvoir.

 

Le conflit finit par éclater fin 1998 et conduit dans les semaines suivantes à la rupture du FN, dont Mégret est exclu, et à la formation d’un nouveau parti d’extrême droite, le Front national – Mouvement national, qui deviendra ultérieurement le Mouvement national républicain (MNR) dont Mégret prend évidemment la tête. La sanction électorale de cette division, au cours de laquelle les leaders d’extrême droite auront donné un spectacle aussi cocasse (pour leurs adversaires) que politiquement désastreux (pour leurs électeurs, sympathisants et adhérents), ne s’est pas fait attendre. Aux élections européennes de juin 1999, le FN perd la moitié de ses électeurs par rapport au précédent scrutin de 1994, tandis que la liste conduite par Mégret n’en recueille que un peu plus d’un quart. Et le déclin se confirme lors des élections municipales du printemps 2001, tout d’abord par l’impossibilité dans laquelle se trouvent tant le FN que le MNR, en se faisant concurrence, de constituer des listes dans bon nombre de localités où l’extrême droite avait pourtant été présente lors des scrutins de 1989 et de 1995, ensuite par les résultats obtenus là où l’un ou l’autre a pu malgré tout se présenter: alors qu’en 1995, le FN avait été en mesure de maintenir ses listes au second tour dans cent trois des cent quatre-vingt-cinq villes de plus de 30 000 habitants où se déroulait un second tour, les candidats lepénistes et mégrétistes n’ont alors pu figurer que dans quarante et une occurrences de ce type sur deux cent cinq.

 

Le FN est alors confronté à un double problème. D’une part, il doit faire face à la concurrence du MNR qui chasse sur ses terres: si Le Pen a gardé avec lui la plus grande part de son électorat (ce que prouvera l’élection présidentielle de 2002), Mégret a été suivi par une majorité de cadres et des élus (municipaux et régionaux) du parti. D’autre part et de ce fait, le FN souffre dans l’immédiat d’un défaut d’encadrement qui le handicape notamment dans les élections locales; et il va devoir recruter et former dans le cours des années 2000 une nouvelle génération de militants et de cadres, dans un contexte difficile.

 

Au terme de la décennie, on peut dire qu’il est parvenu à régler le premier de ces deux problèmes. Les fort médiocres résultats obtenus par le MNR l’ont rapidement affaibli, ses cadres le quittant soit pour retourner au FN soit pour abandonner la vie politique. S’y sont ajoutées les difficultés financières du parti et des poursuites judiciaires contre le couple Mégret liées à la gestion des comptes de sa campagne lors des élections présidentielles de 2002. En 2006, Bruno Mégret n’a pas d’autre choix que de renoncer à se présenter à l’élection présidentielle de l’année suivante et il appelle à voter pour son frère ennemi Le Pen. En 2008, il se retire de la vie politique; et le MNR a depuis lors quasiment disparu.

 

Les résultats électoraux du Front national


Pour autant, le FN n’est pas encore parvenu à boucher tous les trous produits dans son appareil par la scission de 1998-1999. En témoignent ses résultats électoraux dès lors qu’ils reposent sur la nécessité de présenter de multiples candidats qui, parce qu’ils sont connus ou du moins identifiables dans leur circonscription, soient capables de ne pas seulement capitaliser sur leur nom les suffrages du leader national mais de faire encore mieux que lui. Or ce n’est été le cas dans aucune des élections de ce type au cours de ces dernières années. Bien au contraire, le FN continue à régresser en nombre de voix sinon en pourcentages des suffrages exprimés lors de toutes les élections municipales, cantonales, régionales et législatives. Les pertes sont particulièrement sévères lors des élections législatives de 2007 (une perte de 60% par rapport à celles de 2002 et de 70% par rapport à celles de 1997) et, dans une moindre mesure cependant, lors des élections régionales de 2010 (un peu plus du tiers d’électeurs en moins par rapport à celles de 2004). Sous ce rapport, les dernières cantonales, sans faire exception, marque peut-être un début d’inflexion puisque les pertes par rapport aux précédentes élections de 2004 sont de bien moindre ampleur (moins de 10%).

 

Simultanément, le FN aura dû faire face au problème pendant de la succession de Jean-Marie Le Pen à l’origine (entre autres) du désastreux conflit avec Mégret. Son coup d’éclat lors des élections présidentielles de 2002, où il totalise plus de cinq millions et demi de voix au second tour, ne fait illusion qu’un temps. Dans les années suivantes, il devient de plus en plus évident que le vieux routier de l’extrême droite, qui arpente les tréteaux de scène politique depuis un demi-siècle, perd de son charisme et de ses talents de tribun qui assuraient encore son succès naguère. En 2007, au terme d’une campagne électorale poussive (il a alors près de quatre-vingts ans !) dans laquelle il a été totalement éclipsé par les deux principaux concurrents, il ne recueille plus que (si l’on peut dire !) trois millions huit cent mille voix et se retrouver éliminé. L’heure de sa retraite a sonné.

 

Reste à lui trouver un remplaçant en évitant que la succession n’ouvre à nouveau une guerre fratricide parmi les prétendants. Ce ne sera pas tout à fait le cas puisque cela passera notamment par le départ de la quasi-totalité de la vieille garde frontiste (Carl Lang et à sa suite Bernard Antony, Martine Lehideux, Jean-Claude Martinez, Christian Baeckeroot, Fernand Le Rachinel) en 2008, qui vont tenter de mettre en selle un Parti de la France (PdF) qui n’aura guère plus de succès que le MNR. Dès lors, rien ne s’opposera plus à l’investiture de Marine Le Pen, si ce n’est l’autre Bruno (Gollnisch), devenu vice-président exécutif du FN. Mais, en dépit de sa fidélité au Chef et de son expérience politique, le vieux compagnon ne fera pas le poids face au «capital symbolique» de la fille, qui plus est ouvertement soutenue pour ne pas dire directement adoubée par son père. C’est Marine Le Pen qui prendra la succession de Jean-Marie à la tête du FN en janvier dernier. Le père trouve ainsi dans sa fille une héritière décidée à faire fructifier son héritage tout en l’infléchissant, ainsi qu’on le verra plus loin.

 

Le défi sarkozyste


Durant cette même décennie, qui n’aura décidément pas été de tout repos pour lui, en plus de ses problèmes internes, le FN aura eu à affronter un second obstacle, d’origine externe, en la personne de Nicolas Sarkozy. Dès 2002, en prenant la responsabilité du ministère de l’Intérieur qu’il va occuper presque continûment (hormis entre mars 2004 et mai 2005 où il exerce les fonctions de ministre de l’Economie, des Finances et de l’Industrie) jusqu’à son élection à la présidence de la République au printemps 2007, Sarkozy prépare méthodiquement cette dernière en mettant en œuvre une stratégie destinée à débarrasser la droite dite républicaine de la concurrence que le FN lui mène depuis une quinzaine d’années et qui lui a déjà valu quelques revers électoraux.

 

Cette stratégie consiste à chasser sur les terres du FN (reprendre ses principales thématiques, notamment l’association entre insécurité et immigration) pour tenter de lui ravir une partie de son électorat, notamment celui que le FN peut avoir lui-même dérobé antérieurement à la droite. En somme, faire du lepénisme sans Le Pen et contre Le Pen ! Sans doute, Sarkozy n’est-il pas le premier homme politique de droite (et même de gauche…) à avoir tenté pareille manœuvre: Jacques Chirac et Charles Pasqua s’y sont essayés avant lui. Mais ce qui n’avait été jusqu’alors que tactique conjoncturelle (notamment en période électorale) va désormais être érigé en une véritable stratégie de conquête puis d’exercice du pouvoir.

 

Bien mieux, conduite par un ministre de l’Intérieur puis par un président de la République, elle va devenir une véritable politique d’Etat. Les déclarations à l’emporte-pièce sur «la racaille» dont il s’agit de débarrasser les banlieues et sur la nécessité de les «nettoyer au Karcher», l’incitation répétée à amplifier le harcèlement policier à l’égard des jeunes issus de l’immigration notamment maghrébine et subsaharienne, source d’inévitables «bavures» en nombre croissant, la répression des émeutes dans les banlieues d’octobre-novembre 2005 prenant des allures de guérilla urbaine, la traque systématique aux «sans-papiers» avec pour résultat des expulsions se comptant par dizaines de milliers, sans considération des liens amicaux, amoureux, familiaux qui ont pu être tissés, plus récemment la chasse aux Rroms, auront été les points saillants d’une escalade dans ce qu’il faut bien appeler l’institution d’une véritable xénophobie d’Etat, ignorant presque entièrement les protestations des associations de défense des droits de l’homme, des syndicats et des partis politiques et même celle de Viviane Reding, la commissaire européenne chargée de la justice et des droits des citoyens. Le tout agrémenté de soi-disant «débats» sur l’identité nationale ou sur la laïcité qui sont autant de campagnes de propagande sur des thèmes frontistes habituels. Tandis que, simultanément, la droite sarkozyste aura multiplié les lois sécuritaires destinées à durcir l’arsenal pénal, en étendant considérablement le pouvoir de la police, conduisant ainsi entre autres au doublement du nombre des gardes à vue durant les années 2000 tandis que la surpopulation pénale aura battu des records. Et l’appareil médiatique aura relayé l’ensemble de ce processus de manière d’autant plus complaisant qu’il est de plus en plus contrôlé par quelques grands groupes financiaro-industriels étroitement liés à la Sarkozie.

