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2 avril 2010 5 02 /04 /avril /2010 10:19

par Serge Halimi

Les Français sont vraisemblablement plus nombreux à connaître le nombre de minarets en Suisse (quatre) et de « burqas » en France (trois cent soixante-sept (1)) qu’à savoir que le Trésor public a perdu 20 milliards d’euros à la suite d’une décision « technique » de l’exécutif.

Il y a dix-huit mois en effet, au lieu de subordonner son sauvetage des banques en perdition à une prise de participation dans leur capital, laquelle ensuite aurait pu être revendue avec un joli bénéfice, le gouvernement français a préféré leur consentir un prêt à des conditions inespérées… pour elles.

 

Vingt milliards d’euros de gagnés pour leurs actionnaires, c’est presque autant que le déficit de la Sécurité sociale l’an dernier (22 milliards d’euros). Et quarante fois le montant de l’économie annuelle réalisée par l’Etat lorsqu’il ne remplace qu’un fonctionnaire partant à la retraite sur deux.


Le rétablissement électoral du Front national, et plus généralement de l’extrême droite en Europe, n’est pas tout à fait étranger à cette distribution de l’attention publique entre la poutre des polémiques subalternes qu’on enflamme et la paille des sujets prioritaires dont on prétend qu’ils sont trop compliqués pour le commun des mortels. Le fiasco des élections régionales derrière lui, M. Nicolas Sarkozy va s’attaquer à la « réforme des retraites ». L’enjeu social et financier étant considérable, on sait déjà que le gouvernement français s’emploiera à distraire la galerie en relançant le « débat sur la burqa ».


Riposter à cette manœuvre n’impose certainement pas de s’enfoncer sur son terrain boueux en donnant le sentiment de défendre un symbole obscurantiste. Encore moins de taxer de racisme les féministes — hommes et femmes — qui légitimement le réprouvent. Mais comment ne pas juger cocasse qu’une droite qui a presque partout associé son destin à celui des Eglises, du patriarcat et de l’ordre moral se découvre soudain éperdue de laïcité, de féminisme, de libre-pensée ? Pour elle aussi, l’islam accomplit des miracles !


En 1988, M. George H. W. Bush succéda à Ronald Reagan après une campagne d’une démagogie insigne, au cours de laquelle il réclama que soit criminalisé le fait de brûler la bannière étoilée — un acte commis entre une et sept fois par an…

 

Avec le courage qu’on imagine, plus de 90 % des parlementaires américains adoptèrent une disposition répressive allant en ce sens — laquelle fut annulée par la Cour suprême.

 

Au même moment éclatait l’un des plus grands scandales de l’histoire économique des Etats-Unis, celui des caisses d’épargne déréglementées par le Congrès, que des aigrefins avaient pillées, enhardis par des sénateurs dont ils avaient financé les campagnes. En 1988, nul ou presque n’avait évoqué le péril d’une telle arnaque, bien qu’il fût déjà connu. Trop compliqué, et puis la défense du drapeau occupait les esprits.


Le contribuable américain a payé 500 milliards de dollars le scandale des caisses d’épargne. On découvrira bientôt ce que cache réellement la « burqa ». Et combien cela coûte.

 

http://www.monde-diplomatique.fr


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1 avril 2010 4 01 /04 /avril /2010 10:01

Par LCR le Mercredi, 31 Mars 2010 PDF Imprimer Envoyer

 

 

La Ligue Communiste Révolutionnaire (LCR) dénonce énergiquement le vote intervenu sans réel débat en Commission de l'Intérieur de la Chambre, concernant l'interdiction du niqab et de la burqa dans l'espace public.


Des arrêtés communaux interdisent déjà de se dissimuler le visage dans les lieux publics, sauf en période de carnaval. Le vote intervenu mercredi matin n'est en réalité qu'une pitoyable gesticulation islamophobe, sexiste et liberticide qui s'attaque à un phénomène marginal.


La LCR attire l'attention des organisations syndicales, de défense des droits humains et des libertés démocratiques: si cette loi passe la rampe, elle ira gonfler les dispositifs liberticides et antidémocratiques déjà en place.

Selon le projet de loi adopté, toute personne ayant «le visage masqué ou dissimulé en tout ou en partie, de manière telle qu'elle ne soit pas identifiable» dans l'espace public sera passible d'une amende de 15 à 25 euros et/ou d'un emprisonnement d'un à sept jours.


Ainsi, un manifestant ou un gréviste qui, à l'occasion d'un rassemblement public ou d'un piquet de grève, se masque partiellement le visage pour éviter la répression patronale ou policière pourra parfaitement être poursuivi. C'est sur base de ce type d'interdiction légale que les autorités danoises ont arrêtés ou bloqués pendant des heures des manifestants pacifistes lors du contre-sommet de Copenhague en décembre dernier.


Tout comme les projets d'interdiction du port du foulard à l'école, cette loi ne sert fondamentalement qu'à faire diversion par rapport aux véritables problèmes que sont la dégradation de l'emploi, du logement, de la santé, de l'éducation et des transports publics en cette période de crise capitaliste.


La LCR tire la sonnette d'alarme: en instrumentalisant et en dévoyant la laïcité et la lutte contre l'oppression des femmes comme le fait cette loi, c'est le racisme et le sexisme qui sont en train de marquer des points inquiétants dans la société.


Cette loi qui prétend défendre la dignité des femmes va tout simplement interdire aux femmes concernées de circuler librement dans la rue, au risque de les enfermer dans leur maison.


Comble de l'hypocrisie, elle est votée par des partis au pouvoir qui bafouent quotidiennement les droits des femmes en démantelant les services publics, en réduisant les budgets sociaux, aux associations féministes ou en développant la précarité.


S'il y a urgence à défendre la laïcité et les droits des femmes, pourquoi ne pas interdire les rassemblements publics contre le droit à l'avortement, comme celui auquel participait Monseigneur Léonard dimanche dernier? Or, dans ce cas là, aucun de nos «ayatollahs» pseudos-laïcs ne s'est précipité pour légiférer. Deux poids, deux mesures?


La LCR est scandalisée de voir les partis traditionnels MR, CDH, PS et y compris Ecolo, stigmatiser une communauté et tomber ainsi dans le piège orchestré par l'extrême-droite.


Si l'objectif de ces partis est de glaner des voix sur le dos d'une communauté dont une partie n'a toujours pas le droit de vote, faut-il rappeler que l'électeur préfère toujours l'original à la copie?


L'exemple de la France - où le Front National a opéré une spectaculaire remontée aux élections régionales en bénéficiant de la campagne islamophobe et raciste orchestrée par le gouvernement Sarkozy – devrait pourtant faire réfléchir nos apprentis-sorciers.


La LCR met en garde: l'histoire fournit trop d'exemples montrant que la stigmatisation permanente et la violence verbale contre une communauté pavent le chemin pour la violence physique contre celle-ci. La vague islamophobe est de plus en plus haineuse et elle a déjà tué dans d'autres pays. Danger!


Pour la LCR, l'émancipation des femmes musulmanes – et de toutes les femmes - sera l'oeuvre de ces femmes elles-mêmes, pas de l'Etat belge. La LCR est solidaire de leurs combats contre toutes les formes d'oppression, ici et ailleurs.


Quant à la laïcité, elle se définit selon nous par la séparation entre l'Etat et les pouvoirs religieux, pas par l'interdiction des signes religieux individuels dans l'espace public, qui doit être pluraliste et respecter les convictions de chacun-e.

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26 mars 2010 5 26 /03 /mars /2010 09:53
 
     
Maroc photos169au4


Le débat sur l'interdiction du port du foulard à l'école en Belgique s'inscrit dans un contexte inquiétant de montée de l'islamophobie – qui est une forme de racisme - dans toute l'Europe.


Un an après leur congrès européen contre "l'islamisation de l'Europe," les partis fascistes et d'extrême droite peuvent se réjouir de voir leurs idées nauséabondes se concrétiser à travers une flopée de mesures discriminatoires et d'actes racistes: interdiction des minarets en Suisse, interdiction du port du voile intégral en France, proposition d'impôt sur le port du foulard en Hollande, profanations de cimetièrres et de mosquées, insultes verbales, agressions physiques, discriminations à l'emploi, chasse aux sorcières dans les médias où l'on amalgame et assimile sans cesse les musulmans à des intégristes ou des terroristes...


Avec la crise capitaliste, certains veulent stigmatiser et désigner comme boucs émissaires toute une partie de la population, pour diviser les exploité-e-s et les opprimé-e-s et détourner l'attention des véritables problèmes que sont les licenciements massifs, la montée du chômage, de la misère et de la précarité.


Partout, ce sont les femmes qui subissent le choc en première ligne et sont les premières victimes de cette montée de l'islamophobie. Dans les écoles belges, la grande majorité des directions a fait le choix d'interdire le port du foulard, forçant ainsi les jeunes filles concernées à s'inscrire dans des écoles ghettos ou les poussant à la déscolarisation. Et il est question aujourd'hui de légiférer pour généraliser cette interdiction partout.


Dans le climat actuel, aucun parti progressiste n'ose afficher une position claire de peur de perdre des électeurs. En tant qu'organisation politique féministe, laïque, antiraciste et anticapitaliste, la Ligue Communiste Révolutionnaire (LCR) a adopté quant à elle une position nette et claire: selon nous, à la simple question "faut-il une loi qui interdise le foulard à l'école sous peine d'exclusion?" La réponse ne peut être que NON.

  • NON, car on ne peut que combattre une loi qui discrimine directement et quasi exclusivement des jeunes femmes issues de l'immigration.
  • NON, car dans le contexte actuel de la crise capitaliste, nous ne pouvons pas nous laisser diviser par des manoeuvres de la droite réactionnaire et perdre de vue les véritables combats.
  • NON, car ce ne sont pas quelques milliers de jeunes filles qui représentent le véritable problème de l'école, mais bien son manque de moyens, de professeurs, et la démotivation généralisée qui en découle.
  • NON, car l'école, outil d'émancipation, ne peut marchander le droit au savoir contre le renoncement à l'expression de ses croyances philosophiques ou politiques.

Nous sommes opposés à toute forme d’oppression des femmes et donc à toute obligation qui leur est faite de porter ou d'enlever un voile, un foulard ou une burqa contre leur volonté: c'est aux femmes et à elles seules de choisir!


Si, comme parti, nous rejetons les aliénations religieuses, nous affirmons aussi que la croyance est un droit inaliénable de l'individu. La juste définition de la laïcité, selon nous, c'est la séparation entre l’Eglise et l’Etat afin que les religions n’exercent aucun pouvoir politique et que l’Etat n’impose aucune forme de pensée philosophique. Ce n’est pas la ségrégation et l’apartheid entre les croyante-s et les non-croyant-e-s!


Notre combat est avant tout dirigé contre cette société capitaliste et les oppressions qu'elle alimente et utilise, comme le racisme et le sexisme. Nous voulons une société socialiste et démocratique qui offre à chacun-e les moyens de s'épanouir. Et cette société, nous ne l’obtiendrons que par la mobilisation dans l'unité la plus large de la classe des travailleurs/euses, des jeunes, des femmes, sans distinctions ethniques ou religieuses.


C’est dans ce sens que la LCR soutient activement la manifestation du 27 mars appelée par le Mouvement pour les Droits Fondamentaux (www.mouvdf.be ) contre l'interdiction du foulard à l'école; pour le respect des convictions et religion de chacun-e, y compris à l’école; pour un enseignement gratuit, démocratique et de qualité pour tou-te-s; pour le droit des (jeunes) femmes à decider elles-mêmes de porter ou non le foulard et à être respectées dans leurs choix.


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10 mars 2010 3 10 /03 /mars /2010 09:35
dieu n existe pas
1er avril 2004

Préambule


Le texte qui suit reprend l’essentiel d’une contribution versée au débat du Collectif national pour les droits des femmes (CNDDF) en janvier dernier. Cette contribution n’avait d’autre but de tenter d’ouvrir un débat de fond parmi les féministes soucieuses de défendre à la fois les droits des femmes et de faire échec au racisme, et ceci en regardant les réalités en face.


Ce débat a eu lieu et a permis, sur la base d’un consensus, de publier une tribune dans Libération, le 27 janvier dernier, intitulée « Contre le racisme et pour les femmes ». A partir de là, un large processus unitaire s’est amorcé qui a débouché le 6 mars à une manifestation parisienne pour la journée internationale des luttes de femmes.


