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29 octobre 2010 5 29 /10 /octobre /2010 14:52

Par Xavier Renou (29 octobre 2010)


A Tarente, dans l’extrême sud italien, la population meurt à petit feu depuis un demi siècle, dans l’indifférence des autorités. En cause : les aciéries qui génèrent une pollution mortelle chargée d’amiante, de Co² et de dioxine. Elles fournissent 10 millions de tonnes d’acier par an, soit la plus grosse production d’Europe. Un système où les fortunes générées pour quelques uns valent bien le sacrifice de quelques milliers d’ouvriers et de riverains.

 


Photo : la ville de Tarente (source)

 


D’abord il y a la mer, immense. Le soleil, bien sûr, et les champs d’oliviers, d’oranges, de mandarines, à perte de vue. Une situation géographique exceptionnelle, pour la ville la plus méridionale d’Italie, située dans le talon de la botte italienne, où la terre agricole est si riche. Tarente fut jadis le port de commerce principal de la Grèce méditerranéenne, qui précéda la conquête romaine. Mais si Tarente est connue aujourd’hui dans toute l’Italie, et dans toute l’Europe, c’est en raison de son niveau extrême de pollution, et du taux record de cancers qui l’accompagne.


En 1960, les autorités italiennes décident de construire à Tarente la plus grande aciérie d’Europe, avec cinq hauts-fourneaux. C’est la société publique ILVA (nom de l’île d’Elbe d’où était extrait au 19ème le minerai de fer nécessaire à la fabrication de l’acier) qui est chargé de gérer ces hauts-fourneaux. Privatisée en 1988, l’Ilva tombe dans le giron du groupe Riva SPA, géant italien de la sidérurgie, et 10ème producteur mondial d’acier. 20 ans plus tard, le site de Tarente demeure le premier producteur européen d’acier : 10 millions de tonnes en sortent chaque année.


Contact direct avec l’amiante


Lorsque Ilva débarque à Tarente, on met en avant la création d’emplois, la modernité des installations, la fierté d’accueillir un tel investissement dans la région des Pouilles, l’une des plus pauvres d’Italie. Aujourd’hui, on parle plutôt, comme Roberto Missiani, ancien ouvrier de l’aciérie, du « sacrifice » pur et simple de la ville, au nom de la croissance économique. Fringuant jeune retraité, dont les mains s’agitent en tous sens lorsque la colère le prend, il manie désormais mieux l’ordinateur portable que les feuilles d’acier. Il a pu prendre sa retraite à 50 ans, pas trop usé. C’était la règle, avant, après 30 ans de travail au contact de l’amiante, une substance qui recouvre de nombreux équipements en aciéries, pour ses qualités isolantes et anti-incendie.


Roberto se souvient qu’avant d’entendre parler des ravages de l’amiante, on lui faisait manipuler ce matériau à la main, sans masque ni gants. Aux poussières de l’amiante dont il remplissait ses poumons s’ajoutaient le dioxyde de carbone, le benzopyrène issu de la combustion de l’acier, tous deux fortement cancérigènes. La dioxine, aussi, qui fit jadis la tragique réputation de Séveso, après l’explosion. Sans compter la poussière rouge du minerais d’acier, échappée des tas de minerais laissés à l’air libre dans l’usine, et qui recouvre chaque jour les rues du quartier de Tamburi - le quartier du Tambour - qui jouxte l’usine. Les enfants y respireraient l’équivalent de 800 cigarettes par an. Malade, il l’est, oui. Il a déjà subi plusieurs opérations à la gorge, à la tyroïde, et ses poumons sont empoisonnés. Il se sait condamné. On glisse sur le sujet.


Médecine du travail à la botte d’Ilva


Roberto, avec quelques-uns, a cependant décidé de se battre, après avoir découvert les causes de sa maladie. Pendant plusieurs décennies, il est comme les 11.000 employés que dévore chaque année le géant industriel. A la fois ignorant et soumis. Ignorant, parce que la médecine du travail, payée par ILVA, se contente d’examens superficiels de la santé du personnel, et que les maladies n’apparaissaient qu’après bien des années de travail dans le ventre d’acier.


Soumis, aussi, parce que le travail est rare dans la région et que la paie est correcte (1.000 à 1.500 Euros mensuels, aujourd’hui, un très bon salaire au sud de Naples). Parce que les vieux employés souffrants choisissaient de se taire, pour ne pas obérer les chances de leurs enfants de trouver un emploi à l’usine. Quelle famille de la ville, aujourd’hui encore, ne compte pas au moins un membre qui a travaillé ou travaille encore chez ILVA ?


En 2007, Roberto s’associe à une poignée d’habitants pour créer une association, Alta Marea, du nom de cette « marée haute » qui engloutira un jour, espèrent-ils, le monstre. Alta Marea est en fait une plateforme, qui réunit adhérents individuels, souvent d’anciens travailleurs d’ILVA, et une quinzaine d’associations écologistes (WWF, Peacelink, la Ligue de protection des oiseaux et la Ligue de protection de l’environnement italiennes...) ou de malades (la ligue national contre le cancer, l’association des leucémiques...).


1.500 morts par an


Et des malades, il y en a ! Tarente compte actuellement un peu moins de 200.000 habitants. D’après Roberto, elle a perdu 40.000 habitants en 10 ans. Morts prématurément, pour la moitié d’entre eux, ou partis s’installer ailleurs pour échapper aux fumées et à la contamination des sols. 1.500 personnes décèdent chaque année de causes liées aux pollutions de l’air, de l’eau et des sols. Chaque habitant respire plusieurs dizaines de tonnes de monoxyde et de dioxyde de carbone par an. 92% de la dioxine émise par les industries d’Italie (soient 8,8% des émissions totales de dioxine dans l’Union Européenne), provient des cheminées d’ILVA, et se répand sur la ville au gré des vents marins.


La liste est longue des maladies provoquées chez les habitants par l’exposition à ce cocktail chimique : tuberculose, hémorragie, embolie et œdème pulmonaire, cancer des poumons, du sang (leucémie), du plasma... On bat ici tous les records. Le propriétaire de l’usine, et du groupe international qui porte son nom, Emiliano Riva, 75 ans, est d’ailleurs condamné à la suite d’une plainte concernant les rejets de dioxine bien supérieurs aux normes européennes. Seulement, la justice italienne est ainsi faite que les procès y sont attendus plusieurs années, qu’ils se déroulent donc parfois après que le délais de prescription soient arrivés à terme. Et l’on n’y fait que rarement respecter les jugements lorsque ceux-ci frappent des personnalités puissantes.


Vers la désobéissance civile ?


Riva fut condamné en octobre 2008 à deux ans de prison, et le directeur Luigi Capogrosso, à un an et 8 mois de prison. Aucun des deux n’y passera le moindre jour. En guise de sanction financière, Riva n’eut à payer que les 8.000 Euros de frais de justice ! Curieusement, la ville de Tarente a même renoncé à demander son dû, des compensations pour les dégâts environnementaux causés par les rejets de l’aciérie. Dans un périmètre de 25 km autour de la ville, tous les champs sont considérés comme impropres à l’exploitation agricole : contaminés. Il y pousse pourtant de larges vergers qui nourrissent et empoisonnent à la fois la population de la sous-région.


