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9 février 2010 2 09 /02 /février /2010 10:37
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Femmes musulmanes, certaines avec foulard et faisant grève

A propos de la décision du NPA-Vaucluse de présenter une candidate portant le foulard : « Si les partis considèrent que les quartiers ne doivent plus être des déserts politiques, ce débat va se poser »
8 février 2010

Vincent Tiberj est chercheur à Sciences-Po et au Centre d’études européennes, spécialiste de l’extrême gauche et de l’immigration. Il revient sur les raisons qui ont amené le NPA a présenter une candidate voilée.




La présentation d’une candidate voilée, est-ce un « coup » politique du NPA ?


Non. Cela tient à une tradition de la LCR et du NPA qui essaient de coller à une forme de représentativité sociale à la différence des autres partis. Déjà en 2002, aux législatives, c’était à l’extrême gauche qu’on trouvait le plus de femmes, le plus de jeunes, et le plus de profils sociaux différents. Cette candidate, femme, jeune et qui revendique son islam est symptomatique car elle est l’antithèse du profil classique de l’homme blanc, de catégorie sociale supérieure, de 50 ans.


Pourquoi cette candidature choque-t-elle autant ?


Parce qu’il y a une certaine illusion de ce que doit être un parti trotskiste ! C’est l’image du bon vieux cadre ouvriériste pour qui seule la question sociale compte, symbolisé par LO. Le NPA, c’est un vrai syncrétisme des gauches post-matérialiste et mouvementiste, avec des références comme l’écologie, le droit à la différence et la défense des sans-papiers.


On ne peut pas comprendre ce qui s’y passe si on ne se souvient pas qu’Olivier Besancenot a milité pour le devoir de mémoire de la colonisation au lendemain des émeutes de banlieues en 2005. A la différence des autres partis, le NPA a fait de son intervention dans les quartiers une priorité. Ce sont autant de signes qui montrent, qu’au NPA, la diversité culturelle et religieuse n’est pas une nouveauté.


Cette spécificité induit-elle une approche différente de la laïcité et du féminisme ?


Oui et c’est pour cette raison qu’un certain nombre de militants sont choqués. Il y a au NPA comme dans le reste de la société, plusieurs conceptions de la laïcité qui s’affrontent :


- la vision classique d’une vieille laïcité de gauche où la religion est un ennemi qu’il faut combattre et pour qui une telle candidature est inenvisageable ;

- la laïcité classiquement républicaine séparant la sphère privée et la sphère publique pour qui cette candidate a le droit d’être croyante mais ne peut pas apparaître voilée ;

- et enfin une laïcité multiculturelle qui considère qu’à partir du moment où il y a un certain nombre d’idées partagées, qu’on soit juif, musulman ou chrétien, ne choque pas. Pour eux, le voile n’est pas forcément un signe d’oppression mais un choix.


Cette différence de conception touche aussi le féminisme. Les militantes qui montent au créneau sont celles qui se sont battues, dans les années 1970, contre toutes les formes de dominations masculines, notamment religieuses. Pour elles, le voile est perçu comme une imposition par les hommes. Ce sont des situations qui existent, mais cela ne semble pas être le cas de cette candidate qui affirme que le voile est un choix personnel.


Est-ce que l’arrivée de femmes voilées en politique ne va pas concerner d’autres partis ?


Ce phénomène a déjà touché le PS qui a une conseillère municipale voilée à Creil (Oise) et le PCF à Echirolles (Isère). A partir du moment où les partis considèrent que les quartiers ne doivent plus être des déserts politiques mais des endroits où il faut avoir des candidats, ce débat va se poser.

Les musulmans représentent une minorité qui vont vouloir aussi s’insérer dans un parti. Il ne faut pas s’arrêter aux préjugés : selon nos études, les musulmans sont autant sinon plus attachés à la laïcité que les catholiques !


Propos recueillis par Sylvia Zappi



* Article paru dans le Monde, édition du 09.02.10. LE MONDE | 08.02.10 | 14h03 • Mis à jour le 08.02.10 | 14h19.

* Vincent Tiberj est chercheur à Sciences-Po et au Centre d’études européennes, spécialiste de l’extrême gauche et de l’immigration.

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9 février 2010 2 09 /02 /février /2010 10:03
Alain BADIOU
photo : Tokujin Yoshioka Installation @ Maison Hermes Japan

(Le Monde, édition du 22 février 2004)

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


1. D’aimables républicaines et républicains arguèrent un jour qu’il fallait une loi pour interdire tout foulard sur les cheveux des filles. A l’école d’abord, ailleurs ensuite, partout si possible. Que dis-je, une loi ? Une Loi ! Le président de la République était un politicien aussi limité qu’insubmersible. Totalitairement élu par 82 % des électeurs, dont tous les socialistes, gens parmi lesquels se recrutaient nombre des aimables républicain(e)s en question, il opina du bonnet : une loi, oui, une Loi contre le petit millier de jeunes filles qui mettent le susdit foulard sur leurs cheveux. Les pelées, les galeuses ! Des musulmanes, en plus ! C’est ainsi qu’une fois de plus, dans la ligne de la capitulation de Sedan, de Pétain, de la guerre d’Algérie, des fourberies de Mitterrand, des lois scélérates contre les ouvriers sans papiers, la France étonna le monde. Après les tragédies, la farce.


2. Oui, la France a enfin trouvé un problème à sa mesure : le foulard sur la tête de quelques filles. On peut le dire, la décadence de ce pays est stoppée. L’invasion musulmane, de longtemps diagnostiquée par Le Pen, aujourd’hui confirmée par des intellectuels indubitables, a trouvé à qui parler. La bataille de Poitiers n’était que de la petite bière, Charles Martel, un second couteau. Chirac, les socialistes, les féministes et les intellectuels des Lumières atteints d’islamophobie gagneront la bataille du foulard. De Poitiers au foulard, la conséquence est bonne, et le progrès considérable.


3. A cause grandiose, arguments de type nouveau. Par exemple : le foulard doit être proscrit, qui fait signe du pouvoir des mâles (le père, le grand frère) sur ces jeunes filles ou femmes. On exclura donc celles qui s’obstinent à le porter. En somme : ces filles ou femmes sont opprimées. Donc, elles seront punies. Un peu comme si on disait : "Cette femme a été violée, qu’on l’emprisonne". Le foulard est si important qu’il mérite une logique aux axiomes renouvelés.


4. Ou, au contraire : ce sont elles qui veulent librement le porter, ce maudit foulard, les rebelles, les coquines ! Donc, elles seront punies. Attendez : ce n’est pas le signe d’une oppression par les mâles ? Le père et le grand frère n’y sont pour rien ? D’où vient qu’il faut l’interdire, alors, ce foulard ? C’est qu’il est ostentatoirement religieux. Ces coquines "ostentent" leur croyance. Au piquet, na !


5. Ou c’est le père et le grand frère, et féministement le foulard doit être arraché. Ou c’est la fille elle-même selon sa croyance, et "laïcisement" il doit être arraché. Il n’y a pas de bon foulard. Tête nue ! Partout ! Que tout le monde, comme on disait autrefois - même les pas-musulmanes le disaient - sorte "en cheveux".


6. Notez bien que le père et le grand frère de la fille au foulard ne sont pas de simples comparses parentaux. On l’insinue souvent, parfois on le déclare : le père est un ouvrier abruti, un pauvre type directement "venu du bled" et commis aux chaînes de Renault. Un archaïque. Mais stupide. Le grand frère deale le shit. Un moderne. Mais corrompu. Banlieues patibulaires. Classes dangereuses.


7. La religion musulmane ajoute aux tares des autres religions celle-ci, gravissime : elle est, dans ce pays, la religion des pauvres.


8. Imaginons le proviseur d’un lycée, suivi d’une escouade d’inspecteurs armés de centimètres, de ciseaux, de livres de jurisprudence : on va vérifier aux portes de l’établissement si les foulards, kippas et autres couvre-chefs sont "ostentatoires". Ce foulard grand comme un timbre poste perché sur un chignon ? Cette kippa comme une pièce de deux euros ? Louche, très louche. Le minuscule pourrait bien être l’ostentation du majuscule. Mais, que vois-je ? Gare ! Un chapeau haut de forme ! Hélas ! Mallarmé, interrogé sur le chapeau haut de forme, l’a dit : "Qui a mis rien de pareil ne peut l’ôter. Le monde finirait, pas le chapeau." Ostentation d’éternité.


9. La laïcité. Un principe inoxydable ! Le lycée d’il y a trois ou quatre décennies : interdiction de mélanger les sexes dans la même classe, pantalon décommandé aux filles, catéchisme, aumôniers. La communion solennelle, avec les gars en brassard blanc et les mignonnes sous le voile de tulle. Un vrai voile, pas un foulard. Et vous voudriez que je tienne pour criminel ce foulard ? Ce signe d’un décalage, d’un remuement, d’un enchevêtrement temporel ? Qu’il faille exclure ces demoiselles qui mêlent agréablement hier et aujourd’hui ? Allez, laissez faire la broyeuse capitaliste. Quels que soient les allers et retours, les repentirs, les venues ouvrières du lointain, elle saura substituer aux dieux morts des religions le gras Moloch de la marchandise.


10. Au demeurant, n’est-ce pas la vraie religion massive, celle du commerce ? Auprès de laquelle les musulmans convaincus font figure de minorité ascétique ? N’est-ce pas le signe ostentatoire de cette religion dégradante que ce que nous pouvons lire sur les pantalons, les baskets, les tee-shirts : Nike, Chevignon, Lacoste,... N’est-il pas plus mesquin encore d’être à l’école la femme sandwich d’un trust que la fidèle d’un Dieu ? Pour frapper au cœur de la cible, voir grand, nous savons ce qu’il faut : une loi contre les marques. Au travail, Chirac. Interdisons sans faiblir les signes ostentatoires du Capital.


11. Qu’on m’éclaire. La rationalité républicaine et féministe de ce qu’on montre du corps et de ce qu’on ne montre pas, en différents lieux et à différentes époques, c’est quoi ? Que je sache, encore de nos jours, et pas seulement dans les écoles, on ne montre pas le bout des seins ni les poils du pubis, ni la verge. Devrais-je me fâcher de ce que ces morceaux soient "dérobés aux regards" ? Soupçonner les maris, les amants, les grands frères ? Il y a peu dans nos campagnes, encore de nos jours en Sicile et ailleurs, les veuves portent fichus noirs, bas sombres, mantilles. Il n’y a pas besoin pour cela d’être la veuve d’un terroriste islamique.


12. Curieuse, la rage réservée par tant de dames féministes aux quelques filles à foulard, au point de supplier le pauvre président Chirac, le soviétique aux 82 %, de sévir au nom de la Loi, alors que le corps féminin prostitué est partout, la pornographie la plus humiliante universellement vendue, les conseils d’exposition sexuelle des corps prodigués à longueur de page dans les magazines pour adolescentes.


13. Une seule explication : une fille doit montrer ce qu’elle a à vendre. Elle doit exposer sa marchandise. Elle doit indiquer que désormais la circulation des femmes obéit au modèle généralisé, et non pas à l’échange restreint. Foin des pères et grands frères barbus ! Vive le marché planétaire ! Le modèle, c’est le top modèle.


14. On croyait avoir compris qu’un droit féminin intangible est de ne se déshabiller que devant celui (ou celle) qu’on a choisi (e) pour ce faire. Mais non. Il est impératif d’esquisser le déshabillage à tout instant. Qui garde à couvert ce qu’il met sur le marché n’est pas un marchand loyal.


15. On soutiendra ceci, qui est assez curieux : la loi sur le foulard est une loi capitaliste pure. Elle ordonne que la féminité soit exposée. Autrement dit, que la circulation sous paradigme marchand du corps féminin soit obligatoire. Elle interdit en la matière - et chez les adolescentes, plaque sensible de l’univers subjectif entier - toute réserve.


16. On dit un peu partout que le "voile" est l’intolérable symbole du contrôle de la sexualité féminine. Parce que vous imaginez qu’elle n’est pas contrôlée, de nos jours, dans nos sociétés, la sexualité féminine ? Cette naïveté aurait bien faire rire Foucault. Jamais on n’a pris soin de la sexualité féminine avec autant de minutie, autant de conseils savants, autant de discriminations assénées entre son bon et son mauvais usage, La jouissance est devenue une obligation sinistre. L’exposition universelle des morceaux supposés excitants, un devoir plus rigide que l’impératif moral de Kant.


Au demeurant, entre le "Jouissez, femmes !" de nos gazettes et l’impératif "Ne jouissez pas !" de nos arrière-grands-mères, Lacan a de longue date établi l’isomorphie. Le contrôle commercial est plus constant, plus sûr, plus massif que n’a jamais pu l’être le contrôle patriarcal. La circulation prostitutionnelle généralisée est plus rapide et plus fiable que les difficultueux enfermements familiaux, dont la mise à mal, entre la comédie grecque et Molière, a fait rire pendant des siècles.


17. La maman et la putain. On fait dans certains pays des lois réactionnaire pour la maman et contre la putain, dans d’autres, des lois progressistes pour la putain et contre la maman. C’est cependant l’alternative qu’il faudrait récuser.


18. Non pas toutefois par le "ni... ni...", qui ne fait jamais que perpétuer en terrain neutre (au centre, comme Bayrou ?) ce qu’il prétend contester. "Ni maman ni putain", cela est tristounet. Comme "ni pute ni soumise", lequel est au demeurant absurde : une "pute" n’est-elle pas généralement soumise, oh combien ? On les appelait, autrefois, des respectueuses. Des soumises publiques, en somme. Quant aux "soumises", elles ne sont peut-être que des putains privées.


19. On y revient toujours : l’ennemi de la pensée, aujourd’hui, c’est la propriété, le commerce, des choses comme des âmes, et non la foi. On dira bien plutôt que c’est la foi (politique) qui manque le plus. La "montée des intégrismes" n’est que le miroir dans lequel les Occidentaux repus considèrent avec effroi les effets de la dévastation des consciences à laquelle ils président. Et singulièrement la ruine de la pensée politique, qu’ils tentent partout d’organiser, tantôt sous couvert de démocratie insignifiante, tantôt à grand renfort de parachutistes humanitaires. Dans ces conditions, la laïcité, qui se prétend au service des savoirs, n’est qu’une règle scolaire de respect de la concurrence, de dressage aux normes "occidentales" et d’hostilité à toute conviction. C’est l’école du consommateur cool, du commerce soft, du libre propriétaire et du votant désabusé.


20. On ne s’extasiera jamais assez sur la trajectoire de ce féminisme singulier qui, parti pour que les femmes soient libres, soutient aujourd’hui que cette "liberté" est si obligatoire qu’elle exige qu’on exclue des filles (et pas un seul garçon !) du seul fait de leur apparat vestimentaire.


21. Tout le jargon sociétal sur les "communautés" et le combat aussi métaphysique que furieux entre "la République" et "les communautarismes", tout cela est une foutaise. Qu’on laisse les gens vivre comme ils veulent, ou ils peuvent, manger ce qu’ils ont l’habitude de manger, porter des turbans, des robes, des voiles, des minijupes ou des claquettes, se prosterner à toute heure devant des dieux fatigués, se photographier les uns les autres avec force courbettes ou parler des jargons pittoresques. Ce genre de "différences" n’ayant pas la moindre portée universelle, ni elles n’entravent la pensée, ni elles ne la soutiennent. Il n’y a donc aucune raison, ni de les respecter, ni de les vilipender. Que "l’Autre", - comme disent après Levinas les amateurs de théologie discrète et de morale portative - vive quelque peu autrement, voilà une constatation qui ne mange pas de pain.


22. Quant au fait que les animaux humains se regroupent par provenance, c’est une conséquence naturelle et inévitable des conditions le plus souvent misérables de leur arrivée. Il n’y a que le cousin, ou le compatriote de village, qui peut, volens nolens, vous accueillir au foyer de St Ouen l’Aumône. Que le chinois aille là où il y a déjà des Chinois, il faut être obtus pour s’en formaliser.