 

Il ne fait pas de doute que pareille politique, menée cyniquement dans un but démagogique de séduction d’une partie de la population plus encore que par conviction propre de ses instigateurs, aura permis à Sarkozy de se rallier, dans un premier temps, des électeurs passés ou potentiels du FN. La contre-performance relative de Le Pen lors du premier tour des élections présidentielles de 2007, relativement à celui de 2002, lui est imputable autant qu’à l’âge avancé de ce dernier. Sarkozy est alors parvenu, pour un temps, à réaliser une synthèse de différents courants politico-idéologiques de la droite, combinant un néolibéralisme offensif, un populisme xénophobe et même un catholicisme traditionaliste [6]. Car cette formule ne manquait pas d’une certaine efficacité, la thématique et la politique xénophobes (grossièrement basée sur l’équation immigration = insécurité) étant destinée à divertir et canaliser le ressentiment des couches populaires, agressées et apeurées par la dégradation de leur situation socio-économique (persistance d’un fort chômage, aggravation de la précarité, austérité salariale, démantèlement rampant des protections de l’Etat-providence, absence de toute perspective de promotion sociale pour les jeunes, etc.) que la politique néolibérale du gouvernement ne faisait qu’aggraver, en leur désignant les responsables et les coupables (des boucs émissaires) et leur montrant que le gouvernement s’y attaquait avec rigueur et vigueur.

 

Mais, pour efficace qu’elle ait été pendant un certain temps, cette formule n’en était pas moins fragile. Plus on remplissait de charters d’immigrés sans papier, plus on durcissait la législation sur les conditions d’entrée et de séjour des étrangers, plus on arrêtait de petits délinquants, plus on bourrait les prisons… et plus il apparaissait que toute cette agitation sécuritaire et xénophobe était sans effet, parce que sans rapport, sur l’amélioration de la condition socio-économique des couches populaires les plus paupérisées et les plus précarisées, les apeurées et les plus disposées à mordre à l’hameçon du populisme sarkozyste. Encore moins cette agitation était-elle en mesure de s’opposer à la dégradation de cette situation qui s’est produite à la suite du krach financier de l’automne 2008 et de ses suites, la plus grave récession économique depuis l’après-guerre, la brusque hausse consécutive des dettes publiques, les actuelles politiques d’austérité budgétaire et salariale destinée à faire payer aux salariés, aux chômeurs, aux retraités, etc., le prix du sauvetage du capital en général et du capital bancaire en particulier. Ajoutons que le cynisme même avec lequel les politiques néolibérales ont continué à être menées avant, pendant et après cet épisode de crise aiguë, aura fini par manifester clairement leur caractère de classe: on institue un bouclier fiscal qui aura valu à dix-neuf mille ménages parmi les plus fortunés de toucher un chèque de 36 200 € en moyenne en 2010, tandis que le SMIC n’aura bénéficié d’aucun «coup de pouce» depuis 2007 et qu’on vient d’instituer une franchise de 30 € pour les bénéficiaires de l’aide médicale d’Etat – quelques exemples parmi des dizaines d’autres possibles. Ce que le style «bling bling» de nouveau riche de l’occupant de l’Elysée et les pratiques manifestes de concussion de certains membres de son entourage (cf. le rôle trouble joué Eric Woerth par dans l’affaire Bettencourt) se sera enfin chargé de confirmer et d’illustrer jusqu’à la caricature.

 

Bref, du fait tant de son contenu contradictoire que du style imprimé à son exécution par un Sarkozy dont, par moments, l’amateurisme n’a d’égal que le narcissisme, la formule politique qui a fait son succès en lui permettant de conquérir l’Elysée est en train de faire faillite. Et cette faillite libère à nouveau un espace politique pour un FN qui, de son côté, sans avoir encore effacé toutes les séquelles de la crise ouverte en 1998 au niveau de son appareil, a retrouvé un leader en la personne de Marine Le Pen et voit affluer ou refluer vers elle un électorat que l’épisode sarkozyste n’aura pas su fixer à droite mais aura bien su consolider dans toutes ses convictions d’extrême droite par ses politiques et discours sécuritaires et xénophobes.

 

La stratégie de la Marine

 

Si la fille Le Pen est bien le clone de son père sur le plan rhétorique, son discours et plus encore sa stratégie visent à s’en démarquer de manière plus ou moins explicite. En effet, dans son mot d’ordre de «dédiabolisation» du FN ne s’exprime pas seulement la volonté de débarrasser le discours frontiste de scories liées à l’histoire de l’extrême droite que charriait encore Le Pen père: plus question de dérapages antisémites ni d’évoquer les chambres à gaz des camps d’extermination nazis comme des «points de détail» de l’histoire de la Seconde Guerre mondiale, autant de tropes politiquement contre-productifs; plus question non plus d’exalter la Pucelle (Jeanne d’Arc) et de s’en prendre à l’IVG, Marine est fille (femme) de son temps; plus question de réclamer le dépôt des cendres de Pétain à Verdun, et autres vieilles lunes de l’Action française.

 

Plus fondamentalement, il s’agit d’infléchir la stratégie du FN: alors que Le Pen père a tout au long de sa carrière politique fantasmer une prise du pouvoir à la de Gaulle (une crise nationale majeure dans laquelle toute la classe politique serait complètement discréditée et où il serait appelé à jouer l’homme providentiel), en se refusant à envisager toute alliance avec la droite (et c’est bien ce que lui reprochait et proposait au contraire Mégret dans les années 1990), sa fille se place, à mon sens, clairement dans cette perspective. Pour elle, le FN doit travailler à créer les conditions politiques et idéologiques d’une situation où la droite «républicaine» n’aura plus d’autre choix que de s’allier à lui. En somme, ce que Marine Le Pen envisage et prépare, c’est la constitution d’une alliance gouvernementale entre tout ou partie de la soi-disant droite républicaine et de l’extrême droite frontiste, permettant à cette dernière d’accéder au pouvoir. Un scénario à l’italienne [7] ou à l’autrichienne [8], dans lequel une extrême droite relookée s’allie à une partie de la droite pour exercer des responsabilités gouvernementales, ou du moins un scénario à la danoise [9] ou à la néerlandaise [10], dans lequel la droite ne disposant que d’une majorité parlementaire relative doit compter, pour pouvoir gouverner, sur l’appui des élus d’extrême droite, dès lors en mesure de lui dicter pour partie sa politique.

 

De pareils scénarios peuvent-ils se réaliser en France dans les prochaines années ? Cela supposerait qu’une partie importante de l’UMP, sinon sa totalité, soit prête à s’allier au FN, de sorte à obtenir ensemble une majorité parlementaire. Certains de ses leaders, à commencer par le principal d’entre eux, semblent y être prêts: la persistance actuelle de Sarkozy et de son entourage proche dans une politique visant à chasser sur les terres du FN en est un signe. D’autres, par contre, tels Fillon et Juppé, semblent s’y refuser, ayant pris conscience de l’échec de la stratégie sarkozyste et se plaçant déjà en situation de prendre la tête de la droite après sa défaite électorale prévisible en 2012. Si le clan sarkozyste poursuit dans cette voie, il faut s’attendre à un éclatement de l’UMP (les craquements se font déjà entendre du côté de certains centristes, Borloo en tête) et une recomposition de la droite, pouvant impliquer la totalité du centre (Modem inclus), avant ou plus probablement après les élections de 2012, surtout si elles sont perdues par la droite, ce qui est le plus probable. Quoi qu’il en soit, cela exclut que, dans l’immédiat au moins, une alliance entre l’extrême droite FN et une droite ex-UMP puisse obtenir une majorité parlementaire, même relative.

 

Tout cela fait évidemment le jeu de la «gauche» gouvernementale, le PS et ses alliés potentiels (Front de gauche et Verts-Europe Ecologie). Sauf accident majeur (une «guerre des chefs» lors des primaires socialistes, paralysant plus ou moins le Parti socialiste et délégitimant le candidat désigné), c’est bien ce dernier qui devrait l’emporter. La pression du FN sur la droite, donnant un semblant de crédit à «la menace fasciste», lui ralliera ce qu’il faut d’électeurs, notamment parmi les abstentionnistes de gauche habituels. De la sorte, pour peu que l’élu obtienne une majorité parlementaire, l’alternance entre droite et gauche fonctionnera correctement une nouvelle fois, assurant la continuité réelle de la prévalence des intérêts de la bourgeoisie derrière la discontinuité apparente du personnel politique chargé d’y veiller. Et ce surtout si c’est Dominique Strauss-Kahn qui est investi par le PS, comme ce sera probablement le cas.

