
1 septembre 2009 Le Télégramme
En vue des régionales, le Parti breton invite l'UDB (Union démocratique bretonne) à faire alliance et à renoncer à ses accords
avec les «partis hexagonaux». L'UDB refuse catégoriquement.
Porte-parole du Parti breton et élu municipal à Redon, Émile Granville, affirme que «les partis français présents en Bretagne ne répondront jamais à la nécessité
d'avoir un point de vue politique totalement libéré du centralisme parisien». Aussi, dans une lettre ouverte, s'attache-t-il à démontrer qu'entre le Parti breton et l'Union démocratique bretonne
(UDB), il y a tant de «points de convergence» qu'il semble logique qu'ils passent un accord en vue de «constituer une force bretonne démocratique ouverte et réformatrice» capable de compter aux
régionales de 2010.
«Nous devons nous rassembler»
Émile Granville écrit: «La société nouvelle que nous voulons en Bretagne - conviviale, dynamique, équitable, durable - fait que nous devons nous rassembler...». Porte-parole de l'UDB et élue
régionale, Mona Bras n'est pas du tout d'accord. «Le Parti breton a besoin d'exister et il est tout à fait légitime, au nom de la démocratie, que l'offre politique soit diversifiée en Bretagne.
Elle va de l'extrême droite avec Emsav (Adsav, en réalité, concurrencé ou remplacé par les "identitaires" note du blog), à l'extrême gauche avec Emgann. Depuis 45ans, l'UDB est un parti de
gauche. Quant à la droite bretonne, dont le Parti breton, elle a bien du mal à émerger. De toute façon, on le voit sur la cartographie de la Bretagne à cinq départements, quelles que soient les
élections, la Bretagne est un bastion de gauche».
«Pas d'alliance contre nature»
Quand le Parti breton lui reproche ses alliances avec les Verts ou le PS, Mona Bras rappelle que pour obtenir des élus municipaux - dont son porte-parole - «le Parti breton a passé des accords
électoraux avec les partis hexagonaux de droite». Quand Émile Granville parle de développement durable, Mona Bras lui répond: «Quel parti n'a pas son petit programme de développement durable
aujourd'hui? En revanche, il y a un développement durable de gauche et un développement durable de droite. Dans le Grenelle de l'environnement, on place le nucléaire dans les énergies
renouvelables!». Conclusion: «Pas question d'une alliance contre-nature», commente Mona Bras.
Commentaire:
L'Udb a bien raison de rappeler que les élus du Parti breton le sont sur des listes de la bonne vieille droite. C'est celle-là même qui favorise l'agriculture
productiviste polluante, qui ferme les services publics, qui fait fermer hôpitaux ou services d'urgence et classes maternelles... Quelle contradiction pour ces "bretons éclairés" de venir ensuite
voir les "bretons de base" qui luttent contre ces fermetures. D'ailleurs on ne les voit pas trop...
Mais l''Udb ne devrait pas être si surprise de cette "drague" de la part d'un parti ouvertement "nationaliste".
Précisions: le nationalisme n'est pas une maladie honteuse, c'est la volonté pour un peuple colonisé de se constituer en "nation" avec son propre état. Exemple : le
peuple palestinien et avant les peuples irlandais, indochinois, algérien...
Or il se trouve que nous nous trouvons dans un pays dont les élites (celles de gauche y compris) prétendent avoir réglé ce problème et pensent que l'évoquer relève
de la maladie mentale: les "malades" sont basques, bretons, corses, kanaques, antillais.
Pour éviter ce rejet du "nationalisme" l'UDB a créé un concept: "l'autonomisme". Etre "autonomiste" protège de la répulsion envers ceux soupçonné d'être
"nationalistes", connoté "extrême droite", "héritier des collabos". Avant guerre "autonomiste" signifiait carrément "sécessionistes".
Autonomiste à la création de l'UDB, c'était aussi moins ringard que "régionaliste" qui renvoie à l'ancien "Emsav" du 19è siècle, formé de gens réactionnaires,
royalistes, cathos intégristes, folkloristes et folkloriques. L'un d'entre eux siégeait en "bragoù braz" lors du Front Populaire selon Charles Tillon!
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Tentative d'analyse:
Assisteraît-t-on à une "modernisation" des références de l'UDB, par une sorte d'adaptation au sein des partis nationalistes modérés européens?
Le parti socialiste et les Verts se sont faits au fil des ans (sans que l'Udb ne s'en rende compte?) les meilleurs défenseurs des revendications "bretonnes", sur la
langue en particulier, que cela soit au conseil régional que dans les municipalités.
On peut même dire que le PS a pris la tête laissée vacante du régionalisme en Bretagne, même si les Verts conservent une grande sympathie dans le mouvement
culturel. La droite ( une partie de l'UMP, Modem et Parti breton) n'a fait que suivre. Et tiens, au fait, que
devient le POBL de Yann Fouere? Le gros de l'UMP, reste encore franchement "jacobine"! L'UMP est plus Chiraquienne que pro Sarko en Bretagne, est-ce la raison?
Les associations "bretonnes" ont plus de subventions sonnantes et trébuchantes à espérer du côté de la gauche "française" (et même de la droite) que de soutiens
sans frais du côté de l'Udb.
L'assertion que "seule l'autonomie" sauvera la langue bretonne, ne tient pas longtemps face à l'avalanche de subventions qui irrigue un petit secteur économique
vivant d'argent institutionnel.
La conséquence, en est que l'espace politique de l'UDB (et du Parti breton, et d'Emgann ) se rétrécit, si les partis "français" font plus et mieux qu'eux. Simple
marketing!
Cela pousse les nouveaux militants, qui (heureusement pour eux!) n'ont pas connu le fort ostracisme populaire "anti breton" des années 60 et 70 à assumer le
nationalisme. Comme à Emgann, le mot "nationaliste" n'est plus "tabou".
Le journal en ligne "Vieiros" de Galice a publié une interview du responsable UDB jeune qui déclare franchement que les
esprits évoluent et que l'UDB évolue au sein des autres partis "nationalistes". Et comment le cacher, quand on milite au Parlement Européen au sein du groupe associé aux Verts, des partis
"nationalistes" de droite (modérée) comme de gauche, catalans, basques, gallois, flamands, galiciens...
Précisons, ce nationalisme des régions "minoritaires", n'est pas une "tare", c'est une option politique, qui est globalement démocratique, associée aux écolos, en
Europe de l'Ouest (à part la Ligue du Nord italienne, les flamands extrémistes...). Question qui pourtant reste taboue en France.
C'est une simple clarification de vocabulaire, qui a du attirer l'attention du Parti breton.
Pour le NPA, le problème n'est pas le soutien à des revendications de plus en plus "bretonnes" de la part de l'UDB, nous soutenons d'ailleurs souvent les mêmes.
C'est l'orientation de plus en plus "social-libérale" de l'UDB, le vote "Oui" à la constitution libérale en 2005, la gestion avec le PS et les Verts, qui ne sont pas des partis "français" mais
des défenseurs de l'Europe libérale, des solutions de déréglementation libérales.