23. Le seul problème concernant ces "différences culturelles" et ces "communautés" n’est certes pas leur existence sociale, d’habitat, de travail, de famille ou d’école. C’est que leurs noms sont vains là où ce dont il est question est une vérité, qu’elle soit d’art, de science, d’amour ou, surtout, de politique. Que ma vie d’animal humain soit pétrie de particularités, c’est la loi des choses. Que les catégories de cette particularité se prétendent universelles, se prenant ainsi au sérieux du Sujet, voilà qui est régulièrement désastreux. Ce qui importe est la séparation des prédicats. Je peux faire des mathématiques en culotte de cheval jaune et je peux militer pour une politique soustraite à la "démocratie" électorale avec une chevelure de Rasta. Ni le théorème n’est jaune (ou non-jaune), ni le mot d’ordre qui nous rassemble n’a de tresses. Non plus d’ailleurs qu’il n’a d’absence de tresses.


24. Que l’école soit, dit-on, fort menacée par une particularité aussi insignifiante que le foulard de quelques filles amène à soupçonner que ce n’est jamais de vérité qu’il y est question. Mais d’opinions, basses et conservatrices. N’a-t-on pas vu des politiciens et des intellectuels affirmer que l’école est d’abord là pour "former des citoyens" ? Sombre programme. De nos jours, le "citoyen" est un petit jouisseur amer, cramponné à un système politique dont tout semblant de vérité est forclos.


25. Ne serait-on pas préoccupé, en haut et bas lieu, de ce que nombre de filles d’origine algérienne, marocaine, tunisienne, le chignon bien serré, la mine austère, acharnées au travail, composent, avec quelques Chinois non moins vissés à l’univers familial, de redoutables têtes de classe ? De nos jours, il y faut pas mal d’abnégation. Et il se pourrait que la Loi du soviétique Chirac aboutisse à l’exclusion tapageuse de quelques excellentes élèves.


26. "Jouir sans entraves", cette ânerie soixante-huitarde, n’a jamais fait tourner à haut régime le moteur des savoirs. Une certaine dose d’ascétisme volontaire, on en connaît la raison profonde depuis Freud, n’est pas étrangère au voisinage de l’enseignement et d’au moins quelques rudes fragments de vérités effectives. De sorte qu’un foulard, après tout, peut servir. Là où désormais le patriotisme, cet alcool fort des apprentissages, fait entièrement défaut, tout idéalisme, même de pacotille, est le bienvenu. Pour qui du moins suppose que l’école est autre chose que la "formation" du citoyen-consommateur.


27. En vérité, la Loi foulardière n’exprime qu’une chose : la peur. Les Occidentaux en général, les Français en particulier, ne sont plus qu’un tas frissonnant de peureux. De quoi ont-ils peur ? Des barbares, comme toujours. Ceux de l’intérieur, les "jeunes des banlieues" ; ceux de l’extérieur, les "terroristes islamistes". Pourquoi ont-ils peur ? Parce qu’ils sont coupables, mais se disent innocents. Coupables d’avoir, à partir des années 1980, renié et tenté d’anéantir toute politique d’émancipation, toute raison révolutionnaire, toute affirmation vraie d’autre chose que ce qu’il y a. Coupables de se cramponner à leurs misérables privilèges. Coupables de n’être plus que de vieux enfants qui jouent avec ce qu’ils achètent. Eh oui, "dans une longue enfance on les a fait vieillir". Aussi ont-ils peur de tout ce qui est un peu moins vieux qu’eux. Par exemple, une demoiselle entêtée.


28. Mais surtout, Occidentaux en général et Français en particulier ont peur de la mort. Ils n’imaginent même plus qu’une Idée puisse valoir qu’on prenne pour elle quelques risques. "Zéro mort", c’est leur plus important désir. Or, ils voient partout dans le monde des millions de gens qui n’ont aucune raison, eux, d’avoir peur de la mort. Et, parmi eux, beaucoup, presque chaque jour, meurent au nom d’une Idée. Cela est pour le "civilisé" la source d’une intime terreur.


29. Et je sais bien que les Idées pour lesquelles on accepte aujourd’hui de mourir ne valent en général pas cher. Convaincu que tous les dieux ont de longue date déclaré forfait, je me désole de ce que de jeunes hommes, de jeunes femmes, déchiquettent leurs corps dans d’affreux massacres sous la funèbre invocation de ce qui depuis longtemps n’est plus. Je sais en outre qu’ils sont instrumentés, ces "martyrs" redoutables, par des comploteurs peu discernables de ceux qu’ils prétendent abattre. On ne redira jamais assez que Ben Laden est une créature des services américains. Je n’ai pas la naïveté de croire à la pureté, ni à la grandeur, ni même à une quelconque efficacité, de ces tueries suicidaires.


30. Mais je dis que ce prix atroce est d’abord payé à la destruction minutieuse de toute rationalité politique par les dominants d’Occident, entreprise que n’ont rendue aussi largement praticable que l’abondance, notamment en France, des complicités intellectuelles et populaires. Vous vouliez avec acharnement liquider jusqu’au souvenir de l’Idée de révolution ? Déraciner tout usage, même allégorique, du mot "ouvrier" ? Ne vous plaignez pas du résultat. Serrez les dents, et tuez les pauvres. Ou faites-les tuer par vos amis américains.


31. On a les guerres qu’on mérite. Dans ce monde transi par la peur, les gros bandits bombardent sans pitié des pays exsangues. Les bandits intermédiaires pratiquent l’assassinat ciblé de ceux qui les gênent. Les tout petits bandits font des lois contre les foulards.


32. On dira que c’est moins grave. Certes. C’est moins grave. Devant feu le Tribunal de l’Histoire, nous obtiendrons les circonstances atténuantes : "Spécialiste des coiffures, il n’a joué dans l’affaire qu’un petit rôle".


Alain Badiou
philosophe, écrivain et professeur à l’école normale supérieure.


texte trouvé ici http://pagesperso-orange.fr/felina/doc/laic/badiou.htm

Une analyse du débat qu'a provoqué la candidature Ilham sur la liste NPA en Rhône Alpes. Analyse intéressante parce qu'elle inscrit ce "débat" dans le combat que mènent les capitalismes pour diviser les opprimés dans leur ensemble.


Car leur peur n'est pas le voile mais de voir les jeunes des cités se politiser et prendre la place qui leur revient de droit dans la politique de la cité.

Ilham est jeune, issue de l'immigration et porte un foulard tout en défendant l'ensemble des victimes des ravages du capitalisme.


C'est en celà qu'elle fait peur... Peur qu'elle ne soit le symbole que le peuple dans ses différences et en les acceptants peut s'unir contre son véritable adversaire : La bourgoisie !

Nous devons rester uni face à cette attaque qui au travers de Hilam est une attaque contre l'ensemble de prolétaires.

Soutien total et inconditionnel à Ilham Moussaid !

Carland




Par Copas
 à propos du
 communiqué du comité Exécutif
du NPA du 8 février...

Le CE du NPA n’a pas compris le sens de la grande attaque des médias et des appareils contre ce parti et sa militante.

C’est extrêmement grave de ne pas relever et comprendre le sens de l’attaque qui dépasse la question de la laïcité.


  La laïcité n’est pas le sujet de cette affaire !


Le sujet vient que la bourgeoisie manœuvre de façon de plus en plus déterminée pour désigner un bouc émissaire dans la grande crise que nous vivons.

Des vagues d’agressions sociales se font par la bourgeoisie , de plus en plus rapprochées et les maneuvres pour désigner des boucs émissaires sont de plus en plus intenses.

La droite (avec quelques bruns de gauche) travaille le sujet à coups redoublés et accélère le pas maintenant.

Des reconduites àla frontière en grande démonstrations, rafles, débat sur l’identité nationale, terrorisme, loi sur la burqa, il ne se passe pas de jour sans que les médias bourgeois cherchent à illustrer le thème de la dangerosité de l’Islam, ou les immigrés, etc, sur tous les tons possibles sans risquer de procès .

Tout est mis en place pour désigner à la vindicte une communauté qui représente ce que représentaient les juifs lors de la dernière grande crise.

La bourgeoisie est donc prète à tous les dérapages.

Parallèlement à la désignation d’un bouc émissaire, les musulmans et tous ceux dont les ancêtres sont venus de pays à dominante musulmane, la bourgeoisie ne souhaite pas que l’alternative réelle à son système apparaisse, construite sur l’anticapitalisme.

Et précisément l’anticapitalisme n’a cessé de progressé ces dernières années, les réactions redeviennent de plus en plus vives dans la classe populaire après avoir marqué un passage à vide pendant 6-7 mois.

les nouvelles attaques et vagues de chômage pointent le bout de leur nez.

Et c’est justement le deuxième point qui explique la hargne de la bourgeoisie et de la gauche malpropre qui gère pour les patrons :

Ilham revendique d’être anticapitaliste.

L’un , la minorité visible (ah si elle s’était normalisée en enlevant le fichu ....) qu’on souhaite transformer en bouc émissaire

l’autre , le parti le plus visiblement anti-capitaliste (ce qui ne signifie rien de la justesse de la ligne de ce parti)


C’est bien la conjugaison des deux qui a fait le haut le coeur de ceux qui votent à tour de bras des subventions aux écoles catholiques privées, se font voir à génuflexer, à se signer publiquement, etc...


Et c’est là la bourgeoisie qui s’affole et hurle, avec quelques salauds utiles et lâches à gauche.

Les deux cibles de la bourgeoisie étaient ensemble dans le collimateur , c’est l’addition des deux qui fait la réaction violente .

Il y a eu des candidates de listes du PS et d’union de la gauche sous direction PC , même élu et ça n’a pas traumatisé ni la gauche ni l’appareil de la bourgeoisie.

Il faut donc reconnaitre qu’un autre élément rentrait en ligne de compte, et ce sont bien l’anticapitalisme et la minorité visible conjugués qui ont fait le spasme de la bourgeoisie, ses hurlements et ses appels à l’agression.


Et ça , ça n’a rien à voir avec le débat sur la laïcité, débat honorable et utile par ailleurs et qu’il faut mener.

Le CE NPA se trompe en y voyant un débat sur la laïcité, ou même sur l’islamophobie dégagée du contexte de classe.

C’est bien les deux qui font la violence de la réaction de la droite et de la gauche de gestion libérale.


Et c’est ça qu’il fallait débusquer en montant les paris dans le débat.

Lequel débat a passé maintenant les frontières.


Source : http://bellaciao.org/fr/spip.php?article98116

 

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8 février 2010 1 08 /02 /février /2010 10:12
Lettre à Ilham Moussaid

dimanche 7 février 2010 (23h44)


de La Louve


Elle finira bientôt par être drôle, cette histoire de voile.


Drôle et signifiante.


Si la France avait encore compté plus de Roland Barthes que de Bernard-Henri Lévy, si l’on entendait plus Jean Starobinski que la Star Academy, plus de Lacan que de cancans, peut être que nous n’en serions pas réduits aujourd’hui à avancer comme des rats dans un tunnel de ténèbres et d’immondices.


Qui sont les obscurantistes aujourd’hui?

Celles qui portent un foulard sur les cheveux parce qu’elle ne se sont pas (encore?) résolues à l’ôter?

Parce que leur parcours personnel, leur cheminement individuel et politique, philosophique à ce stade, ne leur impose pas (et peut être jamais, et alors?) l’athéisme comme absolument nécessaire à leur combat?


Ou ceux qui font de la transparence, du dévoilement érigés en principe impératif catégorique, l’obstacle le plus sûr à l’émancipation du peuple par le peuple?


L’obligation de se dévoiler est un ordre imbécile donné par des tartuffes qui avancent masqués tous les jours, et ne font les choses, eux , que derrière un voile.

L’obligation de se dévoiler est un ordre inique donné par des lâches qui meurent de trouille que l’autre voile, le vrai voile, celui qui tient le peuple dans l’ignorance et la paralysie, celui qui protège leurs magouilles, soit arraché.

A leur incantation forcenée et hystérique au dévoilement devrait être répondu :

"Chiche? Si moi, j’enlève mon voile, toi, tu enlèves ton masque".


Je me dévoile si tu te dévoiles.

Je me dévoile si tu dévoiles quelque chose de bien plus laid et répugnant que cette religion que tu me reproches, je me dévoile si tu dévoiles, toi, tes motifs réels, tes intérêts personnels à prendre ouvertement tes concitoyens pour des cons en prétendant être "de gauche" depuis 25 ou 30 ans.


Chère Ilham,

Je ne te connais pas, mais je te dis : garde-le, ton foulard, si c’est ainsi que tu te sens bien, si c’est ainsi que tu te sens suffisamment forte pour entrer dans ce difficile combat qu’est celui que tu as choisi.

Garde-le, je préfère gagner une camarade avec un foulard, plutôt que de perdre une camarade qui était prête à lutter avec toutes et tous sans exclusive contre le capitalisme, à cause d’un foulard.

Ce monde dans lequel nous visons toutes, nous autres, toutes un peu "Ilham", au fond, est encore et toujours, un monde d’hommes, patriarcal ou machiste, réactionnaire, au moins autant à gauche qu’à droite.

On te clouera au pilori "pour ton bien".

On te contestera ta légitimité "pour ton bien".

On te tiendra à l’écart "pour ton bien".

On se servira de toi "pour ton bien".

On te raillera si tu es laide, car tu seras jugée "imbaisable",(traduire : indigne de recevoir leurs fantasmes de bites aussi courtes que leurs idées).


On te méprisera si tu es jolie, a fortiori si tu ne te donnes pas, on te fera passer pour une sotte, une hystérique, une arriviste, une marie-couche-toi-là "Ah on sait bien comment elle est arrivée là celle-là".

Et les femmes qui singent les hommes, croyant ainsi, avec leurs minables petites couilles d’emprunt, oublieuses que c’est dans leur ventre que peut naître la vie nouvelle, y arriver mieux et plus vite, ne seront pas les dernières à te caillasser, oh non.


Sur cette voie difficile, celle d’être une femme qui, en plus, lutte pour son émancipation (contre un père, contre une culture, contre une famille, contre le capitalisme...), tu rencontreras aussi des hommes, de vrais hommes, pas des macaques qui courent après les ombres dans la caverne, pour qui tu seras une Égale sans pourtant cesser d’être une Autre, c’est-à-dire, une femme.


Pour aller encore plus loin (et tant pis si on me le reproche) si à ma manière je n’avais pas "la foi", une foi en ce que l’homme peut être capable du pire comme du meilleur, une foi en l’espoir d’un avenir meilleur, je ne serai pas là en train de t’écrire.


Prends-soin de toi, reste toi-même le plus possible, la politique change les êtres. Rend coup pour coup quand on te frappe, ne t’excuse jamais d’avoir un point de vue minoritaire, sache aussi écouter les autres quand ils prennent la peine d’argumenter avec toi et reconnaître tes erreurs le moment venu, et "Vai via".


J’ai confiance en nous toutes et tous militant-e-s communistes, socialistes révolutionnaires, anarchistes ; le jour, (s’il arrive, ce jour !), où tu confondrais profession de foi politique et profession de foi religieuse, nos chemins se sépareraient.


Nous pourrions sans doute avoir des différends politiques, mais ce ne sera pas ton foulard qui nous servira d’argument ce jour-là, et c’est à cela que, malgré tout, nous nous reconnaîtrons (personnellement, en tout cas, j’espère bien que je n’en serai jamais réduite à de telles bassesses, j’espère me respecter toujours assez et respecter encore assez les autres pour exercer un minimum de dialectique et d’analyse critique).


Salutations militantes


http://osemy.blogspot.com/2010/02/ce-que-devoile-le-voile-lettre-ilham.html

 





Pierre Tévanian














 

Le voile médiatique  : un faux débat...


Ainsi le « voile » va magnifiquement « voiler » les problèmes sociaux !



A nouveau l’opposition capital/travail va être occultée ! Diviser ceux que l’oppression capitaliste réunit ! Et réunir ceux que le capital divise ! Voilà ce que le « voile » va réussir à faire ! Et on retrouvera, comme par miracle, les dominés unis aux dominants au nom de la laïcité … qui oppresse !


