André Menesguen du NPA et Annick Burbaud sa suppléante, sur la 6è circonscription.
Dans la 6e circonscription du Finistère, qui va de Carhaix à la presqu’île de Crozon en passant par Châteaulin, siège du groupe Doux, les
difficultés financières du volailler, placé en redressement judiciaire vendredi, ne devraient pas trop bousculer les rapports de force entre droite et gauche.
Avec 59,26% des voix au second tour de la présidentielle, cette dernière a bon espoir de gagner la bataille. L’avenir du géant de la volaille, qui représente 2
700 emplois dans l’Ouest, n’en a pas moins éclipsé les autres sujets. A l’image de la une du Télégramme qui circulait samedi dans les allées du marché de Carhaix : «Groupe Doux : et
maintenant ?»
C’est la question que tout le monde se pose.
«C’est un traumatisme énorme, on sent beaucoup d’émotion», souligne Matthieu Guillemot, porte-parole du candidat du NPA ( André Menesguen: note du Blog) ,
tout en distribuant ses tracts et en réclamant «la restitution des subventions».
Pour lui, «ça va être l’occasion de voir s’il y a une différence entre gestion de droite et gestion de gauche». Jean-Pierre Jeudy, ancien maire communiste
de la ville et aujourd’hui militant du Front de gauche, s’interroge de son côté sur les raisons d’une telle déconfiture. «Maintenant, il va falloir se demander comment on en est arrivé
là», observe-t-il, pointant des «délocalisations au Brésil» sur lesquelles Doux a «tout misé».
Derrière son comptoir d’œufs, Philippe, 49 ans, ancien routier reconverti dans l’élevage et l’abattage de volailles bio, a son idée : «Il y a eu un gros
problème de gestion, estime-t-il. On a confondu chiffre d’affaires et bénéfices. Mais si Doux ferme, ça va faire de gros dégâts, dans les usines, mais aussi chez tous ceux qui
travaillent pour eux, les éleveurs, les fabricants d’aliments… Tout va se casser la figure.»
Le sujet est sensible à Carhaix.
La circonscription est située entre Châteaulin, où l’usine Doux emploie 700 personnes, et Plouray, où un site d’abattage du groupe compte 130 salariés.
L’élevage de volailles y a longtemps été l’une des principales ressources. «C’est ici, dans les années 50, qu’est née l’aviculture française, rappelle Christian Troadec, maire de
Carhaix et candidat divers gauche aux législatives.
Il y avait partout des petits poulaillers où les industriels venaient s’approvisionner. C’est une sacrée page qui se tourne.» Venu serrer des mains entre un
stand de charcuterie et les étals de fruits et légumes, l’édile était vendredi à Châteaulin, où il a rencontré les employés, «inquiets pour leurs salaires», et la direction.
«Quand je me suis trouvé dans le grand bureau de Briec Bounoure [un des dirigeants historiques de Doux, ndlr], en face de quelqu’un qui voit tout
s’écrouler, ça fiche un drôle de sentiment», raconte-t-il. Mais le concurrent direct de Richard Ferrand, le candidat PS, n’a pas été surpris par les déboires du volailler.
«Il y avait des problèmes de règlement des éleveurs depuis plusieurs années. Et, ces derniers temps, des ruptures d’approvisionnement des élevages en
aliments, indique-t-il. Tout le monde savait que c’était fragile et il aurait fallu les aider au moment opportun.»
Sur le marché de Carhaix, certains voient aussi dans la sortie de route du volailler «la fin d’un système
productiviste» à bout de souffle.
«Il faut arrêter de tuer les sols et de prendre les animaux pour des machines, lance Caroline, productrice de fromages. Quand on entre dans un
poulailler, mieux vaut ne pas regarder au fond, ça donne le mal de mer ! Espérons que le gouvernement mettra en place des choses pour produire différemment, plus propre et en équilibre avec la
nature.»
Samedi, Marie-Anne Haas, chef d’entreprise et candidate du Front national, était aussi dans les allées du marché de Carhaix. Avec un seul message concernant Doux :
«On peut sauver l’outil, mais il y aura des licenciements.»
http://www.liberation.fr/politiques/2012/06/03/hauts-fourneaux-et-basses-cours-s-invitent-dans-la-campagne_823390