Néanmoins le processus unitaire engagé à cette occasion n’a pas été à son terme puisque « Ni pute ni soumise », en lien avec la Coordination laïque et féministe (auxquelle s’est rallié à la dernière minute Lutte ouvrière) ont décidé d’appeler séparément à cette manifestation pour ne pas avoir à endosser la dénonciation de la politique gouvernementale. Puisque également le collectif « Une école pour tou-te-s » (moins d’une centaine dans la manifestation) a décider de centrer ses mots d’ordre sur le soutien aux filles voilées. Le débat doit donc se poursuivre. C’est le sens de la publication de ce texte.

La Laïcité

En France, cette notion recouvre des principes généraux qui organisent la vie publique, et la vie scolaire, en particulier qui ont été codifiés dans une série de textes fondamentaux comme la déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, le préambule de la Constitution de 1946, repris en 1958, ainsi que dans des lois.


On peut citer notamment celle de 1881 rendant l’école primaire et les maternelles gratuites ; celle de 1882 qui rend l’instruction primaire obligatoire jusqu’à 14 ans pour les enfants des deux sexes, français et étrangers ; celle de 1886 qui confie à des enseignants exclusivement laïcs l’enseignement dans l’école publique ; celle enfin sur la séparation des Eglises et de l’Etat qui mettait fin au régime concordataire instauré par Napoléon 1er et qui supprimait tout financement par l’Etat des ministres des cultes et des activités religieuses.


Cependant l’établissement d’un statut spécifique pour les départements d’Alsace-Moselle (et pour d’autres en dehors de la « métropole »), la loi Debré en 1959 sur le financement des écoles privées sous contrat ont largement écorné cette indépendance de principe entre l’Etat et les religions [1].


Cette indépendance est censée garantir deux choses :


- la liberté de conscience (liberté des croyants, des athées et agnostiques), l’Etat ne s’ingérant en aucune manière dans la vie religieuse, sauf pour faire respecter l’ordre public ;

- l’égalité entre tous les citoyens, quelles que soient leurs croyances et leurs convictions. La notion d’égalité s’est élargie au cours du Vingtième siècle en France et ailleurs, puisqu’aujourd’hui la loi interdit toute discrimination fondée sur le sexe, les choix sexuels, etc.

La laïcité a été instaurée en France après un combat difficile contre l’Eglise catholique qui a toujours bénéficié de nombreux privilèges en tant qu’église dominante [2]. La laïcité n’a pas pour but d’éradiquer les religions comme veulent le faire croire les dirigeants des pays islamistes. Elle a pour but de favoriser la vie ensemble de citoyens et citoyennes aux options religieuses et philosophiques différentes. [3]


La diversité religieuse


Aujourd’hui, dans toute l’Europe, la diversité religieuse s’est encore accentuée sous l’influence des vagues d’immigration successives venues des anciennes colonies ou comme résultat de la mondialisation avec son cortège de pauvreté et de guerres etc. En France, la sécularisation de la société amorcée il y a plusieurs décennies est contrebalancée par la montée de l’Islam parmi par les jeunes de parents ou grands parents immigrés, venus d’Afrique du Nord notamment. Cette islamisation des banlieues n’est pas nouvelle mais elle est aujourd’hui d’autant plus visible qu’elle se traduit pour une partie des jeunes musulmans des deux sexes par une bataille politique pour le droit de porter le voile à l’école au nom de la liberté et de l’égalité entre toutes les religions.

Où en sommes nous ?

Les premiers conflits sur la question du voile ont surgi à Creil en 1989. Suite aux premiers débats qui ont entouré cette affaire le Conseil d’Etat avait formulé un avis considérant que le port du voile n’était pas en soi contradictoire avec le principe de laïcité. Cela le devenait quand il était porté de manière ostentatoire et qu’il s’accompagnait de prosélytisme.


Membre de la rédaction des Cahiers du féminisme en 1989, mes amies et moi étions plutôt satisfaites de cet arrêté. Nous avions fait campagne pour dédramatiser ces « affaires » et inviter le mouvement féministe et tous les progressistes à ne pas se tromper de débat et à ne pas tomber dans le piège de la droite et de l’extrême droite promptes à stigmatiser les jeunes musulmans. Nous étions optimistes et faisions le pari que l’école publique et le mouvement féministe feraient reculer ces phénomènes « marginaux » [4].


Nous nous sommes trompées. Le port du voile s’est étendu. Au niveau national, Hanifa Chérifi (la médiatrice du gouvernement) parlait en avril 2003 de 150 affaires de voile, conflictuelles par an contre 300 en 1994 mais les chiffres recensés donnent une vision déformée de la réalité. Ils s’appuient sur les cas ayant donné lieu à des conflits ouverts mais bon nombre d’enseignants des banlieues populaires confrontés à cette question, l’ont réglée seuls.


Dans les collèges et les lycées, comme à la fac de Paris 8 par exemple (Saint-Denis), on observe, depuis deux ou trois ans, de nombreuses filles voilées de manière stricte. Il y a même des étudiantes qui se pointent drapées de noir des pieds à la tête dans des tchadors. Le voile n’est pas un phénomène majoritaire mais ce n’est plus un phénomène totalement marginal, dans les quartiers et les banlieues populaires.

Pourquoi ?

Il n’y a pas une seule explication mais plusieurs :


- Le contexte international marqué par l’offensive militaire des Etats-Unis en Afghanistan, en Irak et le redoublement de l’agressivité de la politique du gouvernement israëlien contre les palestiniens. Face à cela, un certain nombre de jeunes cherchent ainsi à manifester leur solidarité avec le peule palestinien.

- A cela vient s’ajouter, face aux discriminations subies en France, la volonté de ne plus « raser les murs » (comme ont été contraints de le faire leurs parents) et de revendiquer pour les jeunes issus de l’immigration et pour l’Islam, l’égalité avec les autres jeunes français et les autres religions. Il est évident que les politiques menées depuis 20 ans, par la droite et la gauche gouvernementale, contre les couches populaires et qui se sont traduites par un chômage de masse et la précarité et le développement des ghettos sociaux, ont alimenté d’un côté la montée de l’extrême droite et de l’autre les replis communautaires.

- Cela peut s’expliquer également par la volonté de certaines jeunes femmes de se « protéger » contre l’agressivité sexiste qu’elles subissent chez elles ou dans la rue : la loi de Dieu étant « supérieure » à celle du père et des frères ; quand elles portent un voile, les hommes sont censés les respecter.

- Mais tous les facteurs précédents ne se seraient pas traduits par le développement du port du voile dans les établissements scolaires si des mouvements islamistes implantés dans certains quartiers populaires depuis plusieurs années, n’avaient pas cherché à convaincre leurs fidèles et en particulier les jeunes filles qu’il fallait porter le voile pour être une « bonne » musulmane.


Le port du voile n’est pas donc pas l’expression d’une mode ponctuelle ou de l’initiative de quelques jeunes filles plus pieuses que d’autres mais le résultat d’une bataille politique au sens plein du terme. Que disait la médiatrice du gouvernement Hanifa Chérifi (nommée en 1994 et toujours en place) le 30 avril 2003 dans L’Humanité à propos de ces jeunes femmes qui allaient au tribunal pour défendre le port du voile ? : « J’ai eu en face de moi des jeunes filles sûres d’elles mêmes et nullement désorientées. Elles connaissent parfaitement les aspects juridiques de la question et récitent par cœur l’avis du Conseil d’Etat (…). J’ai voulu en savoir plus. J’ai ainsi découvert l’existence d’un véritable réseau de soutien à ces élèves, composé de juristes, d’avocats, d’étudiants, de prédicateurs organisés dans des associations islamistes connues, telles que l’UOIF ».


Peut-être en rajoute-elle sur l’influence des intégristes mais on ne peut la nier et faire comme si elle n’existait pas. Le droit de porter en classe les signes religieux a reçu le soutien en France de tous les représentants officiels des religions. Dans toute l’Europe, la religion catholique est à l’offensive : demande que soit inscrite dans la « Constitution » européenne la référence au « patrimoine chrétien de l’Europe ». En Espagne, l’enseignement de la religion catholique devient obligaroie dans les écoles publiques et la religion catholique retrouve ainsi son statut de religion d’Etat. Les islamistes les plus futés demandent, eux, la redéfinition d’une laïcité « ouverte » permettant le port de tous les insignes religieux.

La division du monde associatif

face à ce phénomène, plusieurs attitudes sont possibles :


- Pour certaines associations, le MRAP, la LDH, et des militantes féministes comme C. Delphy, les débats sur le voile ont été orchestrés par le gouvernement pour masquer les vrais problèmes que sont les inégalités économiques et sociales dans les banlieues et ne sont que l’expression de « l’islamophobie » dominante liée à la montrée de l’extrême droite et au passé colonial de la France [5].


Dans ce sillage, certains considèrent que le combat des jeunes musulmanes est un combat pour une liberté démocratique et que la laïcité « à la française » a fait son temps et qu’il faut instaurer une laïcité « plus ouverte » qui autoriserait à l’école l’affichage de tous les signes religieux. Ce courant a raison sur un point. L’ampleur du débat sur le voile a effectivement joué un rôle de diversion par rapport à la question des inégalités économiques et sociales.


Mais ce courant se trompe sur une question d’importance. Contrairement à ce qu’il pense, ce n’est pas le gouvernement qui a soulevé le problème du voile. La droite était tout autant divisée que la gauche, l’extrême gauche ou le mouvement associatif. Ce sont les enseignant-e-s qui au fil des mois ont vu se détériorer la situation non seulement au niveau de leurs conditions de travail mais également face à l’offensive politique de courants islamistes décidés à en découdre sur le terrain de l’école.


Or, qui a voulu soutenir ces enseignant-e-s pour les aider à résoudre ces questions sans alimenter le climat raciste ou capituler devant le développement du voile ? Personne. Pire, ils et elles ont été calomnié-e-s honteusement comme des « islamophobes » par le courant antiraciste, alors que chacun et chacune cherchait à se « débrouiller » le mieux possible pour éviter toutes les impasses.


- Le deuxième courant a été porté par des personnalités féminines du monde des arts et des lettres [6] qui ont lancé un appel solennel au Président de la République en faveur d’une loi, pour défendre l’égalité des sexes comme si ce gouvernement dont la politique ne cesse de creuser les inégalités n’était pas responsable des replis identitaires dont témoignent entre autres le développement du voile à l’école et dans les quartiers. Ce courant a raison sur deux points : la majorité des femmes musulmanes ne portent pas le voile et ne souhaitent pas le porter ; le voile met gravement en cause le principe d’égalité des sexes.


Un troisième courant a émergé tardivement à la fin de l’année dernière [7] et une marque de soupçon à l’égard de tous les hommes, tous considérés comme des violeurs en puissance ; choisir de porter le voile (pour celles qui ont fait ce choix), c’est également être porteuse d’un modèle de société. Pour celles qui en font une prescription religieuse incontournable, cela signifie que les femmes ont le droit de sortir de l’espace domestique (du moins jusqu’au mariage), mais seulement à la condition d’être « couvertes » et à la condition de ne pas remettre en cause une conception de la famille dans laquelle les hommes, comme chefs de famille, sont censés en être les pourvoyeurs financiers et les femmes comme mères, responsables du foyer.


Cette conception place les femmes dans la dépendance des hommes, ce qu’admet d’ailleurs un prédicateur subtil comme comme Tariq Ramadan. [8].

Cela va même plus loin pour certaines. Le voile a en effet connu une nouvelle extension avec la révolution iranienne. C’est donc, pour certains et certaines qui choisissent de porter le tchador, un moyen de se référer à des régimes totalitaires islamistes où s’exerce la « charia », régimes totalitaires où n’existe aucune séparation des pouvoirs ni aucune séparation entre le politique et le religieux.


Mais toutes les femmes voilées ne sont pas des intégristes. Fort heureusement. Et parmi les femmes voilées certaines prétendent mener un combat féministe en distinguant la religion (égalitaire) et la tradition (patriarcale). Soit. Mais toutes sont invitées à respecter cette conception des rapports entre les hommes et les femmes. Cette conception d’une « complémentarité des rôles » qui fait l’impasse sur les rapports d’oppression a été un axe majeur de la contestation féministe.


Cette contestation n’a pas été suffisante, on le sait, pour établir l’égalité réelle entre les hommes et les femmes dans la famille mais ce n’est pas une raison pour accepter de faire passer pour une émancipation, ce qui est la marque de l’oppression traditionnelle des femmes par les hommes. Ce n’est pas une raison non plus pour assimiler l’oppression des femmes où l’égalité formelle entre les sexes est reconnue par la loi, à celle des femmes considérées comme des citoyennes de seconde zone, des mineurs dans des pays sous loi musulmane par exmple.