Bravo ! Résultat ? Collectivement nous allons « exclure » une minorité qui souffre ! Nous allons en faire nos boucs émissaires ! En quoi l’interdiction du voile serait moins violente que l’obligation de le porter ? Et nous prétendons, après cela, être les défenseurs héroïques de la liberté et de la fraternité !!! De même qu’à l’époque l’Education nationale a réussi à éjecter une cinquantaine de gamines de l’école sous prétexte qu’elles portaient une voilette moins moche que celle de nos nonnes et religieuses qu’on ne vilipende pas pour autant !


Qu’est-ce qu’elles en ont pensé de notre liberté et fraternité ? Mais nous avons brillamment réussi la chose suivante : humilier des gamines ! Quelle gloire ? J’ai eu honte d’un tel lynchage ! Interdire à des gamines voilées l’accès à l’école est-ce éducatif ? Est-ce prôner l’émancipation ? Non ! C’est juste ghettoïser culturellement ! Au nom de la liberté… nous excluons ! Il n’y a que les crétins umpistes ( et LO et F. Grond) pour le penser ! Au nom de la liberté nous supprimons la liberté !! J’ai eu ce genre de gamines en classe ! Elles sont bien ! J’étais de leur côté ! Il suffit d’accueillir !.... D’être généreux ! De tolérer ! D’aimer ! De respecter !


Dans la dictature tunisienne le voile est interdit aussi ! Et ce, au nom de l’émancipation ! Et, pourtant, les femmes le portent ….. en signe de résistance ! De même qu’en Pologne des communistes dissidents ( complètement athées) allaient à l’Eglise juste pour protester ! Au Pakistan, en Inde il y a des communistes qui sont Hindous et Musulmans !


Un an avant l’assassinat de Che Guevara en Bolivie, Camilo Torres – un curé – mourrait les armes à la main (le 15 février 1965) en Colombie ! Il disait : « si Jésus existait aujourd’hui il serait guérillero ». Sachant qu’il était curé l’auriez- vous combattu ??? Le prêtre François Houtard (de Louvain) est anticapitaliste ! Il faut lire son livre sur la mondialisation ! Mais il est prêtre ! Faut-il l’exclure ! Mieux : lutter contre lui ! Où allons-nous si nous suivons les voies de la division ?


Les dominants aiment ça : les esclaves-salariés se battent entre eux – c’est le comble - pour un chiffon ! Pour moi la camarade Ilham qui porte le voile ne montre qu’une chose : son sentiment d’exclusion, sa volonté de retrouver une identité et ce, à travers le NPA ( ce qui est un honneur pour nous !). Ne défendons-nous pas les exclus ? … d’où qu’ils viennent ? Nous défendons les palestiniens, les sans-papiers ; nous sommes contre la guerre en Afghanistan, etc… Et notre camarade Ilham? Il suffit qu’elle soit en France pour que soudain nous participions à sa « lapidation » symbolique ? ! Bravo ! Sinon les strings, les képis, les lederhosen, les cravates, etc. ce n’est pas interdit !!!? Absurde ! En Allemagne, aux USA ( cf le 1ier amendement), en GB, cette histoire de voile est considérée comme ridicule !


Moi qui suis parfaitement athée, j’ai tout de même lu la Bible, la Thorah, le nouveau testament, le Coran, Lao-Tseu, etc.. je vous conseille de méditer la parabole du « bon Samaritain » !


Conclusion : Diviser ceux que l’oppression capitaliste réunit ! Et réunir ceux que le capital divise ! Tel est le but de l’opération "voile" !


« L’on ne sait ce que l’on doit le plus admirer : la ruse des dirigeants ou l’idiotie des gouvernés » C’est de Tchouang Tseu au 4ième siècle avant notre ère !

Serge Pralat de Solesmes (59).


http://www.evene.fr/livres/livre/pierre-tevanian-le-voile-mediatique-21799.php

 

Réponse du maire communiste d’Echirolles, qui justifie le voile de sa conseillère municipale
jeudi 4 février 2010 (23h37)

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BesmaMechta Déléguée Animation des Centre Sociaux

En réponse à la lettre d’une de ses administrées protestant contre le port du voile d’une des élues au Conseil Municipal dans le cadre de ses fonctions, le Maire d’Echirolles (38) lui a envoyé une missive...


LETTRE DE RENZO SULLI, MAIRE D’ECHIROLLES

Madame,

Je vous remercie de votre courrier qui soulève une question très importante : celle du combat pour la laïcité, qui est et doit rester le socle inébranlable de notre République. Vous le savez, j’en suis un ardent défenseur et je partage donc complètement vos positions sur le sujet.


Mais la laïcité n’est ni un acquis définitif, ni donné à chacun de nous à la naissance. Elle est le fruit d’un modèle culturel dans lequel nous baignons dès notre enfance et qui nous fait adhérer à ses valeurs. Au-delà de cette éducation, nous en mesurons en grandissant et dans la pratique tous les effets bénéfiques, ceux qui nous protègent de l’intransigeance, qui permettent aux hommes et aux femmes de garder leur libre arbitre, aux peuples d’échapper à certaines guerres.


La laïcité n’est jamais un acquis définitif et le combat pour sa protection et son développement doit être quotidien et vigilant.

Que faire alors de ces Français, venus d’ailleurs, imprégnés d’autres cultures et traditions et qui n’ont pas eu la chance d’être les héritiers de 1789, et bien plus tard de la loi 1905. 111 ans pour convaincre le peuple de France du bien fondé de la séparation de l’Eglise et de l’Etat.


Certains d’entre eux ne veulent pas en entendre parler et préfèrent rester dans leur approche religieuse de la société, voire se radicalisent.

D’autres commencent à « s’ouvrir », font les pas qu’ont eu à faire nos grands-pères, en France comme dans le reste de l’Europe pour enfin adhérer à ces valeurs.


D’autres enfin s’engagent davantage pour revendiquer le droit de vivre dans une République laïque (même en restant croyants par ailleurs), ils mesurent la liberté qui s’ouvrent ainsi à eux, celle que certains de leurs ancêtres avaient pu déjà connaître dans une période trop éphémère de l’Andalousie musulmane et éclairée.


Ils font ce chemin, agissent auprès de nous, militent dans les associations et confortent leur confiance en notre modèle laïque.

Besma Mechta est de ceux-là. Elle est engagée depuis plusieurs années dans la vie associative. Elle est très investie dans Cité Plurielle. Elle a rejoint enfin le groupe communiste et partenaires de la ville. Elle est par ailleurs écrivain public à titre bénévole.


Elle se présente dans tous ses engagements comme une militante laïque, renvoyant à la sphère privée sa pratique religieuse.

Pour tous ceux et celles qui hésitent encore, qui attendent un signe de nos institutions pour conforter leur choix, elle est un symbole. Pas celui d’un retour en arrière, mais bien celui d’un pas en avant. Elle montre qu’on peut être laïque et musulmane.


Elle doit servir d’exemple, pour ouvrir la porte à tous les autres. Si nous ne le faisons pas, nous renverrons des millions de musulmans à un repli identitaire et communautaire. En le faisant, nous leur offrons un autre modèle identitaire qui les respecte et leur permet d’avancer. Sans jamais renier notre engagement laïc, toujours clairement affirmé.


Alors certes, il lui reste un turban sur la tête et non pas un voile, cet espèce de « fichu » ou de foulard que portaient encore nos grands-mères il n’y a pas si longtemps…par tradition. Laissons le tomber tout seul. Demain, j’en suis convaincu, beaucoup d’autres nous rejoindront pour s’intégrer enfin comme français laïcs, croyants ou non. La laïcité aura alors gagné une nouvelle victoire.


Quant à l’aspect plus politique de votre courrier, je voudrais vous faire part des réflexions suivantes.

Depuis 30 ans que la gauche dans son ensemble prône l’intégration des personnes d’origine étrangères (sans avoir par ailleurs tenu ses promesses notamment celle du droit de vote aux élections locales) avez-vous constaté une baisse du communautarisme et un repli du fait religieux de cette population ? Non, c’est le contraire qui s’est passé, faute pour cette population d’être acceptée à participer à notre république.

C’est sur ce terrain de la non intégration, et de la discrimination à l’emploi, sociale, et politique dont souffre cette population, qu’ont prospéré les idées rétrogrades, le repli identitaire et religieux, et que la condition des femmes et des jeunes filles s’est dégradée.


Pour « soulager » les populations du poids religieux, quelle est votre proposition ? et à qui s’adresse-t-elle ? Aux seuls musulmans ou aussi aux autres religions comme la religion catholique par exemple ?

Cette dernière est toujours contre l’IVG, la contraception ou le divorce. Leurs représentants sont pourtant présents à tous les postes de notre république dans les assemblées d’élus nationales ou locales. Alors certes ça ne se voit pas, les femmes ne couvrent plus leurs cheveux comme le faisaient avant leurs mères ou leurs grands-mères.


Pour les musulmans la solution serait simple et hypocrite jusqu’au bout, ne choisir que des hommes qui eux n’ont pas de couvre-chefs traditionnels. Une bonne façon sans doute d’améliorer la condition des femmes.

Pensez-vous vraiment que c’est en continuant à exclure les personnes qui font le pas de la laïcité que nous permettrons à la laïcité d’avancer.


Nous autres occidentaux nous sommes prompt à donner des leçons de démocratie et d’émancipation aux autres peuples de la terre, sans que ne nous effleure jamais l’idée du temps qu’il nous a fallu pour y parvenir, et que nous ne leur reconnaissons pas, l’idée que peut-être il leur appartenait de tracer eux-mêmes leur chemin pour y parvenir. Gardons toujours à l’esprit comment « notre modèle de développement » a finalement affamé l’Afrique et favorisé par la même, la radicalisation des religions dans certains pays.


Je ne dirais jamais de Benhazir Bhutto qui continuait à porter le voile en certaines circonstances qu’elle était un symbole de l’oppression des femmes ; ni des militantes Marocaines, Tunisiennes, Algériennes ou d’Afrique noire plus généralement du droit des femmes qu’elles sont traîtres à leur cause parce qu’elles continuent à respecter certaines traditions tout en poursuivant leur combat.


Continuons d’exiger un 20 sur 20 à notre examen de laïcité, et continuons à faire avancer le fait religieux. La laïcité n’est pas un dogme, c’est un combat ! Je crois que vous le partagez.

Aussi, en évitant toute confusion, je vous invite à aider ceux qui s’engagent sur ce chemin et qui serviront de modèles aux autres, plutôt que de les stigmatiser.


Le jour où faute d’avoir réussi cette ouverture et cette intégration nous ne serons plus qu’un « village d’irréductibles gaulois » gardiens du dogme, peut-être serons-nous restés purs et durs et fiers de l’être, mais notre monde aura fait un grand pas en arrière. Renzo SULLI


Maire d’Echirolles


http://www.ville-echirolles.fr/vie_municipale/conseil_muni02.html

http://www.ville-echirolles.fr/article5251.html


Si Lénine avez donne cet ordre débile a toute les femmes et a tous les camarades d'enlever le voile et à tous les soldat de l’arée rouge d'enlever toutes les croix orthodoxe de leur cou, il se serait retrouver tous seul a faire la révolution en 1917...

Un petit clin d’oeil en passant !

Voila trois affiche de la propagande communiste sovietique, à noter que toutes les femmes sont voilée...

RF

 

Lénine : Socialisme et religion 

vendredi 5 février 2010

3 décembre 1905

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


La société moderne est fondée tout entière sur l’exploitation des grandes masses de la classe ouvrière par une infime minorité de la population appartenant aux classes des propriétaires fonciers et des capitalistes. C’est une société d’esclavagistes, car les ouvriers « libres » qui travaillent toute leur vie pour le capital, n’ont « droit » qu’aux moyens d’existence strictement indispensables à l’entretien des esclaves produisant les bénéfices, qui permettent d’assurer et de perpétuer l’esclavage capitaliste.


L’oppression économique qui pèse sur les ouvriers, provoque et engendre inévitablement sous diverses formes l’oppression politique, l’abaissement social, l’abrutissement et la dégradation de la vie intellectuelle et morale des masses. Les ouvriers peuvent obtenir une liberté politique plus ou moins grande afin de lutter pour leur affranchissement économique, mais aucune liberté ne les débarrassera de la misère, du chômage et de l’oppression tant que le pouvoir du capital ne sera pas aboli.


La religion est un des aspects de l’oppression spirituelle qui accable toujours et partout les masses populaires, écrasées par un travail perpétuel au profit d’autrui, par la misère et l’isolement. La foi en une vie meilleure dans l’au-delà naît tout aussi inévitablement de l’impuissance des classes exploitées dans leur lutte contre les exploiteurs que la croyance aux dieux, aux diables, aux miracles naît de l’impuissance du sauvage dans sa lutte contre la nature.


A ceux qui peinent toute leur vie dans la misère, la religion enseigne la patience et la résignation ici-bas, en les berçant de l’espoir d’une récompense céleste. Quant à ceux qui vivent du travail d’autrui, la religion leur enseigne la bienfaisance ici- bas, leur offrant ainsi une facile justification de leur existence d’exploiteurs et leur vendant à bon compte des billets donnant accès à la félicité divine. La religion est l’opium du peuple.


La religion est une espèce d’alcool spirituel dans lequel les esclaves du capital noient leur image humaine et leur revendication d’une existence tant soit peu digne de l’homme.

Mais l’esclave qui a pris conscience de sa condition et s’est levé pour la lutte qui doit l’affranchir, cesse déjà à moitié d’être un esclave. L’ouvrier conscient d’aujourd’hui, formé par la grande industrie, éduqué par la ville, écarte avec mépris les préjugés religieux, laisse le ciel aux curés et aux tartuffes bourgeois et s’attache à la conquête d’une meilleure existence sur cette terre. Le prolétariat moderne se range du côté du socialisme qui fait appel à la science pour combattre les fumées de la religion et, organisant l’ouvrier dans une lutte véritable pour une meilleure condition terrestre, le libère de la croyance en l’au-delà.


La religion doit être déclarée affaire privée ; c’est ainsi qu’on définit ordinairement l’attitude des socialistes à l’égard de la religion. Mais il importe de déterminer exactement la signification de ces mots, afin d’éviter tout malentendu. Nous exigeons que la religion soit une affaire privée vis-à-vis de l’État, mais nous ne pouvons en aucune façon considérer la religion comme une affaire privée en ce qui concerne notre propre Parti.


L’État ne doit pas se mêler de religion, les sociétés religieuses ne doivent pas être liées au pouvoir d’État. Chacun doit être parfaitement libre de professer n’importe quelle religion ou de n’en reconnaître aucune, c’est-à-dire d’être athée, comme le sont généralement les socialistes. Aucune différence de droits civiques motivée par des croyances religieuses ne doit être tolérée. Toute mention de la confession des citoyens dans les papiers officiels doit être incontestablement supprimée.


L’État ne doit accorder aucune subvention ni à l’Église ni aux associations confessionnelles ou religieuses, qui doivent devenir des associations de citoyens coreligionnaires, entièrement libres et indépendantes à l’égard du pouvoir. Seule la réalisation totale de ces revendications peut mettre fin à ce passé honteux et maudit où l’Église était asservie à l’État, les citoyens russes étant à leur tour asservis à l’Église d’État, où existaient et étaient appliquées des lois inquisitoriales moyenâgeuses (maintenues jusqu’à ce jour dans nos dispositions (égaies), qui persécutaient la croyance ou l’incroyance, violaient la conscience et faisaient dépendre les promotions et les rémunérations officielles de la distribution de tel ou tel élixir clérical. La séparation complète de l’Église et de l’État, telle est la revendication du prolétariat socialiste à l’égard de l’État et de l’Église modernes.


La révolution russe doit faire aboutir cette revendication comme une partie intégrante et indispensable de la liberté politique. Sous ce rapport, la révolution russe est placée dans des conditions particulièrement favorables, le détestable régime bureaucratique de l’autocratie féodale et policière ayant provoqué le mécontentement, l’effervescence et l’indignation dans le clergé même. Si misérable, si ignorant que fût le clergé orthodoxe russe, il s’est réveillé cependant au fracas de la chute de l’ancien régime, du régime médiéval en Russie.


