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10 septembre 2011 6 10 /09 /septembre /2011 09:15

 

Chili 1973. Pinochet noyait dans le sang les travailleurs chiliens

Pour la plupart des médias, le 11 septembre est l’anniversaire de l’attentat contre les tours jumelles du WTC à New York en 2001. Mais le 11 septembre est avant tout un autre anniversaire tragique: en 1973, le général Pinochet renversait - avec le soutien actif des États-Unis - le président Allende et écrasait le mouvement ouvrier chilien.

 

Les travailleurs occupent une place importante dans l’histoire du Chili: la classe ouvrière a en effet participé étroitement aux événements majeurs qui ont fait de ce pays un cas particulier sur le continent latino-américain. Lors de son indépendance en 1810, le Chili était un pays essentiellement agricole. Mais la découverte de gisements de salpêtre, associée à la pénétration du capital britannique, va dès le milieu du 19e siècle contribuer à développer l’industrialisation et le prolétariat.

 

Un mouvement ouvrier de type européen


Dès 1853 les typographes organisent une grève. En 1900 les mutuelles comptent déjà 55.000 adhérents. Une grève générale, appelée "Semaine rouge" va paralyser le pays en 1905. En 1921 Le Parti socialiste a deux députés et la même année le syndicat anarcho-syndicaliste FOCH adhère à la IIIe Internationale.

Au lendemain de la Première Guerre mondiale les capitaux américains prennent la relève du capitalisme britannique, surtout pour l’exploitation des mines de cuivre. Le prolétariat des mines ne sera pas nombreux, mais le cuivre était d’un intérêt stratégique car au début des années 1970 il représentait 70% de la valeur des exportations.

En 1938, le Chili connaîtra une expérience de Front populaire. A la fin des années 60, alors que la plupart des pays latino-américains avaient connu de nombreux coups d’état militaires, de longues périodes de dictature bonapartiste et une tradition de partis populistes (en Argentine, au Mexique, au Pérou), les travailleurs chiliens disposaient d’un mouvement ouvrier "classique" de type européen: un Parti socialiste, un Parti communiste, une centrale syndicale (CUT) et des organisations révolutionnaires dont la plus connue était le Mouvement de la Gauche révolutionnaire (MIR).

 

Victoire électorale d’Allende en 1970

A l’automne 1970, Salvador Allende (PS), candidat de l’Unité populaire (PS, PC et radicaux), remporte les élections présidentielles avec 36,4% des voix. Allende est un vieux routier de la politique: en 1938 il était déjà directeur de cabinet du Premier ministre dans le gouvernement de Front populaire. Ministre en 1942, sénateur en 1945, il sera le candidat du Front populaire à trois reprises avant de l’emporter en 1970.

Le score d’Allende en 1970 n’est pas beaucoup plus élevé que celui du président sortant, le Démocrate chrétien Eduardo Frei (36,3%). Le Parti national (droite conservatrice), la CIA, la multinationale américaine ITT, le journal de droite El Mercurio et certains cercles de militaires conspirent dès le début pour empêcher Allende d’accéder à la présidence. Le 22 octobre 1970, deux jours avant la prestation de serment d’Allende, l’armée tente (déjà!) un putsch manqué.

 

Les masses se radicalisent


Aux yeux des travailleurs, des paysans et des couches plébéiennes des bidonvilles, l’élection d’Allende représente une victoire sur la bourgeoisie et un pas en avant pour l’élimination de l’exploitation capitaliste. La bourgeoisie redoute plus cette radicalisation incontrôlable des masses que la victoire d’Allende, d’autant plus que l’Unité populaire (UP) est minoritaire au parlement, que les tribunaux donnent presque toujours satisfaction à l’opposition et que l’armée est prête à comploter.

Parmi les premières mesures prises par Allende, il faut noter le doublement des bas salaires et la reprise de la réforme agraire qui avait été initiée par son prédécesseur Eduardo Frei. Cette réforme ne touchait que les propriétés supérieures à 80 hectares.

Cependant les élections municipales d’avril 1971 sont un bon indicateur de la radicalisation des masses: les partis de l’Unité populaire remportent en effet 51% des voix. Une imposante mobilisation populaire commence à se développer, surtout sous l’impulsion du MIR qui élargi son implantation auprès des paysans et parmi les couches pauvres des bidonvilles. Dans le sud du pays, d’importantes usines textiles sont occupées et les paysans commencent à occuper les terres sans attendre la réforme agraire. La plupart du temps, l’UP choisit la répression pour endiguer ces luttes.

 

Polarisation de la société


En juillet 1971, les mines de cuivre (80% des ressources du cuivre) sont nationalisées. Sur le plan international les Etats-Unis utilisent tout leur poids pour faire baisser de 50% les cours du cuivre: l’impérialisme américain est décidé à étrangler coûte que coûte la radicalisation en cours au Chili. Face à l’augmentation du coût de la vie, la petite et la moyenne bourgeoisie mobilisent: des milliers de ménagères des quartiers riches se retrouvent dans la rue lors de manifestations de "casseroles vides", aux côtés de l’extrême-droite.

Face aux mobilisations de la droite, le Parti communiste (PC) en conclut qu’il faut tendre la main à la Démocratie chrétienne (DC) censée représenter la petite-bourgeoisie. C’est ainsi que des négociations s’ouvrent avec la DC en juin 1972 en vue de renforcer le pouvoir afin de juguler les mobilisations ouvrières.. Mais les pourparlers échouent et la Démocratie chrétienne rompt les négociations.

La situation est dans l’ensemble fort semblable à celle de l’Espagne du début des années 30 où la bourgeoisie s’est un moment posée la question de savoir quel serait l’instrument le mieux capable d’arrêter la mobilisation des masses: le front populaire ou le coup d’état militaire. On peut dire qu’après la rupture des négociations de juin 1972 la bourgeoisie chilienne avait pris son parti pour le putsch militaire.