Aujourd’hui, Alta Marea est arrivée à bout de sa patience. Elle a poussé de nombreuses portes, entendu de nombreuses promesses, mené pas mal d’opérations d’alerte et de sensibilisation, dont deux grandes manifestations de plus de 20.000 personnes, en 2008 et 2009. Elle a même obtenu avec d’autres la condamnation de la ville de Tarente au Tribunal : une pétition, signée par plusieurs milliers de personnes, fait obligation à la ville d’organiser un référendum consultatif sur la fermeture de l’aciérie. Pourtant la ville s’y refuse. Le juge a exigé, la ville a cédé et promis le référendum pour mars. Mais Tarente vient de faire machine arrière, sans explications, il y a à peine quelques jours. La démocratie fait peur au pays de la pollution. Les militants, très remontés, envisagent désormais de passer à la désobéissance civile. A suivre...

Xavier Renou

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24 octobre 2010 7 24 /10 /octobre /2010 08:21
Social samedi 23 octobre 2010

Ce samedi matin, des militants de Greenpeace ont trouvé porte close à l’agence BNP de la rue d’Aiguillon à Brest. Sur les portes, une affiche indiquait que l’agence fermait à 10 h 40 alors qu’elle est habituellement ouverte jusqu’à 12 h 30. Puis, les militants se sont rendus rue Victor Hugo. Là aussi, même scénario. Le responsable de l’agence, interpellé par une de nos militantes, n’a pas souhaité répondre aux questions.


Cette action s’inscrit dans un contexte national. Greenpeace demande à la BNP de ne pas financer Angra, au Brésil.

 

« Un projet scandaleux qui viole les normes internationales sur la sûreté. »

 

En cause : un réacteur nucléaire qui a commencé à être construit en 1984 « pour s’arrêter en 1986, au moment de Tchernobyl, faute de financements ». « Alors que 70 % des pièces du réacteur sont stockées sur le site depuis cette date, et que le projet correspond aux standards de sûreté d’avant Tchernobyl, la construction a recommencé il y a quelques mois, comme si 25 ans ne s’étaient pas écoulés. »

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23 octobre 2010 6 23 /10 /octobre /2010 13:14
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1er mars 2010

 

Introduction au livre de Daniel Tanuro, L’impossible capitalisme vert, à paraître à La Découverte.



Ce livre est une contribution décisive à la définition d’un projet écosocialiste qui permette de dépasser les contradictions - ou au moins de réduire la distance - entre la critique du capitalisme et l’écologie.


La tâche pouvait sembler insurmontable. En caricaturant un peu, il y a eu longtemps d’un côté un mouvement ouvrier baignant dans le productivisme et faisant de la croissance la solution à tous les maux de l’humanité ; et de l’autre, une écologie profonde qui allait souvent jusqu’à suggérer que la surpopulation était la source de tous les maux.

 

Beaucoup de chemin a été parcouru et le processus de convergence s’est engagé autour de deux basculements. Du côté des partis de gauche et des syndicats, la prise en compte du défi climatique a progressé. Sur l’échiquier politique français, le Parti de gauche met en avant l’idée d’une planification écologique, des « décroissants » ont rejoint le Nouveau Parti Anticapitaliste, et Europe Ecologie est devenue le partenaire privilégié du Parti socialiste.


Il s’agit cependant d’une longue marche : les contradictions entre défense de l’emploi et protection de l’environnement n’ont pas disparu, comme le montre l’exemple d’AZF à Toulouse, et les généralités sur la création d’« emplois verts » ne prennent pas forcément la mesure des enjeux. Du côté des écologistes, on peut observer un processus symétrique qui consiste à se dégager de la gangue de l’écologie profonde et à assimiler peu à peu que l’écologie est une question éminemment sociale. Là encore, la convergence n’est pas immédiate, comme en témoignent les positions discordantes sur la taxe carbone ou le nucléaire.


Pour que les choses continuent à avancer, il faut d’abord prendre conscience de l’urgence des mesures à prendre face au réchauffement climatique. Le livre de Daniel Tanuro paraît au moment où se déploie l’offensive des « climato-sceptiques » emmenée en France par Claude Allègre. L’objectif est de délégitimer le GIEC et tous les moyens sont bons. On pirate (à partir de la Russie ou de l’Arabie saoudite) des courriels dont on extrait le terme trick pour faire croire à un trucage alors qu’il s’agit d’une de ces astuces dont usent les scientifiques. Non pour truquer les données mais pour les traiter : il s’agissait en l’occurrence de relier deux séries de données discontinues.

 

On pointe une faute de frappe (2035 au lieu de 2350 à propos de la fonte des glaciers dans l’Himalaya) pour dénoncer un prétendu catastrophisme et, dans le cas d’Allègre, on accumule les citations erronées et les graphiques truqués ou tronqués. Tout ceci est dérisoire et l’analyse détaillée de Daniel Tanuro constitue une réponse anticipée à ces contre-attaques inspirées par les lobbies. Elle va encore plus loin en montrant au contraire que les recommandations du GIEC sont probablement sous-calibrées et qu’une série de phénomènes sont sous-estimés comme les processus non linéaires sur lesquels James Hansen, le climatologue en chef de la Nasa, insiste particulièrement. En tout cas, il faut prendre les objectifs du GIEC comme un minimum.


Le réchauffement climatique est par définition un phénomène planétaire mais son impact n’est pas géographiquement ni socialement neutre. C’est un autre fil directeur de l’ouvrage. Les immigrés climatiques ne sont pas répartis aléatoirement sur la planète et appartiennent, pour l’immense majorité, aux régions les plus défavorisées du globe. Et la question de savoir qui va payer les mesures à prendre est éminemment sociale. De ce point de vue, l’idée avancée notamment par les Verts allemands, de compenser auprès des entreprises les taxes écologiques par une baisse des cotisations sociales est suicidaire, puisqu’elle revient à transformer toute mesure écologique en offensive anti-sociale.


L’apport décisif de Daniel Tanuro est ici de montrer que la dégradation climatique ne peut être dissociée du fonctionnement « naturel » du capitalisme. Ses réussites, mesurées en termes de productivité, ont été extraordinairement coûteuses en émissions de CO2. Toute la question est de savoir s’il est possible de lui faire payer ces « coûts » grâce à des correctifs marchands, écotaxe ou marché des permis d’émissions. On trouve dans le livre de Daniel Tanuro les arguments qui permettent de comprendre pourquoi il s’agit d’une illusion dangereuse. Ce type de solution est en réalité conçu pour rentabiliser un segment de capitalisme vert, sur lequel plusieurs pays parient comme locomotive d’une nouvelle croissance.

 

Mais on impose en même temps une condition, celle de ne pas peser sur les conditions générales de la rentabilité. On pourrait modéliser cette idée en disant que les politiques de réduction d’émissions seront menées jusqu’au point où elles font baisser le taux de profit. Et ce point reste bien en-deçà des objectifs du GIEC.


Il y une autre borne à l’extension du capitalisme vert, qui est le respect de la concurrence comme principe économique essentiel. Tout récemment, le premier ministre français a justifié l’abandon de la taxe carbone par le risque de « plomber la compétitivité » des entreprises françaises. Si l’on veut atteindre les objectifs calibrés par le GIEC, il faut instaurer des formes de planification et de coordination à l’échelle du globe, qui passent notamment par des transferts de technologie vers les pays en développement. Or, une telle organisation du monde est rigoureusement incompatible avec la logique concurrentielle du capitalisme.


L’ampleur des mutations nécessaires est le fondement objectif de la convergence écosocialiste. La lutte contre le défi climatique suppose en effet une véritable révolution dans la manière dont l’humanité répond à ses besoins. Elle implique de réduire les modes de satisfaction marchands de ces besoins, de baisser la durée du travail et de concevoir des biens sobres et durables. La consommation marchande est en grande partie une consommation de compensation face à l’intensification du travail et à la dégradation des services public et des conditions de logement.