Ce n’est pas une raison enfin pour accepter sans broncher une conception de la sexualité qui ne peut entraîner que répression et violences et nous fait revenir des décennies en arrière. Nous savons que conception de la sexualité et des rapports entre les hommes et les femmes est largement partagée par toutes les religions monothéïstes [9]. Cela doit nous inciter au contraire à débattre franchement avec les jeunes femmes et les jeunes gens de toutes les religions pour les conduire à contester de l’intérieur leur propre religion d’un point de vue féministe.


Les populations de confession musulmane doivent pouvoir exercer leur culte librement et dignement dans des mosquées et non dans des caves ; nous considérons par ailleurs que des jeunes musulmanes sont totalement libres de porter un voile chez elles ou dans la rue pour affirmer leurs convictions, et de préférer vivre dans un modèle familial traditionnel. Elles ne sont pas les seules à faire ce choix ou… le subir.


C’est à elles de faire leur propre expérience. Mais toutes les jeunes femmes d’origine maghrébine ne sont pas musulmanes et toutes les musulmanes ne partagent pas ces positions. C’est pourquoi il est très important que les jeunes filles qui ne souhaitent pas être voilées et qui se battent pour leur égalité face à leurs frères, leurs copains, ou les imams puissent le faire totalement librement sans être soumises à des groupes de pression au sein des établissements scolaires notamment. C’est pourquoi tous les signes d’appartenance religieuse doivent rester discrets dans l’enceinte scolaire.

Une loi inopportune

Une loi interdisant les signes religieux à l’école risque fort d’être ressentie par les musulman-e-s comme une mesure de discrimination inacceptable surtout lorsqu’on sait que la religion catholique dispose toujours de certains privilèges [10]. Seule une loi qui aurait redéfini en positif la laïcité et aurait mis en cause les privilèges de l’Eglise catholique (ce que craignaient les évêques) aurait pu être comprise…


Ce n’est pas ce qui est prévu. Le projet de loi qui est prévu, n’est pas raciste mais c’est un texte sans aucune ambition destinée seulement, à la veille des élections, à faire un consensus minimum entre l’UMP et le PS, pour éviter que le Front national ne rafle la mise lors des prochaines échéances électorales. Pour régler la question des signes religieux à l’école, point n’était besoin d’une loi. Les règlements intérieurs des établissement scolaires auraient été suffisants à condition d’avoir été couverts une directive nationale ou une charte de la laïcité dans l’éducation nationale, pour éviter de laisser chacun, chacune isolé-e face à ce problème. [11].


Cela nécessitait l’organisation d’un vaste débat dans la société mené sereinement, dans lequel les syndicats enseignants auraient dû jouer un rôle moteur. Ce ne fut pas le cas. Les syndicats enseignants, eux-mêmes divisés, sont resté en retrait. Et Le gouvernement a décidé de légiférer en essayant de capter à son profit la crainte d’une large partie des enseignant.e.s et des femmes de voir remis en cause la laïcité et surtout le principe d’égalité des sexes récemment conquis. Le gouvernement pouvait se réjouir de la division opérée dans les rangs de ses adversaires.


C’est pourquoi le CNDDF a décidé de prendre l’initiative pour organiser une mobilisation unitaire à l’occasion du 8 mars. Plutôt que de descendre dans la rue pour s’opposer à une de circonstance, dans la plus grande confusion, une forte proportion de féministes a préféré manifester à l’occasion de la journée internationale de lutte des femmes pour faire avancer les droits des femmes et l’égalité dans ce pays.

Après le 8 mars

Après le 8 mars, l’heure n’est pas à la constitution de collectifs contre l’exclusion des jeunes filles voilées, pour une raison simple : les enseignant.e.s ont comme soucis essentiel non pas d’exclure leurs élèves (l’exclusion étant toujours le signe d’un échec) mais de les convaincre, comme les y invite la loi, de l’intérêts de toutes et de tous de ne pas confondre les salles de classe avec un église, une synagogue ou une mosquée. Il y a en revanche d’autres urgences :


- Il faut développer un travail d’explication en profondeur sur la question de la liberté et de l’égalité en matière de sexualité : égalité entre les hommes et les femmes, homosexualité et hétérosexualité. Combattre l’idée que la sexualité, hors mariage, est un péché. Les associations qui font déjà ce travail, comme le Planning familial, doivent obtenir de nouveaux moyens pour élargir leurs activités, avec d’autres. La lutte contre les tabous redevient, depuis quelques années déjà, d’une grande actualité. Nous devons en profiter pour expliquer pourquoi nous sommes pour la mixité (ce qui n’exclut pas la possibilité pour les filles et les femmes de se réunir à part quand elles le souhaitent) et pour la liberté en matière de sexualité, ce qui est différent de la marchandisation des corps et de la sexualité par le capitalisme. Toute société fondée sur la répression sexuelle est une société hypocrite, à la source des pires violences, notamment contre les femmes et les enfants.


- Il faut poursuivre la mobilisation contre les violences sexistes menée par des associations spécialisées, par le CNDDF et Amnesty International, en exigeant la création de centres d’accueil et d’hébergement en nombre suffisant pour les femmes victimes de violences conjugales et le droit d’asile pour les femmes étrangères victimes de violences conjugales et autres.


- Mais parallèlement, si nous souhaitons lutter contre le développement de l’extrême droite et de l’influence des religieux, il faut se battre pour des investissements massifs en faveur de logements sociaux et de services publics de qualité (transports, écoles, crèches, centres de santé, etc.) dans toute la France et notamment dans les quartiers populaires. Il faut un véritable service public gratuit d’accueil de la petite enfance.


- Pour le droit à l’emploi, contre le chômage et la précarité et contre les discriminations dont sont victimes les jeunes issus de l’immigration et notamment les jeunes femmes.


- Pour le droit de vote à tous les résident-e-s étrangers et un statut d’autonomie pour les femmes immigrées.

 


Mais toutes ces revendications ne pourront se transformer en véritables mobilisations que si les jeunes des banlieues, et en particulier les jeunes femmes, s’en saisissent. Comment aider les jeunes femmes qui cherchent leur autonomie à s’organiser ? C’est un véritable défi qui est lancé aux différentes composantes du mouvement féministe.


Josette Trat



Notes

[1] Cf. Jean Boussinesq : La laïcité française, Le Seuil 1994.

[2] Cf. Henri Pena-Ruiz : Qu’est-ce que la laïcité, Folio Actuel Gallimard 2003.

[3] Pour un point de vue musulman éclairé sur la question cf. Soheib Bencheik, Marianne et le prophète, Grasset 1998.

[4] La majorité de la LCR s’était alors reconnue dans cette position.

[5] Cf. dans Le Monde la tribune d’A. Boumedien-Thiery, D. Bouzar, C. Delphy, E. Fassin, F. Gaspard, M. Rebérioux et N. Savy : « Un voile sur les discriminations »

[6] Cf. notamment « »Laïcardes" puisque féministes d’Anne Vigerie et Anne Zelinsky, Le Monde du 29 mai 2003 ou Elle du 8 décembre 2003).

[7] Cf. Libération du 27 janvier 2004. mais en un mois seulement, il a réussi à se faire entendre progressivement et à débloquer partiellement la paralysie dans laquelle était confinée le mouvement féministe ainsi que de nombreux autres mouvements sociaux. Ce débat a été porté, après un débat approfondi, par le Collectif national pour les Droits des Femmes et a débouché sur la réussite de la manifestation du 6 mars 2004 à Paris. Ce s’est construit autour de plusieurs axes qui loin d’être contradictoires se complètent. Il s’agit à la fois de faire un travail d’explication en faveur de la laïcité et contre le voile comme un symbole d’oppression, et de lutter contre les discriminations subies par les jeunes des deux sexes issu.e.s de l’immigration, contre le chômage et la précarité qui touchent prioritairement les femmes, contre les violences subies par les femmes et leurs droits de disposer librement de leur corps grâce à la contraception et au droit à l’avortement. Toutes choses qui mettent en cause la politique la politique gouvernementale.

Pour ce courant, que nous soutenons, la laïcité à l’école est une chance. C’est l’occasion pour les jeunes, non pas de nier leurs appartenances mais de les confronter pacifiquement avec celles des autres, sur la base de rencontres interindividuelles entre élèves mais également entre élèves et enseignant-e-s, rencontres qui ne sont pas prédéterminées en fonction des appartenances respectives à un groupe religieux ou à une classe sociale mais en fonction d’affinités multiples.

La mixité sociale a déjà largement disparu. Va-t-on aller maintenant vers une ghettoïsation renforcée sur la base des appartenances religieuses ? Les juifs d’un côté, les musulmans de l’autre ? et tous les autres où devront-ils aller ? Des jeunes d’origine maghrébine devront-ils se soumettre de plus en plus à la loi du groupe qui fait obligation à tout « bon » musulman, de jeûner au moment du Ramadan et à toute « bonne » musulmane de se voiler comme c’est déjà le cas dans certains quartiers ? Préserver un espace où ce ne sont pas les religions qui imposent leur loi, c’est préserver un espace de liberté, même si certains et certaines n’en sont pas conscient-e-s aujourd’hui. C’est être solidaires de tous les élèves qui ne souhaitent pas s’aligner à titre individuel sur les normes communautaires, quelles qu’elles soient.

Pour ce courant également, il faut refuser la banalisation du voile au nom de l’égalité des sexes. Rappelons que seule une minorité des femmes musulmanes se voile. Toutes n’interprètent donc pas de la même manière le Coran. Le voile n’est pas seulement un signe d’appartenance religieuse ni un simple morceau de tissu comme un autre. A notre époque, c’est une marque de discrimination à l’égard des femmes dont le corps est considéré comme la source de toutes les perditions [[Cf. Mohamed Kacimi, « Le voile une antique aliénation », Libération 10 décembre 2003.

[8] Cf. A. Gresh et Tariq Ramadan, L’Islam en question, Actes Sud, 2002, p. 280.

[9] Cf. Caroline Forest, Fiammetta Venner, Tirs Croisés, Calmann-Lévy, 2003.

[10] Cf. le statut de concordat en Alsace-Moselle.

[11] Cf. le jugement du 10 juillet 1996 du Tribunal administratif concernant l’affaire Kherouaa.

* Paru dans Critique communiste n° 172, printemps 2004 [La loi sur le voile en question], pp. 124-132. [Il est possible que certaines corrections introduites dans la version de ce texte publiée dans Critique communiste n’aient pas été intégrées ici, malgré nos efforts.]

* Josette Trat est militante de la LCR, membre de son secrétariat femme.

Mis en ligne le 9 mars 2010
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7 mars 2010 7 07 /03 /mars /2010 17:07

Un quotidien algérien s’étonne de voir nombre de polémiques tourner autour des immigrés et de l’islam. Il y voit une lepénisation accélérée des esprits.

22.02.2010 | Djamel Bouatta | Liberté

Ilham Moussaïd, candidate du NPA dans le Vaucluse aux régionales, à Marseille le 3 février 2010, porte le foulard.

Ilham Moussaïd, candidate du NPA dans le Vaucluse aux régionales, à Marseille le 3 février 2010, porte le foulard.


Sarkozy sort sa grosse batterie, caressant sans retenue, dans le sens du poil, les sentiments xénophobes et racistes visant les immigrés – et les musulmans en particulier.


Création de “zones d’attente spéciales” pour les indésirables, agrément de listes antiminarets pour les élections régionales, haro crié sur les produits halal… La liste islamophobique est loin d’être close. Le débat sur l’identité nationale, inventé pour stigmatiser l’islam, a échoué ? Qu’à cela ne tienne, le président français rebondit en transposant Guantanamo dans son pays, dit “des lumières et des libertés"! Et c’est à l’ex-socialiste Eric Besson que revient la charge de mettre au point ce nouvel instrument anti-immigrés. Le ministre va déposer un projet de loi destiné à favoriser la création de "zones d’attente spéciales" pour les étrangers sans papiers. Le projet sera présenté en Conseil des ministres début mars… juste avant les régionales. Il prévoit de véritables Guantanamo, où seront parqués les étrangers entrés clandestinement en France et les immigrés indésirables à renvoyer dans leur pays d’origine.


Les harragas seront ainsi entassés sur un site le temps qu’il faudra à l’administration pour établir les papiers de leur conduite hors de France. Les formalités d’expulsion seront simplifiées pour faire partir les indésirables au plus vite, sans délai et sans aucun recours. Ils auront 48 heures pour faire appel, contre 30 jours aujourd’hui. La durée maximale de rétention, elle, serait étendue de 32 à 45 jours, histoire de laisser le temps nécessaire pour convaincre le juge de décider la reconduite. Jusqu’à aujourd’hui, il s’est encore trouvé des juges indépendants pour débouter les instructions d’expulsion de la police ! Cela vient d’être le cas pour les harragas débarqués sur les côtes corses, les juges ayant exigé de l’administration qu’elle examine leur demande d’asile avant de prendre cette mesure radicale.