Le clergé lui-même soutient aujourd’hui la revendication de liberté, s’élève contre le bureaucratisme officiel et l’arbitraire administratif, le mouchardage policier imposé aux « ministres de Dieu ». Nous autres socialistes, nous devons appuyer ce mouvement en poussant jusqu’au bout les revendications des représentants honnêtes et sincères du clergé, en les prenant au mot quand ils parlent de liberté, en exigeant qu’ils brisent résolument tout lien entre la religion et la police.


Ou bien vous êtes sincères, et vous devez dès lors réclamer la séparation complète de l’Église et de l’État, de l’école et de l’Église et demander que la religion soit déclarée affaire privée, et cela de façon absolue et catégorique. Ou bien vous ne souscrivez pas à ces revendications conséquentes de liberté, et cela signifie que vous êtes toujours prisonniers des traditions inquisitoriales, que vous voulez toujours avoir accès aux promotions et aux rémunérations officielles, que vous ne croyez pas à la puissance de vos armes spirituelles, que vous continuez à accepter les pots-de-vin de l’État ; et alors les ouvriers conscients de Russie vous déclarent une guerre sans merci.


Par rapport au parti du prolétariat socialiste, la religion n’est pas une affaire privée. Notre Parti est une association de militants conscients d’avant-garde, combattant pour l’émancipation de la classe ouvrière. cette association ne peut pas et ne doit pas rester indifférente à l’inconscience, à l’ignorance ou à l’obscurantisme revêtant la forme de croyances religieuses. Nous réclamons la séparation complète de l’Église et de l’État afin de combattre le brouillard de la religion avec des armes purement et exclusivement idéologiques : notre presse, notre propagande. Mais notre association, le Parti ouvrier social-démocrate de Russie, lors de sa fondation, s’est donné pour but, entre autres, de combattre tout abêtissement religieux des ouvriers. Pour nous, la lutte des idées n’est pas une affaire privée ; elle intéresse tout le Parti, tout le prolétariat.


Mais puisqu’il en est ainsi, pourquoi ne nous déclarons-nous pas athées dans notre programme ? Pourquoi n’interdisons-nous pas aux chrétiens et aux croyants l’entrée de notre Parti ?

La réponse à cette question fera ressortir la différence très importante des points de vue de la démocratie bourgeoise et de la social-démocratie sur la religion.


Notre programme est fondé tout entier sur une philosophie scientifique, rigoureusement matérialiste. Pour expliquer notre programme il est donc nécessaire d’expliquer les véritables racines historiques et économiques du brouillard religieux. Notre propagande comprend nécessairement celle de l’athéisme ; et la publication à cette fin d’une littérature scientifique que le régime autocratique et féodal a proscrite et poursuivie sévèrement jusqu’à ce jour doit devenir maintenant une des branches de l’activité de notre Parti. Nous aurons probablement à suivre le conseil qu’Engels donna un jour aux socialistes allemands : traduire et répandre parmi les masses la littérature française du XVIII° siècle athée et démystifiante [1] .


Mais en aucun cas nous ne devons nous fourvoyer dans les abstractions idéalistes de ceux qui posent le problème religieux on termes de « raison pure », en dehors de la lutte de classe, comme font souvent les démocrates radicaux issus de la bourgeoisie. Il serait absurde de croire que, dans une société fondée sur l’oppression sans bornes et l’abrutissement des masses ouvrières, les préjugés religieux puissent être dissipés par la seule propagande.


Oublier que l’oppression religieuse de l’humanité n’est que le produit et le reflet de l’oppression économique au sein de la société serait faire preuve de médiocrité bourgeoise. Ni les livres ni la propagande n’éclaireront le prolétariat s’il n’est pas éclairé par la lutte qu’il soutient lui-même contre les forces ténébreuses du capitalisme. L’unité de cette lutte réellement révolutionnaire de la classe opprimée combattant pour se créer un paradis sur la terre nous importe plus que l’unité d’opinion des prolétaires sur le paradis du ciel.


Voilà pourquoi, dans notre programme, nous ne proclamons pas et nous ne devons pas proclamer notre athéisme ; voilà pourquoi nous n’interdisons pas et ne devons pas interdire aux prolétaires, qui ont conservé tels ou tels restes de leurs anciens préjugés, de se rapprocher de notre Parti.


Nous préconiserons toujours la conception scientifique du monde ; il est indispensable que nous luttions contre l’inconséquence de certains « chrétiens », mais cela ne veut pas du tout dire qu’il faille mettre la question religieuse au premier plan, place qui ne lui appartient pas ; qu’il faille laisser diviser les forces engagées dans la lutte politique et économique véritablement révolutionnaire au nom d’opinions de troisième ordre ou de chimères, qui perdent rapidement toute valeur politique et sont très vite reléguées à la chambre de débarras, par le cours même de l’évolution économique.


La bourgeoisie réactionnaire a partout eu soin d’attiser les haines religieuses - et elle commence à le faire chez nous - pour attirer de ce côté l’attention des masses et les détourner des problèmes économiques et politiques réellement fondamentaux, problèmes que résout maintenant le prolétariat russe, qui s’unit pratiquement dans sa lutte révolutionnaire. Cette politique réactionnaire de morcellement des forces prolétariennes, qui se manifeste aujourd’hui surtout par les pogromes des Cent-Noirs, trouvera peut-être demain des mesures plus subtiles. Nous lui opposerons dans tous les cas une propagande calme, ferme, patiente, qui se refuse à exciter des désaccords secondaires, la propagande de la solidarité prolétarienne et de la conception scientifique du monde.


Le prolétariat révolutionnaire finira par imposer que la religion devienne pour l’État une affaire vraiment privée. Et, dans ce régime politique débarrassé de la moisissure médiévale, le prolétariat engagera une lutte large et ouverte pour la suppression de l’esclavage économique, cause véritable de l’abêtissement religieux de l’humanité.


Notes

[1] Voir F. Engels, La littérature politique des émigrés. Le programme des communards blanquistes émigrés.

http://www.marxists.org/francais/lenin/works/1905/12/vil19051203.htm

 


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6 février 2010 6 06 /02 /février /2010 10:59
Maroc photos169au4 ouvrières "voilées" en grève

 tempête dans un verre d'eau ou révélateur de certains stéréotypes?
  le Vendredi, 05 Février 2010      


La décision – courageuse dans le contexte actuel de «chasse aux sorcières» sur ce thème – du NPA (Nouveau Parti Anticapitaliste) français de présenter la camarade Ilham Moussaïd, une jeune femme portant le foulard, aux élections régionales dans le Vaucluse, a suscité de très vives réactions. Militante anticapitaliste, féministe et trésorière du NPA local, Ilham a semble-t-il le tort d'être croyante et se retrouve victime de critiques et de stéréotypes qui la jugent sur son apparence plutôt que sur ses actes.


Cette candidature suscite d'une part des débats internes, qui se veulent serain, au sein du NPA. Il y a peu également, nos camarades danois du SAP ont été confrontés aux mêmes discussions suite à la présentation d'une candidate portant le foulard sur une liste de l'Alliance Rouge et Verte. Nous publions ci-dessous un article qui revient sur ces débats.


Sur un autre plan, venant de la gauche social-libérale, de la droite et de l'extrême droite racistes et réactionnaires, les attaques les plus virulantes contre la décision du NPA n'ont bien entendu rien d'étonnant, c'est une nouvelle fois l'occasion de ressortir l'étiquette fabriquée de toute pièce «d'islamo-gauchisme», comme d'autres parlaient «d'hitléro-trotskysme» à une autre époque.


Certaines déclarations venant de la gauche sont par contre honteuses et inquiétantes, car elles traduisent un glissement dangereux et une perte de repères. Pour Marie-George Buffet, du PCF (Parti communiste français), la candidate du NPA est la preuve d'un «recul des droits des femmes» (...) «Des femmes qui redeviennent un objet d'instrumentalisation». On peut se demander en quoi la candidature d'une jeune femme d'origine immigrée qui s'engage en politique au sein d'un parti anticapitaliste constituerait un tel «recul»? En outre, Buffet dénie aux femmes portant le foulard toute forme d'autonomie ou de conscience politique puisqu'elles sont considérées comme forcément «instrumantalisées», et bien entendu soumises et incapables d'agir de leur propre chef.


Buffet ajoute en outre qu'«Il faut arrêter de jouer avec les femmes, de faire peur avec les femmes». Rappelons que cette polémique sur la candidature d'Ilham surgit sur fond de débats passionnés sur la question de l'interdiction du port de la burqa dans l'espace public et que la commission parlementaire qui se penche sur cette interdiction a été initiée par un député... du PCF! Ce dernier a été immédiatement soutenu avec fracas par Sarkozy dans le cadre de son « débat sur l'identité nationale », lancé dans le seul but de stigmatiser les citoyens/nes français/es de confession musulmane et l'immigration en général.


Jean-Luc Mélanchon, leader du Parti de Gauche (PG), a déclaré quant à lui que le NPA faisait une «erreur» et que son choix était «régressif», ajoutant que «Lorsqu’on veut être élu, il faut pouvoir représenter tout le monde, c’est donc une erreur de se présenter à une élection en affichant une appartenance religieuse qui rend impossible cette représentation du souverain dans son ensemble ».


Dans une lettre ouverte que nous publions dans ce dossier, Philippe Marlière répond à ces propos démesurés. Nous pourrions également ajouter que l'indignation de Mélanchon est bien sélective. Fervent partisan du président vénézuélien Hugo Chavez qui, dans tous ses discours, parle de Dieu, de Jésus  Christ et brandit régulièrement la Bible ou un crucifix, le leader du PG ne s'est pourtant jamais fendu de la moindre critique sur un tel «affichage d'appartenance religieuse qui rend impossible cette représentation du souverain dans son ensemble ». Il faut croire que lorsque l'on est une femme arabo-musulmane, cela n'est pas permis.


Malgré tout, les choses ont un peu évolué à gauche et parmi les féministes françaises depuis la loi sur l'interdiction du port du foulard à l'école en 2004. Comme le souligne le sociologue Jean Baubérot dans le dernier numéro de la revue «Politique» (qui consacre un dossier très intéressant sur le thème du féminisme et de la multiculturalité); «En 2004, le féminisme prohibitionniste était dominant. Mais c'était plutôt un féminisme de classes moyennes aisées, assez conformiste. Le féminisme hostile à l'interdiction était bien réel, mais outre qu'il était minoritaire, son discours n'a absolument pas été pris en compte dans les médias. Aujourd'hui, avec l'affaire de l'interdiction de la burqa, les lignes bougent. Une partie du féminisme et une partie de la laïcité ont pris conscience qu'il y avait derrière l'idée d'interdiction généralisée une question de libertés publiques.» Nous publions, pour clôre ce dossier, une prise de position de Josette Trat, militante féministe de longue date, sur ce sujet. (LCR-Web)




Profession de foi de Ilhem Moussaïd aux élections régionales 2010:

Face à un système capitaliste mondial qui enrichit 20% de personnes au détriment des 80% autres, qui maintient un tiers de la population sous le seuil de pauvreté et qui ne permet pas à un quart de la planète d’accéder à l’eau potable. Face à un système capitaliste mondial qui met en péril l’équilibre de la planète ; l’augmentation de la température, la fonte des glaces, la disparition de nos espèces animales, végétales, minérales et qui épuise nos ressources minières, forestières, énergétiques, nous devons réagir et inventer tous et toutes un autre système où les enfants étudieraient au lieu de travailler, où les employées ne se suicideraient pas à cause de la pression des patrons, où des personnes ne dormirait pas dehors alors qu’il y a des milliers d’appartements, d’immeubles vides, où l’argent ne serait pas roi.

C’est dans cette optique que je me suis engagée au NPA et que je présente ma candidature sur la liste des régionales. La gratuité des transports publics, la formation des jeunes, la récupération des subventions publiques accordées aux entreprises qui licencient alors qu’elles font des bénéfices, le développement du tissu associatif et non du clientélisme, la création d’emplois, de logements, autant de sujets qui me tienne à coeur et qui fonde mon engagement.

Née à Avignon, âgée de 21 ans, militante féministe, internationaliste et anticapitaliste, je lutte contre les discriminations, le racisme dans les quartiers populaires, contre l’apartheid et l’injustice en Palestine, j’espère apporter à Avignon, au Vaucluse et à la région ma pierre pour un nouvel ordre dominant, la liberté, la paix, la justice, le respect, la tolérance et la fraternité.

Ilhem Moussaïd

Interview d'Ilhem Moussaïd sur Dailymotion

 

 

Lever le voile sur les ambiguïtés
 par Frédéric Bourgade
(point de vue paru dans lemonde.fr)

Une camarade qui porte le voile – signe d'appartenance religieuse – peut-elle être considérée comme une féministe ?


Les copains vauclusiens ont manifestement répondu oui, puisqu'ils l'ont choisie pour être à la fois leur trésorière départementale et l'une des candidates de notre parti aux élections régionales. Certes, la question a fait – comme le dit Olivier Besancenot – l'objet d'une réflexion complexe et sérieuse mais le fait est que, pour la première fois, dans un parti politique laïque, plus que de simplement respecter le droit de croire ou de ne pas croire, on considére qu'un signe ne signifie rien. Ce qui par définition est paradoxal.


Le voile dit à l'évidence, au moins deux choses dont personne ne peut douter, sauf à se mentir à soi-même. Il dit qu'elle (notre camarade) met Dieu en tête – au premier rang si l'on préfère – de sa vision du monde et qu'elle a Dieu en tête pour référence en matière de normes de vie. Autrement dit, il n'y a pas place, dans sa vision des choses, pour une perspective laïque et la libération humaine ne dépend pas de notre capacité à inventer l'avenir mais du dessein que Dieu nous a fixé.Ainsi, en acceptant cette camarade, et en la présentant aux élections, nous donnons à croire que la religion aurait partie liée avec la libération sociale du genre humain.


Certes, on m'objectera que la Théologie de la libération, en Amérique du Sud, a participé à l'émancipation des populations, mais c'est précisément parce qu'elle était en rupture avec les dogmes que les prêtres engagés dans ces combats ont pu y trouver leur place, c'est parce qu'ils ont laïcisé leur pratique qu'ils ont pu revendiquer le partage des richesses. Là, nous nageons, au contraire en pleine confusion.


En effet, même si le féminisme peut prendre des chemins détournés selon le pays où il se développe pour s'imposer dans l'espace public, comment pourra-t-on faire croire que le voile est un outil de libération.

Il libére de quoi ? Du regard intrusif des hommes.


Les relations hommes-femmes ne seraient donc que sexuée et la femme devrait se couvrir parce qu'elle serait responsable du démon qui s'empare des hommes. Il me semble plutôt qu'il dit l'obligation de disparaître dans le regard des hommes – la disparition la plus extrême étant le niqab et la réclusion à la maison – dont aucun n'est, en retour du démon qui le tarauderait, contraint de porter une cagoule pour s'interdire de voir l'objet de la tentation permanente. La femme incarnerait par nature le mal absolu. Quand j'étais jeune – dans les années 1960 –, les hommes disaient d'une femme en cheveux – c'est-à-dire qui sortait sans foulard pour couvrir ses cheveux – que c'était une garce. Le voile est donc bien le signe d'une inégalité de traitement homme-femme, donc d'une domination qui soumet la femme. Il s'agit donc bien d'une régression.


Le voile libére-t-il du risque communautariste ? Précisement, il dit l'inverse. Une croyante qui porte le voile ne voudra pas – selon les normes religieuses qui sont sa référence – d'un ami, d'un compagnon ou d'un mari qui ne serait pas musulman. Il dit donc clairement son rejet de la mixité, du mélange, sauf en cas de convertion. Il fait donc clairement primer la dimension religieuse sur le libre choix amoureux. Dimension qui exclut le droit à l'avortement puisque les enfants, c'est Dieu qui les donne. Je ne vois pas où est le féminisme revendiqué par notre camarade.