 

La rotation accélérée des biens de consommation est un facteur de rentabilité du capital sans correspondre à une véritable création de valeurs d’usage. Il s’agit de rompre avec cette logique de maximisation du profit et de la remplacer par une logique de maximisation du bien-être sous contrainte environnementale. Ce pourrait après tout être une définition ramassée de l’écosocialisme et un résumé du livre de Daniel Tanuro dans sa recherche d’une nouvelle synthèse entre mode de vie et respect de l’environnement. Puisse sa lecture convaincre les écologistes de la nécessité d’être anticapitaliste.

Et vice versa.


Michel Husson, mars 2010

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1 octobre 2010 5 01 /10 /octobre /2010 13:09

1 octobre 2010 à 10h55 - Le Télégramme

 

Prenant connaissance du rejet de leur recours contre l'arrêté du préfet, autorisant la maternité porcine industrielle de Trébrivan par le juge des référés du tribunal administratif de Rennes l'association «Sous le vent, les pieds sur terre» et des riverains ne baissent pas les bras.


 «Cette décision ne peut, évidemment, pas nous satisfaire. Nous allons poursuivre nos actions en justice. Le combat pour la protection de l'environnement et la reconquête de la qualité de l'eau en Bretagne (eau douce et eau du littoral) est sans fin et nous le savions en créant notre association en juillet 2008», explique Sylvie Gourdon, sa présidente, dans un communiqué.

 

Elle ajoute: «Nous avons appris, depuis, que ce type d'installation surdimensionnée va envahir le Centre-Ouest Bretagne avec son cortège de pollutions et ses risques accrus pour la sécurité routière. Nous n'acceptons pas de voir notre environnement pris en otage par un système agricole productiviste outrancier».

 

Pour soutenir ses actions, l'association va organiser un grand fest-deiz à Trébrivan le dimanche 17 octobre, de 14h30 à 21h avec la participation de nombreux artistes «convaincus que notre cause est juste».

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29 septembre 2010 3 29 /09 /septembre /2010 11:48

Par LCR le Lundi, 27 Septembre 2010 PDF Imprimer Envoyer

 

 

Le Mouvement politique des Objecteurs de Croissance a adressé à une série de forces progressistes une proposition de déclaration commune, destinée aux organisations syndicales, afin de remettre en question le mot d'ordre "pour la croissance" avancé dans le cadre de l'euro-manifestation du 29 septembre. Afin d'entamer un dialogue nécessaire et utile sur le sujet, nous publions ci-après la réponse de direction de la LCR à cette demande ainsi que, ci-dessous, le texte de cet appel (LCR-Web)


Chères amies, chers amis, cher(e)s camarades,

Votre proposition d’Appel aux syndicats dans le cadre de l’Euromanifestation du 29 septembre a retenu toute notre attention.

Nous partageons l’essentiel de vos constats sur la gravité de la crise environnementale et l’urgence d’y apporter des solutions radicales, mettant fondamentalement en cause le productivisme.

Nous considérons comme vous que les syndicats doivent être soutenus dans la mesure où ils résistent à l’offensive d’austérité du capital, et critiqués dans la mesure où ils considèrent que la relance du système capitaliste pourrait être une « piste de sortie de crise » pour le monde du travail.

Vous avez raison d’écrire que, pris au piège de la logique capitaliste, les syndicats « se trouvent désormais réduits à négocier la limitation de la vitesse à laquelle les conditions de travail et de solidarité sont détériorées ». Une alternative à cette ligne de cogestion du système est en effet indispensable.

En tant qu’anticapitalistes et écosocialistes, nous luttons contre cette société qui produit toujours plus de valeurs d’échange (marchandises) sources de profits pour une minorité d’exploiteurs, en détruisant les deux seules sources de toute richesse : la terre et le travailleur. Nous voulons y substituer une société qui produira des valeurs d’usage (des utilités) afin de satisfaire les besoins humains réels, démocratiquement déterminés, dans le respect des contraintes écologiques. Vous pouvez donc nous considérer comme des « objecteurs de croissance », quoique nous ne nous définissions pas comme tels.

Cependant, nous ne pouvons souscrire à votre Appel. La raison principale est que nous sommes en désaccord avec vos conclusions sur les «objectifs » que les syndicats (notamment) devraient « viser simultanément » « pour que la nécessaire transition vers une société soutenable soit socialement possible et juste ».

Vous citez trois objectifs :

- Réévaluation profonde des croyances qui soutiennent les politiques actuelles et changement d’objectifs ;

- Forte réduction du temps de travail rémunéré ;

- Garantie d’un revenu d’existence suffisant pour tout être humain.


Lors d’une audition devant le congrès des Etats-Unis, James Hansen, climatologue en chef de la NASA, a déclaré que les dirigeants des entreprises du secteur énergétique devraient être traînés en justice pour crime majeur contre l’humanité et la nature, parce qu’ils bloquent la transition nécessaire vers un système énergétique économe et efficient, basé sur les renouvelables, et qu’ils le font en pleine connaissance des conséquences catastrophiques de leurs actes. Or, cette capacité de blocage dont parle Hansen plonge ses racines, non dans des « croyances », mais, plus fondamentalement, dans la propriété privée capitaliste sur les ressources, qu’elles soient naturelles ou financières.


Il en découle que, selon nous, les principales conditions pour que la transition soit possible et juste sont beaucoup plus structurelles : il s’agit avant tout de briser le pouvoir des monopoles capitalistes, en particulier dans les secteurs de l’énergie et de la finance. Ces secteurs doivent être expropriés et mis sous statut public, selon des modalités permettant un réel contrôle démocratique par les travailleurs et les usagers.


Sans cela, il nous semble rigoureusement impossible de relever le double défi auquel l’humanité est confrontée aujourd’hui : satisfaire les besoins humains réels de trois milliards d’êtres humains qui manquent de l’essentiel mais dont la demande est non solvable, d’une part, et réduire la consommation finale d’énergie, donc aussi, dans une certaine mesure, la production matérielle, afin de sortir des combustibles fossiles en deux générations, d’autre part.


Dans votre Appel, cet élément central est abordé par la bande, lorsque vous évoquez brièvement « des droits d’accès garantis aux biens communs et publics gérés collectivement (sécurité sociale, éducation, accès à l’énergie, l’eau, etc. » Nous soutenons l’idée que l’eau, l’énergie, etc. sont des biens communs auxquels l’accès devrait être gratuit jusqu’à un certain seuil, déterminé en fonction des besoins sociaux. Mais il nous semble indispensable de dire clairement la vérité, à savoir que de telles revendications passent par l’expulsion des puissants groupes capitalistes présents dans ces secteurs-clés, donc par une confrontation majeure avec le capitalisme.


Or, plutôt que de dénoncer le capitalisme, vous dénoncez la « croissance », que vous définissez de façon assez vague comme un « dogme », un « culte », ou une série de « mythes », c’est-à-dire comme un phénomène dont les racines sont avant tout idéologiques. Nous ne nions pas l’utilité d’un combat d’idées contre la culture du « toujours plus », le consumérisme, l’envahissement publicitaire, etc. Mais, si la croissance constitue aujourd’hui un « dogme », c’est parce qu’elle est inséparable d’un mode de production où la concurrence pousse chaque propriétaire de capitaux à remplacer des travailleurs par des machines plus productives, afin de toucher un surprofit en plus du profit moyen.