C’en est fini de l’hypocrisie "France, terre d’asile et des droits de l’homme". Le Groupe d’information et de soutien des immigrés (GISTI) évoque déjà l’instauration d’un "régime d’exception en matière de droits". Et ce n’est pas la validation par le ministre de l’Intérieur d’une liste antiminarets aux élections régionales qui va contredire la lepénisation de la France officielle. Cette liste d’extrême droite pour la région Franche-Comté, composée du MNR, du Parti de la France, de la droite nationale et du Front comtois, s’intitule “Ligue comtoise, non aux minarets”. Le programme est clair : plus de musulmans dans la région. Quelques Français qui continuent à faire honneur à la France tolérante ont demandé à la préfecture d’invalider cette liste, contraire aux valeurs républicaines. Le préfet leur a rétorqué : La “Ligue comtoise, non aux minarets” est conforme au Code électoral ! L’effet dominos n’a pas tardé. La préfecture de Moselle a également enregistré une liste “Non aux minarets”.

Même l’alimentation halal s’est invitée dans cette guerre contre l’islam, menée tambour battant en prévision des régionales. Depuis novembre, la chaîne de restauration rapide Quick a rayé le porc de sa carte dans ses établissements en milieu musulman [elle ne propose plus que de la nourriture halal dans huit de ses 350 restaurants français, notamment à Roubaix].


René Vandierendonck, le maire socialiste de Roubaix, s’en est pris à elle [il a porté plainte pour discrimination]. Le PS joint ainsi, sans état d’âme, sa voix à celle des lepénistes dont la raison d’être a toujours été la guerre contre les étrangers qui mangent le pain des Français ! Même posture antimusulmane chez le Parti de gauche, mené par un ex-cacique du PS, Jean-Luc Mélenchon. La direction du parti a désavoué Jean-Yves Causer, le candidat du Front de gauche [auquel appartient le Parti de gauche] aux régionales en Alsace, qui s’était prononcé pour que l’islam soit enseigné à l’école dans la région, au même titre que le catholicisme et le judaïsme. L’islamophobie a donc gagné même la gauche.


Rappelons aussi les cris d’orfraie lancés par la classe politique française contre le Nouveau Parti anticapitaliste (NPA) d’Olivier Besancenot, qui a osé faire figurer, sur sa liste aux régionales en PACA, une musulmane portant le foulard ! [Ilham Moussaïd] Jamais un gouvernement et la classe politique français n’auront autant abusé du fantasme de la peur de l’étranger, et principalement de l’islam. Si on devait trouver un équivalent, il faudrait aller chercher du côté de la France pétainiste, lorsque les juifs étaient pourchassés.

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7 mars 2010 7 07 /03 /mars /2010 17:04

25.02.2010 | Iman Kurdi | ArabNews

La polémique fait rage en France à propos de la candidature d’Ilham Moussaïd aux élections régionales. Pourquoi la présence de cette jeune candidate sur la liste du Nouveau Parti anticapitaliste (NPA) dans le Vaucluse est-elle si controversée ? Parce qu’elle porte le voile. C’est une première, semble-t-il. Jamais une femme voilée ne s’était portée candidate à une élection française. Jamais. Ce que je trouve assez drôle, c’est que cette jeune femme a une façon si française de porter le foulard qu’elle susciterait l’indignation au Moyen-Orient. En Arabie Saoudite, on refuserait de lui délivrer une carte d’identité. En fait de voile, Ilham Moussaïd porte un foulard qui lui couvre les cheveux, mais pas les oreilles ni le cou. Il s’agit non pas d’un niqab [voile dissimulant le visage], mais d’une version moderne du hidjab [foulard couvrant les cheveux, les oreilles et le cou]. Cela étant, il est indéniable que le foulard, en France, a une image négative. Quand Olivier Besancenot a répondu aux critiques en disant qu’une femme pouvait être à la fois féministe, laïque et voilée, il a été tourné en dérision par la presse.

Prenons d’abord l’argument de la laïcité. C’est une valeur fondamentale de la République française. C’est d’elle que découle la séparation officielle entre l’Eglise et l’Etat, votée en 1905, mais aussi la relégation de la religion à la sphère privée. Voilà pourquoi, lorsque Ilham Moussaïd, qui est libre de pratiquer sa religion en privé, porte un symbole religieux sur la tête, on estime qu’elle introduit sa religion dans la sphère publique et ne peut donc pas représenter l’Etat français. Je comprends la logique de ce raisonnement, mais quand j’entends Ilham Moussaïd dire qu’elle défend les valeurs laïques, je la trouve crédible. Je ne vois pas pourquoi le port du foulard serait contradictoire avec une vision du monde où la religion relève d’un choix personnel et où les préceptes religieux doivent être exclus des prises de décision de l’Etat.

Deuxième point : une femme qui porte le hidjab peut-elle être une féministe ? Dans certains pays occidentaux et peut-être même dans certains pays arabes, le foulard est associé à une vision conservatrice du monde. Le port du hidjab dénoterait un manque de liberté et, partant, un manque d’égalité. Mais, venant du Moyen-Orient, une telle question peut paraître déconcertante. Dans un pays où le port du hidjab constitue la norme, on s’aperçoit très vite qu’il est porté par des femmes de toutes tendances politiques, des conservatrices pur jus, certaines de la supériorité de l’homme sur la femme, aux féministes convaincues, militant pour l’égalité des deux sexes. En vérité, le port du hidjab n’est incompatible ni avec le féminisme ni avec la laïcité. Etre voilée ou non ne vous rend pas plus ou moins féministe. Ce sont vos idées, et non ce que vous portez sur la tête, qui déterminent ce que vous êtes.

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22 février 2010 1 22 /02 /février /2010 10:11
Fethi GHARBI







Qui se souvient encore de la tenue ou de la coiffure de Ségolène Royal lors des débats télévisés ou des meetings des dernières présidentielles ?


Probablement peu de monde et certainement pas Jean-Paul Huchon, ni Xavier Bertrand, ni même Martine Aubry et encore moins M.G.Buffet, car ni la féminité de Ségolène Royal ni son rapport à son corps ne fixent notre attention outre mesure. Ce qui compte tout autant pour ses fans que pour ses adversaires c’est son programme politique. Cette femme, se demande-t-on alors, est-elle l’incarnation du socialisme ou une simple propagandiste du néo-conservatisme social démocrate ?


Si la pensée de Ségolène Royal occulte son corps, le foulard d’Ilham Moussaïd tend à occulter la pensée et même l’être de cette candidate du NPA. Ce petit bout de tissu couvrant les cheveux, tombé entre les mains de tous ces chantres haineux de la démesure, semble s’étirer au point de se transformer en linceul ensevelissant le droit à la différence, à l’expression et peut être même à l’existence. Si la symbolique de ce fichu s’apparente au religieux, elle couvre en réalité un champ beaucoup plus large. Le foulard d’Ilham est en réalité un jeu de miroirs polysémique renvoyant à obscurantisme, clan, oppression, bougnoule, banlieue, verlan, étranger, voleurs etc...


Lorsqu’on y regarde de plus près, ce qui est mis en cause n’est en fait que la présence des nord-africains en tant qu’ethnie et en tant que culture sur le sol de l’Hexagone ! Pourquoi alors, au lieu de tourner autour du pot et de se cacher derrière l’excuse de la laïcité et de la liberté de la femme, ne serait-il pas plus simple et plus honnête de dire que les français d’origine maghrébine sont personae non gratae... Il faut être bien candide pour croire que la droite française se soucie de l’émancipation de la femme arabo-musulmane ! La vraie question est la suivante : quel est le meilleur moyen de se débarrasser de tous ces beurs infestent le pays ?


On reproche au NPA d’enfourcher l’irrationnel !


La politique de l’émotionnel serait-elle en France un droit exclusif de la droite ?! En a-t-elle déposé la marque ?


Tant mieux alors pour Olivier Besancenot s’il parvient a stimuler et à récupérer les voix de la banlieue en encensant une candidate enfoulardée. Mr.Sarkozy n’a-t-il pas fustigé cette même banlieue et joué sur les cordes sensibles de l’islamophobie pour happer la majorité des voix de l’extrême droite ? La manœuvre a si bien réussi que l’UMP récidive avec cette campagne anti-foulard juste avant les régionales. Le parti prétendument socialiste lui emboîte le pas et nous joue la même sérénade. Tout ce beau monde (FN,UMP,PS,MODEM) se déchire, chacun faisant de son mieux pour susciter la peur et exacerber la haine.


Avec l’embrigadement de l’outil médiatique, le débat d’idées est mort de sa belle mort, du moins dans le cadre électoral. La subjectivité délirante serait-elle la chasse gardée de la droite ?


La gauche doit-elle se cantonner dans son discours classique et laisser à tous ces démagogues bien pensants l’exclusivité de se jouer des sentiments des électeurs ? Le NPA a, lui au moins, le mérite et la moralité de refuser de dresser les français les uns contre les autres. Il a aussi le courage de se mettre à contre courant de l’islamophobie ambiante.


La démarche du NPA se détache de plus en plus de la gauche classique. Elle nous fait un peu penser à ce qui se fait en Bolivie. Elle nous rappelle les revendications des mouvements indigènes, appelant à rééquilibrer un pouvoir depuis toujours aux mains des élites blanches. Si les indigènes boliviens ont toujours vécu sur leur sol, les maghrébins en France ne sont que les indigènes des anciennes colonies "importés" en masse dans l’après guerre.


Leurs descendants continuent, malgré les apparences, à être traités en tant que tels. Oui, le foulard d’Ilham Moussaïd est un symbole. Il est le symbole d’une fraction de la classe travailleuse mais aussi celui d’une ethnie et d’une culture. Les rapports de classes ne sont pas, comme semble le croire la gauche traditionnelle, simplement économiques, il sont aussi ethniques et épistémiques.


Dans son livre, La Stratégie du Choc, Naomi Klein souligne qu’une guerre, un coup d’état, une catastrophe naturelle, une attaque terroriste provoquent un traumatisme collectif aliénant. Cet état de choc plonge pour un moment la société dans un effroi tel qu’elle se laisse docilement manipuler par n’importe quel prétendu protecteur.


Un tel phénomène psychologique va inspirer l’économiste ultra-libéral Milton Friedman qui conseille aux hommes politiques d’imposer immédiatement après une crise les réformes économiques douloureuses avant que les gens n’aient eu le temps de se ressaisir. Il qualifiait cette méthode de « traitement de choc ». Cette stratégie a fini par constituer la clef de voute de la politique des puissances occidentales. Le film de l’effondrement spectaculaire des tours jumelles, retransmis en boucle, associé au visage hirsute de Ben Laden n’a pour dessein que de susciter et entretenir l’épouvante.


Cette catastrophe grandiose parce que sur médiatisée, sera instrumentalisée par l’état étasunien qui profitera du traumatisme pour attaquer et coloniser illégalement l’Afghanistan et l’Irak et pour promulguer toute une panoplie de lois liberticides à l’intérieur de ses frontières.


Les exemples ne manquent pas. Tout dernièrement, profitant de l’état de choc provoqué par le tremblement de terre en Haïti, toute une armada de l’armée étasunienne a investi ce pays catastrophé en l’espace de quelques heures.

L’état français a lui aussi besoin de recourir à cette stratégie du choc pour faire passer des lois anti-sociales et liberticides. Mais il ne dispose malheureusement pas d’icônes monstres telles que celle du world-trade-center en feu ou celle diabolique d’un Ben Laden. Pour faire peur aux français, il lui faut se contenter... du foulard d’Ilham.


Fethi GHARBI

URL de cet article
http://www.legrandsoir.info/Le-foulard-d-Ilham.html
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19 février 2010 5 19 /02 /février /2010 09:39
Portrait

Ilham Moussaïd. Cette étudiante d’origine marocaine, 21 ans, est candidate NPA aux régionales. Et porte le foulard de la polémique.




Par LILIAN ALEMAGNA


Ilham Moussaid, candidate du NPA dans le Vaucluse, le 3 février à Marseille

Ilham Moussaid, candidate du NPA dans le Vaucluse, le 3 février à Marseille (Jean-Paul Pelissier / Reuters)


Fichu foulard. Il a suffi d’un article du Figaro et d’une conférence de presse improvisée sur le Vieux-Port à Marseille pour qu’Ilham Moussaïd, candidate «voilée» du NPA aux régionales en Paca, déclenche une belle emballée médiatique.


