25 juin 2010 - Le Télégramme
Alors que la France était sous la menace d'une amende de plus de 28 millions d'euros par la Cour de justice européenne en
raison de dépassements du taux de nitrates dans 37 captages d'eau potable, la Commission européenne a décidé, hier, de classer le dossier.
La Commission européenne a clôturé, hier, une procédure d'infraction contre la France au sujet de la pollution des sources d'eau
potable par les nitrates en Bretagne, en saluant les efforts faits pour remédier à la situation. L'exécutif européen, garant du respect des traités de l'Union européenne (UE), «a accueilli
favorablement les mesures prises par la France pour se conformer à ses obligations en vertu des règles de l'UE», souligne-t-il dans un communiqué.
«La France a mis en oeuvre son plan d'action et s'est ainsi en grande partie conformée à la réglementation», a ajouté la commission. Il s'agit d'un vieux
contentieux entre Paris et Bruxelles. La France a été régulièrement épinglée ces dernières années pour ne pas respecter les lois européennes concernant la qualité des eaux destinées à la
production d'eau alimentaire.
La France condamnée en 2001
Elle avait été, notamment, condamnée par la Cour de justice européenne, en 2001, pour violation des règles européennes dans ce domaine. Paris a donc été un temps sous la menace d'une amende de
plus de 28millions d'euros, assortie d'astreintes journalières de 118.000 €, pour la pollution par les nitrates en Bretagne. Cette amende a toutefois été suspendue en 2007 après que la France eut
adopté un plan d'action pour garantir le respect des limites de concentration en nitrates.
La commission a indiqué qu'elle continuerait malgré tout de veiller au respect de la réglementation, notamment en Bretagne. La norme européenne de qualité de l'eau
est fixée à 50mg/l de nitrates. Fin 2009, grâce aux efforts français, seules trois sources d'eau potable présentaient encore des concentrations de nitrates légèrement supérieures à 50mg/l, a
relevé la commission. Et, d'après les données relatives aux concentrations de nitrates couvrant la période janvier-avril2010, ces trois points de captage sont désormais pleinement conformes.
«Le problème n'est pas résolu»
«Il s'agit d'une bonne nouvelle pour les contribuables qui n'auront pas à payer l'amende, mais il ne faudrait surtout pas qu'elle dispense la Bretagne de poursuivre ses efforts» d'amélioration de
la qualité des eaux, a déclaré le délégué général d'Eau et Rivières de Bretagne, Gilles Huet. Mais cette association de référence relève que dans 18 de ces 37 captages, la question de la
pollution a été résolue par une fermeture pure et simple des sites. «On a ainsi fait sortir des captages du contentieux sans résoudre le problème fondamental de la qualité de l'eau», a regretté
Gilles Huet. Pour les autres captages, «on constate globalement une légère diminution des taux de nitrates, mais toujours à un niveau élevé», a-t-il souligné. Par ailleurs, relève Eau et Rivières
de Bretagne, le seuil des 50mg/l «reste très supérieur à celui exigé par la lutte contre les algues vertes, soit 5 à 10mg/l».
Finistère : encore des progrès à faire
La mission interservices de l'eau (Mise) a rendu public son cahier annuel. Il offre une radiographie de la qualité des eaux douces et littorales. Les concentrations moyennes en nitrates
poursuivent leur diminution. La directive-cadre européenne sur l'eau force la France à atteindre un bon état des eaux en2015.
«Cet objectif est réalisable si une évolution constante des comportements se poursuit», estime le préfet Pascal Mailhos. Le Finistère doit notamment, selon lui,
«contribuer à promouvoir une fertilisation raisonnée à l'échelle de chacun des bassins-versants concernés par le plan de lutte contre la prolifération des algues vertes». Ce plan prévoit cette
année une enveloppe de 700.000 € de soutien pour les communes du Finistère et des Côtes-d'Armor. L'an passé, 28 communes finistériennes avaient procédé au ramassage de 41.000m³ d'algues vertes.
Actuellement, 28.000t d'ulves peuvent être traitées, et 11.000 autres épandues dans le département. Alors que les volumes pourraient enfler avec l'obligation légale de ramassage, Pascal Mailhos
espère, pour 2011, révéler où seront implantés des centres de traitement des algues ramassées. Ils seront financés à 80% par l'État.
Sur le front des nitrates,
grands responsables de la prolifération des algues vertes, la baisse de la concentration maximale et moyenne dans les eaux de surface se poursuit. Des dépassements de la concentration maximale
admissible (50mg/l) sont toujours observés sur l'Horn, l'Aber Wrac'h et le Kermorvan. Quant aux eaux souterraines, la diminution continue aussi(32,7mg/l en 2006; 31,9mg/l en 2007; 31,7mg/l en
2008 et 30,9mg/l en 2009). «Restent deux zones délicates, le Léon et le Cap-Sizun, où les résultats sont moins bons, même si l'amélioration est notable», commente Pascal Mailhos.
Au tour des pesticides:
dans les eaux brutes (de surface), un seul dépassement a été constaté, sur l'Aber Wrac'h. Sur 91 captages d'eau souterraine contrôlés, la molécule la plus fréquemment rencontrée reste néanmoins
la déséthylatrazine, composant de l'atrazine, interdite depuis septembre2003. Dans les eaux traitées, des «légers» dépassements de pesticide (au seuil de 0,1 microgramme/l) ont été enregistrés
dans sept communes (une partie de Quimper, de Leuhan, Trégourez, Plouvien, Kernoues, Le Folgoët, Lesneven).
La qualité biologique de l'eau distribuée
est conforme dans 99,3% des 2.700 prélèvements. Pour la teneur en nitrates, dont la limite est de 50mg/l, des dépassements ponctuels ont été mesurés dans sept communes (Beuzec-Cap-Sizun, Elliant,
Saint-Thurien, Kernilis, Loc-Brévalaire, Lanarvily).
Périmètres de protection des captages.
Pour le 31décembre, tous les captages souterrains devront être protégés. Actuellement, 145 des 189 périmètres de protection sont instaurés. «On va s'efforcer de tenir les délais», continue le
préfet. À noter que la teneur en nitrates diminue quasiment deux fois plus vite dans ces captages protégés.
La Mission interservices de l'eau est composée des services de l'État oeuvrant dans le domaine de l'eau (Ddass, DDEA, DDSV...).