Par conséquent, une autre société, visant le « bien vivre » et non le « toujours plus » (nous tenons à préciser : de biens matériels), ne saurait découler simplement de la «déconstruction des mythes économistes», ou d’une « rupture avec le productivisme », permettant un autre « mode d’organisation de notre société». C’est le mode de production lui-même qui doit être mis au banc des accusés.


Nous trouvons très positif que vous vous adressiez aux syndicats. Mais nous décelons une contradiction dans votre démarche : d’un côté vous écrivez que « la situation actuelle se caractérise par l’austérité pour le plus grand nombre » et vous soutenez les syndicats en lutte « contre la volonté du capital de faire payer la crise aux travailleurs »; de l’autre, vous posez « la sobriété » comme alternative à la « croissance », vous invitez les syndicats à faire passer le « bien-vivre » avant le « toujours plus », et la réduction du temps de travail que vous proposez semble devoir s’accompagner d’une perte de salaire. Ainsi formulé, nous craignons que votre Appel puisse sonner comme une invitation résignée à accepter la modération salariale et à laisser tomber les revendications pour une redistribution des richesses.


Le « capitalisme vert » est une contradiction dans les termes. Selon nous, c’est une vérité incontestable que le sauvetage de l’environnement dans la justice sociale nécessite une alternative anticapitaliste. Celle-ci à son tour nécessite la participation active du monde du travail. Le problème auquel nous devons faire face est que, au sein de celui-ci, le niveau de conscience écologique est malheureusement fort bas. Mais il tombera encore plus bas si les travailleurs sont battus par l’offensive capitaliste actuelle et, dans ce cas, le monde du travail s’écartera encore davantage des solutions anticapitalistes qui sont indispensables pour éviter de très sérieuses catastrophes écologiques.


Il n’y a donc pas de raccourci. En définitive, le progrès de la conscience écologique dans les syndicats dépend de la reconstruction d’une conscience de classe, anticapitaliste parmi les travailleurs. Et celle-ci, selon nous, ne se fera pas autour de revendications ambiguës telles que la réduction du temps de travail avec perte de salaire, qui impliquent que les travailleurs porteraient malgré tout une part de responsabilité dans la crise. Elle ne peut se faire qu’autour de revendications claires pour faire payer la crise à ceux qui en sont les seuls responsables : le grand Capital.


Chères amies, chers amis, cher(e)s camarades,


Il est possible que certaines de nos critiques reposent sur des malentendus ou des formulations maladroites. Si la possibilité nous en avait été donnée, nous aurions pris la peine de proposer des amendements à votre Appel, dont la démarche générale nous semble pertinente, rappelons-le. Le temps nous manque pour réaliser cet exercice de convergence. Nous espérons que d’autres occasions se présenteront, et tenons à vous assurer de notre grand intérêt pour ce débat.


Dans l’espoir de vous rencontrer pour l’approfondir, recevez, chèr(e)s ami(e)s, cher(e) camarades, nos salutations écosocialistes.


Le Sécrétariat de la Direction Nationale de la LCR

22 septembre 2010


Résistons à la croissance de l'austérité

Appel aux syndicats


Un front européen d’organisations d’objecteurs de croissance interpelle les syndicats à l'occasion de l'euro-manifestation du 29 septembre 2010. Les objecteurs de croissance demandent aux forces syndicales de réaliser une rupture antiproductiviste sans laquelle ils ne pourront sortir du rôle d’accompagnateurs actifs de la logique destructrice qui est aujourd’hui celle de l’économie. Les objecteurs de croissance proposent de viser le « bien vivre » plutôt que le « toujours plus », de réduire fortement le temps de travail et de défendre un revenu garanti suffisant pour tous.


La Confédération européenne des syndicats organise une Journée d’action européenne le 29 septembre prochain à Bruxelles. Le mot d'ordre de l'Euro-manifestation est : « Non à l’austérité. Priorité à l’emploi et à la croissance ! »

Les organisations d’objecteurs de croissance et personnalités signataires (voire liste ci-dessous) de ce communiqué soutiennent la lutte des syndicats contre la volonté du capital de faire porter le poids de la crise par le monde du travail mais regrettent l’appel à la croissance qui n’est pas une piste de sortie de crise et met la CES dans une posture intenable.


Les objecteurs de croissance signataires du présent communiqué :


1. Dénoncent la logique du productivisme et de la croissance. La logique du « toujours plus » matériel est une impasse car il n’est ni possible ni souhaitable de produire et consommer toujours plus.

2. Estiment que l’austérité pour le plus grand nombre est la conséquence logique de la croissance économique et du productivisme. Par conséquent, refuser l'austérité en réclamant plus des causes qui en sont à l'origine n’est pas une solution.

3. Appellent les forces syndicales à ouvrir les yeux sur le caractère suicidaire du dogme de la croissance économique et du productivisme et à opérer une rupture antiproductiviste.

4. Proposent une autre voie plus réaliste qui vise le « bien vivre » et non le « toujours plus » : déconstruire les mythes économistes et changer d’objectifs, réduire le temps de travail, garantir un revenu suffisant à tous.

1. Dénoncent la logique du productivisme et de la croissance. La logique du « toujours plus » matériel est une impasse car il n’est ni possible ni souhaitable de produire et consommer toujours plus.

Garantir la croissance suppose de pouvoir augmenter continuellement et de manière infinie la production de biens et services marchandisés. La production de ces biens et services nécessitant l’exploitation de ressources naturelles et de travail humain, la croissance infinie suppose nécessairement l’exploitation infinie de la Terre et des Hommes. Aujourd’hui, cette course folle arrive à son terme et montre l’ampleur catastrophique des innombrables dégâts qu’elle génère : la planète Terre qui est la condition de toute activité sociale et humaine est à l’agonie, sa dévastation provoque les effets les plus violents d’abord chez les peuples et les personnes les plus vulnérables.

Les personnes sont chaque jour davantage ravalées au rang de consommateurs/producteurs pour faire tourner une machine qui produit de plus en plus de mal-être, cela au détriment du bien-être individuel et collectif. Le lien social est rongé par la marchandisation et la folle concurrence, qui agressent simultanément les rapports entre les personnes, les peuples et les générations. Les inégalités sociales augmentent partout dans le monde, la misère ne cesse de se propager de façon d’autant plus violente que les dérèglements environnementaux liés aux excès de production, engendrés à la base par l'Occident en deviennent une cause première. Il est désormais clair que l’universalisation du mode de vie des pays matériellement riches n’est pas possible. Quoiqu’en pensent les économistes les plus orthodoxes, il est par exemple impossible que l’ensemble des habitants de l’Inde et de la Chine disposent d’une voiture, d’un poste de télévision et d’un réfrigérateur comme nous en disposons en Occident. La planète n’y survivrait tout simplement pas et les Hommes non plus par conséquent.

Face à ce constat d’échec aussi bien économique qu’humain et écologique, la poursuite de la croissance économique ne peut pas être une solution : pour se maintenir, cette logique implique nécessairement de surconsommer toujours plus de ressources et d'exploiter les travailleurs avant de s'en débarrasser une fois devenus inutiles ou trop chers aux yeux des actionnaires, avec comme corollaire une dégradation incessante de la planète Terre et des relations humaines.


2. Estiment que l’austérité est la conséquence logique de la croissance économique et du productivisme. Par conséquent, refuser l'austérité en réclamant plus des causes qui en sont à l'origine n’est pas une solution.