La jeune femme n’a pas encore 22 ans et à peine un an de militantisme au sein du Nouveau Parti anticapitaliste (NPA) d’Olivier Besancenot. En novembre, elle est investie par ses camarades du Vaucluse, en quatrième position sur la liste départementale. Dans l’indifférence générale. Trois mois plus tard, en plein débat sur l’identité nationale et quand montent les fantasmes autour du port de la burqa, les médias se jettent sur elle et son foulard islamique blanc, noué en chignon derrière la nuque. Dans la foulée, la classe politique hurle au non-respect de la laïcité, à l’atteinte aux valeurs féministes. Au milieu de tout ça, l’étudiante en BTS gestion se jure «laïque, féministe et anticapitaliste».


Essayons de comprendre. Le train s’arrête en gare d’Avignon. Foulard sur la tête, keffieh palestinien autour du cou, elle nous embarque dans sa 106 verte, en compagnie de son camarade Abdel Zahiri, figure associative locale et militant remarqué du NPA. «Vous vous doutiez bien que ça allait faire du bruit, cette candidature ?» leur lance-t-on. «Non ! Franchement ! On ne s’attendait pas à tout ça !» répond la jeune femme, grand sourire, un brin naïve, avec son mélange d’accent de Provence et d’Afrique du Nord.

Direction le siège du club de foot où Abdel officie comme bénévole. On s’installe dans une salle qui fait office de buvette.


«C’est là qu’on fait aussi nos réunions.» On se pose autour d’une table en Formica. Elle s’asseoit, affiches NPA dans le dos, punaisées sur un poster du FC Barcelone. Ils tiennent à filmer l’entretien : pour se couvrir et garder une trace pour leur site internet. Elle dispose son carnet de notes surlignées de stabilo devant elle. La situation fait un peu media-training pour débutants en politique. On nous laisse en tête-à-tête. Elle hésite, bute sur les mots, s’excuse de n’avoir «pas l’habitude» des interviews.


De tout le vacarme autour de sa candidature, Ilham Moussaïd se dit «surprise» d’avoir vu «tous ces journalistes qui cherchaient à me rencontrer juste parce que je porte un foulard et non pas parce que je me présente comme militante. Or ça fait quatre ans que je milite.» Depuis 2006, elle fait partie de l’association AJCREV (prononcez «Agissez ! Rêvez !»), dont Abdel est l’un des fondateurs. Elle s’occupe de soutien scolaire auprès des gamins du quartier de la Rocade à Avignon et organise des sorties culturelles. Viennent ensuite les manifestations contre la guerre en Irak, contre les «massacres de Gaza», où elle se rapproche des militants NPA.


Début 2009, celle qui avait voté Royal en 2007, rejoint la dizaine de militants du «comité populaire» NPA d’Avignon.La jeune première enchaîne les actions : contre la loi LRU, contre la «privatisation» de la Poste, pour le boycott des produits israéliens dans les supermarchés… Au cours d’une formation NPA en Haute-Normandie, elle apprend «ce qu’est vraiment le capitalisme, la lutte des classes, les ouvriers, etc». Marx ? Elle ne connaissait pas.


Elle a commencé à lire un de ses bouquins mais ne se souvient pas du titre. La croyante ne craint pas de dire que c’est sa «foi» qui l’a «amenée au NPA» : la lutte contre les injustices, contre «l’argent roi»…

Besancenot et le NPA qui «draguent les musulmans et les quartiers populaires» ? IlhamMoussaïdrétorque qu’elle ne représente pas la communauté musulmane. «On en a fait une femme objet. C’est méprisant»,déplore Nora, une de ses camarades au NPA. Reste qu’Ilham-la-candidate porte ce bout de tissu blanc qui rend visible sa croyance. Et dans une formation issue de la trotskiste LCR,aux dogmes laïques et féministes, ça dérange. «Mais je suis aussi féministe et laïque !»


Lorsqu’on parlait politique, les réponses étaient plaquées sur des formules à la Besancenot. Là, elle déroule, sincère, les yeux dans les yeux. «La laïcité, c’est la séparation de l’Etat avec l’institution religieuse. Je ne représente pas cette institution religieuse, assume Ilham. Je suis porteuse d’un projet politique qui est l’anticapitalisme.» Elle n’est pas en position éligible, mais si elle était élue, elle n’enlèverait pas son foulard. «L’abbé Pierre a bien siégé à l’Assemblée nationale en soutane.» Au diable le principe de neutralité républicaine.


Sur la question du féminisme, elle dit :«Je lutte contre les violences conjugales, pour l’égalité entre les hommes et les femmes, le droit à l’avortement, à la contraception… Maintenant, il n’y a pas une manière d’être féministe. On n’est pas obligée d’avoir une minijupe.» Et tout ça même si le voile islamique est vu par ses détracteurs comme signe de séparation hommes-femmes et de domination des premiers sur les secondes. «Je ne suis pas soumise. Je n’ai pas un homme derrière moi. La preuve - pour cette célibataire - mes sœurs ne le portent pas.»


Mais pourquoi ce voile-symbole ? On touche ici la limite de ses justifications. Un brin agacée : «C’est vraiment personnel. Je chemine encore. Je ne tiens pas à en parler et à me dévoiler sur ce point.»Une de ses amies d’enfance, Dicra, livre une explication : «On a tous notre crise identitaire. On est des déracinés. Ici on est étranger, là-bas aussi. Alors on se rattache à des valeurs humaines qui constituent un cheminement spirituel.»


Ilham Moussaïd est née à Ajdir, dans les montagnes marocaines, dernière de sept enfants d’une famille d’origine berbère. Un père maçon, une mère au foyer. A 3 ans, tous s’installent en France, à Avignon, dans le quartier de Saint-Chamond. Elle obtient la nationalité française à 18 ans. Ses proches la décrivent «discrète» mais «déterminée». Elle se dit «curieuse», férue de reportages sur l’Egypte antique. Amatrice de rap, de r’n’b et d’Aznavour, elle danse dès qu’il y a «un brin de musique».


Elle a ce côté naïf et idéaliste de la militante débutante. «Peu importe» son futur métier, son «but est de militer pour que les choses aillent mieux».«Elle nous apporte de la fraîcheur», souligne son camarade NPA, Hendrik Davi. Par cette candidature, Ilham Moussaïd et ses camarades veulent aussi «poser le débat en France» : montrer que dans les «quartiers populaires», il y a des femmes comme elles, avec un voile ou pas, qui peuvent s’engager en politique à l’extrême gauche. «La société française a changé de visage et Ilham est une des composantes de cette mixité sociale», pointe son amie Nora. La critique s’adresse aussi à ses propres camarades : «Marx c’est Marx mais les adhérents du NPA en 2010, c’est pas pareil ! lance la candidate. Il faut se rappeler pourquoi on est passé de la LCR au NPA : pour l’ouverture aux milieux populaires. On est un parti révolutionnaire, non ? Et bien commençons par cette révolution-là.»


Ilham Moussaïd en 7 dates



15 juin 1988: Naissance à Ajdir (Maroc).

2001: Arrivée à Avignon.

2006: Obtient la nationalité française.

2007: Rejoint l’association AJCREV à Avignon.

Février 2009: Entre au NPA.

Novembre 2009: Investie candidate aux régionales sur la liste du Vaucluse.

Février 2010: Polémique autour de son voile.

 Photo Olivier Monge. MYOP

 



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19 février 2010 5 19 /02 /février /2010 09:34

Par LCR le Jeudi, 18 Février 2010


Depuis plusieurs mois, les attaques contre le port du foulard dit islamique reprennent vigueur, au nom de «la laïcité», «du féminisme» ou carrément de «la défense des valeurs occidentales». Aujourd’hui, il est question de légiférer à plusieurs égards sur «le foulard», comme le propose ouvertement le MR et le CDH. Les autres partis gouvernementaux sont divisés par des débats internes sur le sujet et peinent à adopter une position claire pour des raisons électoralistes évidentes.


Les velléités d’interdiction du foulard à l’école ne viennent pas par hasard. Elles proviennent de partis politiques de droite comme le MR et le VLD dans l’objectif, entre autres, de séduire les (potentiel-le-s) électeurs/trices de l’extrême droite, de partis comme le Front National et le Vlaams Belang.

C’est aussi une manière de concentrer le débat médiatique sur la question du foulard comme un écran de fumée pour détourner l'attention de la crise capitaliste, de la montée du chômage, des plans d’austérité qui vont réduire les budgets des écoles, des autres services publics, des pensions.

En entretenant le racisme et le sexisme, les polémiques sur le port du foulard à l’école contribuent à diviser la population. Elles font perdre de vue les intérêts convergents des travailleurs et travailleuses, hommes et femmes, de toute culture, religion, philosophie et origine face au capitalisme et ses dégâts. Et cela d’autant plus qu’elles divisent aussi la gauche et les progressistes capables d’encourager l’organisation de résistances solidaires.

La nécessaire unité de la gauche, du mouvement ouvrier, antiraciste et féministe passe par leur capacité à contourner ces tentatives de division pour se concentrer sur les enjeux essentiels tout en défendant les droits et libertés fondamentales de chacun-e.


Dans un tel contexte, la LCR s’oppose tant à l’interdiction du port du foulard à l’école qu’à l’obligation faite à certaines musulmanes de porter ce foulard. C’est cette position, déjà exprimée par le passé[2], que la présente résolution vise à réaffirmer et à actualiser, en cohérence avec les valeurs et combats que la LCR continue à défendre comme le droit à l'école de son choix pour tous et toutes, la laïcité, l'autodétermination et l’émancipation des femmes, le pluralisme culturel et idéologique ou encore l'antiracisme et l'égalité des droits.


Préalables

Le foulard dit islamique ouvre des polémiques sous bien des angles. Il est donc nécessaire de baliser le propos de cette résolution.


1. Les amalgames entre le port du « voile », du « foulard », du « niqab » ou de la « burqua » sont courants. Mais ces pratiques sont pourtant issues de traditions et de motivations différentes. Et les velléités d'interdiction qui les concernent, dans l'espace public, au travail, à l'école ou dans le cadre d'une fonction publique ont aussi des implications distinctes, bien qu’elles se répercutent toutes concrètement en premier lieu sur les musulmanes qui les portent. Nous ne traiterons ici que de l’interdiction du port du foulard dans les écoles.


2. Bien que le retour en force de la spiritualité et de la religiosité dans les sociétés capitalistes occidentales soit un phénomène interpellant dont il convient d'appréhender les causes et les implications, il ne s'agit pas ici de traiter de la place et le rôle des religions dans les sociétés capitalistes et dans la lutte de classes. Nous reviendrons sur les principes de liberté d'opinion et d'expression -y compris religieuse- et de laïcité mais nous nous limiterons à leur incidence dans le cas concret de l'interdiction du port du foulard à l'école. Néanmoins, la LCR programme aussi une discussion sur le retour en force du religieux et sur les intégrismes.


3. Se positionner sur l'interdiction du port du foulard à l'école n'implique pas de s'affirmer pour ou contre le port du foulard en tant que pratique religieuse. D'abord parce que, au nom de l'autodétermination, cette réflexion revient avant tout aux femmes de la communauté concernée. Ensuite parce que, pour développer une position à ce propos en évitant de plonger dans les stéréotypes, il convient de partir d'une analyse plus approfondie et nuancée de l'Islam. Or, cette résolution concerne un parti qui n'a ni les compétences ni la prétention de prendre position sur des questions théologiques.


4. Cette résolution s'inscrit dans le contexte d'un Etat où l'Islam et les musulman-e-s sont minoritaires. Il est évident que la question se pose différemment dans les Etats islamiques ou avec une population majoritairement musulmane, où la réalité des femmes musulmane est toute autre. Dans tous les cas, la LCR lutte fermement contre toutes les formes de violences faites aux femmes et soutient toutes les femmes qui luttent pour leur émancipation de la façon qu'elles estiment la plus appropriée au contexte et aux rapports de force dans lesquels elles vivent.


5. Si les débats sur le foulard sont à ce point passionnés, c'est aussi parce qu'ils s'inscrivent dans un contexte d'injustices, de frustrations, de peurs et de réelles difficultés: les violences verbales, morales et physiques dans les quartiers, les écoles, les entreprises; les remises en question des droits concquis par et pour les femmes; la montée de l'obscurantisme et des intégrismes; la précarité des conditions de vie et de travail; ... Mais, contrairement à ce que pensent certain-e-s, l'interdiction du voile ou du foulard n'est pas une solution à ces problèmes. Si cette résolution ne s'y étendra pas, il est bien sûr nécessaire pour la LCR de développer des réponses politiques à ces sentiments et ces réalités.