Est-ce à dire que le scénario précédent est inéluctable ? Certainement non ! La tournure que vont prendre les événements politiques en France dans les prochaines années dépendra aussi de la renaissance ou non d’une force politique capable d’ouvrir la voie à une alternative au capitalisme: à définir et promouvoir un programme politique crédible qui, tout en s’articulant sur les revendications immédiates du prolétariat, et tout d’abord celles de ses couches les plus opprimées, et sur ses luttes, ouvrent les voies d’une transition vers un au-delà du capitalisme. Car il n’est que trop évident au regard de ce qui précède que l’écho que les thématiques insécuritaires, xénophobes, racistes et sexistes, qu’elles soient diffusées par la droite extrême ou par l’extrême-droite , rencontrent dans certains éléments du prolétariat est d’abord fonction de l’impuissance dans laquelle ceux-ci se trouvent de lutter pour se défendre et de maintenir ouverte une perspective de transformation sociale; et qu’il est donc de la responsabilité de tous les militants, groupes, organisations qui se revendiquent d’un anticapitalisme conséquent que de travailler à renforcer la capacité de lutte du prolétariat et sa capacité d’auto-activité.

 

Au demeurant, ils n’auront guère le choix de s’en exempter. D’une part, parce que la stratégie lepéniste new look de la Marine consistera non seulement à faire du charme à une partie de la droite mais encore à «gauchir» son discours: à se poser en défenseur et unique défenseur des intérêts des travailleurs… à condition qu’ils soient français ! Autrement dit, à renfourcher la thématique de la «préférence nationale» pour faire pièce à la thématique de la lutte de classe. Si la droite néolibérale a cherché à dissoudre cette dernière dans «les eaux glacées du calcul égoïste», en prônant le chacun pour soi et le tous contre tous du marché comme seule planche de salut, l’extrême droite pour sa part va chercher à la fusionner dans la ferveur nationaliste qui fait fantasmer la réconciliation de tous avec tous dans la communauté nationale retrouvée. A nous de faire entendre que la seule voie vers une telle réconciliation se situe dans le dépassement de ce qui, précisément, dresse les uns contre les autres aussi bien les individus que les classes ou les nations, à savoir les rapports capitalistes de production et leur dominance au sein du monde contemporain.

 

D’autre part, tout le scénario précédent, confiné à la scène politique, fait abstraction de la poursuite de la crise structurelle du capitalisme, dont les effets socio-économiques, politiques et écologiques vont en se cumulant et dont le cours prend, de ce fait, une allure de plus en plus catastrophique. Qu’intervienne demain, ce qui est non seulement possible mais hautement probable, une crise plus sévère des «dettes souveraines» sous la forme par exemple de la cessation de paiement de la Grèce, de l’Irlande ou du Portugal (mais l’Espagne n’est pas exclue non plus du scénario, ni même le Royaume-Uni), parce que leurs peuples n’accepteront plus l’austérité drastique et les régressions économiques et sociales que leurs gouvernements cherchent à leur imposer, qu’il faille par conséquent restructurer ces dettes et que leurs créanciers, parmi lesquels figurent les plus grandes banques européennes, aient à passer une partie de leurs créances de l’actif au passif, et c’est la perspective non seulement d’un éclatement de la zone euro mais d’une crise bancaire et monétaire sans précédent en Europe qui se profilerait, dont la situation argentine de 2001-2002 peut cependant nous donner une idée. Dans de telles circonstances, toutes les cartes politiques seraient rebattues et tout le monde serait placé au pied du mur, à commencer par les révolutionnaires. (2 avril 2011)

 

Article publié sur le site d'A l'Encontre


http://labreche.org/?p=1785#more-1785


1. Je reprends cette expression suggestive à la savoureuse Tyrolienne haineuse de l’humoriste Pierre Dac.

2. Je résume ici des thèses que j’ai eu l’occasion de développer et d’argumenter dans Le spectre de l’extrême droite, Editions de l’Atelier, Paris, 1998, et dans L’actualité d’un archaïsme, Editions Page 2, Lausanne, 2e édition, 1999.

3. Cf. mon essai «Mai-juin 1968 en France: l’épicentre d’une crise d’hégémonie», mis en ligne sur le site A l’Encontre début mai 2008; repris dans «Mai-Juin 1968», Intervention. Les cahiers de l’Education populaire, n°8, AES, Lure, septembre 2008.

4. Cf. l’étude que je lui ai consacrée dans Du « Grand Soir » à « l’alternative », Editions Ouvrières (Editions de l’Atelier), Paris, 1991.

5. Je renvoie à Le crépuscule des Etats-nations, Editions Page 2, Lausanne, 2000, et à l’article «Mondialisation» dans La novlangue néolibérale, Editions Page 2, Lausanne, 2007.

6. Cf. mon article «La formule Sarkozy», A Contre-Courant, n°182, mars 2007.

7. Allusion aux coalitions successives entre le parti «postfasciste» Alleanza Nazionale (Alliance nationale), fondée et dirigée par Gianfranco Fini à partir du Movimento Sociale Italiano (MSI, Mouvement social italien), directement héritier du fascisme mussolinien, le parti régionaliste d’extrême droite Lega Nord (Ligue du Nord) fondé et dirigé par Umberto Bossi et le parti de droite Forza Italia (En avant l’Italie !) fondé et dirigé par Silvio Berlusconi, qui ont gouverné l’Italie entre mai 1994 et janvier 1995, puis plus longuement entre avril 2001 et avril 2006, puis à nouveau depuis avril 2008.

8. Allusion à la coalition entre un parti d’extrême droite, le bien mal dénommé FPÖ (Freiheitliche Parti Österreichs, Parti libéral autrichien), et le parti traditionnel de la droite autrichienne, l’ÖVP (Österreichische Volkspartei, le Parti populaire autrichien) qui a gouveré l’Autriche de l’automne 1999 à l’automne 2006.

9. Au Danemark, depuis 2007, le Dansk Folkeparti (Parti populaire danois) soutient avec ses vingt-cinq députés une coalition libérale-conservatrice en obtenant d’elle des mesures très restrictives en matière d’immigration et de droits des étrangers.

10. Aux Pays-Bas, depuis septembre 2010, les vingt-quatre députés du PVV (Partij voor de Vrijheid, le Parti pour la liberté), un parti violemment xénophobe (antimusulman) en fait de liberté, tiennent ainsi en otage la coalition de droite formée par le VVD (Volkspartij voor Vrijheid en Democratie, Parti populaire pour la liberté et la démocratie) et le CDA (Christen Democratisch Appèl, l’Appel démocrate-chrétien).

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28 avril 2011 4 28 /04 /avril /2011 11:46

Campagne interne de succession à la tête du Front national (FN), sondages plaçant Marine Le Pen au second tour de la présidentielle de 2012, bons résultats lors de cantonales pourtant marquées par l’abstention, multiplication d’interventions médiatiques propices à sa banalisation : le FN redevient audible dans la société française. Un nouveau cycle s’ouvre pour le parti d’extrême droite.

Une erreur serait de réduire la poussée frontiste à une pure construction médiatique, à une manipulation politique, comme certains s’empressent de l’analyser. Une autre serait de rester sur de vieux schémas ou de se laisser berner par l’habillage et de crier à la révolution stratégique. Les mêmes avaient, le plus souvent, enterré le FN et ne s’étaient pas préoccupés d’analyser, dans la durée, les évolutions de ce courant en perpétuelle mutation.

Le bon vieil adage giscardien du « changement dans la continuité » illustre la situation du FN : changements d’équipes, de structures, d’habillage, exploration de nouveaux territoires, mais continuité familiale, de stratégie (la dédiabolisation déjà tentée dans les années 1990), d’amitiés avec les franges radicales de l’extrême droite, et sur le fond programmatique.

Parti en travaux…


Depuis la scission de 1998, de nombreux cadres et militants ont quitté le FN. Même si la « primaire » entre Gollsnich et Marine Le Pen lui a donné l’occasion de renouer avec des adhésions1, le FN n’a toujours pas reconstitué un appareil militant national performant. La présence dans 400 cantons de moins qu’en 2004 ainsi que les candidatures fantômes2 voire « atypiques »3, le recrutement de candidats via Internet prouvent cette carence. En plus d’une crise structurelle, le FN est plombé par d’importants soucis financiers (dette de plusieurs millions d’euros envers F. Le Rachinel, vente du Paquebot - ancien siège du FN - en stand-by, conflits prud’homaux).
Tout cela n’a pas empêché le FN d’obtenir de bons résultats aux cantonales tant face à l’UMP que face aux formations de gauche, de confirmer son enracinement électoral à l’est de l’axe Nord-Pas-de-Calais/Paca4 et de progresser dans des régions jusque-là relativement épargnées par le vote frontiste, porté par « la vague brune marine ».