La vague d’austérité qui s’abat sur les peuples d’Europe est imposée par les institutions financières avec l’assistance active des Etats socio-démocrates. Ce qui est aujourd’hui appelé « austérité » est une nouvelle étape de cette dégradation nécessaire pour produire de « la croissance » ,: les spéculateurs cherchant à maximiser toujours plus leurs profits et le culte de la croissance à tout prix imposant la compétition entre les travailleurs du monde entier, le peuple est prié de trimer et de se serrer la ceinture pour faire tourner la machine. Toute croissance économique supplémentaire à venir ne pourra être réalisée qu’au prix de la répétition toujours plus violente de cette logique de dévastation. La croissance garantit l’austérité aux pays riches alors qu’elle plonge déjà des millions de personnes de par le monde dans la misère la plus noire.


3. Appellent les forces syndicales à ouvrir les yeux sur le caractère suicidaire du dogme de la croissance économique et du productivisme et à opérer une rupture antiproductiviste.


Les forces syndicales ont réalisé un compromis historique avec le capital quand les fruits de la croissance et du productivisme ont pu profiter à tous grâce aux améliorations substantielles des conditions de travail obtenues par de dures négociations, singulièrement au sortir de la seconde guerre mondiale. Mais depuis la fin des années 1970, la logique de croissance du capital a mené celui-ci à rompre l’équilibre. Depuis lors le bien-être matériel des populations de nos pays riches décline malgré l'augmentation presque continue du PIB, alors que les personnes les plus pauvres le restent, et que l'écart se creuse entre riches et pauvres, au sein de nos régions comme dans le monde entier.


Pris au piège de la logique close de la croissance infinie, les syndicats se trouvent désormais réduits à négocier la limitation de la vitesse à laquelle les conditions de travail et de solidarité sont détériorées. Ainsi, l’appel pour des emplois de qualité lors de l’euro-manifestation du 29 septembre s’oppose aux objectifs de rentabilité et de croissance que la CES semble appeler de ses vœux dans le même slogan.


Pour préserver la force des systèmes de solidarité conquis de haute lutte et mis en place au sortir de la seconde guerre mondiale, il est désormais indispensable de sortir de la logique de l’accumulation sans fin.

Nous appelons les membres syndiqués des différentes composantes nationales et régionales de la CES à revendiquer haut et fort, au sein de leurs organisations, un changement de cap radical qui prenne une orientation antiproductiviste en faveur du « bien vivre » et de la solidarité et non du « toujours plus » et de la compétition généralisée.

Il est temps que les syndicats ouvrent les yeux sur le caractère suicidaire du dogme de la croissance économique et du productivisme et qu’ils initient sans tarder un profond changement de cap pour s’opposer frontalement à ces deux logiques socialement, humainement et écologiquement dévastatrices.


4. Proposent une autre voie plus réaliste qui vise le « bien vivre » et non le « toujours plus » : dénoncer les mythes économistes et changer d’objectifs, réduire le temps de travail, garantir un revenu suffisant à tous.


Selon nous, pour que la nécessaire transition vers une société soutenable soit socialement possible et juste, trois objectifs doivent être visés simultanément :

- Une réévaluation profonde des croyances qui soutiennent les politiques actuelles et un changement d’objectifs : dénoncer le mythe économique de la croissance infinie ; substituer la coopération et le bien vivre à la compétition et au toujours plus.

- Sortir du travaillisme pour partager le travail et retrouver du temps et du sens : organiser une réduction forte du temps de travail rémunéré,

- Garantir un revenu d’existence suffisant pour tout être humain (et instaurer symétriquement un revenu maximal), notamment en garantissant des droits d’accès aux biens communs et publics gérés collectivement (sécurité sociale, éducation, accès à l’énergie, l’eau, etc.).

Nos pays n’ont jamais été aussi riches mais notre mode d’organisation est inéquitable et destructeur. Un changement de cap est urgemment nécessaire. Les moyens sont disponibles, il nous faut organiser la force collective qui sera capable de s’opposer aux puissances installées et mettre en œuvre les alternatives. Les syndicats doivent reprendre le rôle émancipateur qui fut le leur au cours de l’histoire en rompant clairement avec la logique destructrice du productivisme et de la croissance.

Cet appel est également une invitation au dialogue fraternel avec les forces syndicales.


Une initiative du Mouvement politique des objecteurs de croissance (Belgique) : www.objecteursdecroissance.be

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28 septembre 2010 2 28 /09 /septembre /2010 08:36

Par Nolwenn Weiler (28 septembre 2010)


Les ministres européens de l’agriculture ont tenu conseil sur les OGM ce 27 septembre. En discussion : la proposition de la Commission de laisser à chaque État membre la possibilité d’autoriser, ou non, la culture d’OGM sur son territoire.

 

Pour le moment, les États qui refusent ces cultures (France, Allemagne, Autriche, Hongrie, Grèce, Luxembourg) doivent user de la clause de sauvegarde. En échange de cette liberté nouvelle pour les uns, les autres devraient faciliter la culture et la commercialisation des produits OGM. 

 

La commission ne précise pas comment feront, à terme, les États sans OGM cernés de cultures transgéniques, ni comment sera régulé le commerce des ces produits sur le vieux continent. La nécessité d’une position commune de l’Europe à l’OMC ne semble pas non plus inquiéter la Commission. Comme si elle n’en n’avait que faire. Et que le seul but était d’en finir avec les résistances européennes aux OGM.

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25 septembre 2010 6 25 /09 /septembre /2010 11:01

Daniel TANURO

Daniel Tanuro vous êtes l’auteur de L’impossible capitalisme vert, paru aux éditions Les empêcheurs de penser en rond / La découverte. Vous êtes aussi le fondateur de l’ONG « Climat et justice sociale ». Qu’est-ce que le « capitalisme vert » ?

 

 

 

 


D.T. : L’expression « capitalisme vert » peut s’entendre dans deux sens différents. Un producteur d’éoliennes peut se targuer de faire du capitalisme vert. En ce sens - au sens que certains capitaux s’investissent dans un secteur « propre » de l’économie – une forme de capitalisme vert est évidemment possible et très rentable. Mais la vraie question est de savoir si le capitalisme dans son ensemble peut tourner au vert, autrement dit si l’action globale des capitaux nombreux et concurrents qui constituent le Capital peut respecter les cycles écologiques, leur rythmes, et la vitesse de reconstitution des ressources naturelles. C’est dans ce sens que mon livre pose la question et il y répond par la négative. Mon argument principal est que la concurrence pousse chaque propriétaire de capitaux à remplacer des travailleurs par des machines plus productives, afin de toucher un surprofit en plus du profit moyen. Le productivisme est ainsi au cœur du capitalisme. Comme disait Schumpeter : « un capitalisme sans croissance est une contradiction dans les termes ».

 

L’accumulation capitaliste étant potentiellement illimitée, il y a un antagonisme entre le capital et la nature, dont les ressources sont finies. On peut objecter que la course à la productivité amène le capital à être de plus en plus économe en ressources, ce qui se traduit notamment par la diminution observée de la quantité d’énergie nécessaire à la production d’un point de PIB. Mais, d’une part, cette tendance à l’efficience accrue ne peut évidemment pas se prolonger indéfiniment de façon linéaire et, d’autre part, on constate empiriquement qu’elle est plus que compensée par la masse croissante de marchandises produites. Le capitalisme vert est donc un oxymore, au même titre que le capitalisme social.


Ce constat ouvre un débat entre deux conceptions stratégiques opposées. Pour les uns, le fonctionnement spontanément écocidaire du capitalisme peut être corrigé par une action politique dans le cadre du système, en recourant aux mécanismes marchands (taxes, incitants fiscaux, droits d’émission échangeables, etc.). Pour les autres, dont je fais partie, une politique de rupture s’impose au contraire parce qu’une remise en cause des lois fondamentales du capitalisme est absolument indispensable au sauvetage de l’environnement. Il s’agit notamment d’oser contester la propriété privée des moyens de production, fondement du système. A mon avis, le débat entre ces deux lignes est tranché en pratique par l’exemple de la lutte contre les changements climatiques.