6. Parmi les partisan-e-s de l'interdiction du foulard se retrouvent à la fois des hommes et des femmes de droite ou prétendument de gauche mais aussi d'autres sincèrement et effectivement de gauche. Leurs intentions sont évidement de nature toute différente. Venant de la droite, les arguments laïcs et féministes avancés pour obliger les femmes «à lever le voile» ne sont que de piètres feuilles de vignes accolées à une attaque ouvertement raciste et islamophobe. Venant de la gauche, ces mêmes arguments partent par contre d'une volonté sincère mais reposent néanmoins sur une interprétation erronée des principes laïcs ou féministes, se trompant ainsi dramatiquement de moyens et de cibles à viser, dans une démarche qui fait abstraction ou sous-estime la portée du contexte raciste et de l'offensive islamophobe de la droite réactionnaire. Cette résolution ne considère évidemment pas que l'ensemble des partisan-e-s de l'interdiction soit raciste et sexiste. Mais elle dénonce et condamne les résultats identiques qu'entrainent volontairement (pour la droite) ou involontairement (pour celles et ceux de la vraie gauche) leurs démarches distinctes.


Des paroles aux actes. Des actes aux lois?


Bien qu’elles ne sont généralement pas initiées par les professeurs, les parents ou encore les élèves, les polémiques sont largement amplifiées par les médias qui font preuve de peu d’impartialité en la matière et contribuent largement à faire du port du foulard à l’école un «problème de société» monté de toutes pièces. En Belgique, certain-e-s ont tenté d’importer le débat français de 2004, sans toutefois provoquer tant de remouds que de l’autre côté de la frontière. Mais, depuis lors, l’interdiction du port du foulard s’est généralisée dans la toute grande majorité des écoles.


En septembre et octobre 2009, la communauté flamande et ensuite la province de Hainaut ont décidé d’interdire le port du foulard dans toutes les écoles de leur réseau dès la rentrée 2010. Quant à la communauté française, depuis 2005, elle continue à laisser l’interdiction ou non du port du foulard à la libre appréciation des directions d’écoles en prétextant l’autonomie de ces dernières pour ne pas prendre de position tranchée. Aujourd’hui, il est question de généraliser cette interdiction en la coulant dans la loi. C’est dans ce sens que la ministre (CDH) de l'enseignement francophone envisage d'interdire le port du foulard dans les écoles de la communauté française, voire de tout le réseau officiel, jusqu'en 3e secondaire et de conserver le statut quo à partir de la 4e secondaire. Le MR, qui a déposé des projets au parlement en octobre dernier, n'est pas satisfait par ce projet qu'il juge insuffisant.


A ce jour, il est encore temps d'éviter une interdiction généralisée du port du foulard dans les écoles de Belgique francophone et du réseau libre néerlandophone. Pour les écoles de la communauté flamande et de la province du Hainaut, il s'agit de revenir sur les récentes décisions en la matière.


Une interdiction liberticide et discriminatoire


Généralement, les règlements d’ordre intérieur des écoles n’interdisent pas explicitement le foulard mais plutôt les « couvre-chef », les « signes ostentatoires » ou encore les « signes convictionnels ». Ces règlements essaient de contourner les lois réprimant le racisme et la discrimination par des formulations soi-disant neutres qui ont pour effet de dissimuler leur portée discriminatoire. Mais, tout en s'attaquant par la même occasion à d'autres symboles d'expression des jeunes comme la casquette ou le keffieh, cette terminologie hypocrite ne fait pas illusion. C’est bien le foulard qui est avant tout visé. Dans l’application concrète de telles mesures, même si des jeunes sikhs dans le Limbourg ont également été frappés par ces interdictions, ce sont majoritairement les jeunes filles musulmanes qui sont amenées à choisir entre s’inscrire dans l’école de leur choix ou pratiquer leur religion librement. Il s’agit donc bien d’une discrimination indirecte envers les jeunes filles musulmanes.


Beaucoup de jeunes musulmanes sont amenées à enlever leur foulard contre leur gré, quitte à le vivre difficilement, se sentir reniées dans leur identité et recourir aux anti-dépresseurs pour certaines. Celles qui s’y refusent doivent se tourner vers les rares écoles (quasiment aucune dans l’enseignement général en Communauté française) qui leur permettent de garder leur foulard en classe, ce qui implique parfois pour elles de se réorienter dans d’autres options ou d’autres filières que celles qu’elles auraient choisies.


Dans leur acceptation large comme dans leurs intentions réelles, de telles mesures constituent de véritables atteintes à la liberté d’expression, de pensée, de conscience et de religion des jeunes. Elles alimentent l'oppression de la jeunesse en réprimant leurs libertés et en limitant leurs espaces de débats qui devraient pourtant trouver toute leur place dans le cadre d'un enseignement démocratique. Une généralisation de cette interdiction à travers des textes législatifs s'inscrit bien dans la lignée des mesures liberticides des gouvernements bourgeois.


Une interdiction islamophobe et raciste


Après la disparition de l'URSS et de ses Etats satellites et dans un contexte de renforcement de l'impérialisme, notamment pour le contrôle des ressources énergétiques, les puissances occidentales devaient trouver un nouvel ennemi pour entretenir la peur au sein de leur population et étouffer ainsi les résistances à leurs politiques d'austérités et guerres impérialistes. Le 11 septembre 2001 a été le bon prétexte pour accentuer la stigmatisation des musulman-e-s qui les assimile à des intégristes, des obscurantistes ou des terroristes en puissance. La méconnaissance des musulman-e-s et de leur culture minoritaire dans les pays occidentaux par la majorité de la population a permis d’entretenir et de diffuser un tas de préjugés et stéréotypes pour que l’islamophobie –la peur de l’Islam et des musulman-e-s pris-es comme un tout homogène hors contextes et différenciations- gagne de plus en plus de terrain ces dernières années.


Davantage visibles dans l’espace public occidental et, comme toutes les femmes, en tête des perdant-e-s dans le système capitaliste et patriarcal, les musulmanes qui portent le foulard symbolisent le fantasme d’une soit-disant islamisation croissante de la société. Ainsi, leur corps représente le champ de bataille d’une prétendue guerre de civilisations.


Alors que, grâce aux luttes de ces dernières décennies, les discriminations racistes sont davantage dénoncées et poursuivies (sans trop de succès), les discriminations envers les musulman-e-s se multiplient dans les pays occidentaux où ils/elles sont minoritaires. La volonté d’interdire le port du foulard à l’école en est un exemple. Puisqu’elle se concrétise en discriminations réelles envers une communauté, l’islamophobie devient aussi une forme de racisme à part entière à combattre de toutes nos forces.


Pourtant, la division des progressistes en la matière les empêche de se mobiliser fermement contre ces agressions pour ouvrir des perspectives politiques solidaires et égalitaires, ce qui facilite l'adoption de mesures islamophobes et racistes comme par exemple l'interdiction des minarets en Suisse. En réaction, en Belgique comme dans les pays voisins, beaucoup de jeunes musulmans, de la deuxième et troisième génération de familles issues de l'immigration, cherchent alors dans le Coran une affirmation et une valorisation de leur identité de Belges musulman-e-s, que des jeunes filles expriment notamment à travers le port du foulard. Cette démarche s’accompagne parfois d’un repli identitaire que les musulmans conservateurs, voire réactionnaires, et intégristes s’empressent d’attiser. Mais, pour l'immense majorité des populations musulmanes d'Occident, c'est bel et bien l'application égalitaire des droits proclamés qui est recherchée, et non pas l'enfermement communautaire.


Interdire le port du foulard à l’école par crainte de prosélytisme religieux ou pour amener toutes les musulmanes à l’enlever définitivement est une mesure islamophobe parce qu'elle stigmatise les musulmans en les représentant dans une démarche constante d’endoctrinement religieux et fait planer la crainte pourtant infondée d'une déferlante islamiste dans les pays occidentaux. C'est une mesure néo-coloniale parce qu'elle présuppose une supériorité culturelle «occidentale» à laquelle tout le monde devrait se conformer. Elle est aussi contre-productive parce qu'elle attise un sentiment justifié de stigmatisation auprès des jeunes musulmanes qui doivent alors se replier complètement sur leur communauté alors qu'elles ont justement la volonté de s'ouvrir vers l'extérieur; c'est un cadeau en or pour les intégristes qui cherchent à les couper totalement de la société dans laquelle elles vivent.


Une interdiction violente et sexiste


Premières concernées, les jeunes musulmanes portant le foulard sont pourtant les premières à qui on dénie le droit à la parole, tant dans les médias, que dans les débats publics ou les cénacles politiques. Elles sont déshumanisées par une vision paternaliste et néo-coloniale qui les considère de manière générale comme dominées et soumises à leur père, à leurs frères et à un obscurantisme religieux. Ainsi, tout le monde s’arroge le droit de s’exprimer à leur place… Et cela souvent, paradoxalement, au nom du féminisme qui implique pourtant que toutes les femmes soient elles-mêmes maîtresses de leur propre vie.


Interdire le port du foulard à l’école pour permettre aux musulmanes de s’émanciper de l’oppression patriarcale est un non-sens. Concrètement, cette mesure place de nombreuses jeunes musulmanes en situation d'expulsion et de décrochage scolaire, limitant ainsi leurs relations sociales, leur avenir professionnel, leurs possibilités d’autonomie et donc leur potentiel d’émancipation. Les jeunes filles qui subissent des pressions de leur famille ou de leur entourage pour porter le foulard contre leur gré ne peuvent, au mieux, que trouver un court répit pendant les heures de cours dans une école qui interdit le port du foulard. Au pire, l’interdiction sert de prétexte pour les priver carrément de scolarité.

 


De plus, l’émancipation ne s’impose pas; elle passe nécessairement par l’autodétermination des premières concernées. Ainsi, l’interdiction du port du foulard à l’école équivaut à l’obligation du foulard imposée à certaines parce que, dans les deux cas, il s’agit de décider à la place des femmes de la façon dont elles doivent s’habiller. La seule position cohérente par rapport au foulard pour appuyer les musulmanes dans leur démarche d’émancipation est de lutter avec elles à la fois contre l’interdiction et contre l’obligation pour qu’elles soient libres de disposer de leur corps comme elles l’entendent.


Les musulmanes sont victimes de l’islamophobie ambiante, même dans les milieux féministes, en partie bourgeois et ethnocentrés. Ainsi, les choix des musulmanes librement consentis, comme celui de porter le foulard, sont souvent mis en doute par des soupçons de pressions ou d’intimidations de la part leur famille ou de leur entourage même si, bien sûr, ce phénomène existe et qu'il est à dénoncer et à combattre fermement. Pourtant, les musulmanes qui choisissent de porter le foulard ont des motivations personnelles diverses: affirmer leur droit à une pratique religieuse, affirmer leur identité reniée ou dévalorisée, protéger leur corps et leur intimité des regards et des violences sexistes, trouver davantage de confiance en elles-mêmes, ... Les choix de vie de toutes les femmes sont influencés par le patriarcat et bien plus rares sont ceux et celles qui s’interrogent de la même manière sur l’indépendance du choix d’autres femmes non musulmanes, par exemple, de fonder une famille nombreuse et de rester à la maison pour élever leurs enfants.


L’émancipation des musulmanes n’est pas conditionnée au bannissement du foulard, comme si celui-ci était apriori un facteur d’oppression: il n'est un symbole d'oppression qu'à partir du moment où il est imposé par la contrainte. D’autres marquages sexués des corps comme la mini-jupe, le maquillage ou les talons hauts peuvent tous symboliser l'oppression sans pour autant l'accentuer automatiquement.


Les voies d’émancipation expérimentées par les femmes "blanches" occidentales ne sont pas les seules possibles. Si elles peuvent être source d’inspiration, elles ne sont pas non plus transposable telles quelles à toutes les femmes de toutes les cultures. Les modes d’émancipation sont divers parce qu’ils naissent des femmes qui les portent et s'inscrivent dans des contextes et rapports de force particuliers. Le mouvement féministe ne peut que se renforcer en les intégrant dans une lutte solidaire, unitaire et pluraliste.

L’oppression patriarcale ne se limite ni à la communauté musulmane, ni aux pratiques religieuses, ni à la sphère scolaire.


Pourtant, c’est avant tout pour dénoncer –avec raison dans ce cas- les crimes d’honneur et mariages forcés ou pour interdire le port du foulard à l’école que des femmes et des hommes brandissent soudainement un étendard féministe. Belle instrumentalisation de la cause de la part de beaucoup d’entre eux/elles qui sont bien moins virulents, si pas carrément muets, lorsqu’il s’agit de s’attaquer à l’écart salarial qui reste encore important dans les pays occidentaux (25% en Belgique) ; aux discriminations quotidiennes en matière d’emploi, de santé, de logement ; aux violences sexistes qui tuent chaque jour ; à la marchandisation des corps des femmes; à la rareté des crèches; à la remise en cause permanente du droit à l’avortement et à la contraception libres et gratuits; …


La lutte contre le patriarcat passe par des mesures structurelles et volontaristes qui garantissent l’autonomie et la liberté de choix de toutes les femmes, et certainement pas par des interdictions contre les musulmanes qui contribuent, en plus, à renforcer les replis communautaires et la montée des intégrismes, avec toutes les conséquences que cela implique sur le respect et l’autonomie des femmes.