… mais continuité du parti


Le processus menant de la « primaire » frontiste aux cantonales a contribué au redressement du parti par un nouvel « effet Le Pen » comparable à celui des années 1980. Le parti d’extrême droite récolte ainsi les fruits du travail d’actualisation de son discours et de restructuration de l’appareil entamé dès 2002.
Le congrès de Tours a permis de maintenir la famille frontiste unie, contrairement à ce que souhaitaient les partisans de B. Gollnisch extérieurs au FN (MNR, NDP et PDF), qui voyaient dans la stratégie de Marine Le Pen un dévoiement des « fondamentaux », et l’occasion d’une recomposition de l’extrême droite autour de sa frange « orthodoxe » le plus souvent issue (départs ou exclusions) du FN.


C’est finalement en restant au FN que les « intransigeants » font le plus de tort à Marine Le Pen. En effet, celle-ci cherche à rendre le FN respectable afin de capter les déçus du sarkozysme issus de la majorité présidentielle le moment venu. Pour cela, il s’agit de se débarrasser, en apparence, des nostalgiques de la Collaboration et de l’Empire colonial français ainsi que du « folklore » néonazi mettant en péril la tactique de dédiabolisation et de banalisation du parti à l’œuvre ces dernières années. Le traitement, conflictuel au sein du FN, du cas de l’élu frontiste Alexandre Gabriac, pris en photo en train de faire le salut nazi, éclaire les contradictions tactiques à l’œuvre au sein du FN sans pour autant être la preuve d’une rupture dans la filiation historique du parti.

Continuité programmatique


Un œil sur le fond programmatique du FN finit de nous convaincre que, derrière le « relooking », il reste bien d’extrême droite, raciste, antisocial, dangereux pour les travailleurs. Ceux qui y voient un tournant social récent oublient que ce tournant s’est opéré… dès 1995 ! à cette époque, le FN pro-Reagan des années 1980 tourne le dos au libéralisme et porte un discours pseudo social, avec comme clef de voûte la « préférence nationale » (une société d’apartheid social, inégalitaire à la recherche de boucs émissaires) et le protectionnisme. Le FN tente aussi de renouer avec l’activité catégorielle que ce soit par la relance du « Cercle national des Juifs français » ou celui des « travailleurs syndiqués » avec la création de syndicats « libres », déjà tentée dans les années 1990.
Rien de nouveau donc, si ce n’est l’audience de ces initiatives. Ainsi, il n’était pas envisageable il y a quelques années, que Marine Le Pen puisse être pressentie comme invitée à Radio J (invitation annulée par la mobilisation des associations juives de France), ou que des « coming out » de militants frontistes dans les syndicats puissent être organisés.

Nouvelle période


Au-delà du renouvellement générationnel de ses dirigeants, c’est donc moins le FN qui a changé que son environnement. Depuis des années, la société française est « travaillée » par des discours xénophobes, sécuritaires, destructeurs de solidarité qui ont préparé le terrain à la validation des thèses frontistes. En 2007, la stratégie « néoconservatrice » menée par Nicolas Sarkozy, qui devait réduire durablement l’électorat Front national à peau de chagrin en lui confisquant son discours, a prouvé ses limites. Elle se retourne contre la droite au pouvoir, sur fond de rejet de sa politique sans alternative crédible à gauche (le retour du débat sur la candidature unique escamote, pour sa part, la question cruciale de la politique à mener).
Le venin d’extrême droite a été distillé depuis longtemps, au plus haut sommet de l’état. La stratégie de dédiabolisation du FN n’en est que plus aisée à mettre en œuvre, puisque des éléments de son programme sont dans le débat public. Si les paroles s’envolent, les lois et projets restent et tendent à une inflexion constitutionnelle faisant reculer toujours plus le droit du sol et pouvant rendre légale la préférence nationale. La crise du capitalisme finit de rendre audibles les propositions économiques protectionnistes du FN, alors que le capital de sympathie de ce parti se « limitait » jusque-là aux questions d’immigration et de sécurité.

Nouvelles postures


Le retour du FN dans le jeu politique est favorisé par une véritable stratégie Internet et la mise en place de structures telles que le « think tank » Idées Nations, chargé de la production idéologique ou l’existence d’une garde rapprochée, un « shadow cabinet », très réactive. L’exploration de « nouveaux territoires » par le FN annonce une activité du parti d’extrême droite en direction de nouveaux secteurs de la société. La vigilance s’impose donc.
Le discours social, s’il n’a rien de nouveau, fait partie de la stratégie frontiste visant à élargir son électorat (l’adresse de Marine Le Pen aux fonctionnaires et aux services publics), tout comme le sont les repositionnements thématiques autour de la République, la laïcité, l’état régulateur, l’écologie… Autant de terrains que le FN prétend occuper afin d’être perçu comme l’alternative crédible aux partis du « Système ».

Il est indispensable de démontrer que le FN n’est toujours pas « un parti comme les autres », mais qu’il n’est pas pour autant le parti « anti-système » qu’il prétend représenter.
Il est urgent de repenser les formes de l’action antifasciste en fonction des terrains qu’occupent le FN et de renouer avec une vigilance antifaciste à la fois unitaire et de masse.
Au-delà de ces résistances, la construction d’une alternative crédible de gauche, en rupture avec la société capitaliste, est, plus que jamais, à l’ordre du jour.

 

Eliane Berthier

1. En 2004, le nombre d’adhérents était d’environ 18 000. Le siphonnage de 2007 a créé un important reflux. Au congrès de Tours, en janvier 2011, 22 000 adhérents pouvaient élire le nouveau président.
2. Lefigaro.fr, 24 mars 2011.
3. Dans l’Est, un vieillard de 80 ans reclus dans sa maison de retraite ; une call-girl gothique dans le Nord ; à Strasbourg 6, le candidat FN, qui depuis dément, déclarait aux Dernières Nouvelles d’Alsace « regretter que les résidents étrangers n’aient pas le droit de vote en France alors qu’ils ont le devoir fiscal ».
4. Lors des régionales de 2010, le FN obtenait 22, 87 % en Paca ; 22, 2 % dans le Nord-Pas-de-Calais ; 19, 38 % dans le Languedoc-Roussillon ; 19, 30 % en Picardie ; 18, 44 % en Lorraine.

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27 avril 2011 3 27 /04 /avril /2011 13:02
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26 avril 2011

Gabriel Gérard – Au congrès de Tours, en janvier dernier, une nouvelle génération a pris les rênes du FN. Selon vous, quelles en sont les conséquences ?


René Monzat – Cette organisation reste faible, mais ses cadres, ses équipes dirigeantes ont assimilé les résultats du travail idéologique et intellectuel et politique effectué durant les années 1990.

 

Ils parient sur un moteur politique à deux composantes,

- un discours social, anti libéral, anti financier aux accents parfois anticapitalistes tenu au nom du peuple et des ouvriers

- un discours national, de défense des valeurs françaises et européennes contre une menace de dénaturation

Ils ont compris aussi qu’en mettant l’accent sur l’aspect « social » de leur discours le FN se prémunit contre le « siphonage » de sa base populaire par la droite. Cela garantit la « différence de nature » entre le FN et l’UMP. L’adhésion de militants à la fois au FN et à des organisations syndicales n’est donc pas réductible à de l’entrisme, de la manipulation.

 

Le Front National d’aujourd’hui est plus que jamais un parti de « droite révolutionnaire » au service d’un projet de société autoritaire.

Dans le maniement du discours politique ils ont choisi l’ attitude pragmatique et cynique de la Nouvelle droite qui dit tout et son contraire pour désemparer ses adversaires, et non le discours incantatoire des courants de matrice catholique qui sont prêts à se faire manger par les lions comme les martyrs plutôt que de céder sur un mot..

Ils sont donc capables de « retourner » des mots et notions empruntées à leurs adversaires, par exemple transformer la laïcité en défense du communautarisme gaulois et catholique, parler du droits des femmes, de la république etc.

Le FN est devenu plus dangereux, il gagne en audience et peut reconstruire son appareil. Il est aussi plus agile, plus capable de saisir à son profit les opportunités politiques.

 


L’audience retrouvée du FN est-elle réductible au nouvel « effet Le Pen » ?


Non ! L’audience retrouvée du Front National n’est que l’aspect hexagonal d’une audience croissante de mouvements populistes, xénophobes, ou de droite révolutionnaire. Ce phénomène continental tient à la crise persistante des sociétés européennes en l’absence de perspectives politiques. Marine Le Pen est un symptôme local de la recherche désespérée de solutions politiques. Là réside le phénomène principal.

En France l’évolution du champ politique et idéologique a été accélérée par la stupidité d’une droite qui renforce en se débattant le piège dans laquelle elle s’est placée. En offrant « gratuitement » une hégémonie idéologique aux xénophobes, le gouvernement s’est évertué à saper sa propre base électorale. Cette droite ne voit tout simplement pas que l’électorat populaire du FN n’a aucune raison de revenir vers les partis clientélistes de droite.