Qu'elle soit anticapitaliste, je n'en doute pas. Le capitalisme est pour nous, comme pour elle, le modèle d'expansion de l'impéralisme culturel américain à travers le monde. Cela dit, là, s'arrête la comparaison. En effet, son modèle religieux ne peut pas accepter le capitalisme, non seulement parce qu'il exploite, mais aussi, et peut-être surtout, parce qu'il dénature la religion. En effet, il remplace Dieu par le Dieu argent, il remplace la famille et la communauté, par l'individualisme, il remplace la loi divine par la loi issue des rapports de forces politiques, il remplace les us et coutumes, les traditions, par la réglementation. Dans son cas, je crains que son anticapitalisme ne soit que le rejet d'une identité occidentale.


Si, ce qui vient d'être dit, est exact, comment concevoir que nous acceptions cette situation ? Là aussi, il nous faut ouvrir les yeux. Notre radicalité nous joue, en effet, parfois des tours. Ainsi, nous considérons que la religion est l'opium du peuple, mais comme nous aimons le peuple dont nous voulons la libération, nous le prenons tel qu'il est, avec ses qualités et ses défauts. Quand il s'agit de religion, nous disons que les femmes soumises, par exemple, au port du foulard, en sont les victimes.


Quand elles affirment le porter volontairement, nous ajoutons que ce sont des victimes consentantes, parce qu'inconscientes des rapports sociaux qui les maintiennent dans cette domination. C'est pour cela, généralement, que nous ne voulons pas les rejeter et que nous préférons, par un travail de conviction, les éclairer. Elles seraient dans l'ombre, nous leur apporterions la lumière. Notre certitude est, de plus, confirmée quand elles ne sont pas suffisamment éduquées, puisque l'éducation libère. Et si en plus, elles font partie de la classe ouvrière, la messe est dite.


Pourtant, une croyante qui revendique son voile, est à mes yeux, une militante. Elle ne fait pas que défendre son droit à croire, elle l'utilise comme un drapeau différencialiste, qui, au nom du respect des différences, doit nous conduire logiquement à lui reconnaître les droits que l'on doit reconnaître aux minorités. Et par définition, la liste des droits est illimitée. De gauche – démocratiques, et révolutionnaires – nous ne pouvons, ni ne voulons envisager l'idée d'être aux côtés des minorités. C'est pourquoi, nous finissons par tout confondre. Les revendications des minorités ne sont pas – par essence – universelles et libératrices.

De même que la suprématie des majorités n'est pas – par essence – une domination insupportable.
Dans cette affaire, je crains que nous ne réagissions par réflexe pavlovien plus que par réflexion politique. Non seulement, nous n'aidons pas les féministes du monde entier dans leur combat, mais nous créons de la confusion et nous nous déconsidérons aux yeux de ceux pour qui le NPA est un outil pour changer le monde.


Frédéric Bourgade est sympathisant et électeur du NPA.

 

Les musulmans, la gauche et les féministes auto-proclamés

Toutes sortes de spectres sont apparus dans la gauche danoise l’année où une femme musulmane a été élue comme candidate au parlement pour l’Alliance Rouge-Verte. [1] En prenant son inspiration chez des penseuses féministes actuelles comme dans les critiques de la religion par Marx et Lénine, cet article est une interprétation des conflits qui ont émergé sur la question du socialisme et de la religion en général, et sur celle de la gauche et de l’islam en particulier, ainsi que sur la question des stratégies féministes dans le débat sur le foulard au Danemark en 2007-2008.

Par Nina Trige Andersen [2]


Un vif débat a été suscité à la fois au sein de l’Alliance Rouge-Verte (ARV) comme dans la sphère publique par la candidature au parlement pour un parti de la gauche radicale d’une femme s’identifiant comme musulmane. Un débat sur la religion, le féminisme, et les stratégies pour le socialisme – pour dire les choses gentiment. Quand la candidate, Asmaa Abdol-Hamid, née palestinienne apatride, a été élue par l’assemblée nationale de l’ARV, tout le monde s’attendait à des réactions clairement islamophobes, sexistes et racistes de la part des médias bourgeois et des partis de droite. Mais nous n’avions pas tous prévu à quel point la même dynamique allait frapper la candidate depuis l’intérieur du parti et de la gauche en général.


Les multiculturalistes et les « paniqueurs moraux »


Le débat dans la sphère publique est d’un intérêt moindre, car la plupart des gens de gauche peuvent probablement imaginer les attaques classiques de la bourgeoisie, de la gauche réformiste et des néo-fascistes – par conséquent seuls les débats internes de l’ARV seront esquissés dans cet article. Les différentes positions dans le débat sur la question de savoir si oui ou non il était approprié qu’un parti socialiste ait pour candidate une personne «visiblement» religieuse peuvent être divisées en deux catégories principales :

- Les multiculturalistes: C’est un projet progressiste en soi que La Femme Musulmane (traduction une personne identifiée comme femme, immigrée, portant un foulard) soit représentée.

- Les paniqueurs moraux: Le foulard est oppressif en soi, donc le fait qu’une femme portant un foulard représente l’ARV envoie le signal que nous sommes pour le patriarcat (dans sa version spécifique islamo-arabe).

La deuxième catégorie était divisée en deux :

-Les athées, qui utilisaient la version marxiste vulgaire de la citation «la religion est l’opium du peuple»

-Les socialistes chrétiens qui croient que comme l’islam n’a pas connu une Réforme et les Lumières comme le christianisme, l’islam est toujours une religion fondamentaliste et répressive, à la différence du christianisme qui a une base ainsi qu’un potentiel progressiste.

Ces deux subdivisions semblent croire que le patriarcat, sous sa forme «islamo-arabe», est un phénomène distinct d’autres formes patriarcales: plus fort, plus pathologique et plus maléfique que le patriarcat en général. Dans ce courant du «féminisme» occidental, l’oppression des femmes – quand il s’agit de femmes «musulmanes» – est vue comme quelque chose qui provient d’abord de l’islam. La religion devient l’explication principale de l’oppression des femmes, quand on parle de l’islam et des femmes en relation avec l’islam. L’islam comme «religion» – ou plus souvent l’islam comme «culture» – est conceptualisé comme ayant une essence spécifique, immuable et profondément réactionnaire de manière plus radicale que d’autres religions ou «cultures».

Dans cette rhétorique, la «culture démocratique occidentale» est souvent mise en valeur comme l’antipode de la «culture islamique». Autrement dit, les droits des «femmes musulmanes», et ce que font les «femmes musulmanes» de leur corps sont des marqueurs centraux des nouvelles formes d’identité et de géopolitique qui sont apparues dans la rhétorique néoconservatrice du «choc des civilisations». Certains courants du «féminisme occidental» sont influencés par cette rhétorique. Ce type de «féminisme occidental» participe ainsi à la production du langage et des structures du nouvel impérialisme. [3]

 


Dévoilement


En conséquence, le phénomène «religion» – ou « une religion spécifiquement maléfique» - est vu comme une entité en soi avec un pouvoir en soi. Il s’ensuit que la religion engendre la pratique (sociale) – le contraire d’une compréhension marxiste, comme elle apparaît par exemple dans l’introduction à la Contribution à la critique de La philosophie du droit de Hegel. Ici la «religion» et la critique de la religion sont comprises en sens inverse: «Le fondement de la critique irréligieuse est celui-ci: L’homme fait la religion, ce n’est pas la religion qui fait l’homme. La religion est en réalité la l’homme qui, ou bien ne s’est pas encore trouvé, ou bien s’est déjà reperdu. Mais l’homme n’est pas un être abstrait, extérieur au monde réel. L’homme, c’est le monde de l’homme, l’État, la société. Cet État, cette société produisent la religion (…)»


Nous reviendrons à ce que Marx et plus tard Lénine avaient à dire sur le socialisme et la religion vers la dernière partie de cet article.

Un autre point intéressant dans les dynamiques de l’ARV est que – depuis les subdivisions des paniqueurs moraux, des athées comme des chrétiens – les nouveaux convertis au « féminisme » semblaient sortir de terre comme des champignons ; tout à coup très inquiets de savoir si la candidate était elle-même opprimée par le patriarcat islamique, ou si l’avoir comme représentante du parti signalait à la population que l’ARV approuvait le patriarcat islamique. Les paniqueurs moraux étaient aussi fortement engagés dans le dévoilement de ce que Asma Abdol-Hamid pensait réellement des droits des LGBT, alors qu’elle avait déclaré qu’elle soutenait le programme politique de l’ARV – y compris la partie sur la libération de genre et la libération sexuelle. Ces soupçons étaient souvent exprimés par des gens qui n’avaient jamais auparavant pris la peine de combattre le patriarcat ou l’homophobie.


Seulement son genre et son foulard


Les multiculturalistes tout comme l’armée qui s’est dressée contre l’islamo-patriarcat ont empêché dans une large mesure un débat sur la manière dont le profil politique de cette candidate spécifique pouvait être utilisé stratégiquement dans une perspective socialiste. Asmaa Abdol-Hamid est jeune, c’est une femme, et elle est née au Liban, fille de réfugiés palestiniens – il y a dans ces catégories sociales un potentiel représentationnel évident. Elle travaille depuis des années comme conseillère sociale dans un des quartiers les plus pauvres du Danemark, a fait du travail de terrain avec de jeunes femmes migrantes dans son quartier, et du travail parlementaire pour l’ARV dans sa municipalité.


Toute cette expérience politique et personnelle aurait pu être mise en forme dans une campagne électorale pour contrer l’islamophobie, le sexisme et le racisme et rendre visibles les formes de la société de classes au Danemark. Cette troisième position dans l’ARV qui n’a pas été mentionnée jusqu’ici est ce que nous pouvons appeler la position marxiste-féministe, qui met en avant une analyse historiquement spécifique. Une des raisons pour lesquelles cette position n’a pu ni réussir, ni se rendre clairement visible, c’est la force avec positions mentionnées ci-dessus – et surtout: elles avaient le consensus public avec elles. Asmaa Abdol-Hamid n’a jamais été acceptée ou traitée comme une figure politique. Elle était son foulard et son genre, pour ses opposants – l’armée contre le patriarcat islamo-arabe – comme pour ses soutiens multiculturalistes. Les deux tendances se sont unies paradoxalement dans leur obsession envers la «religion» et la «culture» ainsi que les marqueurs et champs de bataille favoris: le corps et les signes corporels de la « femme musulmane».


Le foulard est le foulard ?


Cette courte présentation d’un cas spécifique dans un contexte danois servira dans le cadre de cet article d’introduction à la discussion de ce que l’on peut dire sur les rapports entre socialisme, religion et féminisme à un niveau analytique plus général.


D’un point de vue féministe et marxiste, il y a tout d’abord deux points importants à avoir à l’esprit : Notre analyse doit toujours prendre son point de départ dans le contexte social/sociétal et historiquement spécifique qu’il essaie de comprendre et dans lequel il se donne comme but d’agir politiquement. Les discours et les pratiques ne peuvent pas être isolés du contexte dans lequel ils ont lieu. Cela veut dire par exemple, que porter un voile en Iran aujourd’hui ne veut pas nécessairement dire la même chose que de porter un voile ou un foulard au Danemark aujourd’hui. Brièvement, en Iran ceux qui détiennent le pouvoir punissent les femmes si elles ne portent pas le voile, au Danemark les femmes sont punies si elles le portent.


Que l’on soit d’accord ou non avec l’utilisation du foulard comme forme de protestation politique contre la marginalisation et la persécution des individus identifiés comme « arabes/musulmans », nous devons au moins analyser le port du foulard comme (aussi) une réaction contre le racisme et la marginalisation, et non seulement comme un marqueur religieux ou culturel de l’oppression des femmes et de la ségrégation des genres.


Les femmes ont toujours été jugées et traitées selon leur apparence. En tant que féministe on doit prêter une attention particulière quand les corps des femmes et ce que les femmes font avec leur corps devient un champ de bataille – comme c’est le cas du foulard pour les islamistes réactionnaires et les impérialistes occidentaux.


Neelam Hussein, de Simorgh, une organisation féministe (et laïque) basée au Pakistan, formule ainsi les choses : «Le voile est devenu un marqueur identitaire, même au Pakistan. Mais surtout en Europe, où il y a l’expérience du racisme, de la violence, et des préjugés anti-musulmans, le voile n’est pas tellement une affirmation religieuse. Il est devenu un acte politique, et doit être compris en tant que tel. Personnellement, je ne suis pas en faveur du voile, mais je défendrai tout de même le droit d’une femme de porter une mini-jupe ou des talons hauts si elle le veut, et de porter le voile, si elle le veut. Il faut considérer les choses de manière plus adulte qu’une réaction immédiate. Mais en tant que féministe, je ne peux pas forcer une femme à sortir de chez elle ou à enlever le voile, simplement parce que je ne suis pas d’accord. Il faut qu’elle soit convaincue de sa propre libération. [4]»


La prostituée et la femme voilée


En observant les réactions venues à la fois de la droite et de l’intérieur de la gauche envers Asmaa Abdol-Hamid pendant les élections, il était frappant de voir les similitudes entre la façon dont on parle des femmes qui portent un foulard et des femmes qui travaillent dans l’industrie du sexe, souvent appelées prostituées : «Elles» sont opprimées à cause de ce qu’elles font ou de ce qu’elles laissent les autres faire avec leurs corps, elles ne savent pas ce qu’elles disent, ou elles essaient peut-être de se protéger, elles ne savent pas ce qui est bon pour elles, mais «nous» savons ce qui est bon pour elles, et nous allons donc décider de comment elles peuvent être libérées.


En même temps, avec cette approche, les femmes qui portent un foulard, comme pour les femmes dans l’industrie du sexe, sont encore plus marginalisées – non seulement parce qu’on leur dénie leur propre droit à la parole, mais de par la façon dont s’organise la société (la régulation des espaces publics, l’accès à l’éducation, l’accès à certains secteurs du marché du travail, l’accès aux droits civiques et à la sécurité sociale, etc.).


Citons encore Neelam Hussein: «Si vous voulez vraiment défier le patriarcat, vous devez reconnaître le fondamentalisme et l’oppression sous toutes ces formes, pas seulement au sein de l’islam. En tant que féministe, il est important de toujours se souvenir d’un point central: soyez critiques envers toutes les idées, même les vôtres. Mais c’est difficile si vous vous êtes convaincus que d’autres personnes ne peuvent pas penser pour elles-mêmes. [5]»


Spectres coloniaux


Paradoxalement, la notion selon laquelle les droits des femmes et la libération sexuelle sont des phénomènes «occidentaux» est brandie à la fois par les fondamentalistes islamiques et par les néoconservateurs et les néolibéraux occidentaux – ainsi que par beaucoup de féministes auto-proclamées à gauche.


Vivienne Wee, professeure au département d’Etudes Asiatiques et Internationales à l’Université de la ville de Hong Kong, a exprimé cette idée ainsi, dans sa critique du livre Great Ancestors – Women Asserting Rights in Muslim Contexts: «Il existe une croyance très répandue dans les sociétés post-coloniales selon laquelle toutes les valeurs progressistes, comme les droits humains, les droits des femmes, la justice sociale ou le développement durable, nous ont été transmises comme une partie du «fardeau de l’homme blanc» qui était de nous civiliser.