 

Dans les pays capitalistes développés, nous sommes confrontés à l’obligation d’abandonner quasi-complètement l’usage des combustibles fossiles en deux générations à peine. Si l’on exclut le nucléaire – et il faut l’exclure - cela implique, en Europe par exemple, de diviser de moitié environ la consommation finale d’énergie, ce qui n’est possible qu’en réduisant dans une mesure non négligeable la transformation et le transport de matière. Passage aux renouvelables et réduction de la consommation énergétique sont liés et nécessitent des investissements importants, inconcevables si les décisions restent subordonnés au dogme de l’efficience-coût. Or, l’alternative à l’efficience-coût ne peut être qu’une planification démocratique axée sur les besoins sociaux et écologiques. Et cette planification à son tour n’est possible qu’en brisant la résistance des monopoles du pétrole, du charbon, du gaz, de l’automobile, de la pétrochimie, de la construction navale et aéronautique,…, car ceux-ci veulent brûler des combustibles fossiles le plus longtemps possible.


Le changement climatique est au centre de votre livre. Vous interprétez ce changement comme étant un « basculement climatique ». Qu’entendez-vous par basculement, et en quoi celui-ci vous paraît-il être autrement plus inquiétant qu’un simple changement ?


D.T. : L’expression « changements climatiques » (il s’agit bien de changements, au pluriel) suggère la répétition de variations climatiques analogues à celles du passé. Or, d’ici la fin du siècle, en quelques décennies, le climat de la Terre risque de changer autant qu’au cours des 20.000 années écoulées depuis la dernière glaciation. Nous ne sommes sans doute plus très loin d’un « tipping point » au-delà duquel il ne sera plus possible d’empêcher la fonte à terme des calottes glaciaires formées il y a 65 millions d’années. Pour décrire cette réalité, le terme « basculement » est indiscutablement plus adapté que celui de « changements » ! La vitesse du phénomène est sans précédent et fait peser une menace majeure, car de nombreux écosystèmes ne pourront pas s’adapter. Cela vaut non seulement pour les écosystèmes naturels mais aussi, je le crains, pour certains écosystèmes aménagés par l’être humain. Voyez ce qui se passe au Pakistan : conçu par le colonisateur britannique en fonction de ses intérêts impérialistes, le dispositif de gestion des eaux de l’Indus par des barrages et des digues qui alimentent un vaste réseau d’irrigation se révèle inadéquat face au risque de crues exceptionnelles.

 

Or, ce risque augmente parce que le réchauffement perturbe le régime des moussons et augmente la violence des précipitations. Il me semble illusoire d’espérer gagner cette course de vitesse en renforçant les infrastructures existantes, comme le proposent la Banque Mondiale et les grands groupes capitalistes spécialisés dans les travaux publics. A l’endiguement des eaux, il serait plus raisonnable d’opposer la gestion souple des crues qui était pratiquée avant la colonisation. C’est ce que propose l’IRN (International Rivers Network) : permettre aux flots d’évacuer les sédiments pour empêcher l’envasement du bassin et alimenter le delta, arrêter la déforestation, ménager des zones inondables, etc.

 

Mais cela demande une refonte complète du dispositif, sur plus de 3000 km, avec des implications majeures sur l’aménagement du territoire, la politique agricole, la politique urbaine, la production énergétique, etc. Sur le plan social, cette refonte, à réaliser en deux ou trois décennies (c’est-à-dire très vite pour des travaux d’une telle ampleur !), implique de remettre en cause le pouvoir de l’oligarchie foncière ainsi que les programmes de développement que FMI et Banque Mondiale imposent par le truchement de la dette.

 

Cette dette doit d’ailleurs être annulée, sans quoi la reconstruction sera lourdement hypothéquée et le pays, étranglé, risquera d’entrer dans l’histoire comme le premier exemple de spirale régressive où le réchauffement global lie entre eux tous les mécanismes du sous-développement et en démultiplie les effets négatifs. On voit bien ici comment les questions sociales et environnementales s’interpénètrent. En fait, la lutte contre le basculement climatique requiert un basculement politique vers un autre modèle de développement, centré sur la satisfaction des besoins des populations. Sans cela, d’autres catastrophes encore plus terribles risquent de se produire, dont les pauvres seront les principales victimes. Tel est l’avertissement lancé par le drame pakistanais.


Vous estimez que les pays du Sud devraient « sauter » l’étape des énergies fossiles pour assurer leur développement et passer directement à celle des énergies renouvelables. Que répondez-vous à ceux qui vous objectent que les énergies renouvelables ne sont pas en mesure (techniquement et quantitativement) d’assurer cette fonction ?


D.T. : Je leur réponds qu’ils ont tort. Le flux solaire qui atteint la surface de la Terre équivaut 8 à 10.000 fois la consommation énergétique mondiale. Le potentiel technique des énergies renouvelables – c’est-à-dire la part de ce potentiel théorique utilisable au moyen des technologies connues, indépendamment du coût – représente six à dix-huit fois les besoins mondiaux, selon les estimations. Il est certain que ce potentiel technique pourrait augmenter très rapidement si le développement des renouvelables devenait enfin une priorité absolue des politiques de recherche dans le domaine de l’énergie (ce qu’il n’est toujours pas actuellement). La transition aux renouvelables pose assurément une foule de problèmes techniques complexes, mais il n’y a pas de raison de les croire insurmontables. Les principaux obstacles sont politiques. Un : sauf exceptions, les énergies renouvelables restent plus chères que les énergies fossiles. Deux : passer aux renouvelables n’est pas la même chose que de changer de carburant à la pompe : il faut changer de système énergétique.

 

Cela requiert d’énormes investissements et ceux-ci, au début de la transition, seront forcément consommateurs d’énergies fossiles, donc générateurs de gaz à effet de serre supplémentaires ; ces émissions supplémentaires doivent être compensées, et c’est pourquoi, dans l’immédiat, la réduction de la consommation finale d’énergie constitue la condition sine qua non d’un passage aux renouvelables qui, une fois opéré, ouvrira de nouveaux horizons. Je le répète : il n’y a pas de solution satisfaisante possible sans affronter le double obstacle combiné du profit et de la croissance capitalistes. Cela implique notamment que les technologies propres contrôlées par le Nord soient transférées gratuitement au Sud, à la seule condition d’être mises en œuvre par le secteur public et sous contrôle des populations.


Vous prônez une écologie sociale que vous appelez l’écosocialisme. Qu’est-ce qu’un écosocialiste ? Et en quoi se différencie-t-il d’un écologiste ou d’un socialiste de « base » ?


D.T. : Un écosocialiste se différencie d’un écologiste en ceci qu’il analyse la « crise écologique » non comme une crise du rapport entre l’humanité en général et la nature mais comme une crise du rapport entre un mode de production historiquement déterminé et son environnement, donc en dernière instance comme une manifestation de la crise du mode de production lui-même. Autrement dit, pour un écosocialiste, la crise écologique est en fait une manifestation de la crise du capitalisme (en n’oubliant pas la crise spécifique des sociétés dites « socialistes » qui ont singé le productivisme capitaliste). Il en résulte que, dans son combat pour l’environnement, un écosocialiste proposera toujours des revendications qui font le lien avec la question sociale, avec la lutte des exploités et des opprimés pour une redistribution des richesses, pour l’emploi, etc.