La nouvelle direction réussit à incarner la modernité du Front National et se montre mieux capable de capitaliser la situation que ne l’était Jean-Marie Le Pen ou que ne l’aurait été Bruno Gollnish. Ce troisième facteur est lui aussi nécessaire pour catalyser en votes le climat politique.

 

Quels sont les nouveaux défis à gauche ?


Elle est un élément du problème car les formations de gauche européennes se sont avérées incapables de protéger les salariés des méfaits de la contre révolution capitaliste et libérale constituée par 40 ans d’assaut contre les acquis sociaux. Incapables de s’opposer à cette offensive, incapables de l’expliquer. Elles sont aujourd’hui incapables d’adopter une politique et une stratégie cohérente d’altermondialisation, d’aide à la généralisation des acquis sociaux dans les zones où la production manufacturière est la plus dynamique.

 

Il faut écouter le refrain de ces femmes et hommes qui, interrogés sur les raisons de leur vote disent leur déception : « on a essayé la gauche, on a essayé la droite, alors maintenant on essaye le Front National ».

La gauche est aussi un élément de la solution. Car elle seule peut regagner l’électorat populaire du FN. Elle seule peut démontrer que la xénophobie, la préférence nationale est un dérivatif, un leurre, un moyen de diviser celles et ceux qui peuvent créer un rapport de force. Mais face au nouveau FN il sera plus difficile de formuler des thématiques consensuelles que dans les années 1990 ou 2000,

 

- parce que la reformulation « culturelle » du racisme anti-immigré en islamophobie a paralysé, y compris la gauche,

- parce que les résistances à la mondialisation libérale restent trop peu crédibles pour constituer des alternatives réelles et que ces perspectives sont loin d’être assumées par la gauche dans son ensemble.

 

Propos recueillis par Gabriel Gérard


MONZAT René, GERARD Gabriel

* René Monzat est l’auteur de Les Droites nationales et radicales en France (avec Jean-Yves Camus), Lyon, Presses universitaires de Lyon, 1992 ; Enquêtes sur la droite extrême, Paris, Le Monde Éditions, « Actualité », 1992 ; Les Voleurs d’avenir. Pourquoi l’extrême droite peut avoir de beaux jours devant elle, Paris, Textuel, « La discorde », 2004 ; Petit manuel de combat contre le Front national (avec Anne Tristan), Paris, Flammarion, 2004.

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20 avril 2011 3 20 /04 /avril /2011 11:14

 

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mercredi 20 avril 2011

Après être montée à coup de communiqués, la pression vient de retomber. Tri Martolod va livrer l'association.

Dans notre édition du mercredi 13 avril, nous relations le fait que la société coopérative Tri Martolod (Concarneau) et son établissement secondaire, An Alarc'h (Huelgoat) avait décidé de cesser de livrer un client considéré comme indésirable. De fait, l'association identitaire Ti Breizh de Guerlesquin, appartenant à l'extrême droite, était montée sur ses grands chevaux. Affirmant, de droit que le refus de vente « pourrait entraîner des poursuites judiciaires résultant d'un refus de ventre aggravé à caractère politique ».

Manquait au dossier, la preuve écrite de la commande. Elle est parvenue le jeudi 14 avril par courriel, « confirmée par lettre recommandée avec accusé de réception que nous avons reçue vendredi 15 avril » indique-t-on du côté de la brasserie. De fait, celle-ci va se plier à contrecoeur à la règle « Bien qu'on soit loin de la commande du siècle (NDLR 2 fûts), et nos conditions générales de ventes ne prévoyant qu'un minimum de 80 € hors taxe, nous sommes donc contraints et forcés d'honorer cette commande ». Tout en précisant qu'il n'a « jamais été question pour la Scop d'utiliser la bière comme un produit politique ».


C'est précisément « ce genre de récupération dont Tri Martolod ne veut pas » affirment les brasseurs. Répondant ainsi à Ty Breizh qui la semaine passée indiquait dans un communiqué » qu'il « était hors de question de se laisser traîner dans la boue et diffamer alors que nous avions choisi de faire travailler un artisan local, conformément à notre volonté de promotion du localisme (sic) ». Ces deux-là ne sont pas prêts à trinquer ensemble au comptoir.

 

Françoise LE BORGNE
Note: Ces dangereux miltants d'extrême droite comptent comme l'an passer venir perturber les manifestations du 1er Mai, nous appelons donc à la vigilance et à la mobilisation.
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5 avril 2011 2 05 /04 /avril /2011 11:27

 

GAZA-STROPHE, Palestine - Teaser FR from GAZA-STROPHE on Vimeo.

 

COMMUNIQUE DE PRESSE DES REALISATEURS DU FILM " GAZA-STROPHE, PALESTINE "


le 04/04/2011


affiche-dissc863-4cf41.jpg
Dimanche 3 avril à 17h55, un commando d'une vingtaine de nervis d'extrême droite pro-Israël de la LDJ (Ligue de Défense Juive), s'est attaqué au Cinéma Espace St Michel (Paris Vème) qui projette en ce moment notre film documentaire "Gaza-strophe, Palestine". Grâce à l'intervention du projectionniste, leur opération a échoué, et les
séances programmées ont pu se dérouler comme prévu.

Si les nervis de la LDJ auraient voulu "discuter" avec nous, eh bien c'est raté : nous étions à 2000 km de Paris, à Belgrade, où notre film a été présenté au 58e Festival de film documentaire et de court métrage, ce week end.

En fait, nous étions en train d'admirer le Danube avec un couple d'amis depuis la forteresse turque qui domine Belgrade, lorsque le responsable du cinéma St Michel nous a appelé pour nous raconter ce qui venait de se passer :

Equipés d'antivols, le commando (formé de jeunes gens très excités) a tenté d'enfermer le projectionniste et l'ouvreuse derrière la caisse du cinéma afin de pouvoir interrompre la séance. Mais le personnel du cinéma a courageusement résisté à l'agression et appelé la police. Visiblement surpris par cette résistance inattendue, les brutes ont rapidement pris la fuite, après avoir frappé le projectionniste, et promis de brûler le cinéma. Ils ont collé dans le hall les autocollants de la Ligue de Défense Juive, et jeté des tracts haineux. Une plainte a été déposée par le projectionniste, le directeur du cinéma envisage les suites judiciaires et dénonce l'agression contre son cinéma. Alertés dans la soirée, plusieurs sympathisants de la lutte pour les droits humains en Palestine ont accouru sur les lieux pour apporter leur soutien au personnel du cinéma.
Ils se sont donné rendez-vous aux prochaines séances (voir leur communiqué : http://generation-palestine.org/omar/ ... commando-sioniste-essaye-
dinterdire-la-projection-du-film-gaza-strophe-au-cinema-saint-)
Après les pressions diverses des groupes intolérants pro-israël qui ont conduit à la déprogrammation du film à Versailles, et d'un débat à Ris Orangis, le 16 mars, les menaces et intimidations de leurs nervis racistes (dont le guide spirituel le rabbin Meir Kahane appelait à tuer les Arabes et à former le grand Israël sur toute la Palestine
après en avoir expulsé tous les Palestiniens) ne nous empêcheront pas de continuer à animer sereinement les projections du film à Paris et ailleurs.
Les réalisateurs, Samir Abdallah et Khéridine Mabrouk

Le film Gaza-strophe, réalisé par Samir Abdallah et Khéridine Mabrouk, est en salles depuis le 16 mars. Salué par la critique, et couronné de plusieurs prix internationaux, il a néanmoins été l'objet d'attaques nombreuses des lobbys pro-israéliens. Les projections au cinéma Saint-Michel continuent :
L'Union Juive Française pour la Paix se joint bien évidemment à la protestation et renovuelle son étonement que la LDJ soit toujours impunie*.
*Note: sans oublier le Betar.
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1 avril 2011 5 01 /04 /avril /2011 12:36
non au fn
30 mars 2011
 

Les récentes élections cantonales ont été l’occasion d’une forte montée du FN. Vote de désespoir, fait de rejets, de dégoûts, et qui s’explique avant tout par la terrible fermeture de l’horizon politique, où il y a peut-être une alternance, mais certainement pas d’alternative. Cependant, on ne peut rendre compte des points marqués par le FN par cette seule configuration, qui valait avant les cantonales et vaudra sans doute après. Un changement rapide et récent du positionnement politique de cette formation a contribué à ce succès, une évolution sans doute facilitée par les modifications à la tête du parti, mais qui ne s’y réduit pas.

 

Le programme raciste et xénophobe du FN est bien connu, qu’il s’agisse de la guerre contre l’immigration et les immigrés, de la dénonciation de « l’étranger » ou de la « préférence nationale » (à l’emploi, au logement, aux prestations sociales). S’y ajoute une politique familialiste et « le retour des femmes au foyer », amplifiée par la demande de Marine Le Pen de « cesser de rembourser l’avortement » [1]. Ces tendances lourdes sont toujours présentes (Marine Le Pen demande « un moratoire » sur l’immigration et que les clandestins soient « repoussés » hors des eaux territoriales [2]) et s’il y a bien un glissement récent des énoncés politiques, il a lieu ailleurs.

