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12 avril 2013
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Le tribunal de commerce de Saint-Brieuc a prononcé, mercredi, la liquidation judiciaire de Guingamp Transports, basée à Louargat. Les 23 salariés vont recevoir une lettre de licenciement.
Fabrice Masson a commencé hier à appeler ses 23 salariés. Le gérant de Guingamp Transports leur a
annoncé que la société cessait son activité. Mercredi, le tribunal a prononcé la liquidation
judiciaire de cette entreprise qui acheminait des fruits, des légumes et des oeufs vers Paris et le Sud de la France. La société comptait encore il y a quelques années 24 camions frigorifiques de
44 tonnes. Elle n'en a plus que dix. Le patron explique la dégringolade par plusieurs facteurs : « En 2009, on a perdu un gros client, le groupe Chéritel, qui représentait 30 % de notre activité.
Après ça, on a conclu avec la société Jacob, à Paimpol, mais on n'a pas souhaité continuer. On ne dégageait pas assez de marges pour supporter nos charges. » Problème : ce client faisait rouler
quatre camions par jour, selon d'anciens salariés.
Guerre patron-syndicats
En 2009 toujours, le dialogue social s'envenime. Fabrice Masson raconte : « Alors que le chiffre d'affaires était en hausse, on avait une baisse du résultat, une
consommation de carburant en hausse et des heures supplémentaires en hausse. J'ai tapé du poing sur la table pour qu'on retrouve une meilleure productivité. » La volonté du patron : faire signer
aux salariés des contrats trimestriels. Refus de ces derniers. L'opposition mène à une grève, en février 2011. Principales revendications des salariés, à l'époque : le paiement des salaires au 5
du mois et « l'arrêt des brimades ». La grève est conclue par l'intervention d'un médiateur de l'inspection du travail.
Redressement de 18 mois
En juillet 2011, l'entreprise est placée en redressement judiciaire pour six mois, renouvelés deux fois. Au terme de ces dix-huit mois, bonne nouvelle : l'entreprise
sort du redressement judiciaire. Le tribunal de commerce décide d'un plan d'apurement du passif de la société. Il prévoit que le remboursement des créances soit étalé sur dix ans.
Grévistes écartés
Mais finalement, l'entreprise a déclaré il y a quelques semaines l'état de cessation de paiement. Pourquoi ce retournement de situation ? Selon Fabrice Masson, « on
a perdu entre-temps un gros client. Un partenaire financier est revenu sur certaines décisions qui nous permettaient de passer le cap. Et le noyau dur de syndicalistes a repris de plus belle. »
Le gérant n'a pas de mots assez durs contre la « confrérie de syndicats ». De leur côté, plusieurs salariés confirmaient hier, sous couvert d'anonymat, que le climat social était
empoisonné.
Les élections des délégués du personnel en 2011 ont même dû être réorganisées après leur annulation par la justice. Les grévistes de février 2011 ont été écartés : ils ne sont pas envoyés au travail, parfois pendant plusieurs semaines. Les délégués du personnel de l'époque ont quitté l'entreprise. Un salarié contacté hier évoque aussi un matériel dégradé : « Pas d'ampoule sur un phare, un rétroviseur cassé, un pare-chocs qui tient avec du ruban adhésif... » Interrogé hier sur la liquidation, un autre salarié confiait : « Vous me l'apprenez ! Je ne suis pas surpris, car des bruits courraient. Mais ça me fout une grosse claque. »
- Alix Froissart