Du coup, ces valeurs tendent à être connues comme des «valeurs occidentales», comme si avant la colonisation européenne, il n’y avait pas eu de notion indigène de la justice ou des droits dans les sociétés qui ont été colonisées. En fait, nous devrions nous rendre compte que ce mythe a été construit précisément pour légitimer la présence coloniale comme un «processus civilisateur». (…) Ce type de discours provient d’un processus d’«altérisation» qui dépeint l’Autre non-occidental en termes de «despotisme oriental » ou d’une autre forme de barbarie duquel les femmes non-occidentales doivent être « sauvées». Il y a une grande ironie à ce que des nationalistes post-coloniaux souscrivent à présent à ce mythe colonial et s’identifient à des personnes qui ne donnent aucune valeur aux droits des femmes. [6] »


Sherene Razack, une professeure de sociologie basée à Toronto, née à Trinidad dans une famille d’origine indienne musulmane, pointe aussi le danger du spectre du colonialisme et de l’impérialisme dans le débat sur la libération des femmes musulmanes: «Le genre est devenu le marqueur décisif, qui sépare les civilisés des non-civilisés, ceux qui méritent, et ceux qui ne méritent pas. C’est pourquoi le féminisme et l’égalité des genres deviennent tout à coup de telles priorités. La logique est que le manque d’égalité des genres dans les communautés musulmanes légitime la violence occidentale et la rend nécessaire. La femme musulmane opprimée doit être libérée de l’homme musulman, dangereux et violent. [7]»


La religion est l’opium du peuple


Nous allons maintenant nous tourner vers ce que Marx et Lénine avaient à dire sur la critique socialiste de la religion – en-dehors de la citation usée «la religion est l’opium du peuple» que, parmi d’autres, la «plate-forme athée» de l’ARV a brandi avec rigueur durant le débat sur la légitimité de la candidature d’Asmaa Abdol-Hamid.


Comme il a été mentionné plus haut, il est toujours utile de voir les choses dans le contexte où elles ont lieu, et la même chose peut être dite sur la citation à propos de l’opium (tirée de l’introduction à la Contribution à la critique de La philosophie du droit de Hegel) qui dans sa totalité est: «La misère religieuse est, d’une part, l’expression de la misère réelle, et, d’autre part, la protestation contre la misère réelle. La religion est le soupir de la créature accablée par le malheur, l’âme d’un monde sans cœur, de même qu’elle est l’esprit d’une époque sans esprit. C’est l’opium du peuple.


Le véritable bonheur du peuple exige que la religion soit supprimée en tant que bonheur illusoire du peuple. Exiger qu’il soit renoncé aux illusions concernant notre propre situation, c’est exiger qu’il soit renoncé a une situation qui a besoin d’illusions. La critique de la religion est donc, en germe, la critique de cette vallée de larmes, dont la religion est l’auréole.»

En bref : le problème n’est pas la religion en elle-même, le problème est l’état du monde qui fait que les gens désirent que la religion apaise leur souffrance – d’où la métaphore de l’opium.


Lénine a décrit la relation entre la religion et l’organisation de la société ainsi dans son texte Socialisme et Religion: «L’oppression économique qui pèse sur les ouvriers, provoque et engendre inévitablement sous diverses formes l’oppression politique, l’abaissement social, l’abrutissement et la dégradation de la vie intellectuelle et morale des masses. [8]» Quand Lénine écrit: «La foi en une vie meilleure dans l’au-delà naît tout aussi inévitablement de l’impuissance des classes exploitées dans leur lutte contre les exploiteurs que la croyance aux dieux, aux diables, aux miracles naît de l’impuissance du sauvage dans sa lutte contre la nature», ceci peut nous donner une indication sur la raison pour laquelle par exemple le fondamentalisme religieux est fort dans des ex-colonies, ou pourquoi certains migrants, qui n’étaient pas très religieux dans leur pays natal, deviennent fondamentalistes en vivant dans une Europe raciste.


Sur le terrain


Ce que Marx a écrit dans ses Thèses sur Feuerbach est un outil très utile pour développer des stratégies pour combattre l’oppression masquée derrière la religion: «Le fait, notamment, que la base temporelle se détache d’elle-même, et se fixe dans les nuages, constituant ainsi un royaume autonome, ne peut s’expliquer précisément que par le déchirement et la contradiction internes de cette base temporelle. Il faut donc d’abord comprendre celle-ci dans sa contradiction pour la révolutionner ensuite pratiquement en supprimant la contradiction. Donc, une fois qu’on a découvert, par exemple, que la famille terrestre est le secret de la famille céleste, c’est la première qu’il faut anéantir sur le plan de la théorie et de la pratique. [9]»


Pour conclure, le combat pour la libération sexuelle et de genre, tout comme le combat pour le contrôle populaire des moyens de production, ne se fait pas « dans les nuages », sur le champ de bataille abstrait du brouillard religieux. Le combat est sur terre. Et la notion quasi- religieuse – masquée en critique de la religion – que la religion et les symboles religieux ont un pouvoir en eux-mêmes – n’a pas plus les pieds sur terre que les fondamentalistes qu’elle prétend combattre.


En tant que socialistes nous ne combattons pas pour qui que ce soit, nous organisons des gens pour qu’ils se battent pour eux-mêmes. C’est aussi valable pour les femmes qui s’identifient comme musulmanes. En gardant cela à l’esprit le risque de s’aligner sur des forces de droite, laïques ou religieuses, est au moins diminué.


[1] L’Alliance Rouge-Verte (Enhedslisten) est une formation large de la gauche radicale danoise, qui s’est formée au début des années 90.

[2] Nina Trige Andersen fait partie de la direction du SAP – la section danoise de la Quatrième Internationale, et milite au sein de l’Alliance Rouge-Verte, en premier lieu dans la commission Queer.

[3] Cette analyse s’appuie sur les analyses féministes critiques faites par des féministes telles que Nighat Said Khan (Pakistan), Sherene Razack (Canada), Gunilla Edemo (Suède) et Mette Buchardt (Danemark, ex : http://www.modkraft.dk/spip.php?art… ).

[4] Pakistansk feminist : stop med at belære os, Dagbladet Information, 25 janvier 2008.

[5] Idem.

[6] Extrait d’une critique sur le site Internet de l’AWID - Association pour le droit des femmes et le développement. Le réseau international de solidarité Femmes Sous Lois Musulmanes (FSLM) et le collectif de femmes basé à Lahore Shirkat Gah (qui agit aussi comme bureau régional de coordination de FSLM pour l’Asie) ont entrepris un travail pionnier de recherche historique. Leur but est de mettre en lumière l’activisme pour les droits des femmes dans les sociétés musulmanes. Critique du livre par Anissa Helie.

[7] Atvarer mot rasisme i feminismens navn, interview sur le site Internet du centre norvégien de recherche sur le genre, Informasjonssenter for kjønnsforskning.

[8] http://www.trotsky.org/francais/len…

[9] http://www.marxists.org/francais/ma…


 

REGIONALES PACA :


SOLIDARITE AVEC LE NPA ET ILHAM MOUSSAÏD

par la coordination régionale PACA des Alternatifs


samedi 6 février 2010


"Partenaires du NPA en PACA pour les élections régionales de mars 2010, sur la base d’un accord politique et programmatique, les Alternatifs PACA sont solidaires de la composition de la liste commune du Vaucluse. La présence sur cette liste d’une jeune militante portant un foulard ne doit pas occulter les objectifs sociaux, démocratiques, écologistes et féministes sur lesquels elle est clairement et depuis longtemps engagée.

Ce sont ces engagements qui expliquent le choix courageux et émancipateur d’Ilham Moussaïd de figurer sur cette liste.


Pour les Alternatifs, la participation à la citoyenneté active de toutes et de tous, et en particulier des jeunes des quartiers populaires de toutes origines, est un objectif central. Elle est inséparable du combat intransigeant pour l’égalité des droits.


Cette candidature a suscité des interrogations. La question est en effet complexe et le débat doit se poursuivre en particulier sur les discriminations et l’héritage post-colonial, comme sur le sens des signes religieux dans l’espace public et sur ce qu’ils signifient par rapport aux droits des femmes.

Les Alternatifs sont prêts à poursuivre ce débat, en restant vigilants sur le contexte dans lequel il s’ouvre. Ils refusent la confusion délibérément entretenue par ceux qui invoquent la laïcité et les droits des femmes uniquement quand il s’agit de l’islam. Ils refusent également l’assimilation entre islam et islamisme, foulard, voile et burqua, sur fond de débat nauséabond relatif à l’identité nationale, dans une logique xénophobe et raciste."


pour la coordination régionale PACA des Alternatifs Magali Braconnot - Bruno Della Sud

 

"L'insoluble contradiction du voile anticapitaliste" (mediapart.fr)
  • Voile médiatique ou vrai débat? En annonçant, mercredi 3 février, la candidature d'Ilham Moussaïd, une militante voilée, en quatrième position de sa liste dans le Vaucluse aux régionales de Provence-Alpes-Côte d'Azur, le NPA est en proie aux critiques de tous bords, interrogeant la société française sur son rapport à la laïcité et à la politique. Martine Aubry (lire ici), Jean-Luc Mélenchon (voir la vidéo) ou Pierre Laurent (lire ici) réprouvent le choix du parti d'Olivier Besancenot.

    Pourtant, depuis l'Abbé Pierre élu député entre 1946 et 1951 jusqu'à Christine Boutin brandissant la Bible dans l'hémicycle (et l'assumant encore aujourd'hui), en passant par les campagnes électorales de Dominique Strauss-Kahn kippa sur la tête dans les rues de Sarcelles (certes dans une ville où le poids des diverses communautés est grand), les exemples de mélange des genres entre religion et politique sont nombreux. Même le port du voile par une élue de la République n'est pas une nouveauté; on retrouve ainsi, par exemple, sur le site de la mairie d'Echirolles (Isère) le portrait de Besma Mechta, conseillère municipale communiste élue depuis 2008, posant avec un foulard couvrant ses cheveux.

    Avec l'immixtion sur le devant de la scène politique d'Ilham Moussaïd, c'est un débat interne fort complexe traversant le NPA depuis sa création qui est désormais livré à la place publique. Un débat où les contradictions sont nombreuses et les convictions profondes de toutes parts. Au-delà de certaines caricatures cherchant à embringuer dans le contexte «burqa/identité nationale» une réflexion pourtant ancienne, Mediapart revient au fond du débat, tel qu'il est actuellement discuté par les militants du NPA.

  • Le NPA a-t-il fait un coup médiatique?

    «Franchement, on se serait bien passé de ce débat en pleine campagne électorale, confie Pierre-François Grond, n°2 et porte-parole du NPA. En l'espace d'une heure, j'ai eu plus de vingt sollicitations médiatiques, dont le 20h de TF1 et de France 2, qu'on a refusé.» Tout part d'un article paru dans Le Figaro mardi 2 février (lire ici). A la va-vite, deux communiqués de presse sont publiés en milieu de matinée, dont le premier ne cite même pas le nom d'Ilham Moussaïd, n'évoquant que «le choix du NPA du Vaucluse qui, après un débat sérieux et complexe, a été d'inclure sur ses listes une de ses membres, militante féministe, anticapitaliste, internationaliste qui estime devoir porter le voile en raison de ses convictions religieuses».

    Un second communiqué, trois heures après, apporte un rectificatif à une citation attribuée à Besancenot dans l'article du Figaro: «J'ai simplement dit: “Ilham est la preuve qu'on peut être au NPA et porter le voile”», exprime la tête de liste anticapitaliste en Île-de-France. «On fait dire à Olivier qu'Ilham est une “militante féministe, voilée et laïque”. Or, ça, c'est ce que dit Ilham, pas Olivier», justifie Grond. Sur le site Arrêts sur image, la journaliste du Figaro maintient toutefois avoir entendu les propos de Besancenot.

    En réalité, le NPA est saisi de ce débat interne depuis sa création, et l'entrée dans la défunte LCR de plusieurs militants issus des «quartiers populaires» (appellation officielle donnée aux banlieues). Dès le lancement du nouveau parti qu'il a impulsé, Olivier Besancenot souhaite qu'il se développe dans les cités, de la même façon qu'il s'implante dans les entreprises. Lors de l'université d'été d'août 2009 à Port-Leucate (Aude), le sujet fait même l'objet de cinq tables rondes (lire notre reportage). Puis, fin septembre 2009, Olivier Besancenot sera la seule tête d'affiche à faire le déplacement au Forum social des quartiers populaires, dans le quartier délabré du Petit-Bard à Montpellier (lire notre reportage).

    A chaque fois, les tensions s'expriment, sur les relations aux associations de quartier, sur l'instrumentalisation politique, sur la pratique du ramadan. Et sur le port du voile, déjà. La candidature d'Ilham Moussaïd doit donc d'abord être interprétée comme la continuité de ce questionnement.

  • Qui est Ilham Moussaïd?

  • Militant à Avignon, et historique de la Ligue, Jacques Fortin voit dans cette étudiante de 25 ans «une fille bien, posée, qui n'essaie pas d'instrumentaliser le NPA au profit de questions communautaires. Lors de son adhésion, son voile n'avait pas posé de problème, plutôt de la sympathie». Comme le raconte Hendrik Davi, un autre militant avignonnais, sur son blog dans Mediapart, «Ilham Moussaïd a milité au sein d'un collectif contre l'occupation de Gaza, il y a un peu plus d'un an». Etudiante, elle participe aussi aux grèves dans sa faculté et devient trésorière locale puis départementale du NPA dans le Vaucluse.

     

    En octobre 2009, elle a participé à une formation près de Rouen, sur la question du féminisme. Elle en garde le souvenir d'un «moment d'échanges qui s'est très bien passé. Je comprends le discours, et c'est vrai qu'il y a des femmes soumises chez les femmes voilées. Mais l'inverse est aussi vrai, je ne me sens pas du tout soumise et je me retrouve dans les principes d'égalité, de justice et de répartition des richesses qui sont portés par le NPA».

    Désignée candidate à l'issue d'un vote des militants du Vaucluse, par 60% des voix, elle entend «défendre la parole des classes populaires et du quartier d'où je viens (La Rocade, à Avignon) mais pas sur le voile. Plutôt sur les questions de discriminations, de logement ou de chômage. Je ne suis pas là pour représenter les femmes voilées, mais j'espère que ça parlera à des gens, que ça fera réfléchir». Aujourd'hui, si elle se dit en accord avec le programme anticapitaliste, elle ne songe pas à retirer son voile: «Il y a des croyants au NPA, de différentes religions. Si j'attire l'attention, c'est seulement parce que l'expression de ma foi est visible.»

    Pour l'un de ses proches, Abdel Zahiri, «Ilham a une vraie légitimité militante. Et il se trouve qu'elle porte le voile. Mais ce n'est pas son combat. Cela dit, c'est aussi un message d'ouverture. C'est un moyen de dire que tout le monde a toute sa place au NPA. Et puis jusqu'ici, les filles voilées étaient obligatoirement soumises. Elle montre que ce n'est pas totalement vrai».

    Pour autant, la désignation d'Ilham Moussaïd fait débat en interne et passe mal. Sa proximité avec Abdel Zahiri n'y est pas pour rien. Provocateur, il ne cesse depuis son adhésion de bousculer les certitudes des militants traditionnels, bien plus structurés politiquement, au sens classique de l'extrême gauche. D'abord taxé de communautarisme, il est désormais critiqué pour son «caractère incontrôlable et individualiste» par certains militants locaux.

    En août 2009, il confiait à Mediapart, à l'issue d'une longue discussion avec le philosophe Daniel Bensaïd: «Moi, quand je viens aux universités d'été, je me déguise en Arabe, avec une djellaba. Mais en vrai, je ne m'habille jamais comme ça chez moi. Seulement, ça permet d'habituer les gauchos, en confrontant les pratiques et en laissant de côté les passions. Ça permet de gagner du temps. Dans l'autre sens, moi j'ai besoin de formations sur le marxisme et tout le bordel, car ça m'intéresse et je n'y connais rien.»

    Intrigué par le personnage, Daniel Bensaïd (décédé il y a deux semaines) disait alors, en évoquant les menus ramadan spécialement servis à une dizaine de militants musulmans: «Cela pose la question de ce qu'on veut. Si l'on veut ouvrir la politique à ceux qui en sont privés, il faut être attentif. Par exemple, on ne peut pas fixer un Conseil national qui aurait lieu pendant l'Aïd-el-Kébir. C'est vrai que ça ne nous viendrait jamais à l'esprit de l'organiser le jour de Noël.»

    Mais le débat actuel au NPA, local et national, se porte lui sur la question de la laïcité et du féminisme. Et il est loin d'être simple…

Quel est l'état du débat au NPA?