Une interdiction qui uniformise et qui ne garantit en rien la laïcité


Dans un pays comme la Belgique où la majorité des écoles font partie du «réseau libre» sous l’autorité du clergé catholique, l’interdiction du port du foulard à l’école au nom de la laïcité est une aberration. Le copié-collé du débat français apparaît ici dans toute son absurdité. Pour défendre efficacement la laïcité en Belgique, il serait évidemment bien plus efficace de se battre pour un réseau unique, public et pluraliste plutôt que de s’attaquer aux jeunes musulmanes en foulard, minoritaires dans les écoles, qui ne font qu’exercer leur liberté de religion et d’expression.


Interdire le port du foulard pour imposer l'athéisme comme unique modèle équivaut à imposer une religion, une vision du monde particulière. C'est aussi une négation de la pluralité culturelle de la société qui devrait pourtant se refléter à travers un enseignement démocratique.

Par contre, la laïcité que nous défendons s'applique aux Etats et aux pouvoirs publics et protège les sans religion et la pluralité des religions. C'est la séparation de l'Eglise et de l'Etat afin que les religions n'exercent aucun pouvoir politique et que l'Etat n'impose aucune forme de pensée philosophique. Ce n'est donc pas la séparation et l'apartheid entre les croyants et les non-croyants.


Dans l'enseignement, cela implique une neutralité philosophique des programmes, de l'orientation pédagogique ou des locaux mais cela n'a aucune implication sur les convictions et les pratiques religieuses des élèves, qui sont des usagers de l'école qui ont le droit de s'exprimer librement.

L'accès à un enseignement de qualité pour toutes et tous implique aussi que des moyens adéquats soient adoptés pour que chacun-e ait accès à l'entièreté du programme scolaire, sans que les convictions personnelles n'imposent de restrictions. Lorsque certain-e-s jeunes refusent de participer à des cours ou activités scolaires qu'ils/elles estiment contraires à leurs convictions, un dialogue ouvert entre l'équipe pédagogique et les élèves concerné-e-s est bien plus adapté pour les amener à changer d'avis qu'une interdiction péremptoire, agressive et incomprise.


Une interdiction qui renforce les inégalités sociales


En Belgique, l’enseignement est parmi les plus inégalitaires d’Europe. Le processus de sélection des élèves du primaire et secondaire entraîne une concentration des jeunes en difficultés (ou en décrochage scolaire), majoritairement issus de familles migrantes et des populations les plus défavorisées, dans les filières techniques et professionnelles des écoles dites de relégation. Là, les moyens matériels sont souvent insuffisants, les professeurs sous pression, les programmes non-vus et l’encadrement inadapté.


Or, les rares écoles qui n’interdisent pas le port du foulard et où s’inscrivent les jeunes musulmanes qui veulent continuer à le porter font justement partie de ces écoles de l’échec. Les récents décrets inscription pour les premières années du secondaire censés améliorer la « mixité sociale » ne changent pas sensiblement la situation pour ces jeunes à qui le droit fondamental à un enseignement de qualité et de la réussite est largement bafoué. Ainsi, l'interdiction de fait du port du foulard à l’école renforce encore pour les jeunes musulmanes les inégalités scolaires qui reflètent fortement les inégalités sociales desquelles elles sont pour la plupart déjà victimes.


Nos tâches


1. Les agressions envers les musulmans et particulièrement les musulmanes s’intensifient et se radicalisent de plus en plus. D’autant plus que peu de progressistes s’engagent ouvertement dans cette voie, il est urgent et nécessaire:

  • de dénoncer et de combattre l’islamophobie croissante en tant que forme à part entière de racisme ;
  • le patriarcat, le sexisme et l’instrumentalisation du féminisme qui consiste à légitimer des postures ou des mesures racistes ;
  • les replis communautaires et la montée des intégrismes religieux ou laïcs.

2. Les jeunes femmes musulmanes de milieux populaires sont parmi les premières victimes du capitalisme et du patriarcat. Parce que c’est sur base des réalités vécues par les plus opprimées et de leurs revendications que doivent se construire les mobilisations antiracistes et antisexistes sous peine de négliger les inégalités sociales les plus criantes, il est urgent et nécessaire :

  • d’encourager l’auto-organisation des jeunes musulmanes ;
  • de défendre avec elles et de faire reconnaître leurs expériences et leurs revendications dans le mouvement ouvrier et les mouvements sociaux
  • de leur faire découvrir les idées communistes révolutionnaires pour une véritable émancipation à long terme
  • d'imposer des mesures structurelles et volontaristes pour lutter contre toutes les formes de violences envers les femmes (maisons d’accueil, collectifs non mixtes autogérés, centres d’auto-défense, hébergements d’urgence, formation des travailleurs/euses des secteurs sociaux, éducatifs et judiciaires aux violences sexistes,…)

3. Pour combattre la division entre les travailleurs/euses et parmi les progressistes, il est urgent et nécessaire de dépassionner et de politiser le débat sur l’interdiction du port du foulard à l’école:

  • en l’orientant sur ses implications concrètes mises en avant par les premières concernées plutôt que sur des querelles de principes abstraits et théoriques ;
  • en liant les revendications particulières des premières concernées aux revendications portées par la majorité des travailleurs et travailleuses ;
  • en combattant les préjugés racistes et sexistes au sein des mouvements sociaux.

4. Il est urgent et nécessaire de combattre l’interdiction du port du foulard à l’école en imposant les véritables solutions pour les véritables problèmes de l'enseignement:

  • le refinancement de l’enseignement à hauteur de minimum 7% du PIB pour un meilleur encadrement et des moyens matériels et logistiques adaptés ;
  • un seul réseau unique, public, pluraliste et démocratique qui garantisse la liberté d’expression, de pensée, de conscience et de religion et l’égalité des droits pour toutes et tous ;

5. Cette résolution n'a pas la prétention de répondre à tout et est donc loin de clôturer les discussions. Au contraire, c'est un jalon pour poursuivre le débat au sein de la LCR sur les questions à la fois liées et distinctes de l'interdiction du foulard à l'école et de ses implications: l'émancipation des femmes, le rapport à la religion et la juste définition de la laïcité dans un contexte de montée du religieux et des intégrismes, le racisme et l'islamophobie, l'enseignement inégalitaire, ...


Résolution adoptée par la Direction Nationale de la LCR-SAP le 14 février 2010 par 14 votes pour, 4 contre et 3 abstentions.


[1] En 2004, la LCR avait déjà marqué son opposition à l'interdiction du port du foulard à l'école, par exemple en ratifiant le manifeste du collectif COIFE par l’intermédiaire de la Fondation Léon Lesoil et de Socialisme Sans Frontières (http://www.liberte-foulard.be ).

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13 février 2010 6 13 /02 /février /2010 09:32

vendredi 12 février 2010



Ilham Moussaïd, la militante voilée du NPA candidate aux régionales dans le Vaucluse, et Julien Salingue, qui milite au NPA en Seine-Saint-Denis, cosignent sur Rue89 une lettre ouverte aux militants de la gauche radicale .


Nous avons pris la décision d'écrire ce texte car nous trouvons que les discussions suscitées, au sein même de la gauche radicale, par l'annonce de la candidature d'Ilham se déroulent, jusqu'à présent, de manière peu constructive.


L'objectif de ce texte n'est donc pas de polariser encore un peu plus le débat, mais bien de l'apaiser. Il nous semblerait en effet paradoxal, pour ne pas dire dangereux, que notre camp social se déchire dans une période où les enjeux sociaux et politiques sont majeurs.

Les deux signataires de ce texte ont, comme chacun-e des militant-e-s du NPA, des histoires différentes, des centres d'intérêt divers et des convictions personnelles.

Nous nous retrouvons sur une orientation anticapitaliste

Nos deux parcours divergent, ainsi que nombre de nos préoccupations et références. Et pourtant nous sommes dans la même organisation, nous distribuons les mêmes tracts, nous vendons les mêmes journaux, nous défendons les couleurs du NPA car nous nous retrouvons sur son orientation anticapitaliste, écologiste, internationaliste, antiraciste, féministe et laïque.

Nous avons été sollicités pour figurer sur les listes aux élections régionales. Parce que chaque membre du parti est potentiellement un-e candidat-e, le NPA n'étant pas une organisation de politiciens professionnels mais une organisation qui refuse toute frontière étanche entre « simple militant-e » et « dirigeant-e » ou « candidat-e ».


Et parce que comme partout, nos comités et fédérations ont essayé de composer des listes qui sont non seulement à l'image du parti, mais aussi à l'image de celles et de ceux que nous voulons faire entendre lors de la campagne.

Nous voulons faire entendre la voix des opprimé-e-s, des exploité-e-s, de celles et ceux qui sont « sans-voix » dans le paysage politique et médiatique : jeunes, femmes, ouvrier-e-s, chômeur-euse-s, personnes issues des « quartiers populaires »… Parce que nous savons que le meilleur moyen de lutter contre les oppressions et l'exploitation, c'est encore que ce soient celles et ceux qui en sont les principales victimes qui se fassent entendre et s'organisent.

En France se développe aujourd'hui une « nouvelle islamophobie »

Selon les périodes, telle ou telle catégorie de la population est plus ou moins victime de discriminations et de stigmatisation. Et nul ne pourra nier que dans la France d'aujourd'hui se développe une stigmatisation de l'islam et des musulmans, une « nouvelle islamophobie », qui s'intègre à la rhétorique internationale de « guerre de civilisation ».

Des propos de Nadine Morano sur les « jeunes musulmans à casquettes » au débat nauséabond sur la Burqa en passant par les commentaires qui ont accompagné le referendum sur les minarets en Suisse, les exemples abondent malheureusement.

Pratiquant une politique volontariste dans les « quartiers populaires », engagé dans la lutte contre toutes les discriminations et tous les racismes, y compris l'islamophobie, le NPA a acquis une audience significative auprès de nouveaux publics, traditionnellement éloignés de l'extrême-gauche : parmi eux, des jeunes héritiers de l'immigration maghrébine, musulmans ou non. Et nombre d'entre eux-elles nous ont rejoints.

Un foulard qui suscite bien des peurs

Pourquoi, dès lors, être surpris ou choqués de la présence d'une jeune musulmane sur une de nos listes aux élections régionales ? Tout le monde aurait dû s'en réjouir !

Mais non, car il y a ce fameux foulard.

Un foulard qui suscite bien des peurs, des méfiances, des interrogations…


Alors que la réalité est toute simple : nous avons tous les deux des convictions personnelles que nous estimons totalement compatibles, voire même complémentaires avec notre engagement au NPA.

Des convictions qui font la richesse de nos identités et qui n'invalident pas, bien au contraire, notre attachement aux principes et objectifs énoncés plus haut. Et pour l'une d'entre nous, ça se voit. Tout simplement. L'essentiel n'étant pas comment la société française ou les organisations politiques interprètent la signification cachée de ce « signe visible », mais ce que celle qui le porte lui donne comme signification concrète.


Les médias, qui relaient complaisamment les discours islamophobes ambiants, ont orchestré une campagne contre le NPA. Doit-on s'en étonner ? Nous rappelons ici que ce n'est pas la première fois que la gauche radicale est la cible d'une telle campagne : proche du terrorisme, complaisante vis-à-vis de l'antisémitisme…


Rien ne nous a été épargné, mais nous avons su tenir bon à chaque fois et défendre nos convictions, y compris à contre-courant, sans nous laisser enfermer par les médias et les politiciens réactionnaires dans des « débats » que nous n'aurions pas choisis. Alors continuons.

Il ne s'agit pas de nier les désaccords qui peuvent exister au sein de la gauche radicale, et il y en a, entre autres sur la question religieuse. Mais il s'agit de revenir à la raison et se concentrer sur l'essentiel : débattre, évidemment, mais en n'oubliant pas que l'objectif est d'agir ensemble afin d'en finir une fois pour toutes avec l'exploitation et toutes les oppressions.