 

Par ailleurs, l’écosocialiste se différencie du socialiste « de base », comme vous dites, en ceci que, pour lui, le seul anticapitalisme qui vaille désormais est celui qui prend en compte les limites naturelles ainsi que les contraintes de fonctionnement des écosystèmes. Cela a de nombreuses implications : rupture avec le productivisme et le consumérisme, bien sûr, dans la perspective d’une société où, les besoins de base étant satisfaits, le temps libre et les relations sociales constituent la véritable richesse. Mais aussi contestation des technologies ainsi que des productions nuisibles, couplée à l’exigence de reconversion des travailleurs.

 

La décentralisation maximale de la production et de la distribution, dans le cadre d’une économie démocratiquement planifiée, est une autre insistance des écosocialistes. Un point sur lequel il me semble important d’insister est la mise en cause de la vision socialiste traditionnelle qui voit toute hausse de la productivité du travail agricole comme un pas vers le socialisme. A mon avis, cette conception ne permet pas de rencontrer les exigences de respect accru de l’environnement. En fait, une agriculture et une foresterie plus soutenables écologiquement nécessitent plus de main-d’œuvre, pas moins.

 

Recréer des haies, des bocages, des zones humides, diversifier les cultures, mener la lutte biologique, par exemple, implique une augmentation de la part du travail social investi dans des tâches de maintenance écologique. Ce travail peut être de haute scientificité et de haute technicité – ce n’est pas le retour à la houe – mais il n’est guère mécanisable. C’est pourquoi je pense qu’une culture du « prendre soin » (j’emprunte ce concept à Isabelle Stengers) doit imprégner les activités économiques, en particulier celles qui sont en prise directe sur les écosystèmes.

 

Nous sommes responsables de la nature. D’une certaine manière, il s’agit d’étendre la logique qui est celle de la gauche dans le domaine des soins aux personnes, de l’enseignement, etc. Aucun socialiste ne plaide pour remplacer les infirmières par des robots ; nous sommes tous conscients du fait qu’il faut plus d’infirmières mieux payées pour que les patients soient mieux soignés. Eh bien ! il en va de même, mutatis mutandis, pour l’environnement : pour être mieux soigné, il y faut plus de force de travail, d’intelligence et de sensibilité humaines. Contrairement au « socialiste de base », et même si c’est difficile, l’écosocialiste, parce qu’il est conscient de l’urgence, tâche d’introduire toutes ces questions dans les luttes des exploités et des opprimés, plutôt que de les renvoyer aux lendemains qui chantent.


Beaucoup, dont moi, sont convaincus que la sortie de capitalisme productiviste est une condition incontournable pour lutter efficacement contre le changement climatique. Pour ce faire, vous en appelez à « l’homme social, les producteurs associés ». Qui sont-ils, et comment peuvent-ils concrètement agir ?


D.T. : Vous faites allusion à la citation de Marx placée en exergue de mon ouvrage : « La seule liberté possible est que l’homme social, les producteurs associés, règlent rationnellement leur échange de matière avec la nature… ». Il faut bien voir que dans l’esprit de Marx, cette régulation rationnelle des échanges est conditionnée par la disparition du capitalisme. En effet, d’une part la lutte de tous contre tous sape en permanence les tentatives des producteurs de s’associer ; d’autre part, une fraction significative des producteurs -les salariés- sont coupés de leurs moyens de production.

 

Ceux-ci, y compris les ressources naturelles, sont appropriés par les patrons. Privés de tout pouvoir de décision, les salariés ne sont pas en mesure de régler rationnellement quoi que ce soit qui concerne la production, pour ne pas parler de régler rationnellement les échanges de matière avec l’environnement ! Pour se constituer en homme social, les producteurs doivent commencer à s’associer dans le combat contre leurs exploiteurs. Ce combat porte en germe l’appropriation collective des moyens de production et l’usufruit collectif des ressources naturelles. Ceux-ci à leur tour sont la condition nécessaire mais non suffisante d’une relation plus harmonieuse avec la nature.


Ceci dit, on peut répondre à votre question sur l’action concrète en examinant comment les différents groupes de producteurs comprennent - ou pas - la nécessité de réguler rationnellement les échanges de matière humanité-nature. Actuellement, il est frappant que les prises de position de type écosocialiste les plus avancées émanent des peuples indigènes et des petits paysans mobilisés contre l’agrobusiness. Ce n’est pas un hasard : ces deux catégories de producteurs ne sont pas, ou pas complètement, coupés de leurs moyens de production.

 

C’est pourquoi elles sont capables de proposer des stratégies concrètes de régulation rationnelle de leurs échanges avec l’environnement. Les peuples indigènes voient dans la défense du climat un argument supplémentaire en faveur de la préservation de leur mode de vie précapitaliste, en symbiose avec la forêt.

 

Quant au mouvement paysan Via Campesina, il a élaboré tout un programme de revendications concrètes sur le thème « les paysannes et les paysans savent comment refroidir le climat ». Par contraste, le mouvement ouvrier est à la traîne. C’est évidemment le résultat du fait que chaque travailleur salarié individuel est amené à souhaiter la bonne marche de l’entreprise qui l’exploite, afin de préserver son gagne-pain.

 

Conclusion : plus les solidarités ouvrières reculeront face à l’offensive néolibérale, plus il sera difficile de développer une conscience écologique chez les travailleurs. C’est un gros problème, car la classe ouvrière, de par sa place centrale dans la production, est appelée à jouer un rôle de premier plan dans la lutte pour l’alternative anticapitaliste nécessaire au sauvetage de l’environnement. Les peuples indigènes, les organisations paysannes et la jeunesse ont donc intérêt à tenter d’impliquer toujours plus les syndicats dans les campagnes pour le climat, en multipliant les collaborations, les contacts à la base, etc.

 

A l’intérieur même du mouvement ouvrier, il convient de faire émerger des revendications qui répondent aux préoccupations en matière d’emploi, de revenu et de conditions de travail tout en contribuant à réduire les émissions de gaz à effet de serre. Un enjeu important à cet égard est la réduction collective radicale du temps de travail, sans perte de salaire, avec diminution drastique des cadences et embauche compensatoire. Un autre volet est l’extension d’un secteur public sous contrôle des travailleurs et des usagers : transports publics gratuits et de qualité, service public de l’énergie, entreprises publiques d’isolation et de rénovation des bâtiments, etc. Les écosocialistes ont un rôle à jouer pour favoriser l’apparition de telles demandes.


Avec L’impossible capitalisme vert vous ne semblez pas craindre d’être taxé de catastrophiste par ceux qui n’ont pas encore compris que nous sommes entrés dans l’ère de l’anthropocène et que l’homme est le principal responsable, notamment depuis l’ère industrielle, de l’emballement climatique. Le capitalisme vert, tout comme « le développement durable » et le « greenwashing », ne participent-ils pas d’une volonté de nier cette responsabilité et de continuer « comme avant » ? La sortie du capitalisme productiviste ne passe-t-elle pas d’abord par une modification de nos comportements de consommateurs et de producteurs ?


D.T. : Je ne suis pas un catastrophiste. Dans mon livre, je me suis basé quasi- exclusivement sur les rapports du GIEC qui, pour ce qui est du diagnostic sur le réchauffement et sur ses impacts possibles, m’apparaissent, quoi qu’on en dise, comme une excellente synthèse de « bonne science », soumise à la peer review. C’est vrai que le GIEC retarde un peu par rapport aux dernières découvertes, mais cela ne change pas grand-chose aux conclusions. En fait, je redoute les discours de panique et de surenchère. Trop souvent, ils tendent à occulter les vraies menaces et les vraies responsabilités.