 

Sous l’égide de Jean-Marie Le Pen, le programme économique du FN était d’inspiration nettement libérale : il fallait « libérer le travail », l’Etat était accusé de « prendre à la gorge » des entreprises victimes des taxes mais surtout soumises à « une législation du travail pesante et empêchant toute souplesse » [3]. Ainsi que le dit Jean-Richard Sulzer, professeur de finance à Dauphine et conseiller économique du Front, « alors que son père était ultralibéral, par réaction au communisme, Marine Le Pen est dirigiste, dans le sens colbertiste du terme. C’est-à-dire qu’elle n’est pas contre un Etat fort » [4]. Ainsi, face à la hausse des prix de l’énergie, elle propose une nationalisation des entreprises « stratégiques » de l’énergie et des transports, voire de certaines banques [5].

 

Rien n’est encore définitivement fixé, l’évolution se fait par à-coups, mais le sens dans lequel elle se fait est clair : l’accent est mis désormais sur l’intervention de l’Etat et sur « le social ». Ainsi, en ce qui concerne les retraites, en-dehors de 40 annuités de cotisation et du développement de régimes de retraite complémentaires par capitalisation, le FN demandait un âge légal de départ à la retraite à 65 ans Lors du grand conflit sur les retraites, ce passage a mystérieusement (et significativement) disparu du programme en ligne [6].

 

Ensuite, dans la présentation faite par Challenge, bien plus récente, la position du FN est énoncée de la façon suivante : 40 années de cotisation pour tous, mais suppression de tout âge légal de départ [7]. Enfin, lors de sa campagne des cantonales, Marine Le Pen a simplement demandé « la retraite à 60 ans » [8], comme les innombrables manifestants l’avaient fait il n’y a pas si longtemps. Du temps de Jean-Marie Le Pen, les 35 heures étaient considérées par le Front comme une source de « désorganisation des entreprises et d’augmentation injustifiée de la masse salariale » [9]. Après son enquête auprès du FN, Jérôme Lefilliâtre affirme le 11/03/2011 sur Challenge.fr « le Front national ne touchera pas à la durée légale du travail » et Jean-Richard Sulzer précise « Nous ne sommes pas opposés aux 35 heures, sauf accord de branche » [10]. Du temps de Jean-Marie Le Pen, il s’agissait surtout de dénigrer l’emploi public.

 

L’Etat, disait le programme du FN, avait été « progressivement paralysé par la masse arthritique des fonctions publiques hypertrophiées, véritables troupeaux de mammouths ». Il fallait abolir les « privilèges » de la fonction publique, et s’il y avait accord pour maintenir les services publics, c’était ceux, « stratégiques », liés à la fonction régalienne et, prioritairement (bien évidemment) la police. Pour le reste, étaient prévus « introduction du principe de mobilité » et « non remplacement d’une partie des départs en retraite » [11]. Pour la campagne des cantonales, ce langage a disparu et Marine Le Pen, s’adressant aux fonctionnaires, promet (selon Le Parisien) « la fin des réductions d’effectifs » ainsi que « des hausses de salaires » [12]. D’ailleurs, l’économiste Nicolas Pavillon, qui travaille également au projet du FN, affirme « nous défendons le retour à l’échelle mobile des salaires », qui est une vieille revendication syndicale.

 

Nous sommes face à une véritable transformation du FN, d’ampleur, qui n’est pas d’ordre conjoncturel, ou seulement liée au changement de direction à la tête de la formation ou encore d’ordre strictement opportuniste, pour « tromper son monde », « faire social ». Il s’agit d’une évolution de fond, par laquelle le FN, loin de prendre ses distances avec l’idéal fasciste, s’en rapproche au contraire et trouve ses véritables bases. N’oublions pas que le parti nazi allemand s’appelait « national-socialiste ». Ramassée en deux mots accolés, nous avons ici l’articulation contradictoire qui forme le fascisme.

 

En effet, le discours fasciste a deux ennemis, et c’est le combat sur ces deux fronts qui en fait l’originalité. D’un côté, l’ennemi c’est le capitaliste, sous la forme du riche, du manipulateur d’argent, du spéculateur ; de l’autre côté, l’ennemi c’est l’autre travailleur, avec qui on est en situation de concurrence directe, pour l’emploi, le salaire, le logement, les allocs, etc. Il est frappant de constater que nous sommes ainsi confrontés aux deux dimensions constitutives du prolétaire : opposé à la bourgeoisie, mais aussi aux autres travailleurs, avec qui il est en situation de concurrence perpétuelle, cette seconde opposition prenant la forme du racisme ou de la xénophobie. Le syndicat ne se fixe-t-il pas comme première mission de constituer un front de classe face au patronat, et, pour cela, de surmonter les divisions qui scindent les rangs ouvriers ? Qui dit surmonter ne désigne-t-il pas des divisions qui ne sont pas effacées, mais seulement dépassées, ne désigne-t-il pas cette tendance permanente, créée et encouragée par le système, à se faire la guerre les uns les autres ?

 

Le public fasciste est celui des « petites gens », qui demandent qu’on les protège, d’un côté des « gros » (et de leurs connivences) et de l’autre, de ceux qui sont encore plus démunis qu’eux et peuvent, de ce fait même, les menacer. N’est-il pas intéressant de relever que c’est sur ces deux dimensions que s’ouvre et se ferme le Manifeste du parti communiste, de Marx et d’Engels ? Il débute par la formule bien connue : « L’histoire de l’humanité jusqu’à nos jours est l’histoire de la lutte des classes », désignant d’entrée de jeu l’ennemi, c’est-à-dire un système d’exploitation et la classe qui en tire profit. Mais le même Manifeste se clôt en nous disant, au contraire, qui n’est pas l’ennemi, en lançant l’appel : « Prolétaires de tous les pays, unissez-vous ! ».

 

Cela explique pourquoi le vote populaire de rejet de la politique suivie en commun par la droite et la gauche auquel nous assistons est un vote d’extrême droite et non d’extrême gauche. En effet, s’il s’agit d’exprimer une radicalisation, une colère, le refus d’une politique au service des riches, pourquoi voter FN plutôt que révolutionnaire ? C’est que le vote FN vise deux ennemis, alors que le vote révolutionnaire appelle à la solidarité des travailleurs de tous pays. Un tel vote révolutionnaire a surtout un sens quand nous sommes dans une phase montante de la lutte des classes, quand les travailleurs ont l’impression qu’on peut « sortir par le haut », en s’y mettant « tous ensemble ». Il perd de son sens, au contraire, quand nous sommes dans un phase de reflux, même temporaire : le grand mouvement sur les retraites s’est quand même terminé sur un échec et le vote FN est un vote de défaite.

 

Ceci étant dit, la montée du FN n’est pas seulement due à une conjoncture qui lui est favorable. Le nouveau programme qu’il a mis en avant a aussi joué son rôle. Tel a été plus particulièrement le cas pour un point de ce programme, qui a eu un très grand impact : le protectionnisme. Le FN demande « l’arrêt du dumping social des pays où la concurrence de la main-d’œuvre ruine des pans entiers de nos industries » et « le rétablissement de nos frontières qui permettrait de réguler ces dumpings sociaux, économiques et environnementaux », en particulier à l’aide de droits de douane élevés [13].

 

Voilà un discours qui demeure en porte-à-faux quand, de façon totalement contradictoire, il se combine avec une orientation libérale, comme c’était le cas de l’ancien programme du FN. Mais voilà un discours qui, au contraire, fait mouche (y compris auprès de militants syndicaux) quand, renonçant à la visée libérale, il se combine avec des propositions en apparence « sociales ». Alors que les programmes de gauche se contentent, soit d’entériner la mondialisation libérale (cas du PS), soit de la dénoncer (mais sans guère faire de propositions), le FN, avec ce thème, donne l’impression d’apporter une solution concrète, à portée de main. « Y a qu’à » fermer les frontières, se protéger de l’extérieur. Dès lors, la lutte contre l’immigration, contre « l’étranger » trouvent leur place, n’apparaissant plus que comme des dimensions d’un programme plus vaste : l’ennemi, c’est ce qui vient du dehors, replions-nous, restons entre nous.

 

Ce discours porte d’autant plus qu’à gauche la question du protectionnisme est pratiquement taboue. Le PS entérine sans discussion le modèle néolibéral actuel ; même la plus grave crise économique depuis celle de 1929 n’a pas suffi à le remettre en cause à ses yeux. A la gauche du PS, la critique du néolibéralisme est radicale, mais la question du protectionnisme est rarement débattue ouvertement en tant que telle. C’est pourquoi quelques mots sur le sujet peuvent être utiles. N’oublions pas que le mouvement altermondialiste a d’abord été désigné comme antimondialiste, et qu’il a fallu toute une bataille pour que, dans les médias, il prenne son véritable nom. Le FN est contre la mondialisation, nous sommes pour une autre mondialisation. Nous sommes contre une mondialisation gouvernée par des forces de marché, pour une mondialisation maîtrisée par les peuples, par le biais de débats et d’une entente politique.