Source : http://www.rue89.com/regionales-2010/2010/02/11/avec-ou-sans-foulard-nous-sommes-dabord-laics-137987

 

 

Fonce, Ilham, et n’écoute pas les vilains 


jeudi 11 février 2010 (22h38)

de Gilles Devers avocat











Ma chère Ilham, je ne voterai pas pour toi. Parce que je n’ai pas la chance d’habiter dans le Vaucluse, et parce que le NPA, ce n’est pas ma tasse de thé, même si j’y compte de vrais amis (La bise, Hélène…). Je ne suis pas d’accord du tout avec votre positionnement, protestataire à perpétuité. Il y a dans le programme du NPA des principes économiques et sociaux que j’estime indéfendables, et qui seraient dangereux si le NPA n’avait pas fait le choix de se protéger dans la posture d’une opposition puriste. C’est la magie du verbe et l’incapacité de faire quoi que ce soit, avec comme illustration votre inaction face à la privatisation de la Poste. Mais, tu me trouveras aussi tous les défauts quand je te dirais que je suis un social démocrate réformiste, persuadé que le monde c’est le marché, et que la responsabilité politique, c’est de s’organiser avec méthode pour en amender les excès et créer, dans la vraie vie, de la solidarité.


Je ne suis donc pas prêt de voter pour toi ou tes petits camarades, mais je veux te dire très tranquillement que je trouve ta candidature incontestable, et je reste halluciné par les éructations de la politic family.

Ces bavards impénitents bafouent la Constitution, en invoquant des règles nées de leurs fantasmes déprimés. Ce qui est en cause, c’est l’article 4 : « Les partis et groupements politiques concourent à l’expression du suffrage. Ils se forment et exercent leur activité librement ». Donc, le NPA, comme tous les partis, est libre de s’organiser comme il l’entend. Aucune loi ne peut interférer, et aucun juge ne pourrait y mettre son nez. Ta candidature ne viole rien : bien au contraire, elle honore la Constitution, en poussant un peu le champ de la liberté politique. Tout centimètre gagné dans la liberté d’expression est une victoire. Bravo.


Et puis, tu colles un joli bonnet d’âne à ces ignorants, sectaires au point d’en devenir oublieux. Comment vont-ils faire demain, après leur cris de pucelles laïques effarouchées, quand ils vont côtoyer au parlement européen tous les partis politiques « démocrates-chrétiens ». La démocratie chrétienne italienne, c’est trente ans d’histoire, et la France n’avait pas rompu ses relations diplomatiques, me semble-t-il. De plus, horreur absolue, il existe en France, tiens toi bien, un Parti Chrétien Démocrate, un Mouvement Démocrate Chrétien et un Parti Républicain Chrétien : il faut envisager d’urgence leur dissolution. Et je ne te parle pas des estivales messes de Chirac à Bormes-les-Mimosas, en cortège officiel depuis le château de Brégançon. Enfin, je te livre, depuis le site de l’Assemblée Nationale, cette page au nom de « L’Abbé Pierre, Député ». Encore un coup du NPA !




 Non, ta candidature est d’autant plus légitime    que tu es une militante du NPA, assumant des  responsabilités dans ton parti. Loin du casting qui prévaut à la constitution des listes des grands partis. En Rhône Alpes, notre héros local, fer de lance de la nouvelle SFIO, Queyranne Jean-Jacques, a placé en position éligible un ancien patineur artistique. Très honorable, sans doute, mais comme contenu politique, c’est un peu court.

 

 

 

 

 

 

 


De toute façon, ne te trompe pas. Ce qui ne leur plait pas, c’est justement que tu ne rentres pas dans le moule qu’ils avaient préparé pour toi. Une femme musulmane qui porte le voile est nécessairement une bigote effarouchée, soumise au grand frère, incapable de penser par elle-même. Alors que tu aies tes idées, et que tu t’avances dans un combat politique minoritaire, ça, ce n’est pas prévu par le scénario. Merci de rester soumise aux idées toute faites, ça nous simplifierait la vie.


Le plus drôle, dans toute cette histoire, c’est la manière dont ils s’accrochent à l’ornement vestimentaire. Ce que tu penses, ce que tu dis, ce que tu fais, peu importe. Demain, une autre dirait la même chose, sans le foulard, tout irait bien. Le bonnet phrygien de Marianne est génial, mais le voile noué en bonnet d’Ilham est atroce. C’est l’apparence qui coince, alors que tu te présentes aux élections pour débattre publiquement. Et puis, dénier ton droit d’être candidat, c’est grave, et parfaitement idiot, car ta candidature est l’occasion de dépasser le symbolique, pour affronter les idées, dans le libre débat démocratique. C’est une mentalité de vilains censeurs, perdus devant une liberté qu’ils rêvent de contrôler.


Bonne chance, Ilham.




Ilham s’est cachée dans la photo. Saurez-vous la retrouver ?



La page de l’Assemblée nationale pour "L’Abbé Pierre, député".

http://www.assemblee-nationale.fr/histoire/abbe-pierre/citations.asp

Le site du Parti Chrétien Démocrate

http://www.partichretiendemocrate.fr/

Le Mouvement Démocrate Chrétien

http://www.mouvementdemocratechretien.org/topic/index.html

Le Parti Républicain Chrétien

http://www.prc-france.org/

http://lesactualitesdudroit.20minut...

 

 

"Candidate voilée: Johsua (NPA) répond à Laurent et Mélenchon" (Marianne)

Samuel Johsua, dirigeant historique de la LCR, était jusque-là «simple» directeur de campagne du NPA en Paca où se présente Ilhem Moussaïd, cette jeune militante voilée. Mais face à ce qu’il estime être une «campagne raciste», il a finalement décidé d’apparaître sur la liste et de répondre à Jean-Luc Mélenchon et Pierre Laurent qui se sont exprimés sur le sujet sur Marianne2.


De mon point de vue, la coordonnée principale, et de loin, de la polémique en cours tient à la possibilité d’assumer en tant que parti féministe un symbole (le foulard) de soumission des femmes aux hommes. Passons sur le fait que la gauche l’accepte sans souci quand il s’agit d’élues à Creil ou à Échirolles. C’est certainement un débat majeur: une fois acté sans contestation possible que le symbole historiquement attesté est bien celui-là, peut-on admettre pour autant que certaines femmes refusent cette interprétation pour elles-mêmes, et que le parti leur confie pourtant une tâche de représentation? Question légitime, d’une importance idéologique majeure, que le NPA (pour ce qui le concerne) abordera à son congrès.

Mais cet aspect se mélange d’une manière totalement indue à de soi-disant principes laïques. Abandonnons la droite à ses haines, et attristons nous de l’incroyable ignorance de ces interrogations chez le républicain qu’est Jean-Luc Mélenchon. Il nous dit doctement: «Le mouvement ouvrier a toujours payé le passage à la religion et à l’ostentation». Pardon? Quand la JOC s’est rapprochée de la gauche (dans JOC il y a «chrétien» non?), on l’a «payé»? Les plus anciens gardent le souvenir respectueux de l‘engagement du groupe «Témoignage Chrétien» dans la défense du droit à l’indépendance du peuple algérien. Une question à Mélenchon et Laurent : si ce groupe demandait à rejoindre le Front de Gauche, vous refuseriez? Et si maintenant un groupe «Témoignage Musulman» se présentait avec la même demande? Allez savoir pourquoi je suis si sûr de la réponse dans les deux cas…

Nous menons suffisamment de combats communs contre le racisme avec le PG pour ne pas engager une seule seconde contre lui un mauvais procès. Mais, en ne prenant pas la mesure (lui comme le PCF) de la nature profondément xénophobe de la tempête médiatique créée par la droite contre le NPA, ils prennent une lourde responsabilité.

«Aurélie Filippetti qui demande à Besancenot de “relire Marx” n’a jamais dû le feuilleter»


Incroyable ignorance disais-je. Car derrière le terme de laïcité se cachent de nombreuses interprétations, et, en ce qui concerne la gauche, au moins deux principales. Aurélie Filippetti qui demande à Besancenot de«relire Marx» n’a jamais dû même le feuilleter pour faire un tel contresens sur le fameux«opium du peuple». Le principal de ce que dit l’illustre barbu dans ce texte est que« éxiger qu'il soit renoncé aux illusions concernant notre propre situation, c'est exiger qu'il soit renoncé à une situation qui a besoin d'illusions.».

 C’est le cœur d’une position constante: seul le combat commun sans condition préalable contre les racines du capitalisme permettra d’éteindre le besoin de religion. Mélenchon dit:«On ne peut pas débattre de ce qui relève de la vérité révélée ». Certes, mais justement, il s’avère que pour Marx la question se règle bien moins au niveau du nécessaire débat que de la lutte commune.Mélenchon dit encore«(…)tirer les leçons de l’histoire de France(…)parce que nous avons connu trois siècles de guerres de religions ». Bien sûr! Mais justement, ces leçons font débat.

Contrairement à Guesde, le point de vue de Jaurès (bien plus modéré politiquement, mais incontestablement plus proche de Marx sur ce terrain précis) lors du débat sur la loi de séparation en 1905, est qu’il faut non pas chercher à détruire la religion elle-même, mais à«la mettre de côté»pour ainsi dire. Et, selon la formule célèbre dans les rangs révolutionnaires (qui se retrouve dans les principes fondateurs du NPA, mais dont on ignore souvent l’origine), chercher à unir le prolétariat par-delà ses divisions nationales et religieuses (on y ajoutera depuis de genre, etc…).La loi de 1905 est celle de Jaurès, pas de ses adversaires au sein du socialisme. Etonnant, vraiment, que Mélenchon l’ignore à ce point!

L'interprétation que fait Mélenchon de la laïcité «est une construction mythique, totalement fantaisiste»


Il est vrai que domine souvent une interprétation particulière, celle (que reprend donc inconsidérément Mélenchon) de la laïcité comme un partage entre le domaine«privé»individuel — où je pense ce que je veux — et domaine«public»— où je me tais (« Elle a le droit de pratiquer, mais pas dans la sphère politique»comme il dit). C’est une construction mythique, totalement fantaisiste.

 Dès le vote de la loi de 1905, il est apparu que ça n’avait aucun sens. Dans l’année qui a suivi, des maires ont cherché à interdire les processions avant de se rendre à l’évidence. Si le droit au culte est destiné au«privé»individuel, autant dire qu’il est quasi clandestin. Il en découlerait aussi que tout parti ou syndicat faisant explicitement référence au christianisme devrait être interdit par la loi. La CFTC par exemple, laquelle pourtant participe à des processus électifs républicains (élections de délégués du personnel, des élus prud’homaux) et, à l’évidence, le parti chrétien-démocrate de Boutin devrait être interdit d’élection.

C’est vraiment cela le programme du PG et du PCF? C’est intenable. On en viendrait nous aussi à interdire les minarets (mais aussi les clochers, je sais bien que nous ne ferions pas de différence…). Ce que règle la loi de 1905, donc la conception de Jaurès, c’est la séparation de l’État et des institutions religieuses par l’interdiction de tout mélange entre les deux. Il en ressort qu’aucun lien organique ne doit exister entre eux, et qu’en conséquence, l’espace public ne doit en aucun cas dépendre directement de décisions, de pressions, d’orientations fixées par les religions instituées. Les citoyens ont par exemple le droit de s’opposer à l’avortement au nom de principes religieux, mais c’est du vote de tous (en fait de la mobilisation de la société comme on le sait bien) que dépend le choix, pas d’un synode des évêques. Pas plus, pas moins.

Après (mais après seulement) le débat devient plus politique, en particulier à gauche. Que Boutin ait le droit de se revendiquer chrétienne n’implique nullement que nous à gauche qui nous battons au nom de valeurs universelles, mettions ce genre de critères en avant. Cette interrogation est légitime, mais le cheminement historique a quand même été marqué par l’évolution de courants chrétiens vers la gauche au nom même d’une vision du christianisme explicitement revendiquée.

 Là encore, vraiment étonnant que ni Mélenchon ni Laurent ne s’en souviennent. Ce mouvement a eu sa traduction politique avec un parti comme le PSU, mais aussi des adhésions massives au PC et à l’extrême gauche, puis au PS. On voit bien là vivre cette deuxième orientation, celle de Jaurès, qui continue à lutter contre les empiètements constants des religions comme institutions (et donc pour la laïcité), mais autorise les rapprochements avec des croyants qui se présentent explicitement comme tels, à condition bien entendu que la religion passe au second plan dans le combat commun.

Faut-il recommencer aujourd’hui le processus pour l’Islam (alors que les cléricaux catholiques, s’ils sont largement défaits, peuvent toujours en profiter pour rependre du poil de la bête), c’est un débat politique parfaitement acceptable (il a lieu au sein même du NPA et il est passionnant). Mais en son principe ce choix est possible au sein même du combat laïque. Décréter le contraire ne peut pas avoir d’autres significations que de bâtir justement un principe d’interdiction contre l’Islam en tant que tel, qu’on n’a pas mis en œuvre pour d’autres religions. Quand même, camarade Mélenchon, avant de confirmer un tel choix dont la gravité ne peut pas t’échapper, on y réfléchit à deux fois.

 


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