 

Le basculement climatique se prête bien aux eschatologies, et il ne manque pas de gourous pour clamer que « la planète est en danger », que « la vie est en danger » que « l’humanité est en danger », que le « plafond photosynthétique » va nous tomber sur la tête, ou que sais-je encore. Tout cela est excessif. La planète ne craint rien, et la vie sur Terre est un phénomène à ce point coriace que l’humanité, quand bien même elle le voudrait, ne pourrait probablement pas en venir à bout, même à coup de bombes atomiques…

 

Quant à notre espèce, le changement climatique, en soi, ne la met pas en péril. Le danger qu’il fait planer est plus circonscrit : trois milliards d’êtres humains environ risquent une dégradation substantielle de leurs conditions de vie, et quelques centaines de millions d’entre eux – les plus pauvres – sont menacés dans leur existence même. Les décideurs le savent et ne font rien - ou presque rien - parce que cela coûterait trop cher, et handicaperait par conséquent la bonne marche des affaires. Voilà la réalité toute nue.

 

Trop souvent, les discours catastrophistes ont pour effet d’en voiler la barbarie potentielle, et de diluer les enjeux dans un vague sentiment global de culpabilité : « ne perdons pas de temps à pinailler sur les responsabilités », « nous sommes tous coupables », « nous devons tous accepter de faire des efforts », etc. Pendant ce temps-là, les lobbies énergétiques continuent tranquillement à brûler du charbon et du pétrole à tire-larigot…


Ceci m’amène à la deuxième partie de votre question, concernant le changement de nos comportements de producteurs et de consommateurs. A la suite de ce que j’ai dit plus tôt, il convient de souligner que les salariés sont incapables de changer leurs comportements de producteurs. Qui produit, comment, pourquoi, pour qui, en quelles quantités, avec quels impacts écologiques et sociaux ? au quotidien, seuls les patrons ont le pouvoir de répondre à ces questions et, en dernière instance, ils y répondent en fonction de leurs profits. Les salariés ne peuvent que tenter d’exercer un droit de regard sur la gestion patronale, dans le but de la contester et de prendre conscience de leur capacité de faire mieux, selon d’autres critères que le profit. C’est la dynamique du contrôle ouvrier, et les écosocialistes devraient se pencher sur la manière dont cette vielle revendication peut être revisitée pour englober les préoccupations environnementales.


Pour ce qui est de la consommation, je crois nécessaire de faire la distinction entre les changements individuels et les changements collectifs. A tout prendre, il vaut certes mieux que celui qui voyage en avion compense ses émissions de CO2 d’une manière ou d’une autre, mais cette compensation lui permettra surtout de s’acheter une bonne conscience à bon marché tout en le détournant du combat politique en faveur des changements structurels indispensables.

 

Promouvoir ce genre de comportements, c’est faire le jeu du « greenwashing », et celui-ci vise effectivement à « continuer comme avant ». Autre chose sont les changements collectifs qui concourent à valider une autre logique possible, favorisent l’invention de pratiques alternatives et contribuent à la prise de conscience que des changements structurels sont nécessaires, qui passent par une mobilisation sociale. Ces changements-là, tels que les groupements d’achat de produits bio auprès des agriculteurs, ou les potagers urbains collectifs, sont à encourager.


Peut-on lutter contre le basculement climatique sans tenir compte des coûts financiers et sociaux que cela représente ? Y-a-t-il urgence à bâtir un autre modèle et à risquer de mettre en péril la société toute entière ? Entre Nature et civilisation, quel choix ?


D.T. : Dire qu’une autre politique climatique mettrait la société toute entière en péril au nom d’une priorité de la Nature sur la civilisation, c’est mettre la réalité sur sa tête ! Ce qui se passe en vérité, c’est que la politique actuelle met la civilisation en péril tout en causant d’énormes dommages irréversibles à la Nature, qui est notre patrimoine commun. Cette politique est totalement subordonnée au dogme de l’efficience-coût, et on voit ce que ça donne : des peanuts. Nous allons droit dans le mur.

 

Evidemment, une autre politique ne pourra pas faire comme si le coût des différentes mesures à prendre n’avait aucune espèce d’importance : entre deux stratégies équivalentes pour réduire les émissions, il est raisonnable de choisir celle qui, toutes autres conditions étant égales, coûtera le moins cher à la collectivité. Mais le fond de l’affaire qu’il faut d’abord une autre politique, guidée par d’autres critères que le coût, notamment des critères qualitatifs. Sur le plan technique, un critère essentiel est celui de l’efficience énergétique au niveau des filières.

 

Le grand écologiste américain Barry Commoner plaidait déjà cette cause il y a plus de vingt ans. Il est thermodynamiquement absurde, disait-il, de transporter du charbon sur des milliers de kilomètres pour produire de l’électricité qui, une fois acheminée sur des centaines de kilomètres, servira à chauffer de l’eau sanitaire, chose que l’on peut très bien faire avec un chauffe-eau solaire. Sur le plan social, un critère majeur doit être la protection des populations et de leur bien-être, en particulier la protection des plus pauvres. Ce critère, aujourd’hui, est très largement ignoré, d’où le drame du Pakistan, entre autres.


Enfin, pensez-vous que votre projet écosocialiste soit réalisable dans un avenir proche ?


D.T. : La possibilité de réaliser ce projet dépend entièrement des rapports de force entre le capitalisme d’une part, les exploités et les opprimés d’autre part. Ces rapports de force sont actuellement à l’avantage du capital, il ne faut pas se le cacher. Mais il n’y a pas de troisième voie possible : les tentatives de sauver le climat par des mécanismes de marché étalent tous les jours leur inefficacité écologique et leur injustice sociale. Il n’y a pas d’autre chemin que celui de la résistance. Elle seule peut changer les rapports de forces et imposer des réformes partielles allant dans la bonne direction. Copenhague a été un premier pas, le sommet de Cochabamba un second. Continuons à marcher, unissons-nous, mobilisons-nous, construisons un vaste mouvement mondial pour le sauvetage du climat dans la justice sociale. Ce sera plus efficace que toutes les démarches lobbyistes de ceux qui se font des illusions sur le capitalisme vert.


SOURCE


http://www.ecologitheque.com/itwtan...

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22 septembre 2010 3 22 /09 /septembre /2010 11:44

22 septembre 2010 Le Télégramme


À l'occasion de ses dix ans d'existence, l'association Halte aux marées vertes organise deuxjours d'animation intitulés Eau de terre, eau de mer, ce week-end, à Hillion (22).

 

Cela débutera samedi 25 , à 17h, par la projection du film «Water makes money», de Leslie Franke et Herdolor Lorenz.

 

Après des travaux et un apéritif dînatoire, ce sera au tour du film «Le temps des grâces», de Dominique Marchais, d'être visionné. Le tout sera suivi d'un débat.

 

Halte aux marées vertes poursuivra le dimanche 26 , à 17h, avec le spectacle humoristique du psychanalyste Laurent Petit.

 

Pratique Eau de terre, eau de mer, samedi25 et dimanche 26 septembre espace Georges-Palante à Hillion.

 

Tarifs: 5 € pour les deux films le samedi, 10 € pour le spectacle le dimanche. Gratuit pour les moins de 10 ans.

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21 septembre 2010 2 21 /09 /septembre /2010 10:47

 

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20 septembre 2010 1 20 /09 /septembre /2010 13:43
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