Au cœur de la controverse, qui dépasse tous les courants de pensée jusqu'ici constitués au sein du NPA, c'est bien l'illustration de l'abandon des fondamentaux trotskystes qui est en jeu. «On est pris dans nos contradictions et entre deux tensions, reconnaît Pierre-François Grond. Entre l'envie de casser les barrières de la politique traditionnelle et l'attachement à nos valeurs féministes et laïques. Aujourd'hui, l'important est de pouvoir entrer dans le parti avec ses croyances, tout en adhérant à une visée émancipatrice. Mais il ne s'agit pas d'imposer des pré-requis, comme il y a trente ans.»

Pour Anne Leclerc, responsable de la «commission féminisme», «il est évident que le NPA, ce n'est plus la Ligue. Mais je pense que la croyance doit rester une question individuelle. Le problème, c'est de ne pas entrer dans la logique de stigmatisation anti-musulmane et de garder le cap de l'émancipation».

De son côté, Omar Slaouti, responsable de la «commission quartiers populaires», met en garde contre «l'idée malsaine que le NPA rechercherait des militantes voilées. On effectue un travail dans les quartiers, et il se trouve juste que dans ces endroits, où on ne voit plus la gauche, il y a plus de musulmans qu'ailleurs. La question est alors: “Quelle place on leur accorde?” Mais rien que de poser cette question, j'ai un peu honte…».

C'est bien la représentation politique qui pose problème, dans la pratique. Un parti se disant laïque peut-il présenter une candidate présentant un signe extérieur religieux? Selon Slaouti, «il ne peut y avoir de militantisme à deux vitesses. Ce n'est finalement pas si éloigné du débat qu'on pouvait avoir à la Ligue dans les années 1980, quand on se battait pour que les travailleurs immigrés puissent être syndicalistes, et pas seulement syndiqués. Et puis Ilham a un discours très clair sur les valeurs féministes, sur l'avortement ou sur l'homosexualité. Et elle combat là où les féministes ne sont pas toujours implantées».

Pierre-François Grond tente lui de démontrer la difficulté du cas présent: «Si une femme voilée vient nous voir et porte un discours inégalitaire, il n'y a pas de problème, elle n'a pas sa place chez nous. La difficulté politique, c'est quand une femme voilée nous rejoint et porte un discours en adhésion avec nos principes. Ici, il ne s'agit pas de la laïcité à l'école, mais d'un choix religieux d'adulte consentant.»

Anne Leclerc, qui a mené des formations au féminisme «très enrichissantes et pas du tout passionnées» avec Ilham Moussaïd, rajoute un autre élément dans l'embrouillamini théorique: «Il y a aussi chez nous des musulmanes non voilées, qui sont croyantes mais opposées au foulard. Et elles vivent très mal, peut-être même plus mal que nous, le fait de voir une candidate du NPA voilée. Pour une fille comme Fahima Laidoudi, qui est membre du comité politique national, les vraies questions sont la précarité et le chômage, et le voile une diversion.» Et d'expliquer le fond du problème: «Rien n'a été codifié sur cette question au lancement du NPA. On a bien sûr comme principes fondateurs la laïcité et le féminisme, mais on ne s'est pas posé la question de la religion.»

Alors, le NPA a décidé de trancher la question religieuse lors de son prochain congrès, du 11 au 14 novembre 2010. En attendant, la direction anticapitaliste laisse tout le monde s'exprimer, tant la diversité des points de vue semble grande en son sein. Et sur son site, à côté du communiqué du NPA Vaucluse, on retrouve celui de la minorité locale«Ce débat n'est pas choquant, il est même salutaire et sera transparent, promet Pierre-François Grond. On l'entamera après les régionales, et on le fera sérieusement, en produisant des textes et sans brutaliser quiconque.» ayant rejeté la candidature d'Ihlam Moussaïd.

Stéphane Alliès.

 

"Le NPA mal fichu sur le foulard" (Libération du 5 février)

Drôle de débat au NPA. Après la présentation d’Ilham Moussaïd, jeune fille musulmane portant un voile, en quatrième position sur leur liste aux régionales dans le Vaucluse, les anticapitalistes se sont pris une volée de la part du reste de la classe politique.

Coup de pub ou simple expression de la transformation de ce nouveau parti issu de la Ligue communiste révolutionnaire, trotskiste donc ultra-laïc, en une formation ouverte à d’autres champs de la société, dont les quartiers populaires? «On savait que ça allait lancer le débat, avoue Abdel Zahiri, figure NPA avignonnaise et proche d’Ilham. On ne l’a pas proposée à la candidature seulement parce qu’elle a un voile sur la tête. Mais c’était un élément on va dire complémentaire.»


«Féministe».


Etudiante en BTS-gestion, cette Avignonnaise de 22ans a rejoint le NPA il y un an. Engagée dans un comité de soutien aux Palestiniens pendant l’offensive sur Gaza, elle rencontre des militants déjà engagés dans la transformation de la LCR en NPA. Aujourd’hui, elle est trésorière de son comité dans le Vaucluse. «C’est surtout quelqu’un d’engagé localement, défend Abdel Zahiri. Quelqu’un qui fait de l’accompagnement scolaire auprès des jeunes des quartiers.»

«Si on a décidé de la présenter c’est parce que c’est quelqu’un de sincère, d’engagée, en accord avec les principes fondateurs du NPA. Elle n’est pas là pour dire comment les gens doivent croire ou ne pas croire. Elle ne représente pas la communauté musulmane ni le Coran! Elle se dit féministe, laïque et anticapitaliste.» Et explique que son foulard blanc est mû par une «conviction religieuse» personnelle. «Elle se définit d’abord sur nos fondamentaux: elle est pour le droit à l’avortement, défend l’homosexualité», ajoute un des responsables locaux, Jacques Fortin.


Démissions.


Mais chez ses camarades du Vaucluse - et plus largement chez des anticapitalistes marqués par l’idéologie marxiste - sa candidature crée débats et contestations. Lors de l’assemblée générale d’investiture des candidats locaux, «on s’est écharpé!» confie Fortin. Une fois le vote favorable à la présence d’Ilham Moussaïd sur la liste, trois colistières ont démissionné, ne voulant pas figurer sur la même liste que la jeune fille. «C’était intenable, pour moi, il y avait une incompatibilité à être dans un parti laïc et féministe avec un signe religieux ostensible, symbole d’une forme d’oppression de la femme.» «Dans cette histoire, deux conceptions de la laïcité s’affrontent, analyse Vincent Tiberj, chercheur à Sciences Po. Une laïcité multiculturelle, au sens anglo-saxon du terme, que l’on retrouve davantage dans les jeunes générations. Et une laïcité que l’on peut qualifier de neutralité où toutes les références religieuses doivent être gommées.» explique l’une d’elle,

 

«Si Ilham faisait de son foulard un signe ostentatoire, bien sûr ça poserait problème. Mais ce n’est pas du tout le cas!»affirme Omar Slaouti, membre de la commission «quartiers populaires» du NPA. «Sidéré»par l’emballement médiatique autour de cette candidature, il dénonce un «climat d’islamophobie rampante. Dès qu’il y a un signe religieux, on y voit un signe ostentatoire.» Outre ce problème de laïcité, «à travers le voile, beaucoup d’entre nous voient aussi un signe d’oppression de la femme», commente Anne Leclerc de la commission «intervention féministe» du NPA. «Le problème est que cette jeune fille est l’exemple type de la personne qui n’a rien d’une personne dominée», pointe Vincent Tiberj. Le NPA paie dans cette affaire les questions laissées en suspens lors de son congrès fondateur d’il y a un an. «La question a été laissée de côté volontairement lors la fondation du parti, explique Pierre-François Grond à la direction du NPA. On ne voulait pas faire d’oukase vis-à-vis des nouveaux militants qui nous rejoignaient.»


Du coup, la question doit être réglée en novembre lors du prochain congrès. «Est-ce qu’une porte-parole voilée ou un porte-parole avec une kippa peut représenter le NPA?» interroge Slaouti. «On demande aux gens de juger une personne sur ce qu’elle est, dit, fait, plus que sur ce qu’elle paraît», revendique Abdel Zahiri tout en dénonçant «l’hypocrisie des politiques» sur le sujet. «Y a-t-il islamisation? Non. Est-on contre les statuts du NPA? Non plus.»

«Cette situation est la conséquence de l’ouverture de l’organisation, observe Florence Johsua, chercheuse au Cevipof. Elle pose la question de la représentativité des profils sociaux des nouveaux militants.»«Le NPA est un syncrétisme de différentes idéologies, définit Vincent Tiberj, la rencontre de différentes gauches, en phase avec des combats postmatérialistes (OGM, sans-papiers…) et culturels différents, très individualisés.»

Lilian Alemagna

 

 

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5 février 2010 5 05 /02 /février /2010 09:24

jeudi 4 février 2010 (19h21)

de Philippe Marlière Maître de conférences à Londres


Dans une interview accordée à Marianne, Jean-Luc Mélenchon a commenté la candidature aux régionales d’Ilham Moussaïd. Cette jeune femme voilée est candidate sur la liste NPA du Vaucluse. Pour le sénateur, cette candidature, ce « n’est franchement pas une bonne idée » et « tout ça est régressif ». Bloggeur sur Rue89 et militant au NPA, Philippe Marlière, lui répond.


Cher Jean-Luc,


Nous avons eu droit à la grand messe sur l’identité nationale des sécuritaires Besson-Hortefeux (un « débat » pour attrape-nigauds ou pour fachos de tout poil). Puis, ce fut au tour du couple Gérin-Raoult, les pieds-nickelés de l’ordre républicain (et « éradicateurs » de burqas). Aujourd’hui, nous enchaînons avec la chasse à la candidate « islamiste » du NPA. Manque de pot, cette fois-ci, c’est toi qui lance la meute contre Ilham Moussaïd. Que tu le fasses à partir d’une feuille réactionnaire (la mal-nommée Marianne) ajoute encore au trouble.


Tu dis que cette candidature est « régressive ». Qu’en sais-tu ? Connais-tu la candidate ? As-tu discuté avec elle de ses opinions politiques ? Qu’est-ce qui te permet de douter de son engagement féministe, laïque et de gauche ?

Tu affirmes que cette candidature est « immature ». Pourquoi ? En quoi le choix d’une femme dont les parents sont issus de l’immigration serait « immature » ? Cette initiative que tu qualifies subtilement de « racoleuse » vise en réalité à présenter une jeune femme d’origine populaire et qui est politiquement active dans sa région. Où est le mal ?

En quoi Ilham Moussaïd est-elle une candidate religieuse ?

On peut opposer cet acte pleinement politique à la pitoyable drague des « minorités visibles » par les partis de gauche (un terme hypocrite et impropre, car on sait bien que l’on s’intéresse ici au caractère ethnique des personnes). Dans ce cas, contre la mise en scène de la couleur sur une liste, des partis de la gauche laïque cèdent quelques strapontins à des minorités normalement invisibles. Qu’as-tu à dire de cette tartufferie électorale ?

Plus fort encore : tu affirmes que le NPA « entraîne le débat sur le terrain religieux ». En quoi Ilham Moussaïd est-elle une candidate religieuse ? Rien dans son discours public de militante ne te permet d’étayer cette accusation gratuite.


Allons, cessons de tourner autour du pot : ce qui te pose problème, ce n’est ni la candidate, ni ses origines ethniques ou sociales, mais le fait qu’elle porte un foulard. Un foulard ! Quelle horreur ! Et te voilà déclinant le prêt-à-penser soi-disant laïque : le foulard, c’est mal, ce n’est pas républicain, ce n’est pas progressiste, etc.


Tu es l’un des rares hommes politiques français qui lit, réfléchit, débat, tente de comprendre et d’interpréter le monde tel qu’il est. Quelle déception de te retrouver attablé au café du communautarisme laïcard. Le foulard est un « signe de soumission patriarcale » assènes-tu. Qu’en sais-tu ?


Le foulard n’a intrinsèquement rien à voir avec cela. Dans certaines situations, une femme voilée peut en effet être soumise à la domination masculine, mais c’est loin d’être une règle générale. Inversement, nombre de femmes en apparence « libérées » et « modernes » vivent sous le joug tyrannique de conjoints.


La domination patriarcale s’inscrit avant tout dans les rapports hommes-femmes au quotidien. Une femme qui a librement décidé de porter le voile et qui mène une existence autonome sera toujours plus libre que celle sans voile qui, du foyer au bureau, sera cantonnée à des rôles mineurs, parce que femme.

Cette laïcité est celle de l’intolérance et du refus de la différence

Nous avons toi et moi longtemps appartenu au Parti socialiste, où il est de bon ton de stigmatiser les « voilées ». C’est dans ce parti que j’ai pu observer les manifestations les plus machistes et misogynes, sans que cela ne suscite aucun tollé chez les éléments masculins : blagues sexistes, intimidations physiques et, last but not least, infractions délibérées à la loi sur la parité. C’est drôle, dans ces cas-là, personne ne s’élève contre la « domination patriarcale ».


Tu affirmes enfin qu’Ilham Moussaïd « divise » et qu’il lui faut « tirer les leçons de l’Histoire de France (…) parce que nous avons connu trois siècles de guerre de religion ». Si ce n’est pas un dérapage de ta part, cela y ressemble de près.


En quoi le foulard d’Ilham serait-il comparable à nos guerre de religions, à la déportation des juifs par la police française ou encore à la « mission émancipatrice » laïco-chrétienne en Algérie ? Il faut garder le sens de la mesure, Jean-Luc !


La laïcité qui décide comment il faut s’habiller sur la voie publique, qui prétend interpréter le sens que l’on donne à son apparence physique et qui exclut les têtes (et les voiles ! ) qui dépassent, ce n’est pas la laïcité : c’est l’intolérance et le refus de la différence. Jean-Luc, laisse cela aux Besson, Hortefeux, Gérin et Raoult.

Avec mes salutations amicales et navrées.



De : Philippe Marlière
jeudi 4 février 2010

Foulard et laïcité

par Raoul Marc Jennar - jeudi 4 février 2010


Je suis pro­fon­dé­ment convaincu que la laï­cité est le plus accep­table des cadres légaux pour qu’ensemble des femmes et des hommes qui croient ou qui ne croient pas en quelque dieu que ce soit puissent avoir en com­mun une même volonté de trans­for­ma­tion de la société en vue de l’émancipation.

Je suis aux côtés des femmes qui ont lutté et luttent encore âpre­ment pour la libre dis­po­si­tion de leur corps et de leur vie. Mais cela ne me paraît pas incom­pa­tible avec les réponses qu’elles se donnent per­son­nel­le­ment aux grandes ques­tions fondamentales.


Une femme qu’elle soit de confes­sion musul­mane, de confes­sion chré­tienne ou de confes­sion hébraïque, peut très bien défendre le droit des femmes à l’IVG et, éventuellement, le refu­ser pour elle-même.


On se bat pour des liber­tés — même celles dont on n’entend pas user - pas pour des inter­dits. On se bat pour refu­ser que les inter­dits des reli­gions deviennent (ou demeurent) des inter­dits de toute la société.


Les moti­va­tions à l’origine du port d’un signe dési­gnant une opi­nion (la croix des chré­tiens, le fou­lard des musul­manes, la kippa des hébreux) ou une adhé­sion ( la branche d’acacias des francs-maçons) sont mul­tiples. J’observe que cette moti­va­tion va du simple signe de recon­nais­sance à la mani­fes­ta­tion déli­bé­rée d’une soli­da­rité entre oppri­més. A l’image du kef­fieh, signe de soli­da­rité avec le peuple palestinien.


Des femmes du NPA s’insurgent parce qu’une mili­tante de ce parti, Ilham, porte le fou­lard alors qu’elle est can­di­date dans le Vau­cluse pour les élec­tions régio­nales. Pour­tant, à ce qu’il me revient, Ilham défend avec beau­coup de déter­mi­na­tion les objec­tifs de son parti tels qu’ils sont for­mu­lés dans les prin­cipes fon­da­teurs du NPA. Sans la moindre restriction.