 

Deux blocs prêts à s’affronter


La rupture des négociations par la DC entraîne un glissement à droite des secteurs arriérés qui soutenaient l’UP et une radicalisation importante des secteurs les plus avancés. En juillet 1972 apparaissent les premières expériences embryonnaires de double pouvoir, notamment à Conception.

Le 25 juillet 500.000 personnes manifestent dans la capitale pour "écraser le fascisme".

La droite de son côté mobilise également: les indépendants et les camionneurs mènent une grève du 20 août au 5 novembre. Le Chili est une longue bande de terre, coincée entre l’océan et la montagne, de 200 km de large et de 4.200 km de long: les transports ont donc un rôle stratégique dans l’économie du pays. C’est dans ces conditions que l’état d’urgence est proclamé dans 24 provinces sur 25. En novembre 1972, le gouvernement est remanié et 3 militaires y font leur entrée.

Malgré la mobilisation de la droite les élections de mars 1973 montrent que la radicalisation des masses ne faiblit pas. L’UP obtient 44% des suffrages. Un nouveau gouvernement est formé, sans militaires. Le 21 juin 1973, à l’appel de l’Unité populaire, une grève générale contre la réaction et le fascisme rassemble 600.000 manifestants à Santiago. Quelques jours plus tard, un régiment de blindés entoure le palais présidentiel et tente un putsch. Alertés par Allende, les travailleurs se mobilisent et en particulier dans les faubourgs de la capitale organisés en "cordons industriels". Mais ces "cordons" sont à peu près dépourvus d’armes...

La droite mobilise à son tour en lançant la deuxième grève des camionneurs, suivie par celles des commerçants, des médecins, des cadres des chemins de fer, des compagnies d’aviation. La CUT appelle à la grève contre les transporteurs. Sous couvert de la "loi sur les armes", l’armée perquisitionne dans les usines, brutalise les ouvriers et confisque à l’occasion quelques vieux pistolets.

Le 4 septembre 1973, 1.000.000 de manifestants défilent dans la capitale pour commémorer le 3e anniversaire de l’élection d’Allende, réclamer un "pouvoir populaire" et l’inciter à avoir "la main lourde" à l’égard de la droite.

Allende met au point un plan anti-putsch visant à écarter du commandement militaire les généraux séditieux, avec le concours des syndicats ouvriers. C’est le général... Pinochet qui est chargé d’appliquer ce plan anti-putsch!

 

11 september 1973


Avant de lancer le coup d’état, Pinochet fait d’abord éliminer les éléments de l’armée fidèles à Allende: les marins favorables à l’UP sont arrêtés, emprisonnés à bord de bateaux où ils seront torturés puis exécutés. Le 11 au matin Pinochet proclame le coup d’état. Pour se défendre les ouvriers occupent les entreprises les armes à la main. Mais la partie est inégale car les cordons industriels sont peu armés.

L’aviation bombarde le palais présidentiel et Allende est tué. L’envoyée spéciale du Washington Post relate que le soir même l’ambassadeur américain sable le champagne pour célébrer le putsch.

L’armée va reprendre une à une les usines occupées, fusillant sur place les ouvriers qui résistent. Des dizaines de milliers de travailleurs, de militants politiques, de syndicalistes sont traqués, abattus en rue, enfermés au stade national.

Beaucoup n’en ressortiront pas vivants. Les réfugiés politiques venus de pays voisins où règne la dictature sont pourchassés, abattus ou remis à la frontière.

 

Un bain de sang


La junte militaire va développer une terreur de masse afin de véritablement terroriser les millions de partisans de l’UP. La répression a d’abord été aveugle et massive, avant de devenir plus sélective à l’égard des militants politiques et syndicaux.

En décembre 1973, Bautista Von Schouwen (MIR) est arrêté et meurt sous la torture. Les militaires font disparaître son cadavre. Miguel Enriquez tombera en octobre 1974,les armes à la main. L’héroïsme des militants du MIR a cependant été vain: leurs commandos armés se sont rapidement trouvés isolés car les masses étaient désarmées et n’étaient pas organisées pour prendre le pouvoir.

La répression durera 17 ans et fera des milliers de morts et de disparus. Dans les usines, les conditions de travail et de salaire vont empirer: les grèves et les élections syndicales seront interdites. En 1975 les salaires vont perdre 40% de leur pouvoir d’achat. Tous les services sociaux vont être privatisés. En 1980 la nouvelle législation sur les pensions instaurera un régime d’épargne individuelle basé sur la capitalisation auprès d’assurances privées. Devant la baisse drastique du niveau de vie beaucoup de travailleurs devront faire un deuxième métier pour survivre.

Comble du cynisme, Henry Kissinger, le secrétaire d’Etat américain au coeur du complot contre Allende, recevra le prix Nobel de la Paix en 1973. A l’heure où j’écris ces lignes, il coule toujours des jours heureux. Et aucun tribunal pénal international ne manifeste la moindre intention de traduire en justice ce criminel de guerre civile.

 

En savoir plus:

 

 

http://www.lutte-ouvriere.org/documents/archives/cercle-leon-trotsky-62/article/le-chili-de-l-unite-populaire-a-la

 

 

http://www.lutte-ouvriere.org/documents/archives/brochures-des-annees-1970-et-1980/article/chili-un-massacre-et-un

 

 

http://www.lutte-ouvriere.org/documents/archives/la-revue-lutte-de-classe/serie-1986-1993-trilingue/article/chili-le-parti-communiste-et-la

 

http://www.lutte-ouvriere-journal.org/?act=artl&num=1645&id=27

 

 

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