 

Pour autant, nous ne sommes pas dupes. Pouvons-nous construire un système social au service des travailleurs avec une économie ouverte à tous les vents ? Pouvons-nous sauver la protection sociale dans le cadre d’une économie dévastée par la concurrence universelle de tous contre tous ? Ce n’est guère envisageable. C’est pourquoi, dans mon dernier ouvrage (La grande crise du XXIe siècle [14]) j’avais fait la proposition suivante : « Nous devons remettre en cause l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC) et conserver l’option d’un contrôle des flux de capitaux. La politique actuelle de l’émergence (telle que pratiquée, par exemple, par la Chine) installe la guerre féroce de tous contre tous. Il faudrait faire basculer son centre de gravité du « tiré par les exportations » vers un développement autocentré, qui se tournerait vers les immenses besoins non satisfaits des populations concernées.

 

La traduction de ces principes devrait être, dans les rapports avec les pays en voie de développement, des accords commerciaux bi ou multilatéraux fréquemment révisés, des accords qui soumettraient à contrôle et à encadrement les flux commerciaux dans les deux sens. Le pendant du décrochage de la locomotive exportations serait l’instauration d’une véritable aide publique au développement. Il ne s’agit pas simplement de revenir en arrière, en restaurant les anciens volumes de l’aide : il faut faire bien plus et mieux, en insistant sur les projets locaux et la participation des populations concernées, en contrôlant l’utilisation des fonds, en surveillant l’application (souvent inconsidérée) des techniques des pays développés. Evidemment, le préalable à toutes ces mesures c’est faire face aux besoins les plus urgents, et en particulier, abroger la dette des pays pauvres et mettre en pratique la souveraineté alimentaire » [15].

 

On le voit : il ne s’agit pas d’une orientation de repli, d’isolement, mais d’un plan d’ensemble, qui concerne les rapports entre grands blocs dans le monde. Il ne s’agit pas d’agressivité et de rapports de force, mais de mettre la politique au poste de commande, il s’agit de négociations qui placeraient au premier plan l’incontournable vie en commun sur le même globe. Il ne s’agit pas de nationalisme, mais de solidarité, conscients que nous sommes de nos responsabilités envers les plus démunis de la planète. L’Europe devrait être le principal protagoniste d’une telle redistribution des cartes, la tâche étant trop lourde à porter pour un seul pays.

Le thème du protectionnisme n’est que l’un de ceux qui ont été propulsés sur le devant de la scène par la récente montée du FN : la sortie de l’euro, également demandée par le Front, en est un autre, qui fait polémique (je renvoie sur ce point aux très bons articles de Catherine Samary et de Pierre Khalfa). Preuve, s’il en était besoin, de l’urgence qu’il y a à alimenter le débat sur le programme et à fournir à la gauche des propositions pour faire barrage à la nouvelle formule du poison FN.

 

Isaac Johsua


Achevé de rédiger le 30/03/2011.


Notes

[1] Nathalie Schuck, Le Parisien, 16/03/2011.

[2] Nathalie Schuck, Le Parisien, 16/03/2011.

[3] « FN, le pire ennemi des salarié-e-s », brochure de VISA (Vigilance et initiatives syndicales antifascistes), page 14.

[4] Jérôme Lefilliâtre, journaliste à Challenge.fr, 11/03/2011.

[5] Nathalie Schuck, Le Parisien, 16/03/2011.

[6] « FN, le pire ennemi des salarié-e-s », op. cité, page 7, 24.

[7] Jérôme Lefilliâtre, journaliste à Challenge.fr, 11/03/2011.

[8] Nathalie Schuck, Le Parisien, 16/03/2011.

[9] « FN, le pire ennemi des salarié-e-s », op. cité, page 14.

[10] « FN, le pire ennemi des salarié-e-s », op. cité, page 14.

[11] « FN, le pire ennemi des salarié-e-s », op. cité, pages 15, 16.

[12] Nathalie Schuck, op. cité.

[13] « FN, le pire ennemi des salarié-e-s », op. cité, pages 11, 13.

[14] La grande crise du XXIe siècle. Une analyse marxiste, La Découverte, 2009.

[15] Ibid, pages 128, 129.

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31 mars 2011 4 31 /03 /mars /2011 13:33

Marie Gueye, élue dimanche conseillère générale de Recouvrance, a été victime de propos racistes sur Internet.

Le Parti socialiste finistérien, Marie Gueye, conseillère générale de Recouvrance, et son remplaçant, Jacques Quillien, ont porté plainte, hier, pour injures raciales et incitation à la haine raciale, contre le site extrémiste breton « breizhatao ».Sous le pseudonyme de Merour, un des piliers du site s'en est pris aux socialistes du Finistère au lendemain du premier tour des élections cantonales, les traitant de « souilleurs de notre peuple » pour avoir soutenu la candidature d'une femme noire. Jacques Quillien, qualifié de « traître à sa race », est clairement menacé.
« Avec cette plainte, nous voulons que les auteurs de ces propos soient identifiés et poursuivis », explique Me Rustique, l'avocat brestois des plaignants. La tâche d'identification sera compliquée par le fait que le site est hébergé aux États-Unis, à Houston précisément. Un choix pas innocent, car les extrémistes de tous poils sont protégés par la Constitution américaine qui garantit une liberté d'expression totale. En France, l'incitation à la haine raciale est punie de 5 ans d'emprisonnement et de 45 000 € d'amende.

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À l'évidence, les auteurs des propos haineux demeurent dans la région et suivent pas à pas l'actualité. Ainsi, ce même site s'en était pris récemment au champion de Bretagne des sonneurs, le Quimpérois Yannick Martin, pour sa couleur de peau.« Ces personnalités sont sûrement plus bretonnes que les racistes de « breizatao » car porteuses des valeurs de partage, de tolérance et d'ouverture qui sont les vraies valeurs de la Bretagne », réagit l'Union démocratique bretonne en soutien à Marie Gueye. Même soutien de la part des élus de l'Autre Gauche Brest Nouvelle Citoyenneté.

Yannick GUÉRIN 

 



Extraits de cette saloperie raciste, antisémite et xénophobe :

"BREIZATAO – BREST (21/03/2011) L’état de décomposition de la région Bretagne sous férule franco-socialiste était éclatante hier avec la candidature d’une africaine. Le pourrissement de notre pays avait été encouragé par le traître à sa race Jacques Quillien, socialiste, se félicitant de ce qu’une allogène venu d’Afrique représente notre peuple.

Le cadavre ambulant qu’est la France, rongé par le virus du cosmopolitisme israélo-jacobin, menace dans sa substance le peuple Breton. Plus que jamais, la résistance à la peste franco-socialiste s’impose. Et à la fin: ILS REPARTIRONT TOUS et les TRAÎTRES PAIERONT."
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26 mars 2011 6 26 /03 /mars /2011 11:15

 



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25 mars 2011 5 25 /03 /mars /2011 09:29

Par Eros Sana, Rino Della Negra (24 mars 2011)


Pour ceux qui l’ignoreraient encore, l’humoriste et militant Dieudonné est un fervent supporter de l’extrême droite. Sa récente interview dans le journal Rivarol, le 11 mars dernier, permet de mieux cerner les contradictions d’un personnage toujours prêt à défendre la liberté d’expression de ses amis... et oubliant, qu’en France, antisémitisme, négationnisme et racisme ordinaire sont punis par la loi.

 

« Tartuffe : Personnage de théâtre faux dévot, hypocrite et profiteur. »


Dieudonné était interviewé le 11 mars dans Rivarol [1], hebdomadaire d’extrême droite fondé en 1951. Ce journal est issu du courant d’extrême droite « de la contre-révolution » et se revendique du pétainisme. Il s’est illustré à sa création par des campagnes de défense des collaborationnistes condamnés à la Libération. Dieudonné tente de nous faire croire depuis quelques années que lui et ses amis – dont un nombre conséquent de racistes et de fachos – n’ont pour seuls ennemis que les « sionistes ». Dieudonné, le patron du Théâtre de la Main d’Or, est devenu l’allié et l’ami de ceux qui luttent contre « le lobby » (sioniste), quitte à oublier les déclarations et les actes racistes que ses « amis » ont perpétré à l’encontre des Noirs et des Arabes.

 

Le journal dans lequel il est interviewé a été condamné par la justice en 1993 pour avoir, entre autre, comparé les Maliens vivant en France à un cancer. Ce cancer aurait été infligé par les « lobbys » qui ont la France sous leur botte ; mais, bon pour les personnes qui orbitent autour de ce journal, les Maliens, ça reste un cancer quand même. La directrice d’alors, Marie-Luce Wacquez, a été jugée coupable le 8 mars 1994 pour la publication d’une caricature raciste réalisée par Chard à l’encontre de la communauté noire. Elle n’est plus en charge du journal, mais son successeur Jérôme Bourbon revendique fièrement son héritage politique dans des émissions de radios et articles [2]. Ces informations n’ont rien de confidentiel et Dieudonné ne peut les ignorer. Tout comme il ne peut ignorer les dessins racistes de Chard, l’illustratrice du journal, qui feraient presque passer Tintin au Congo pour une œuvre de critique de la colonisation [3].