Il me semble qu’il y a, chez ces mili­tantes hos­tiles à la can­di­da­ture d’Ilham, une confu­sion. Un amal­game entre croyance et église. Nul ne peut nier que ceux qui ne sont pas croyants ont été vic­times pen­dant des siècles de la tyran­nie de l’Eglise catho­lique. Mais des chré­tiens l’ont été égale­ment : les Cathares, les Pro­tes­tants et tous ceux qui, croyants, ne croyaient pas selon les dogmes et les rites conve­nus par l’église domi­nante du moment.


C’est le clé­ri­ca­lisme, c’est-à-dire le pou­voir de l’institution qui pré­tend déte­nir la juste inter­pré­ta­tion de la croyance et — logique mono­théiste — l’imposer à toutes et tous, qui a infligé des souf­frances immenses à telle enseigne qu’on peut qua­li­fier de crimes contre l’humanité les maux infli­gés par l’Eglise catho­lique et son clergé. Comme d’autres églises d’ailleurs, puisque le mono­théisme porte en lui l’intolérance, l’arbitraire et le totalitarisme.


Le com­bat contre le pou­voir des églises n’est d’ailleurs pas ter­miné loin s’en faut. Les exemples abondent dans la Répu­blique française pro­cla­mée laïque des avan­tages concé­dés par les pou­voirs publics à des ins­ti­tu­tions rele­vant d’une église. Autre exemple, lors de la confé­rence de l’ONU sur les droits de la femme, on a vu l’alliance des cler­gés des grandes reli­gions mono­théistes s’opposer au droit fon­da­men­tal de la femme à dis­po­ser d’elle-même. Une alliance qui se reforme chaque fois que les droits des femmes sont en débat dans les enceintes internationales.


Croire ou ne pas croire est une liberté indi­vi­duelle fon­da­men­tale. Sauf à bri­mer la liberté de pen­sée, ce n’est pas la reli­gion qu’il faut com­battre, ce sont les ins­ti­tu­tions qui veulent l’imposer. Ce n’est pas l’opium qu’il faut com­battre, c’est celui qui le vend.


C’est le rôle des églises et non les croyances indi­vi­duelles qu’il faut com­battre. Ce qui peut, ce qui doit unir toutes les femmes et tous les hommes qui se réclament de la laï­cité, c’est le com­bat contre le pou­voir des églises sur la société. Pas la néga­tion des opi­nions personnelles.


Etre laïque, c’est être anti­clé­ri­cal ; ce n’est pas impo­ser l’athéisme. La laï­cité ce n’est pas la néga­tion des reli­gions, ni davan­tage la pro­mo­tion de l’athéisme. La laï­cité, c’est le refus de don­ner à quelque clergé que ce soit une emprise sur les choix de la société. Léon Gam­betta le rap­pe­lait : “le clé­ri­ca­lisme, voilà l’ennemi !”


Que la pré­sence d’Ilham, cou­ra­geuse révé­la­trice d’un débat essen­tiel, sur une liste pour les élec­tions régio­nales pose pro­blème à des membres de son parti témoigne des limites de ceux-ci quand ils pré­tendent lut­ter pour l’émancipation. L’émancipation ne signi­fie pas l’alignement des opi­nions per­son­nelles sur un mode de pen­sée unique. “La liberté, c’est d’abord la liberté de celui qui pense autre­ment” (Rosa Luxemburg).

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5 février 2010 5 05 /02 /février /2010 08:49
« Cher Jean-Luc Mélenchon, tu dérapes ! »

de Philippe Marlière Maître de conférences à Londres





Dans une interview accordée à Marianne, Jean-Luc Mélenchon a commenté la candidature aux régionales d’Ilham Moussaïd. Cette jeune femme voilée est candidate sur la liste NPA du Vaucluse. Pour le sénateur, cette candidature, ce « n’est franchement pas une bonne idée » et « tout ça est régressif ». Bloggeur sur Rue89 et militant au NPA, Philippe Marlière, lui répond.

Cher Jean-Luc,

Nous avons eu droit à la grand messe sur l’identité nationale des sécuritaires Besson-Hortefeux (un « débat » pour attrape-nigauds ou pour fachos de tout poil). Puis, ce fut au tour du couple Gérin-Raoult, les pieds-nickelés de l’ordre républicain (et « éradicateurs » de burqas). Aujourd’hui, nous enchaînons avec la chasse à la candidate « islamiste » du NPA. Manque de pot, cette fois-ci, c’est toi qui lance la meute contre Ilham Moussaïd. Que tu le fasses à partir d’une feuille réactionnaire (la mal-nommée Marianne) ajoute encore au trouble.

Tu dis que cette candidature est « régressive ». Qu’en sais-tu ? Connais-tu la candidate ? As-tu discuté avec elle de ses opinions politiques ? Qu’est-ce qui te permet de douter de son engagement féministe, laïque et de gauche ?

Tu affirmes que cette candidature est « immature ». Pourquoi ? En quoi le choix d’une femme dont les parents sont issus de l’immigration serait « immature » ? Cette initiative que tu qualifies subtilement de « racoleuse » vise en réalité à présenter une jeune femme d’origine populaire et qui est politiquement active dans sa région. Où est le mal ?

En quoi Ilham Moussaïd est-elle une candidate religieuse ?

On peut opposer cet acte pleinement politique à la pitoyable drague des « minorités visibles » par les partis de gauche (un terme hypocrite et impropre, car on sait bien que l’on s’intéresse ici au caractère ethnique des personnes). Dans ce cas, contre la mise en scène de la couleur sur une liste, des partis de la gauche laïque cèdent quelques strapontins à des minorités normalement invisibles. Qu’as-tu à dire de cette tartufferie électorale ?

Plus fort encore : tu affirmes que le NPA « entraîne le débat sur le terrain religieux ». En quoi Ilham Moussaïd est-elle une candidate religieuse ? Rien dans son discours public de militante ne te permet d’étayer cette accusation gratuite.

Allons, cessons de tourner autour du pot : ce qui te pose problème, ce n’est ni la candidate, ni ses origines ethniques ou sociales, mais le fait qu’elle porte un foulard. Un foulard ! Quelle horreur ! Et te voilà déclinant le prêt-à-penser soi-disant laïque : le foulard, c’est mal, ce n’est pas républicain, ce n’est pas progressiste, etc.

Tu es l’un des rares hommes politiques français qui lit, réfléchit, débat, tente de comprendre et d’interpréter le monde tel qu’il est. Quelle déception de te retrouver attablé au café du communautarisme laïcard. Le foulard est un « signe de soumission patriarcale » assènes-tu. Qu’en sais-tu ?

Le foulard n’a intrinsèquement rien à voir avec cela. Dans certaines situations, une femme voilée peut en effet être soumise à la domination masculine, mais c’est loin d’être une règle générale. Inversement, nombre de femmes en apparence « libérées » et « modernes » vivent sous le joug tyrannique de conjoints.

La domination patriarcale s’inscrit avant tout dans les rapports hommes-femmes au quotidien. Une femme qui a librement décidé de porter le voile et qui mène une existence autonome sera toujours plus libre que celle sans voile qui, du foyer au bureau, sera cantonnée à des rôles mineurs, parce que femme.

Cette laïcité est celle de l’intolérance et du refus de la différence

Nous avons toi et moi longtemps appartenu au Parti socialiste, où il est de bon ton de stigmatiser les « voilées ». C’est dans ce parti que j’ai pu observer les manifestations les plus machistes et misogynes, sans que cela ne suscite aucun tollé chez les éléments masculins : blagues sexistes, intimidations physiques et, last but not least, infractions délibérées à la loi sur la parité. C’est drôle, dans ces cas-là, personne ne s’élève contre la « domination patriarcale ».

Tu affirmes enfin qu’Ilham Moussaïd « divise » et qu’il lui faut « tirer les leçons de l’Histoire de France (…) parce que nous avons connu trois siècles de guerre de religion ». Si ce n’est pas un dérapage de ta part, cela y ressemble de près.

En quoi le foulard d’Ilham serait-il comparable à nos guerre de religions, à la déportation des juifs par la police française ou encore à la « mission émancipatrice » laïco-chrétienne en Algérie ? Il faut garder le sens de la mesure, Jean-Luc !

La laïcité qui décide comment il faut s’habiller sur la voie publique, qui prétend interpréter le sens que l’on donne à son apparence physique et qui exclut les têtes (et les voiles ! ) qui dépassent, ce n’est pas la laïcité : c’est l’intolérance et le refus de la différence. Jean-Luc, laisse cela aux Besson, Hortefeux, Gérin et Raoult.

Avec mes salutations amicales et navrées.

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Foulard et laïcité

par Raoul Marc Jennar - jeudi 4 février 2010

Je suis pro­fon­dé­ment convaincu que la laï­cité est le plus accep­table des cadres légaux pour qu’ensemble des femmes et des hommes qui croient ou qui ne croient pas en quelque dieu que ce soit puissent avoir en com­mun une même volonté de trans­for­ma­tion de la société en vue de l’émancipation.

Je suis aux côtés des femmes qui ont lutté et luttent encore âpre­ment pour la libre dis­po­si­tion de leur corps et de leur vie. Mais cela ne me paraît pas incom­pa­tible avec les réponses qu’elles se donnent per­son­nel­le­ment aux grandes ques­tions fondamentales.

Une femme qu’elle soit de confes­sion musul­mane, de confes­sion chré­tienne ou de confes­sion hébraïque, peut très bien défendre le droit des femmes à l’IVG et, éventuellement, le refu­ser pour elle-même.

On se bat pour des liber­tés — même celles dont on n’entend pas user - pas pour des inter­dits. On se bat pour refu­ser que les inter­dits des reli­gions deviennent (ou demeurent) des inter­dits de toute la société.

Les moti­va­tions à l’origine du port d’un signe dési­gnant une opi­nion (la croix des chré­tiens, le fou­lard des musul­manes, la kippa des hébreux) ou une adhé­sion ( la branche d’acacias des francs-maçons) sont mul­tiples. J’observe que cette moti­va­tion va du simple signe de recon­nais­sance à la mani­fes­ta­tion déli­bé­rée d’une soli­da­rité entre oppri­més. A l’image du kef­fieh, signe de soli­da­rité avec le peuple palestinien.

Des femmes du NPA s’insurgent parce qu’une mili­tante de ce parti, Ilham, porte le fou­lard alors qu’elle est can­di­date dans le Vau­cluse pour les élec­tions régio­nales. Pour­tant, à ce qu’il me revient, Ilham défend avec beau­coup de déter­mi­na­tion les objec­tifs de son parti tels qu’ils sont for­mu­lés dans les prin­cipes fon­da­teurs du NPA. Sans la moindre restriction.

Il me semble qu’il y a, chez ces mili­tantes hos­tiles à la can­di­da­ture d’Ilham, une confu­sion. Un amal­game entre croyance et église. Nul ne peut nier que ceux qui ne sont pas croyants ont été vic­times pen­dant des siècles de la tyran­nie de l’Eglise catho­lique. Mais des chré­tiens l’ont été égale­ment : les Cathares, les Pro­tes­tants et tous ceux qui, croyants, ne croyaient pas selon les dogmes et les rites conve­nus par l’église domi­nante du moment.

C’est le clé­ri­ca­lisme, c’est-à-dire le pou­voir de l’institution qui pré­tend déte­nir la juste inter­pré­ta­tion de la croyance et — logique mono­théiste — l’imposer à toutes et tous, qui a infligé des souf­frances immenses à telle enseigne qu’on peut qua­li­fier de crimes contre l’humanité les maux infli­gés par l’Eglise catho­lique et son clergé. Comme d’autres églises d’ailleurs, puisque le mono­théisme porte en lui l’intolérance, l’arbitraire et le totalitarisme.

Le com­bat contre le pou­voir des églises n’est d’ailleurs pas ter­miné loin s’en faut. Les exemples abondent dans la Répu­blique française pro­cla­mée laïque des avan­tages concé­dés par les pou­voirs publics à des ins­ti­tu­tions rele­vant d’une église. Autre exemple, lors de la confé­rence de l’ONU sur les droits de la femme, on a vu l’alliance des cler­gés des grandes reli­gions mono­théistes s’opposer au droit fon­da­men­tal de la femme à dis­po­ser d’elle-même. Une alliance qui se reforme chaque fois que les droits des femmes sont en débat dans les enceintes internationales.

Croire ou ne pas croire est une liberté indi­vi­duelle fon­da­men­tale. Sauf à bri­mer la liberté de pen­sée, ce n’est pas la reli­gion qu’il faut com­battre, ce sont les ins­ti­tu­tions qui veulent l’imposer. Ce n’est pas l’opium qu’il faut com­battre, c’est celui qui le vend.

C’est le rôle des églises et non les croyances indi­vi­duelles qu’il faut com­battre. Ce qui peut, ce qui doit unir toutes les femmes et tous les hommes qui se réclament de la laï­cité, c’est le com­bat contre le pou­voir des églises sur la société. Pas la néga­tion des opi­nions personnelles.

Etre laïque, c’est être anti­clé­ri­cal ; ce n’est pas impo­ser l’athéisme. La laï­cité ce n’est pas la néga­tion des reli­gions, ni davan­tage la pro­mo­tion de l’athéisme. La laï­cité, c’est le refus de don­ner à quelque clergé que ce soit une emprise sur les choix de la société. Léon Gam­betta le rap­pe­lait : “le clé­ri­ca­lisme, voilà l’ennemi !”

Que la pré­sence d’Ilham, cou­ra­geuse révé­la­trice d’un débat essen­tiel, sur une liste pour les élec­tions régio­nales pose pro­blème à des membres de son parti témoigne des limites de ceux-ci quand ils pré­tendent lut­ter pour l’émancipation. L’émancipation ne signi­fie pas l’alignement des opi­nions per­son­nelles sur un mode de pen­sée unique. “La liberté, c’est d’abord la liberté de celui qui pense autre­ment” (Rosa Luxemburg).

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18 janvier 2010 1 18 /01 /janvier /2010 14:50
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Salud deoc'h holl.

J'assiste en spectateur aux débats dits de la "gauche de la gauche" en Bretagne administrative.
J'ai lu un certain nombre de contributions, et j'ai bien peine à concevoir ce qu'il y a de breton là-dedans. J'entends par là quelque chose qui sorte des intérêts de boutiques, de positionnements politiques généraux. Quelque chose qui colle au territoire qui est sensé inspirer une politique donnée.

On pourrait gloser ou débattre sur la notion de capitalisme spécifique en Bretagne. Qu'il soit ravageur et globalisé, j'en conviens, il n'a d'ailleurs jamais cessé de l'être.
 
 Mais spécifiquement, en Bretagne, ce ne sont pas tant les ravages du capitalisme que l'on peut combattre dans ces institutions que les structures en place.

 Aménagement du territoire ? Economie auto-centrée ? Politique de ressources pour la pêche ? Refonte de l'agriculture, décidée à Bruxelles au profit des gros céréaliers de la Beauce et des banques ? Relance du réseau breton ferroviaire ? Unité territoriale ? Statut pour la langue ? Démocratie, services publics et territoires ?
 
 Je n'ai vu qu'un vague passage timide sur l'Aéroport de Notre-Dame des Landes, cela fait bien peu pour un projet de société.
 
 Il manque à la gauche de la gauche, recroquevillée sur les acquis soit-disant républicains, un débat breton, ce qui fait que les électeurs sensés leur préfereront le PS, Europe Ecologie ou Troadec.
 
 Ce débat, évidement, ne peut être un débat de circonstances avant telle ou telle élection. C'est un débat en profondeur, sur le territoire, les institutions, bref sur la Bretagne.
 
 Je précise que je ne suis pas membre de Breizhistance/ Parti Socialiste de Bretagne, et je ne sais si cette nouvelle formation a fait partie de vos discussions.
 
 A galon,
 
 Yannig

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Note du blogueur:

 Nous avons reçu cette opinion à la fois sur l'image que donnent de nous les discussions pour la liste aux régionales, ainsi que sur le fonds. Je la passe en tribune libre, regrétant bien sûr le passage sur des gens censés qui voteraient censément PS, Europe Ecologie voire même Troadec! Censés nous sommes, censés nous voterons NPA-PG Décroissants! Gast!
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