6 octobre 2010 à 08h00 - Le Télégramme
La demande de la CFDT 29 de reconnaissance en Unité économique et sociale du réseau ADMR 29 par le tribunal de grande instance de Brest a été étudiée hier. La
décision est mise en délibéré au 2 décembre.
Une cinquantaine de représentants bénévoles des associations locales ont assisté aux plaidoiries de Me Tigréat, pour la CFDT 29, et de Me Rousselin, pour le réseau
ADMR 29. Venus soutenir ce dernier, ils ont été recadrés par le président Jublin lors de protestations bruyantes.
Pour Me Tigréat, «l'UES serait la possibilité, au sein d'une entité juridique distincte, d'une représentativité commune des salariés du réseau». S'appuyant sur des
textes et des statuts de l'ADMR, Me Rousselin a, lui, démontré qu'il n'est pas besoin d'UES. Il a produit les décisions des tribunaux, les arrêts de la Cour de cassation qui, en France, ont
statué et rejeté des demandes similaires, dont celles de 1985 et de 1998, à Brest. Mais, dira Me Tigréat, le réseau a évolué pour prendre, aujourd'hui, les contours d'une entreprise de 3.700
salariés.
De la théorie à la pratique
À l'issue du débat, Yves Derrien, président du conseil d'administration fédéral, s'est réjoui de la prestation de Me Rousselin. «Il a prouvé qu'il n'y avait pas
d'identité entre les différentes structures. Sur le plan social, il a mis en évidence le rôle du président d'association».
Dans les faits pourtant, plusieurs des 92 associations du Finistère sont sans président depuis des mois et s'en remettent à la fédération. «Il faut que nous retrouvions des présidents», a confirmé Yves Derrien. Dehors, une grosse centaine de salariés du réseau, angoissés, a patienté.
Réseau qui, sur les six premiers mois de l'année 2010, aurait perdu, par rapport à 2009, près de 200.000 heures d'intervention au profit de la concurrence. «Nous sommes payées intégralement mais nous n'avons presque plus de boulot», s'inquiètent des employées du Groupements d'associations locales (GAL). L'enveloppe des heures allouées pour l'année par le conseil général est épuisée. C'est dramatique». Une autre salariée en colère témoigne: «Nous en sommes là car, parmi les bénévoles, il y a des meneurs qui n'ont pas fait leur travail. Mais ils sont intouchables.
Nous, nous sommes salariées de l'ADMR depuis 20 ou 30 ans et nous allons perdre notre travail. Les bénévoles ont des responsabilités dans la situation actuelle. Qu'elle soit reconnue!». Sollicités, des représentants des bénévoles ont refusé de s'exprimer.
- Karine Joncqueur
Portée par le syndicat, la demande a été examinée hier au tribunal d'instance de Brest. Une centaine de salariés étaient réunis à l'extérieur, personnel fédéral et d'associations locales.
Pour l'heure en effet, « l'ADMR en Finistère c'est : une fédération départementale, 84 associations locales et plus de 3 700 salariés », expose Me Tigréat. Ce mardi, l'avocat détaille en quoi la fédération et les associations locales ne font qu'un. Parce que, déjà, « il y a une interdépendance financière ».
Si « entre le dépôt de la requête de la CFDT (juin : NDLR) et l'audience, la situation a changé », l'avocat estime que « les relations financières entre la fédération et les associations sont imbriquées. La fédération versait aux associations les salaires et l'ensemble des charges fiscales ». Pour lui, il n'y a donc pas de « totale autonomie financière ».
« Difficultés économiques »
Il met sur la table le système dit de « péréquation ». « Des transferts financiers en fait : les associations qui vont bien donnent à celles qui vont moins bien. Qui gère cette péréquation ? La fédération ! » Pour ce qui est de l'unité sociale, il souligne que « le suivi des contrats, la formation des salariés... sont centralisés par un organisme rattaché à la fédération ». Et de rappeler ce courrier adressé aux présidents locaux dans lequel on envisage des possibilités de reclassements des personnels fédéraux touchés par le plan social dans les associations.
Si la partie adverse admet « des difficultés économiques depuis quelques années et, que la loi Borloo (2005) a ouvert l'aide à domicile au secteur marchand » (tout en rappelant que la fédération est sous procédure de sauvegarde), elle ne voit pas le projet d'UES du même oeil que la CFDT.
Pour elle, « le président fédéral n'a aucun pouvoir pour administrer une association locale ». Elle explique que « les associations locales procèdent elles-mêmes au recrutement et signent les contrats de travail ». De fait, « elles exercent bien leurs prérogatives d'employeurs ».
« On pourra peut-être savoir... »
Pour la défense, « il y a bien autonomie financière des associations ». Elle reproche à la partie adverse de « se référer aux règles financières en vigueur d'il y a une quarantaine d'années or un nouveau schéma est en vigueur depuis juillet 2010 ». Elle va jusqu'à dire que la requête de la CFDT a été faite « dans le but d'obstruer la procédure de licenciements économiques »... Le tribunal rendra sa décision le 2 décembre.
Au sortir, la CFDT résume l'audience aux salariés. Une assemblée générale suit. « On pourra peut-être savoir combien il y a d'associations en danger », lâche au micro Marie-Lou Roudaut de la CFDT. « Ben voilà, ça on ne le sait pas ! », s'agace une employée ADMR.
Elle est inquiète. « On ne sait pas où on va. On n'a pas d'infos sur les finances. On apprend tout par la presse. » Une autre, 28 ans d'ADMR au compteur, qui travaille à la fédération, ne tient plus : « J'aimerais qu'on me dise qui va partir ou pas. Moi, je n'espère plus grand-chose. » Ce que donnerait une UES ? « Avec elle au moins, il y aurait le même discours pour tout le monde et on bénéficierait d'un comité d'entreprise unique. Cela permettrait aussi et surtout de sauvegarder nos emplois. »