 

Les amis négationnistes de Dieudonné


Dieudonné a toujours déclaré ne pas s’intéresser au « révisionnisme historique », terme employé pour escamoter le mot « négationnisme ». Dans l’interview, il reconnaît pourtant être devenu un proche de Robert Faurisson. Son « copain Robert » comme il l’appelle. Ce « copain » lui aurait ouvert les yeux sur la « fausseté » des crimes contre l’humanité des manuels édités par Fernand Nathan (donc, à ses yeux, par des Juifs) et lui a fait découvrir de nouvelles perspectives sur l’histoire. Il y a quelques années, Dieudonné disait ne rien partager avec Faurisson. Il voulait simplement défendre la « liberté d’expression » et la performance artistique du « professeur ». Aux yeux de Dieudonné, « l’infréquentable Robert » est un personnage de théâtre. Dieudonné affirmait même être choqué de la négation, par ce dernier, du rôle de l’île de Gorée dans le commerce des esclaves [4]. Aujourd’hui, c’est « Touche pas à mon pote Robert », alors que celui-ci continue à tout faire pour relativiser les massacres perpétrés par les Européens.

 

Une vision historique partagée par Monseigneur Williamson, évêque catholique traditionaliste excommunié par Jean Paul II en raison de ses déclarations antisémites et négationnistes. Dieudonné parle de la valeur et du courage de cet homme d’Église qui lutte contre « le lobby » et la police de la pensée. Le « christique Williamson », exemple de résistance pour Dieudonné, déclarait le 2 avril 2000 que les Blancs avaient de droit divin la supériorité sur les Noirs et pouvaient piller leurs terres avec la bénédiction du Bon Dieu. Dieudonné, désormais expert autoproclamé dans la parole de Jésus et la connaissance des saintes Écritures, appréciera l’interprétation de la Bible de Williamson : « Depuis Noé, les fils de Japhet sont destinés, à de amples exceptions près, à commander aux fils de Cham et à occuper les tentes des fils de Sem. » Les Blancs étant les descendants de Japhet, les Noirs ceux de Cham et les Arabes et les Juifs ceux de Sem. C’est dans l’ordre naturel, même s’il y a des exceptions dont Dieudonné doit faire partie [5] Pour les autres, ils seront sans doute assimilés à un « cancer » dont il faut s’occuper.

Dieudonné se déclare également solidaire de Vincent Reynouard qu’il présente comme un père de famille nombreuse emprisonné pour ses idées. Vincent Reynouard est un négationniste qui œuvre à redorer la svastika du Troisième Reich : Hitler était un philanthrope et l’occupation allemande dans les années 1940, c’était du tourisme. Pas de massacre à Oradour-sur-Glane, pas de déportations... Tout ça, ce sont des mensonges du « lobby » qui embête le copain Robert, les grands hommes d’Église et les comédiens talentueux.

 

Dieudonné loue le courage de Bruno Gollnish


Vincent Reynouard est un ancien membre du Parti nationaliste français et européen (PNFE), un groupuscule néonazi dont la devise était « France d’abord ! Blanche toujours ! ». Le fait d’arme glorieux des camarades de Vincent Reynouard est d’avoir plastiqué un foyer de travailleurs immigrés Sonacotra en décembre 1988. Une seule personne sera condamnée à 18 ans de prison, d’autres bénéficieront d’un non-lieu. Des pièces du dossier se sont opportunément égarées grâce au zèle de curieux syndicalistes policiers, liés au PNFE. L’attentat a fait un mort et 12 blessés, facilement oubliés par Dieudonné.

Si pour les proches de Dieudonné, l’Île de Gorée n’existe plus et la Shoah est inventée par Fernand Nathan, des crimes comme l’attentat meurtrier contre le foyer Sonacotra ou la mort de Brahim Bouarram et d’Ibrahim Ali (assassinés en 1995) ne méritent pas d’être pris en considération. Les crimes racistes commis par les nervis du FN – et légitimés par les idées diffusées par les groupuscules d’extrême droite – sont aussi oubliés.

Dieudonné déplore le virage islamophobe de Marine Le Pen, et loue le courage de Bruno Gollnisch, qui était soutenu par Rivarol pour la succession de Jean-Marie Le Pen à la tête du FN. Lui aussi affronte le « lobby », et c’est tout ce qui compte. Les déclarations de Gollnisch sur le fait qu’il ne doit pas y avoir une mosquée de plus construite en France sont aussi « révisées », effacées.

 

Le Front national est généreux avec ses serviteurs


Un des principaux soutiens de Bruno Gollnisch est Yvan Benedetti, élu Front National à la mairie de Vénissieux. La pensée de celui-ci est synthétisée dans l’éditorial du journal « Droite Ligne » : « S’ils nous disent que toute l’Arabie est une mosquée sur laquelle ne peut se laisser construire aucune église, nous leur répondons que toute la France est une cathédrale sur laquelle on ne peut laisser construire la moindre mosquée ». Quand Dieudonné va au tribunal, c’est toujours pour soutenir une personne qui a dit du mal des Juifs ou qui a soutenu les négationnistes et leurs propos. C’est désormais son unique combat. Bien qu’il passe son temps à affirmer l’inverse, il ne défend plus les petites gens, il ne défend plus les classes populaires.

 

Il y a 15 jours a débuté le procès des victimes de l’incendie du boulevard Auriol. 17 morts, dont 14 enfants, ont péri dans la nuit du 26 octobre 2005. L’enquête n’a pas pu donner de réponse, alors que certains indices indiqueraient que l’origine de l’incendie serait criminelle. Dieudonné avait soutenu les familles au début. Et là, plus personne : ses nouveaux amis n’aiment pas plus les Noirs et les Arabes, que les Juifs. On ne rompt pas avec ses sponsors. Le racisme, ça rapporte. Et le Front National sait se montrer généreux avec ses serviteurs [6]

 

Jean-Marie Le Pen pour parrain


On ne rompt pas non plus avec sa famille. Le comédien n’a jamais reconnu que le baptême de sa fille a été célébré par un prêtre intégriste. Il a toujours nié que le parrain de sa cadette était Jean-Marie Le Pen. Ses soutiens, par le biais du site « La Banlieue s’exprime », ont expliqué qu’il s’agissait de malveillance de la part des médias « sionistes » comme Rue 89, avides de médire sur « l’artiste ». Sur scène, Dieudonné a expliqué qu’il s’agissait d’un coup de bluff. Il l’a aussi nié face à ceux qui s’inquiétaient de cette proximité avec Le Pen. Dans l’interview donnée à Rivarol, Dieudonné finit par avouer que ce parrainage et ce baptême ont bien eu lieu et qu’ils ont une dimension politique et spirituelle « de lutte contre le sionisme » dans le cadre d’un front uni… Il scelle ainsi sa fidélité en confiant la responsabilité spirituelle de sa fille à Jean-Marie Le Pen.

 

En lisant l’hebdomadaire Rivarol, on comprend que pour les lecteurs de ce journal, les morts du boulevard Vincent-Auriol ne sont pas les victimes d’une tragédie sur fond de spéculation immobilière, mais 17 Noirs en moins sur le sol de la France blanche.

 

Eros Sana et Rino Della Negra

Notes

[1] n°2990 du 11/3/2011. Article mis en ligne sur le site medialibre dirigé et géré par Marc George, militant du Front National et partisan de Bruno Gollnisch, proche de Dieudonné depuis 2005 : http://www.medialibre.eu/6395/dieud...

[2] Notamment dans cette émission de « Méridien Zéro » animée par l’équipe du « Mouvement d’Action Sociale » : http://meridienzero.hautetfort.com/...

[3] Françoise Pichard dite Chard, ses illustrations pour les journaux d’extrême droite « Rivarol » et « Présent »sont en ligne sur ce site : http://dessinsdechard.free.fr/

[4] Une parfaite démonstration de cette « distance » avec les théories de Faurisson : http://www.dailymotion.com/video/x9...

[5] Dans cette émission de feu Serge de Beketch (raciste revendiqué), il ne dit mot et consent lorsque son hôte radiophonique parle d’inégalité des races de manière polie mais claire (aux alentours de la 10e minute) : http://www.youtube.com/watch?v=ksqN.... Il y aurait des races « aptes » et « inaptes » à certaines choses, reste à savoir lesquelles !!

[6] Une prestation généreuse de 60 000 euros pour avoir mis à disposition le Théâtre de la Main d’Or lors de la dernière campagne présidentielle. Le FN confirme et Dieudonné reste évasif.

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